TREIZE RAISONS, le livre de JAY ASHER

*-Eh, mollo ! C’est moi… qu’est-ce que tu fais là? Je lui demande. Sous mes yeux,
Marcus brandit une grosse pierre de la taille de son poing. -Prends ça, dit-il. Je lève les yeux vers lui. Pour quoi faire? -Tu te sentiras mieux après, Clay. Sérieux.* (Extrait: Treize raisons, Jay Asher 2007, t.f et rééditions 2010, 2014, 2017, Albin Michel, éditions de papier, 290 pages.)

*-J’espère que vous êtes prêts, parce que je vais vous raconter l’histoire de ma vie. Ou plus exactement la raison pour laquelle elle s’est arrêtée. Et si vous êtes en train d’écouter ces cassettes, c’est que vous êtes l’une de ces raisons.*
En entendant ces mots, Clay Jensen croit à une erreur, il n’a rien à voir dans la mort d’Hannah Baker. D’abord choqué, il erre dans la ville endormie, suspendu à la voix de son amie. Et ce qu’il va découvrir va changer sa vie à jamais.

SUICIDE RAISONNÉ
*À la fin du cours, Mrs Bradley a distribué des
tracts intitulés «les signaux indicateurs chez
les personnes à tendances suicidaires».
Devinez ce qui venait en tête du top 5?
«Un brusque changement d’apparence.»
J’ai tiré sur une mèche de mes cheveux courts.
hmm…Si prévisible, moi? Qui l’eût cru?
(Extrait : TREIZE RAISONS)

TREIZE RAISONS est le récit de Clay Jensen, un des treize désignés sur les cassettes enregistrées par une adolescente perturbée, Hannah Baker. Avant de mettre fin à ses jours, Hannah a enregistré des cassettes dans lesquelles elle pointe du doigt chacune des treize personnes qui aurait une responsabilité dans son suicide.

Clay se demande qu’est-ce qu’il fait sur ces cassettes, quel est son rôle. Il décide donc de les écouter, une par une…pour comprendre. C’était capital pour Clay de comprendre, d’autant qu’il avait un sentiment amoureux pour Hannah. La vie de Clay ne sera plus jamais la même à cause de ce qu’il a entendu…et compris.

Il est étrange ce livre. Je l’ai trouvé dur, dérangeant et il touche une corde extrêmement sensible : le suicide. Il pourrait heurter certains lecteurs, certaines lectrices qui, comme moi par exemple, trouvent le suicide très difficilement justifiable. Un livre qui confronte une école de pensée, ce n’est pas nouveau, ce n’est pas malsain non plus.

C’est l’idée de base qui m’a mis mal à l’aise. C’est vrai. Le livre est poignant, émouvant. L’auteur prend le lecteur à témoin d’une incroyable succession de malheurs, trahisons, de coups bas, le tout porté, voire bercé par un nuage d’indifférence.

Ce qui m’a dérangé en particulier, c’est que dans ce livre, l’idée du suicide est développée un peu à la façon d’une téléréalité à rebours. On dirait un scénario. Le suicide est plus que raisonné ici, il est présenté comme la seule solution au problème d’Hannah et ça, c’est singulièrement dérangeant car ça laisse supposer qu’il n’y a plus d’espoir, plus rien à faire. Ça me dépasse et ça livre un message qui va complètement à l’encontre de mes croyances. Dans son histoire, Hannah ne communiquait pas.

Les sentiments ne se sont jamais développés avec Clay parce qu’ils n’ont jamais su communiquer. Hannah avait besoin d’aide. Il y en a un qui a essayé : monsieur Porter, le prof d’anglais. Il s’est joliment planté quand il a évoqué l’ultime possibilité pour Hannah de tourner la page…mauvaise idée.

Au moins, ai-je développé un courant d’accord avec Clay : il n’en revenait pas et moi non plus : *J’aimerais seulement trouver une trace d’elle loin de la laideur de ces cassettes. C’est même une nécessité vitale*  (Extrait)

Je sais, je vais un peu à contre-courant de la critique. TREIZE RAISONS est considéré comme un chef d’œuvre de la littérature américaine. Plus d’un million d’exemplaires vendus. Moi je l’ai trouvé décevant et dévastateur. C’est un livre-spectacle porté à l’écran. J’en reste au livre toutefois : il ne contient pas de volonté évidente de privilégier la prévention, rien ou presque sur les signes annonciateurs de suicide.

Dans un communiqué émis en avril 2017 par l’Association québécoise de prévention du suicide, l’organisme s’inquiète de voir des jeunes déjà fragiles s’identifier à Hannah Baker et à son choix fatal : *La série peut renforcer l’idée que le suicide est un résultat « naturel » de l’intimidation ou d’autres difficultés, ce qui n’est pas le cas* (AQPS/Radio-Canada)

Le succès télévisuel de TREIZE RAISONS a convaincu NETFLIX de poursuivre l’aventure. J’espère que l’accent sera mis davantage sur la prévention, la formation en relation d’aide qui devrait même faire partie du programme scolaire de secondaire.

Je l’ai déjà dit, aucun livre n’est foncièrement mauvais sauf de rares exceptions. TREIZE RAISONS véhicule une espèce de non-dit qui évoque le refus de cette saleté qu’on appelle l’indifférence, l’action devant l’intimidation et qui appelle à une meilleure compréhension de la fragilité psychologique des adolescents, l’importance de développer une capacité d’empathie.

Ça peut paraître étrange mais c’est comme ça, le non-dit parle dans l’écrit et je l’ai ressenti. C’est la qualité du défaut de ce livre.

Je crois qu’il y a toujours de l’espoir. J’aurais préféré que le livre manifeste cette croyance…

Suggestion de lecture : LE MAGASIN DES SUICIDES, de Jean Teulé

Jay Asher est un romancier américain né en Californie dans une famille qui a toujours encouragé ses goûts artistiques. Treize Raisons, son premier roman, a reçu de nombreuses distinctions, dont celle du Teen Book Review, et a figuré sur la liste des best-sellers du New York Times. Treize Raisons est devenu une référence de la littérature jeunesse actuelle. (lecteurs.com)
Il a été adapté à la télévision en 2007. succès immédiat,  fulgurant. forçant la réédition du livre.

TREIZE RAISONS À LA TÉLÉ

Katherine Langford et Dylan Minette sont les acteurs principaux de la série TREIZE RAISON inspiré du livre de Jay Asher et développée en 2017 par Brian Yorkay pour Netflix. 

Bonne lecture

Claude Lambert

le dimanche 25 août 2019

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