*…la devise des Fantômes :
-Soyez silencieux, vigilants,
obstinés, intransigeants. Et
surtout, n’oubliez jamais que
le client n’a pas toujours raison
*********
La plupart des gens considèrent que la somme
dont ils disposent est un but à atteindre
plutôt qu’une barrière à ne pas franchir…
(extrait de DAYS, James Lovegrove, J’ai lu,
Bragelonne, 2005)
Commentaire sur DAYS
de James Lovegrove
DAYS est un roman d’anticipation dont l’action se déroule dans un giga-complexe commercial. L’histoire raconte la journée-type des employés qui travaillent dans ce magasin aux dimensions titanesques, les consommateurs qui le fréquentent et même les voleurs qui y opèrent. DAYS est le plus grand magasin du monde, aux dimensions d’une ville. Sept frères y règnent en rois selon les traditions établies par le fondateur Septimus Day. L’histoire commence alors que Frank Hubble de la brigade de la sécurité stratégique de DAYS (qui a le droit de tuer au besoin) s’apprête à donner sa démission. Une journée folle commence dans le plus grand *gigastore* du monde…
C’est un livre très intéressant et son sujet est original. L’histoire se déroule dans un gigantesque magasin aux dimensions effrayantes : sept étages hauts de 14 mètres chacun, ses cotés font 2 kilomètres et demi de longueur, le tout couvrant sept millions de mètres carrés. On y trouve 666 rayons de vente dans lesquels on peut acheter n’importe quoi, à peu près tout ce qui existe et c’est peu dire. Je m’en remets ici à la devise de DAYS : *Tout ce qui est mis en rayon sera vendu et tout ce qui est vendable sera mis en rayon*.
Pour avoir un compte chez DAYS, il faut être quelqu’un, appartenir à une certaine classe, voire à une élite. Et même dans l’élite, il y a des niveaux. La carte aluminium par exemple est dans le bas de gamme, la carte Silver monte d’un cran et ainsi de suite. Avec une carte rhodium, vous êtes presque Maître du monde. Ce n’est pas facile d’avoir une carte. Il faut économiser pendant des années comme deux des héros de l’histoire, Linda et Gordon qui se sont privés pendant des années pour vivre finalement une seule journée de cauchemar.
DAYS est une anticipation sociale et une satire sur nos travers de consommateurs et nos habitudes en société. Je ne veux pas tout dévoiler mais je ne m’attendais pas du tout à une forte intensité dramatique, spécialement dans la 2e moitié. En effet, au cœur de l’histoire, il y a un conflit entre deux rayons adjacents : l’informatique et le rayon livre se livrent une guerre à mort : insultes, harcèlement, menaces, agressions, coups bas et même une alerte à la bombe…(imaginez ça chez Wall Mart entre deux rayons dits associés…)
Il y a d’autres trouvailles…par exemple les ventes *flashs* qui ne durent que 5 minutes, transformant la foule en troupeau et où on aboutit à des chaos indescriptibles…plus de blessés que de bonnes affaires finalement.
Avec beaucoup d’habileté, l’auteur raille nos comportements souvent grotesques en société et met en perspective les vices et les travers non seulement des consommateurs mais aussi du *Dieux Commerce* qui ne craint pas le ridicule on dirait bien. Lovegrove dépeint plus qu’il ne critique. Il a soigneusement évité la diatribe même s’il y est allé fort avec la guerre des rayons. Je crois qu’il a voulu mettre en perspective la psychologie des foules et les excès d’un monde froid et capable d’être cruel et violent.
De par l’intelligence de l’écriture, le réalisme du propos et les ressemblances frappantes avec notre société actuelle, par exemple, la description de comportements excessifs de clients et de commerçants, je dirais que ce livre m’a autant effrayé qu’il m’a amusé.
Je crois que la lecture de ce livre vous fera passer un moment agréable…avant d’aller magasiner…
James Lovegrove est un romancier de science-fiction spéculative fantasy et horreur. Il est né au Royaume-Uni en décembre 1965. Il est aussi spécialiste en littérature anglaise et chroniqueur littéraire pour le Financial Time. Son premier roman THE HOPE a été publié en 1990. DAYS est le premier roman de Lovegrove traduit en français. Son grand succès lui a valu une réédition chez J’AI LU et une mise en nomination pour le prix ARTHUR C CLARKE en 1988.
BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
juin 2014