LES 9 VIES D’EDWARD, de CHRYSTINE BROUILLET

*Edward sauta sur la table de la terrasse pour méditer
au soleil. La lavande et les rosiers miniatures attiraient
des abeilles qui l’auraient sûrement agacé s’il n’avait
été aussi préoccupé par le festin de sa maîtresse. Les
miaulements saccadés de Muscade, une jeune beauté
siamoise qui cherchait un compagnon de jeu, lui
apportèrent la solution.*
(extrait LES 9 VIES D’EDWARD de Chrystine Brouillet, Denoël,
1998, 240 pages)

Ce récit raconte l’histoire de la 9e et dernière vie d’un chat nommé Edward et de l’amour inconditionnel qu’il éprouve pour sa maîtresse *à deux pattes* : Delphine Perdrix, photographe de son métier. Edward s’est mis en tête de trouver un mari pour sa maîtresse. Mais qui??? Pour trouver le candidat parfait, Edward fouille dans ses vies antérieures et trouve finalement le *deux pattes* idéal : Sébastien Morin, un jeune homme qu’il a connu au XVIIe siècle alors qu’il voyageait vers la Nouvelle France. Edward décide de relever le plus grand défi de ses neuf vies : trouver le corps dans lequel s’est incarné Sébastien Morin. 

Ha…Ces humains…

*Edward devait l’aider à trouver celui qui la rendrait
heureuse. Il allait se consacrer à cette quête et,
avant de mourir, voir Delphine s’épanouir. Il
aspirait au paradis des chats, au repos éternel,
sans autre vie à revivre, mais pour jouir de cette
paix il devait s’assurer du succès de sa mission.
(extrait : LES 9 VIES D’EDWARD)

C’est un livre tout à fait à la hauteur du talent de Chrystine Brouillet. Il raconte simplement et de façon parfois émouvante la vie de Delphine Perdrix et de son chat Edward. Je n’aime pas particulièrement les chats et je suis sûr que madame Brouillet sait très bien que nombre de ses lecteurs n’aiment pas les chats.

Elle s’est simplement organisée pour qu’on les voit de façon différente et ce, avec beaucoup d’intelligence et de subtilité en permettant entre autres à son Edward de jeter un regard très critique, parfois amusé, parfois amusant sur cette bizarrerie à deux pattes qu’est l’être humain.

En fait, le livre comporte deux éléments particuliers qui ont retenu toute mon attention : d’abord les personnages en général et Delphine en particulier : une jeune femme dont la vie est centrée sur la conquête des hommes, la perfection professionnelle et l’amour inconditionnel qu’elle éprouve pour Edward, son chat abyssin qui en est maintenant à sa neuvième et dernière vie.

Et justement, pour finir en beauté ses 9 vies, Edward s’est fixé comme objectif de trouver un homme pour Delphine…un homme qui serait l’amant parfait et le mari idéal…

Mais c’est surtout dans les 9 vies d’Edward que reposent toute l’originalité et la richesse du récit de Chrystine Brouillet. On peut dire que dans toutes ses vies, Edward a tout vu ou presque comme en fait foi cet extrait :

*…il était en Égypte, sous la XXIIe dynastie, et à Paris en 1997, il avait vécu l’occupation et la première exposition universelle, l’un des passages de la comète de Halley, une traversée éprouvante vers un pays giboyeux…* (extrait LES 9 VIES D’EDWARD).

Donc notre ami Edward a connu Nefertari et le faste de la Cour d’Égypte…il a connu l’inquisition et j’en passe. Il en a suffisamment vu pour pouvoir porter un regard critique sur la nature humaine.

De plus, l’auteure a doté son héros d’un don spécial (hérité d’une sorcière dans une de ses vies) : celui de capter par le toucher (ou la lèche) les émotions et les rêves humains et de pouvoir transmettre à ceux-ci des pensées en arrière-plan. J’ai trouvé ça génial car ça donne au texte une remarquable plus-value.

Edward cherche, dans sa dernière vie, l’incarnation d’un personnage qu’il a connu dans une de ses vies, en fait celle qu’il a vécue pendant la grande édification de la Nouvelle-France : un homme tout indiqué pour Delphine : le fameux Sébastien Morin : une quête noble et dangereuse.

C’est dans cette quête de la perfection et dans le caractère introverti de Delphine qu’une intrigue captivante prend naissance. Car il faut le dire…Delphine *ne l’aura pas facile*.

Chrystine Brouillet ne m’avait pas déçu comme auteure jeunesse, voilà maintenant qu’elle me surprend dans un roman pour adultes. Avec LES 9 VIES D’EDWARD, elle nous propose un livre léger, agréable à lire, un peu grandiloquent mais très original, fruit d’une recherche raisonnée et sûrement d’un petit faible pour les chats.

Il est vrai que la description des vies d’Edward a tendance à noyer l’intrigue mais moi j’ai pu composer avec ça surtout parce qu’Edward est attachant et drôle. Je vous recommande ce livre ne serait-ce que pour sortir des sentiers battus.

Suggestion de lecture, de la même autrice : INDÉSIRABLES

Chrystine Brouillet est une auteure et chroniqueuse québécoise née le 15 février 1958 à Loretteville. Elle décroche le prix Robert Cliche dès le tout début de sa carrière avec CHÈRE VOISINE publié en 1982. De 1992 à 2002, elle publie près d’une douzaine de romans pour la jeunesse, surtout à la Courte Échelle. Cette période de sa carrière a été marquée par de nombreux prix prestigieux.

Mais ce qui fait que Chrystine Brouillet est passée au rang des auteurs les plus lus au Québec, tient d’un personnage qu’elle a créé, une femme inspecteur de police, héroïne d’une série policière de 1987 à 2013 : MAUD GRAHAM. La carrière de Chrystine Brouillet est gratifiée d’une prestigieuse reconnaissance littéraire dont l’Ordre de la Pléiade et en 1995, le grand prix littéraire Archambault.

BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
OCTOBRE 2015

1 avis sur « LES 9 VIES D’EDWARD, de CHRYSTINE BROUILLET »

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