À LA CROISÉE DES MONDES 2

Commentaire sur
LA TOUR DES ANGES

de PHILIP PULLMAN

*…une guerre se prépare. J’ignore encore qui seront nos alliés, mais je sais qui nous devons combattre. Il s’agit du Magisterium, de l’Église… Depuis qu’elle existe, l’Église a toujours cherché à supprimer et à contrôler toutes les pulsions naturelles. Et quand elle ne peut pas les contrôler, elle les détruit. Certaines d’entre vous ont vu ce qu’ils faisaient à Bolvangar. C’était épouvantable, mais ce n’est malheureusement pas le seul endroit, ni la seule pratique de ce genre.

J’ai voyagé dans les contrées du Sud. Il y a là-bas des Églises qui mutilent les enfants elles aussi, comme les gens de Bolvangar, pas de la même façon, mais de manière tout aussi horrible. Ils leur coupent les organes sexuels, oui parfaitement, aux garçons comme aux filles ; ils les tranchent avec des couteaux. Voilà ce que fait l’Église, et toutes les églises ont le même objectif : contrôler, détruire, anéantir tous les bons sentiments. *

(Extrait : LA TOUR DES ANGES, tome 2 de À LA CROISÉE DES MONDES de Philip Pullman, Gallijeune éditeur, papier, 2007, 423 pages, ISBN-13 : 978-2070612437, aussi disponible en version audio, éditée par Gallimard. Durée d’écoute : 11 heures 18 minutes, narrateur : François-Éric Gendron.

 

Le jeune Will, à la recherche de son père disparu depuis des années, croit avoir tué un homme. Dans sa fuite, il franchit la brèche qui lui permet de passer dans un monde parallèle. Là, à Cittàgazze, la ville au-delà de l’Aurore, il rencontre Lyra. Les deux enfants devront lutter contre les forces obscures du mal et, pour accomplir leur quête, pénétrer dans la mystérieuse tour des Anges. Le deuxième tome de la célèbre trilogie de Philip Pullman nous entraîne à nouveau dans un univers étrange et envoûtant, immensément riche de découvertes et d’émotions.

Pour vous remettre dans le contexte, je vous invite, amis lecteurs, amies lectrices, à lire mon commentaire sur le livre 1 de la série : LES ROYAUMES DU NORD.

ENTRE LE DELÀ ET L’AU-DELÀ

Avec la TOUR DES ANGES, nous sommes au cœur de la série LA CROISÉE DES MONDES. Dès le départ, on y fait la connaissance d’un jeune ado, Will, à la recherche de son père, croyant avoir tué un homme, Will, en prenant la fuite, traverse accidentellement une mince brèche temporelle qui le précipite dans un monde parallèle. Ce passage s’explique dans le premier tome par l’action de Lord Asriel qui a provoqué rien de moins qu’une fissure dans l’enveloppe du temps.

Une fois arrivé dans ce monde d’une autre dimension, Will fera la connaissance de Lyra Bellaqua, l’héroïne des ROYAUMES DU NORD, fille de Lord Asriel et de la cruelle Marysa Coulter. Il se trouve que Lyra est aussi à la recherche de son père. Will et Lyra vont se mettre en *mode entraide* mais pour accomplir leur quête, ils devront franchir de redoutables obstacles  et pénétrer dans la mystérieuse tour des anges.

Bien que cette histoire soit bien développée et riche en rebondissements, elle est moins aboutie que dans le livre 1, il y a un peu de répétition, de redondance et Philipp Pullman continue d’étaler au grand jour son mépris pour l’Église et la religion, ce qui est un peu irritant même si ce sont les abus de l’Église, représentée ici par le magisterium qui sont à la basse de toute l’histoire.

Même s’il n’ajoute rien de vraiment neuf, Pullman maintient ici les grands thèmes introduits dans LES ROYAUMES DU NORD : la poussière, appelée aussi *matière sombre* qui colle à la conscience de chaque être humain adulte, c’est LE grand mystère de la CROISÉE DES MONDES, les daemons, êtres de forme animale, prolongement de l’être humain représentant l’âme. C’est à mon avis, une des plus belles trouvailles de Pullman.

L’aléthiomètre, un mystérieux instrument qui apporte des réponses tant que ses aiguilles et icônes sont bien interprétés, je retrouve les principaux personnages du livre 1 dont mes préférés, à cause de leur altruisme en particulier : Lee Scoresby et Seraphina Pekkala, une sorcière protectrice de Lyra.

Les deux ados ont un caractère bien trempé, ils sont plaisants à suivre mais comme je l’ai souligné dans mon commentaire sur les ROYAUMES DU NORD, leur maturité est plus grande que nature…c’est comme trop beau pour être vrai…ce qui arrive très souvent quand un auteur veut faire d’un jeune personnage un héros.

Pullman entretient comme une philosophie dans sa trilogie : rien de moins qu’un combat à finir contre l’église. Ça se sent dans toute son œuvre. Bien que le tome 2 soit moins original et intense que le livre 1, ça reste un grand roman d’aventure. En terminant, j’ai écouté la version audio de LA TOUR DES ANGES. C’est un petit chef d’œuvre de narration exécuté par François-Éric Gendron. Remarquable performance.

Suggestion d’écoute :  DERNIÈRE TERRE, la trilogie audio de Clément Rivière

LA TRILOGIE
À LA CROISÉE DES MONDES


L’auteur Philip Pullman

Bonne lecture/
Bonne écoute
Claude Lambert

 

LE MENHIR D’OR

De Albert Uderzo et René Goscinny

Les comédiens : Bernard Alane, Guillaume Briat, Julien Chatelet, Emmanuel Curtil, Jean-Claude Dondat, Caroline Klaus.

Assurancetourix a décidé de participer au célèbre concours de chant des bardes gaulois pour remporter le menhir d’or. Pour le protéger dans cette compétition suivie de près par les romains, Astérix et Obélix sont chargés de l’accompagner : ils ne doivent pas quitter Assurancetourix des yeux ; quitte à y perdre une oreille !

Les plus vieux se rappelleront qu’au départ, LE MENHIR D’OR est sorti en 1967 en livre-disque de vinyle. Cette aventure a été rééditée en album hors-collection en octobre 2020. Ce sera la dernière incursion d’Albert Uderzo dans l’univers d’Astérix.

Cette petite aventure est axée sur le personnage le plus farfelu du village d’Astérix : ASSURANCETOURIX . Les bédéphiles du monde entier savent qu’Assurancetourix chante mal. Ce sont les auditeurs et auditrices qui vont en avoir maintenant la preuve.

Bref et différent

Il faut donc prendre cet album pour ce qu’il est, c’est-à-dire une œuvre à part qui tranche à mon avis avec les standards habituels de la collection. C’est beaucoup plus court, plus spontané, moins subtil et aussi, toujours selon moi, moins recherché. En fait, c’est la subtilité et la finesse de l’humour qui m’ont manqué.

Cet épisode n’a pas vraiment créé d’images dans mon esprit mais plutôt une certaine nostalgie du graphisme de Goscinny. Notez, c’est une production de qualité avec les effets sonores, les comédiens qui ont semblé avoir un plaisir fou dans leur interprétation. C’est très criard évidemment.

À quoi peut-on s’attendre d’autre quand le principal personnage est un barde qui *éternue* ses chansons. J’ai trouvé original que les auteurs parodient la chanson de Charles Trenet publié en 1938 MÉNILMONTANT, devenue depuis, un grand classique de la chanson française. Inutile de dire que cette chanson d’or a été proprement massacrée par ASSURANCETOURIX, caricaturalement interprété par Emmanuel Curtil.

Il faut mentionner enfin que le livre qui accompagne cette production sonore est un livre illustré et non une bande dessinée. C’est très différent et il est plus difficile de ressentir cette espèce de magie qui se dégage des aventures d’Astérix. Donc en général, je n’ai pas vraiment accroché à cet épisode. Mais l’idée serait bonne je crois d’écouter cette aventure avec un enfant et de lui faire explorer en même temps le livre illustré car je ne perds jamais de vue que le livre audio peut être une excellente façon d’introduire les enfants à la lecture.

Extrait : LE MENHIR D’OR (version audio, Astérix, livre 6, éditions Albert René, 2020, durée d’écoute : 31 minutes)

Suggestion d’écoute des mêmes auteurs : ASTÉRIX LE GAULOIS/ASTÉRIX LA SERPE D’OR

Bonne écoute
Claude Lambert
le samedi 11 mai 2024

ARTEMIS FOWL, d’Elowin Colfer

version audio

Artemis Fowl est un impitoyable génie du crime. Il a douze ans. Artemis a un plan pour rétablir la fortune de sa famille. Il a découvert l’existence du peuple des fées et avec l’aide de Butler, son majordome, s’apprête à kidnapper leur capitaine Holly Short pour exiger une rançon. Seul bémol : les fées sont armées, puissantes, terriblement dangereuses et Artemis semble avoir quelque peu sous-estimé leurs pouvoirs. Au moins, il peut se réjouir d’avoir enfin trouvé un adversaire digne de ce nom.

 Artemis est sans nul doute un enfant prodige. Mais pourquoi
un être aussi brillant a-t-il décidé de consacrer sa vie
à des activités délictueuses? Voilà une question à laquelle
une seule personne serait en mesure de répondre. Or, il prend
un malin plaisir à ne jamais parler de lui-même. (Extrait)

Quelque part chez les fées

Sur le plan technique, la version audio d’Artémis Fowl est un petit chef d’œuvre de production omni sonore. Tout y est, les effets sonores, la qualité du son, la musique qui m’a littéralement envoûté, une parfaite synchronisation, un tout accrocheur et irrésistible, rendu par le narrateur Jean-Paul Bordes et une dizaine de comédiens qui se distinguent par la justesse du ton et de l’expression. À l’écoute de cette merveille, le temps m’a paru court. Sur le plan littéraire toutefois, je serai peut-être un peu moins dithyrambique. Je résume d’abord.

L’histoire est celle d’un jeune gamin qui entre à peine dans l’adolescence, imbu, égocentrique et avide, mais doté d’une intelligence supérieure : Artemis Fowl, 12 ans, issue d’une famille historiquement redoutée de voleurs, d’exploiteurs, de manipulateurs et d’arnaqueurs. Pour refaire la fortune de la famille, Artemis découvre l’existence du peuple des Fées, puissantes créatures qui vivent sous terre et décide de capturer leur capitaine, Holly Short. Ce ne sera pas simple, mais Artemis est tellement sûr de lui…

C’est une histoire bien développée, comportant de très bonnes idées mais elle a des irritants dont le principal est à mon avis le personnage principal. En effet, Artemis Fowl est plus grand que nature, l’auteur lui a donné des attributs qui ne font pas du tout son âge. C’est surfait et ça décrédibilise sensiblement l’histoire. Toutefois, je dois préciser que cette histoire est écrite et interprétée à la manière d’un conte.  Et moi, je l’ai forcément écoutée (le résultat aurait été le même en lecture) avec mes oreilles et mon esprit d’adulte.

Je crois que les jeunes lecteurs, 9 à 12 ans pourraient être séduits par cette histoire. Et la version audio plairait je crois davantage aux jeunes qui rechignent à lire. Ils apprécieront sans aucun doute le côté aventurier d’Artémis Fowl. C’est mon cas même si j’ai préféré le capitaine Holly Short, l’ombrageuse et courageuse Holly qui pourrait ne pas être facile à sortir des griffes de Fowl.

En résumé, Artemis Fowl est une grande réussite technique, l’histoire est originale mais certains personnages sont sous-développés comme le majordome de Fowl, Butler. Le rythme est soutenu mais pas l’intrigue. L’humour demeure au stade de tentatives. Le monde des fées est une petite merveille d’imagination. Quant au monde humain, l’histoire laisse à penser qu’il ne changera jamais.

Est-ce par hasard que dans cette histoire, l’auteur a donné au monde des humains le nom de *peuple de la boue* ?  J’ai passé un très bon moment d’écoute. Je suis sûr que les jeunes apprécieront ce moment de cinéma réservé exclusivement aux oreilles…

Suggestion de lecture : LE GARÇON ET L’UNIVERS, de Trent Dalton

ARTÉMIS AU CINÉMA

Ferdia Shaw dans le rôle d’Artémis Fowl.

Pour parcourir la distribution et la fiche technique du film réalisé par Kenneth Branath et sorti en 2020, cliquez ici. Vous pouvez également consulter ici la biographie de l’auteur ainsi que sa bibliographie. Je vous invite également à consulter l’impressionnant parcours du narrateur principal, Jean-Paul Bordes.

 
                                 l’auteur Eoin Colfer                              Jean-Paul Bordes, narrateur

Bonne écoute
Claude Lambert
le samedi 4 mai 2024

MAUDIT KARMA, de David Safier

*Le jour où je suis morte n’a pas vraiment été
une partie de plaisir. Pas seulement à cause
de ma mort. En réalité, celle-ci est péniblement
arrivée bonne sixième dans la série des pires
instants de cette journée.*
(Extrait : MAUDIT
KARMA, Davied Safier, Presses de la cité/Pocket
2008. Édition de papier, 345 pages.)

Animatrice de talk-show, Kim Lange est au sommet de sa gloire quand elle est écrasée par une météorite. Dans l’au-delà, elle apprend qu’elle a accumulé beaucoup trop de mauvais karma au cours de son existence. Non seulement elle a négligé sa fille et trompé son mari, mais elle a rendu la vie impossible à son entourage. Pour sa punition, Kim se réincarne en fourmi. Et le pire reste à venir: de ses minuscules yeux d’insecte, elle voit une autre femme la remplacer auprès de sa famille. Elle doit au plus vite remonter l’échelle des réincarnations. Mais, elle devra revoir au passage la plupart de ses conceptions sur l’existence !

Le karma post-météorite
*La lumière m’enveloppa.
Douce.
Chaude.
Pleine d’amour.
Je la pris dans mes bras et entrai en elle.
Je me sentais si bien.
Tellement en sécurité.
Tellement heureuse.
Mon être commença à se dissoudre.
Tous mes souvenirs s’estompaient… *
(Extrait)

Le ton est donné dès le début du récit alors que le morceau de météorite que Kim Lange reçoit sur la tête et qui la tue sur le champ n’est rien d’autre qu’un lavabo, détaché d’une station spatiale entraînée accidentellement dans l’atmosphère terrestre. Au lieu de se désintégrer, le lavabo est tombé sur la tête de notre héroïne.

L’auteur laisse à penser au départ que le lecteur a en main un livre qu’il ne faut pas trop prendre au sérieux même s’il véhicule des réflexions et des questionnements très intéressants. J’y reviendrai. Voici donc l’histoire de Kim Lange, une présentatrice de télévision au sommet de sa gloire, égocentrique et très centrée sur sa carrière au détriment de sa fille Lilly et de son mari, Alex, qu’elle trompe soit dit en passant avec un beau tombeur appelé Daniel Kohn.

Affaiblie par un mauvais karma, Kim renaît dans le corps d’une fourmi et comparait devant Bouddha…et oui, LE Bouddha qui a atteint le Nirvana. Dans cette histoire, le bienheureux philosophe servira de répartiteur pour envoyer Kim Lange d’une vie à l’autre.

Pour atteindre son objectif : regagner l’estime de Lilly et Daniel, Kim devra accumuler du bon karma en logeant dans le corps de différents animaux et ça pourrait aller plus loin. Elle sera aidée dans sa quête par Bouddha, un peu timidement. Toutefois, un célèbre aventurier aidera Kim beaucoup plus activement. Il s’agit de Casanova…LE Casanova…Giacomo Girolamo Casanova, célèbre écrivain vénitien surtout réputé pour son côté séducteur qui, par le plus pur hasard est aussi à la recherche de bon karma.

Pour nos amis, le chemin sera long, même dans la complicité et sera pavé d’aventures rocambolesques, de moments tendres, d’action, de tension, le tout teinté d’humour et de fraîcheur.

J’ai passé un beau moment de lecture. L’histoire est simple, un tantinet prévisible. Il y a beaucoup d’anecdotes, des trouvailles originales. C’est déjanté. J’ai trouvé la finale un peu simpliste. L’ensemble est un peu moralisant mais drôle. Comme je le dis plus haut, l’histoire pousse à la réflexion entre autres sur le pouvoir de l’amour et propose une petite carricature de la réincarnation.

La plume est un peu superficielle. L’ensemble est léger mais divertissant. Je me suis amusé même si l’humour est passablement revisité. On est loin de la trouvaille littéraire mais il faut prendre ce petit livre pour ce qu’il est : un objet de divertissement.

Je dirai en terminant que j’ai trouvé les citations de Casanova, en bas de page dans tous les cas, particulièrement drôles et stimulantes en lecture : -Qu’est-ce qui se passe ? -C’est cet idiot de Nils qui fait bruler les fourmis avec une loupe. Citation, MÉMOIRES DE CASANOVA : <…si je dois un jour avoir amassé suffisamment de bon karma pour revenir sur cette terre dans une forme humaine, je mettrai un soin tout particulier à botter l’arrière-train de tout garnement pourvu d’une loupe> Extrait.  Ça se laisse bien lire et ça arrache des sourires.

Suggestion de lecture : LE SECRET INTERDIT, de Bernard Simonay

Scénariste renommé, David Safier s’est imposé sur la scène littéraire allemande et internationale avec son premier roman, Maudit Karma, puis avec ses quatre autres romans : Jésus m’aime, Sors de ce corps, William !, Sacrée Famille, et Le Fabuleux Destin d’une vache qui ne voulait pas finir en steak haché. Tous ses ouvrages sont publiés aux Presses de la Cité et repris chez Pocket.

Bonne lecture
Claude Lambert
le samedi 6 avril 2024

L’ÉPÉE DE VÉRITÉ, livre de Terry Goodkind

Commentaire sur le livre 1
LA PREMIÈRE LEÇON DU SORCIER

*Terrassé par la fièvre et la douleur, Richard s’aperçut à peine
qu’il s’était affaissé la tête reposant sur la table. Il gémit pendant
que son esprit embrumé mesurait les implications de ce que
Calahan venait de dire à Zede : Les prophéties du grimoire des
ombres recensées allaient se réaliser…*
(Extrait : L’ÉPÉE DEVÉRITÉ, livre 1. À l’origine : Bragelonne éditeur,
2014. Version audio : Audible studio éditeur, 2018, Durée d’écoute :
32 heures 15 minutes. Narrateur : Vincent de Boüard)

Une frontière magique, infranchissable, sépare la Terre d’Ouest des Contrées du Milieu. Paisible garde forestier, Richard Cypher n’a jamais quitté sa forêt. Son destin bascule lorsqu’il sauve de la mort d’une jeune femme, Kahlan, poursuivie par les sbires du tyran Darken Rahl. Assoiffé de pouvoir, il s’est emparé des Contrées du Milieu et se rapproche dangereusement de la Terre d’Ouest à la recherche d’artefacts grâce auxquels il aspire à dominer le monde. Richard va trouver son ami Zedd, un puissant sorcier. Commence alors pour le forestier une initiation magique grâce à l’Épée de Vérité, arme puissante et dévastatrice.

Le sorcier de vérité
*Quand il fut à un pas d’elle, la femme se leva, se
retourna avec grâce et prononça doucement le
nom de Richard. Cette voix…il la connaissait. Il
crut que son cœur allait exploser quand il vit le
visage qui, inévitablement, allait avec. *
(Extrait)

LA PREMIÈRE LEÇON DU SORCIER est un long pavé sonore de plus de 32 heures d’écoute soit une brique de 637 pages dans l’édition de papier de Bragelonne. C’est très long et ce n’est que le premier tome d’une série de 12. Comme dans tout bon *fantasy*, l’oeuvre de Goodkind évoque la sempiternelle guerre du bien contre le mal qui n’est pas sans rappeler LE SEIGNEUR DES ANNEAUX de Tolkien pour les sorciers, créatures du mal et déploiements guerriers et L’HISTOIRE SANS FIN de Michael Ende pour les aspects féériques et environnementaux du récit.

L’histoire commence très simplement alors qu’un simple guide forestier, Richard Cypher sauve une belle inconnue des griffes de brigands. Elle s’appelle Khalan. Au premier regard, des sentiments s’éveillent mais il y a plus urgent car dans la foulée de la mystérieuse Khalan se mettent en place des forces, des évènements, d’obscurs personnages et d’étranges créatures.

Le but de ce déploiement est de pousser Richard et Khalan dans le rôle qui leur revient réellement en vue d’une confrontation finale avec le tyran le plus monstrueux des contrées du milieu, un sorcier d’une inimaginable cruauté nommé Darken Rahl. C’est ainsi que Richard Cypher devient sorcier et se voit remettre par son ami Zedd le sorcier L’ÉPÉE DE VÉRITÉ.

Pour ce livre, j’ai utilisé la version audio. J’ai bien aimé cette histoire quoique j’ai dû apprivoiser la voix du narrateur et ça n’a pas été simple au début. J’ai fini par me faire finalement à une voix parfois trop théâtrale allant jusqu’à la caricature. Un ton trop souvent déclamé et alarmiste. Heureusement, la performance pour les personnages principaux est satisfaisante.

Dans l’ensemble, j’ai trouvé le récit très immersif. On dirait bien que l’auteur a misé sur le pouvoir des mots avec un langage très descriptif, clair et bien ventilé. Comme je le disais, c’est un récit très long. Trop en fait. Ça frôle la redondance en plusieurs endroits. Je pense entre autres à cette longue série de séances de torture de Richard par une espèce de maritorne appelée Mère Dena. Préparez-vous. Vous en avez pour des heures.

Je comprends que Goodkind a voulu bien planter le décor pour sa série mais ça donne des longueurs qui donnent parfois envie de décrocher. Heureusement les tomes suivants sont un peu plus courts. L’histoire reste prévisible mais deux éléments m’ont tenu dans le coup : le caractère descriptif du récit et un certain lien qu’on peut faire avec notre propre quotidien à cause justement de cette première leçon du sorcier qui évoque la recherche de la vérité et son opposé : la désinformation.

C’est un peu classique mais aventurier, rafraîchissant voire dépaysant. Il sera intéressant d’entendre la suite, en espérant une meilleure prestation.

Suggestion de lecture : LE POISON SECRET, de Francis Leblanc

Terry Goodkind naît en 1948 à Omaha, dans le Nebraska. Malgré sa dyslexie, mais avec l’encouragement de ses professeurs, il poursuit des études d’art afin de se spécialiser dans la représentation de la faune et de la flore. Son parcours professionnel est pour le moins particulier : avant de devenir écrivain il est tour à tour charpentier, luthier et restaurateur d’antiquités. En 1983, il part s’installer avec son épouse dans le Maine C’est là que, dix ans plus tard, il rédige face à la mer son premier roman, La Première Leçon du sorcier, dont le succès lance sa carrière d’écrivain.

LA SUITE (liste partielle)

Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert

le samedi 24 février 2024

LONGWOR, L’ARCHIPEL-MONDE, de Denis Duclos

*«Tlacacalilizli ! Les flèches, les flèches vivantes
qui tuent !… Ah, malheur, il est mort ! » hurlait
maintenant la sorcière, des sanglots dans la
gorge. Elle secouait en tous sens sa chevelure
épineuse.*

(Extrait : LONGWOR, L’ARCHIPEL-MONDE,
Le Cycle de l’Ancien Futur, livre 1, Denis Duclos, édition
de papier, J’ai lu éditeur, édition numérique mai 2001,
Rivages/Fantasy éditeur 1999, 345 pages)

Longwor : un minuscule archipel au nord-est de la Guyane, que les courants marins et les anomalies magnétiques ont caché aux yeux du monde. Augustin Coriac, disparu dans ces parages voici un siècle, y aurait-il surpris des secrets encore plus étranges que ceux qui l’ont guidé jusque-là ? Sur la Majeure, la plus grande île de l’archipel, Augustin découvre chemins forestiers, passages souterrains et marais pestilentiels. Mais il est vite confronté à la violence des jeux de pouvoir qui agitent ce micro monde. Il échappera à mille dangers tout en découvrant le pouvoir secret du «Grand Dragon» qui régit la destinée de l’archipel.

Un surprenant microcosme
*« Buvons, mes amis, au Grand Équilibre, qui, comme par miracle,
interdit aux puissances de ce monde de nous faire sombrer dans
l’apocalypse ! Buvons à la vie qui permet à ce pauvre être de
résister à tous les traitements inhumains qu’on lui a fait subir !»
On trinqua à l’adresse du thrombe endormi. *
(Extrait)

LONGWOR, L’ARCHIPEL-MONDE est le premier opus d’une série appelée LE CYCLE DE L’ANCIEN FUTUR. C’est un grand récit aventurier qui a attiré mon attention pour plusieurs raisons. Il s’agit de la démarche d’un aventurier. Ça n’a rien d’extraordinaire comme récit, cependant, l’histoire a certains attributs très intéressants. Voyons d’abord le synopsis.

À la fin du XIXe siècle, un aventurier appelé Augustin Coriac trouve le moyen d’atteindre et d’explorer un endroit légendaire quelque part au nord-est de la Guyane, mais pourtant caché aux yeux du monde par des courants marins capricieux et des anomalies magnétiques.

Dès son arrivée, il rencontre Phial d’Atoy de Parinofle qui deviendra guide officiel de cette odyssée extraordinaire dans cet archipel à la beauté aussi luxuriante qu’hostile. L’objectif de Coriac est d’atteindre Clotone, la capitale de l’Archipel mais il devra affronter de nombreux dangers, les subtils jeux de pouvoirs des principaux acteurs étant les moindres.

Le premier élément qui m’a sauté aux yeux est le soin particulier que Denis Duclos a mis dans la création de Longwor. Il a donné à l’archipel une histoire, des légendes, des mœurs, une géographie, un système politique, une mythologie, toutes sortes de créatures, espèces et sous-espèces et j’en passe mais non sans mentionner le plus important : LE GRAND ÉQUILIBRE, une expression rituelle qui se réfère à des croyances partagées dans tout Longwor.

C’est la caractéristique majeure de l’Archipel qui rend capital le souhait des insulaires de ne jamais entrer en contact avec le Nouveau-Monde. *On m’a parlé d’un jeu entre les îles, d’un lien compliqué entre la politique et les courants marin…* (Extrait)

toutes ces caractéristiques attribuées à Longwor sont tellement vastes et, je dois le dire, inutilement compliquées, que l’auteur a consacré 20% de son livre (un cinquième…je trouve ça énorme) à une petite encyclopédie des Îles de Longwor, c’est-à-dire un dictionnaire d’êtres de toutes sortes peuplant l’imaginaire de l’archipel : hommes, dieux, fées, chevaux, navires, thrombes et même des morts vivants. Ajoutons à cela trois dictionnaires thématiques spécifiques à Longwor.

Autre élément qui m’a frappé dans ce livre est la beauté de l’écriture. L’auteur y décrit un microcosme qui n’est pas sans rappeler les envolées descriptives de Jules Verne : *Vous ne le connaissez pas dit fièrement Propio. « Elle court comme une brenèle, grimpe comme une chevirelle et nage comme un phomar. Éventuellement, elle mord comme un petit traquart… » (Extrait)

Beaucoup de mots sont des déformations ou des extensions de mots courants comme *gouvernoral* au lieu de gouvernemental ou *BLIN* au lieu de lin. Évidemment, donner autant d’attributs à un peuple caché comme l’histoire et la mythologie nécessitait qu’on lui attribue également un langage.

Voilà. Je vous ai donné les principales raisons qui me poussent à vous recommander ce livre…des raisons qui constituent un côté dépaysant avec beaucoup de trouvailles. Sur le plan de l’histoire, c’est plus ordinaire…un aventurier qui découvre et explore un monde nouveau, étrange et pouvant être dangereux. Ordinaire, et courant en littérature. Mais il y a beaucoup d’autres choses que l’histoire dans Longwor et ça fait de cette lecture une belle diversion.

Suggestion de lecture : SAUVAGE, de Jamey Bradbury

Denis Duclos est sociologue, docteur d’État, directeur de recherche au CNRS à Paris, écrivain et chercheur associé à un groupe de recherche de l’Institut Télécom. Denis Duclos est intervenu régulièrement dans le Monde diplomatique depuis 1993. Il a écrit des récits mythiques et d’Heroic fantasy inspirés par sa réflexion sur le concept de pluralité. Le «cycle de Longwor» est inspiré du cycle homérique. Il décrit des aventures épiques dans un archipel imaginaire, où la liberté des personnages se confronte à la «machine» des fonctions identitaires de chaque île.

LA SUITE

Bonne lecture
Claude Lambert

le samedi 25 novembre 2023

LES INDES FOURBES, roman graphique

Commentaire sur la BD de
ALAIN AYROLES et JUANJO GUARDINO

(Dessin extrait de : LES INDES FOURBES, scénario d’Alain Ayroles, dessins de Juanjo Guardino, Éditions Delcourt 2019. Formats papiers et numérique. Numérique pour la présente, 160 pages.)

 *Seigneur, je suis de Ségovie. Je vous épargnerais le récit de mes premières années et de la vie que je menai en Castille. Sachez simplement qu’elles furent placées sous le sceau de l’indigence, de la fourbe et de la friponnerie. En dépit de mes constants efforts, malgré des trésors d’astuce et des joyaux d’imagination, je ne parvins jamais à m’élever au-dessus de ma misérable condition. * (Extrait)

Fripouille sympathique, don Pablos de Ségovie fait le récit de ses aventures picaresques dans cette Amérique qu’on appelait encore les Indes au siècle d’or. Tour à tour misérable et richissime, adoré et conspué, ses tribulations le mèneront des bas-fonds aux palais, des pics de la Cordillère aux méandres de l’Amazone, jusqu’à ce lieu mythique du Nouveau Monde : l’Eldorado !

 

2020 – Prix des libraires de bande dessinée,
2020 – Prix BD Gest’ du meilleur récit court Europe, 2019 – Prix Landerneau, 2020 – Prix Le Parisien de la Bande dessinée

Flamboyant mariage
de la plume et du pinceau

Parmi les nombreuses légendes qui ont enrichi la littérature au fil des siècles, celle de l’Eldorado figure en bonne place. Je parle bien sûr de cette contrée mythique d’Amérique du sud qui supposément, regorge d’or et qui a conduit beaucoup d’hommes à la mort ou à la folie. Ce mythe remonte au XVIe siècle. L’Eldorado constitue la toile de fond d’une œuvre géniale d’Alain Ayroles et Juanjo Guarnido qui fait une entrée triomphale dans l’univers du 9e art, l’enrichissant avec un talent qui force l’admiration.

L’histoire se déroule pendant le siècle d’or espagnol, c’est-à-dire la période où le rayonnement culturel de la monarchie catholique espagnole atteint son apogée. L’histoire est celle d’un sympathique bon à rien, Don Pablos de Ségovie, paresseux, ratoureux, profiteur et qui, au fil du récit alterne entre l’extrême pauvreté et l’extrême richesse. Ce coquin de Pablo naviguera avec une simple carte à destination des Indes. C’est ainsi qu’on appelait l’Amérique du sud au XVIe siècle.

Le but est simple quoique pas facile à atteindre : Devenir riche en appliquant les lois paternelles, la deuxième loi en particulier : *Tu ne travailleras point*. C’est ainsi que Pablo vivra toute une série d’aventures rocambolesque. Au départ, jeté à la mer pour avoir triché aux cartes, réchappé sur une petite île et recueilli par des hommes noirs, il vivra toute une série de quiproquos qui l’amènera jusqu’à la cour d’Espagne.

La première chose qui m’a sauté aux yeux dans cette bande dessinée est l’extraordinaire richesse du graphisme. J’y ai décelé un grand souci du détail dans les traits et les jeux de couleurs. De plus, qu’une bande dessinée puisse m’émerveiller autant sur le plan graphique que sur le plan littéraire est un phénomène relativement rare. Même si LES INDES FOURBES est un récit à flash-backs, le fil conducteur de l’histoire est solide.

L’histoire comporte en effet toute une série de retours dans le temps ou si vous voulez, des allers-retours temporels. Ce type de développement donne parfois des récits compliqués et mêlants qui peuvent pousser au décrochage. Ici, l’auteur, Alain Ayroles maîtrise le développement de son histoire avec une remarquable habileté et la fait fondre en douceur dans les superbes aquarelles de Juanjo Guarnido.

Donc, nous avons ici une belle et grande aventure, pour ne pas dire une véritable fresque historique, d’un filou sympathique et attachant qui fait avaler des couleuvres aux esprits faibles en faisant le moins d’efforts possibles dans le but de devenir riche…sans rien faire, un rêve encore très actuel. Donc, pour se résumer : la BD comprend de l’humour, des revirements, des rebondissements, un peu de violence aussi mais tout à fait inévitable si on saisit bien la folie de l’Eldorado.

L’effet visuel est d’une beauté presqu’hypnotique et la synergie entre le récit et les dessins est parfaite. J’ai vu cette BD sur support numérique dans une excellente édition. C’est mieux sur papier toutefois car l’éditeur a publié le livre en grand format. On peut sans doute mieux apprécier toutes les subtilités graphiques. Je vous recommande chaleureusement LES INDES FOURBES. Ce fut pour moi un enchantement.



(Extrait : LES INDES FOURBES, dessin de Juanjo Guardino)

Suggestion de lecture : ABSCONCITÉS, par le dessinateur Klub

Alain Ayroles (à gauche sur la photo) est un scénariste français de bandes dessinées né en 1968. Il est auteur de deux séries publiées en parallèle chez Delcourt : GARULFO et DE CAPE ET DE CROCS. Juanjo Guardino est dessinateur de bandes dessinées et dessinateur chez Disney à Montreuil. Il a participé entre autres à la conception de plusieurs FANZINE et publié des illustrations pour les versions espagnoles des *comic books Marvel*

(photo : Éditions Delcourt 2020)

 

Bonne lecture
Claude Lambert
le samedi 11 novembre 2023

 

LE TOUR DU MONDE EN QUATRE-VINGTS JOURS

Commentaire sur le livre de
JULES VERNE

*Un bon anglais ne plaisante jamais, quand il s’agit d’une
chose aussi sérieuse qu’un pari, répondit Phileas Fogg.
Je parie vingt mille livres contre qui voudra que je ferai le
tour de la terre en quatre-vingts jours ou moins, soit dix-
neuf cent vingt heures ou cent quinze mille deux cents
minutes. Acceptez-vous ? *
(Extrait : LE TOUR DU MONDE EN QUATRE VINGTS JOURS,
Jules Verne, édition de 1997 chez Gallimard jeunesse, collection
Folio junior. Édition de papier, 332 pages. Littérature jeunesse)


« Je parie vingt mille livres que je ferai le tour de la terre en quatre-vingts jours au moins. » Ainsi s’adressait Phileas Fogg, en cette soirée du 2 octobre 1872, à ses compagnons du Reform-Club de Londres. Et le voilà parti avec son domestique Passepartout. Le gentleman anglais, avare de paroles, précis comme une mécanique, et le Français, vif, malin et bavard, s’accordent à merveille ! Mais nombreux sont les périls qui les attendent sur la route des Indes, de la Chine et des Amériques…

Un pari sur le monde
* Dans ce singulier pays ou les hommes ne sont
certainement pas à la hauteur des institutions,
tout se fait «carrément», les villes, les maisons
et les sottises. *
(Extrait)

J’ai reconnu très vite et avec plaisir la plume visionnaire et onirique de Jules Verne, qui a embelli mon adolescence et jusqu’à aujourd’hui encore en me faisant voyager dans des univers extraordinaires : DE LA TERRE À LA LUNE, CINQ SEMAINES EN BALLONS, VING-MILLE LIEUES SOUS LES MERS, MICHEL STROGOFF, VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE…*Avec Jules Verne, vous pouvez aller partout et de toutes les façons possibles…par tous les temps : il vous suffit de puiser dans le trésor des voyages extraordinaires.* (Extrait du supplément)

Dans LE TOUR DU MONDE EN QUATRE-VINGT JOURS, nous suivons quatre personnages : le principal, PHILEAS FOGG, un richissime gentleman, son valet, Passepartout, l’officier de police FIX et MISS AOUDA, une jeune femme sauvée d’un cruel rituel indou par Passepartout et ramenée en Angleterre par Fogg et qui donnera un sens à toute cette aventure.

FOGG est plutôt égocentrique, peu intéressé à ce qui l’entoure, ne montre jamais ses émotions et sa maîtrise de soi pousse un peu à la caricature. C’est un personnage plus grand que nature un peu comme les personnages de L’ÎLE MYSTÉRIEUSE ou comme Dick Sand, le jeune marin du roman UN CAPITAINE À 15 ANS.

Pour moi, ce n’est pas le meilleur de Verne à cause du personnage principal que l’auteur a imaginé trop mécanique, trop stoïque. Peu sympathique et à peu près pas attachant. Mais ma lecture a été sauvée par deux éléments en particulier. Premièrement, le deuxième personnage en importance : Jean Passepartout, valet de Fogg, un sympathique bavard rusé et surtout extrêmement intuitif. Il est sympathique, drôle, attachant et fera la différence dans cette extraordinaire aventure.

Deuxièmement, mon esprit a voyagé et je n’ai jamais vu le temps passer : Londres, Suez, Bombay, Calcutta, Hong Kong, Yokohama, San-Francisco, New-York avec, pour chaque coin du monde, une généreuse part de surprises, revirement, obstacles de toutes sortes. Et dire que cette merveilleuse odyssée repose sur un pari extrêmement risqué pour Fogg pour qui l’imprévu n’existe pas. Bien sûr, les évènements vont lui démontrer le contraire bien évidemment. Mais l’admettra-t-il ?

Malgré un personnage principal plutôt froid et très *british* j’ai beaucoup aimé ma lecture. Ce livre n’a pas vieilli et pourtant, il décrit la géographie physique et sociale du XIXe siècle. Comme tout ce qui est signé Jules Verne, il induit le rêve et incite aux voyages même les plus inusités. L’écriture n’est pas très actuelle dans le style mais j’ai trouvé la plume fluide et vivante, avec un soupçon d’humour. Toutes les péripéties de ces valeureux personnages ainsi que la finale à laquelle je n’aurais jamais pensé font de LE TOUR DU MONDE EN QUATRE-VINGT JOURS un incontournable roman d’aventure qui constitue une course effrénée contre la montre.

Jules Verne est né à Nantes en 1828.  Après son mariage en 1857, il devient agent de change à la Bourse pour vivre. Travaillant le jour, il étudie la nuit, les mathématiques, la physique, la géographie, la botanique pour construire son œuvre. En 1863, il apporte le manuscrit de « Cinq semaines en ballon » à l’éditeur Hetzel. Cette rencontre sera décisive : ce grand éditeur, enthousiasmé par les manuscrits de Jules Verne, lui propose un contrat propre à stimuler le génie de l’auteur de « Vingt Mille Lieues sous les mers », un contrat qui l’attache à sa maison.

Ainsi, Verne élabore une œuvre immense,  démontrant que la science est le mouvement incessant qui part de l’homme et y revient avec une provision de connaissances, d’images et de rêves. Jules Verne est mort le 24 mars 1905 à Amiens la ville natale de sa femme, où il s’était installé en 1871.

Suggestion de lecture, du même auteur : DE LA TERRE À LA LUNE

C’est la plus célèbre adaptation du classique de Verne : LE TOUR DU MONDE EN 80 JOURS, sorti en 2007. Une saga de 2 heures 50 minutes réalisée par Michael Anderson avec David Niven, Mario Moreno et Shirley MacLaine.

La version de 2004 réalisée par Frank Coraci a aussi atteint des sommets grâce, entre autres à la performance de Jackie Chan. Je n’ai pas tout à fait compris pourquoi, mais la notoriété de Jules Verne y était sûrement pour quelque chose.

Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert
le samedi 16 septembre 2023

 

RESSUSCITER, le livre de Colleen Houck

*Dans un instant, les trois rois demanderaient l’impensable.
Une faveur qu’aucun roi, aucun père, ne devrait demander
à son fils. Cette pensée glaçait le sang du roi Heru et lui
donnait des cauchemars saisissants où son cœur trouvé
indigne ne faisait pas le poids contre la plume légère de la
vérité lors du jugement dernier. *
(Extrait : RESSUSCITER, de
Colleen Houck, t.f. AdA éditeur, 2017, papier, 570 pages.)

Lorsque Lilliana Young, une jeune fille de 17 ans, entre un matin de la relâche scolaire au Musée Métropolitain d’art de New York, la dernière chose qu’elle escomptait voir était un prince égyptien aux pouvoirs divins, se réveillant après 1 000 ans de momification. Elle ne s’imaginait vraiment pas être choisie pour l’accompagner dans une quête qui les mènera de l’autre côté du globe.
Mais le destin emporte Lily, et avec son prince solaire, Amon, elle doit se rendre dans la vallée des rois afin de réveiller les frères de ce dernier, dans l’espoir d’empêcher le dieu métamorphe et maléfique Seth de prendre le contrôle du monde.

De New-York à la Vallée des Rois
*Je piquai du nez vers l’avant juste comme
Amon m’attrapait dans ses bras.
Je ne pouvais plus rien sentir.
Je ne pouvais plus rien entendre.
Un instant plus tard,
Je ne pouvais plus rien voir. *
(Extrait)

J’avais déjà lu deux volumes de la SAGA DU TIGRE de Collen Houck.  Avec RESSUSCITER, j’ai l’impression d’avoir goûter un peu au même plat : de l’archéologie, une remontée dans le temps, des divinités de la mythologie, de la magie, le tout avec un peu de sentiment. La différence est qu’au lieu de nous emmener dans les Indes, Collen Houck nous transporte cette fois en Égypte.

L’histoire est celle de Lilliana Young, une jeune fille sans histoire de 17 ans qui, en visite au Musée métropolitain des arts de New York voit un jeune prince égyptien se réveiller après 1000 ans de momification. Il s’appelle AMON et il persuade Lily (elle n’avait pas vraiment le choix) de mettre en commun leur énergie pour retrouver ses frères qui doivent aussi être réveillés en Égypte. Le but : empêcher le maléfique dieu Seth de diriger le monde et de le plonger dans le chaos.

Cette histoire est une variation sur un thème usé surdéveloppé en littérature et au cinéma. Toutefois, le livre renferme de très belles forces. Heureusement, avec le temps, j’ai pu surmonter cette impression de déjà vu et soutenir une lecture jusqu’au bout afin de trouver des éléments accrocheurs, un peu d’originalité, un petit quelque chose capable de venir me chercher et de me *capturer*. Je dois admettre que même si le thème est répétitif, RESSUSCITER est un roman fort qui pourrait intéresser les jeunes lecteurs.

Le livre a tout de même 560 pages, c’est un long pavé qui nous plonge dans la mythologie égyptienne, loin d’être simple en passant. Je dirais que c’est une lecture avancée pour les 13 ans et plus. Mais une des forces du roman est de permettre aux jeunes lecteurs/lectrices de s’identifier aux héros : deux jeunes de 17 ans, Lily et un jeune dieu solaire du même âge et ses frères à peu près du même âge : Asten et Amhose, sans peur et sans reproche.

Il y a ensuite le fait que l’histoire est richement documentée. J’ai appris beaucoup de chose sur l’Égypte, ce pays à l’histoire fascinante. Et une chose très importante, en tout cas pour moi qui n’est pas très attiré par les histoires d’amour et les contenus *fleurs bleues*, c’est qu’il se développe un sentiment très fort entre AMON et Lily, mais c’est un sentiment réservé, timide et j’en ai compris les raisons en cours de lecture et ça se tient.

La réserve d’Amon, n’empêche pas quelques envolées romantiques : *La vérité, c’est que si je pouvais embouteiller ta fragrance de lys d’eau et la porter sur moi pendant que j’erre dans le désert, même si je souffrais d’insolation et de déshydratation, et que je me voyais secouru par un cheik du désert qui voudrait me l’échanger, et même si ce troc devait sauver ma propre vie, je ne m’en départirais pas pour tous les bijoux, les soies et les richesses précieuses de l’Égypte, ainsi que toute les terres qui l’entourent. * (Extrait) Beaucoup d’éléments intéresseront les jeunes.

Ce livre comporte beaucoup de longueurs, des redondances et des passages plus ou moins nécessaires. Il faut le lire avec patience et profiter d’une belle plume, colorée, imagée et très descriptives. La finale a été bien imaginée. J’ai eu un peu de difficulté à m’attacher aux personnages même l’héroïne Lily m’a semblé froide et un peu caractérielle.

Vous voyez, je sors un peu mitigé de cette lecture mais je ne la regrette pas. Je vous le recommande au moins pour son contenu mythologique et historique.

Suggestion de lecture : LE CHÂTEAU DES FANTÔMES, de Sophie Marvaud

Colleen Houck est l’auteure à succès de LA SAGA DU TIGRE, quatre fois primée par le New-York Times. Elle a reçu le prix Parent’s Choice et a fait l’objet de multiples recensions et reportages dans les grands magazines et réseaux de télévision. Notons au passage que le Romantic Times a désigné LA MALÉDICTION DU TIGRE <<comme l’un des meilleurs livres que j’ai jamais lus.>> Colleen Houck habite à Salem en Oregon avec son mari et une imposante collection de tigres en peluche.

LA SUITE

Bonne lecture 
Claude Lambert
le dimanche 23 juillet 2023

 

JÉRÔME ET SON FANTÔME, de Sylvie Brien

Version audio

*Oui ! Des fous, mon petit Arnaud. Des fous drôles,
mais aussi des fous méchants, des fous tristes, des
fous malheureux. Je les vois. Là ! comme piégés
dans le temps…attends que je te raconte encore…)
(Extrait : JÉRÔME ET SON FANTÔME, de Sylvie Brien,
Dominique et compagnie Éditeur, 2016, papier, 200
pages. Version audio : Dominique. Audible 2018, durée
d’écoute :2 heures 58 minutes. Narrateur : Pierre Corriveau)

À la mort de son père, au début des années 60, Jérôme, 12 ans, est hébergé avec sa famille chez ses grands-parents. Il découvre avec surprise que le village qu’ils habitent est peuplé de personnages tous plus étranges les uns que les autres. Cela n’empêchera toutefois pas le jeune garçon de se faire de nouveaux amis, dont un « jeune » fantôme qui lui fera vivre d’incroyables aventures… soit dit en passant, le tome 2 est prometteur…

Les idées folles de Jules
*Moi qui croyait qu’un fantôme, c’était transparent,
vaporeux et effrayant. J’avais eu toute une surprise.
À vrai dire, à le voir, j’aurais jamais pensé que
Jules puisse être un revenant en chair et en os.
<Pourquoi es-tu venu ici> demandais-je au
spectre…*
(Extrait)

Le vieux Jérôme raconte un épisode très important de sa vie à son petit fils Arnaud. Jérôme remonte le temps de plus de cinquante ans, jusqu’en 1962 alors qu’il a 12 ans. Après la mort de son père, Jérôme s’installe chez ses grands-parents et c’est alors qu’il est témoin d’évènements bizarres, disons plus intrigants que méchants : une bicyclette qui prend sa place toute seule par exemple ou des poubelles qui lévitent jusque dans la rue.

Jérôme est amené à comprendre qu’il s’agit là de l’œuvre d’un fantôme qui ne veut pas se montrer. Jérôme surmonte sa peur et finira par convaincre le spectre de se montrer et d’expliquer pourquoi il lui rend des services. Et finalement le fantôme finit par se montrer.

Surprise, il s’agit d’un jeune garçon de 12 ans, le même âge que Jérôme. Il s’appelle Jules. Il semble ne pas comprendre qu’il est mort. Jérôme lui explique la triste réalité et Jules demande à Jérôme de découvrir comment il est mort, pourquoi, et où est son corps.

C’est alors que Jérôme se lance dans une quête extraordinaire et certaines alliances l’aideront beaucoup dans sa démarche, Avec le curé par exemple, le ptit dur de l’école Gaston et même le fossoyeur qui en sait pas mal long et il y a bien sûr Jules dont l’aide sera précieuse. Jérôme mettra au jour une vérité aussi incroyable que l’aventure qu’il est en train de vivre.

La question est de savoir si Jules pourra enfin reposer en paix. Aux jeunes lecteurs d’en faire la découverte. J’ai beaucoup aimé cette petite histoire que Sylvie Brien a développé avec une belle retenue : pas d’artifice, pas de violence, un peu de frissons et de mystère. Elle laisse les jeunes lecteurs avec l’idée qu’il est possible que les fantômes existent, qu’on peut y croire ou non.

Il ne faut pas non plus avoir peur des fantômes. Un mystère n’est pas forcément aussi épais qu’il en a l’air. L’histoire réunit donc des éléments qui plaisent aux jeunes lecteurs de 10 à 14 ans : de l’intrigue, du mystère et de l’humour. L’histoire s’appuie aussi sur de belles valeurs : l’amitié, l’entraide, l’esprit d’équipe et la tolérance qui manque tant à la Société.

J’ai été captif de cette histoire pour deux raisons en particulier : d’abord la galerie de personnages. J’ai accueilli chaleureusement Jérôme dès le départ, un petit débrouillard astucieux et persévérant et puis Jules que j’ai accueilli presque comme un petit fils et pour lequel j’ai développé une empathie qui m’a gardé dans l’histoire jusqu’à la fin. Eh oui, je dirais que Jules m’a forcé à lire l’histoire d’une traite…Aucun regret.

Je ne ferai pas le tour de tous les personnages mais plusieurs m’ont fasciné, en particulier Gaston, le ptit dur que tout le monde craint. J’ai redécouvert que ce genre de personnage cache du bon qui finit par ressortir. La deuxième raison de mon engouement est ce retour aux années 60 dont l’atmosphère est magnifiquement recréée.

Mes petits bémols maintenant… les filles n’ont aucun rôle dans cette histoire à part peut-être celui de chipies, l’enseignante acariâtre et les cadorette par exemple. J’ai rapidement développé l’impression qu’il manquait quelque chose. Les parents aussi n’ont pratiquement aucun rôle.

Ça nous éloigne d’une réalité quand même importante si on tient compte du fait que l’histoire se déroule dans les années 60, une époque où les familles prévalent plus qu’aujourd’hui.

Enfin j’ai écouté la version audio et j’ai été un peu déçu par la narration de Pierre Corriveau qui a eu de la difficulté à trouver le ton juste. J’aurais préféré qu’il se laisse aller un peu plus en utilisant l’accent que laisse supposer l’écrit. Heureusement, Pierre a une voix magnifique et c’est pour moi une belle compensation.

C’est un récit idéal pour pousser les préados à la lecture à cause de l’émotion qui se dégage de l’histoire et d’un amalgame de fantastique et des réalités de l’adolescence. À la fin du récit, tout est en place pour une suite prometteuse. Moi j’ai aimé, ce qui laisse à penser qu’il n’y a pas d’âge pour lire un livre-jeunesse.

Suggestion de lecture : LE CHÂTEAU DES FANTÔMES de Sophie Marvaud

Juriste et notaire de formation, Sylvie Brien se consacre entièrement à l’écriture dans les années 2000. Publiée au Canada et en France par plusieurs éditeurs, elle est Membre de l’Union des Écrivaines et Écrivains du Québec et anime des rencontres littéraires pour le programme Culture à l’école. En 2005, son roman La Fenêtre maléfique est choisi pour l’événement Montréal capitale mondiale du livre (UNESCO). Elle remporte en 2018 le prix littéraire de l’AQPF avec son roman 16 ans et Patriote.

La suite 

Bonne écoute
Claude Lambert