LA MÉMOIRE DU LAC, de Joël Champetier

*Pour tuer avec une .22, il fallait viser à la tête ou au cœur.
Une balle ne suffirait probablement pas. Mes pensées
étaient lucides, froides comme de la glace. Pendant que
je remplissais le chargeur, je planifiais la suite des
évènements. *
(Extrait : LA MÉMOIRE DU LAC, Joël Champetier, à l’origine :
Alire éditeur, 2001, papier, 274 pages. Version audio : Audiible
studios éditeur : 2017, durée d’écoute : 7 heures 41 minutes,
         narration : Jonathan Morier)

Ville-Marie, petite ville sur les bords du lac Témiscamingue. Daniel Verrier vient de perdre ses deux enfants en bas âge, morts par noyade. Miné par le remords – il est en partie responsable de leur mort – , délaissé par sa femme et aux prises avec de graves problèmes psychologiques, dont une amnésie partielle, Verrier sombre lentement dans la folie. Mais est-ce bien la folie ou s’agit-il d’autre chose? Pourquoi le demeuré de la ville, Éric «la Poche» Massicotte, le poursuit-il sans relâche de son message sibyllin: «Daniel, le lac attend?» Et quel rapport y a-t-il entre ses malheurs et le charnier découvert dans les caves du manoir Bowman? Les réponses sont peut-être enfouies dans la mémoire de Verrier… ou au plus profond du lac Témiscamingue!

Un ménage d’épouvante et de fantastique
*un goût de bile au fond de la gorge, je me suis
approché de la camionnette. Elle ne bougeait plus.
Ça ne me rassurait pas vraiment. Je savais que
l’eau était profonde à cet endroit-là. La partie
arrière du véhicule ne pouvait être appuyée que
sur un étroit piton rocheux…*
(Extrait)

L’histoire est celle de Daniel Verrier, un homme malmené par la vie, suite au départ de sa femme, à la mort par noyade de ses deux enfants, emportés sous les glaces du lac Témiscamingue et, comme pompier volontaire, victime d’un accident alors qu’une tige de métal lui perce le crâne.

Alcoolique, partiellement amnésique et menacé par l’épilepsie, suivie par une psychiatre, Daniel est hanté par un message reçu de l’idiot du village : *Daniel, le lac attend*. Parallèlement, des policiers demandent à Verrier de collaborer avec eux, à titre d’historien, pour enquêter sur la découverte d’un charnier dans le manoir Bowman où on aurait pratiqué d’étranges rites amérindiens qui se rapprochent beaucoup de la sorcellerie.

Le récit devient alors un mélange de légendes, de fantastique, de sorcellerie et d’intrigue policière et il réactualise une vieille légende voulant qu’une créature démoniaque hante les profondeurs du lac Témiscamingue.

C’est un roman aussi sombre qu’intrigant car il tient l’auditeur dans une zone grise à savoir si Daniel Verrier sombre dans la folie ou encore s’il serait réellement victime du lac que ce soit pour des raisons paranormales ou pour des causes explicables. *Je suis resté longtemps immobile, le corps anesthésié, sauf à la tête, là où le pouls battait douloureusement. J’étais incapable d’agir car choisir une action aurait fait éclater l’illusion que cela ne pouvait être qu’un cauchemar. * (Extrait)

Ce roman m’a tenu en haleine à cause d’un personnage-clé qui m’a causé toute une surprise en cours de récit : Éric Massicote, appelé la Poche et aussi à cause d’un secret de jeunesse que Daniel dévoilera dans une surprenante confession.

C’est un roman bien construit. On sent que l’auteur a bien travaillé la psychologie de ses personnages. Daniel en particulier. L’intrigue devient rapidement addictive et emporte le lecteur/auditeur dans un mélange de genre équilibré : horreur, épouvante, violence, menace, intimidation, danger, légendes… la plume est très directe et je dois le dire, très efficace.

Version audio : Je n’ai pas vraiment été emballé par la narration de Jonathan Morier dont la voix transmet peu d’émotions. Le registre vocal est toutefois agréable et a tout de même réussi à m’envahir de l’atmosphère du récit qui est glauque et lourde. Pour ce qui est de l’histoire comme telle, j’aurais souhaité que l’auteur pousse un peu plus loin dans la terreur en particulier dans la finale qui manque de mordant. Mais c’est très personnel comme impression et peut-être secondaire au fond car j’ai réalisé après coup que ce moment d’audition a passé très vite et je l’ai finalement beaucoup apprécié.

Suggestion de lecture : NOIRE PROVIDENCE, de James Rollins

Né le 30 novembre 1957 à Lacorne (Abitibi), Joël Champetier écrivait depuis 1981. Il a à son actif seize livres touchant tant la science-fiction que le fantastique et la fantasy. Son premier roman fantastique, La Mémoire du lac, a mérité le Grand Prix 1995 de la science-fiction et du fantastique québécois et le prix Aurora du meilleur roman, alors que son second, La Peau blanche, a été adapté pour le cinéma par Daniel Roby.

Outre son travail d’écrivain et de scénariste, Joël Champetier a été le rédacteur en chef de la revue Solaris de 1999 jusqu’à ce qu’il soit emporté par la leucémie en 2015. En son hommage, un prix littéraire a vu le jour en 2016, le prix Joël-Champetier, récompensant les auteurs de nouvelles, non canadiens, francophones.

Bonne écoute
Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 12 février 2023

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