QUI DOIT MOURIR ?

Commentaire sur le livre de
DIANA URBAN

<La cloche me tomba presque des mains lorsque Sasha et Priya poussèrent un cri. Ma poitrine se comprima tandis que tout le monde regardait ce qui était posé sur le plateau, bouche bée… Une seringue… >

Extrait : QUI DOIT MOURIR, Diana Urban, Albin Michel Jeunesse, 2020, édition de papier, 480 pages. Version audio : Audible studios éditeur, 2020, durée d’écoute 9 heures 57 minutes. Narrateur : Hervé Carrasco.

On dirait le début d’une blague… La star du lycée, le super athlète, le meilleur élève, l’accro aux joints et le solitaire se retrouvent dans la même pièce. Ils ont été sélectionnés pour un dîner exclusif. Pour quoi ? Par qui ? La farce tourne au vinaigre. Au centre de la pièce se trouvent une bombe à retardement, une seringue de poison et le message suivant : vous avez une heure pour tuer l’un d’entre vous. Sans cela, vous périrez tous, dans cette pièce.

Pourquoi eux ? Qui les a piégés ? Alors que chacun cherche dans son passé ce qui le lie aux autres, l’évidence se dessine : ils cachent tous un secret… Un secret dangereux ? fatal ? Chacun tente de sauver
sa peau, mais la question reste. Qui doit-on sacrifier ?

MACABRE HUIS CLOS

QUI DOIT MOURIR est un huis clos noir, très addictif, bien construit et qui en dit long sur notre méconnaissance de la nature humaine. Mais voyons d’abord la trame. Sur convocation de la mairie, six personnes, des lycéens, se rendent à l’endroit indiqué en vue de l’attribution d’une bourse. Une fois dans la pièce prévue à cet effet, tout se referme derrière eux. Les voilà enfermés.

Au départ, cet emprisonnement a toutes les apparences d’une blague, mais les jeunes déchantent vite lorsqu’ils constatent la présence dans la pièce d’une bombe à retardement, 60 minutes pour être précis, d’une seringue contenant un poison mortel, la toxine botulique et d’un message court et glacial : <une personne parmi vous doit mourir>

Pour bien saisir l’ampleur du drame humain qui va se dévoiler jusqu’à un inimaginable gâchis à faire grincer des dents, il faut saisir la psychologie complexe des personnages qui est graduellement dévoilée grâce à des -chapitres flash-backs- qui alternent avec les chapitres se concentrant sur les évènements tragiques qui se déroulent dans la pièce close.

Voici un aperçu des personnages : Amber est la narratrice. C’est une musicienne à l’ambition modérée. Diego est l’intellectuel du groupe, dans le genre un peu effacé. Scott est le rebelle, dealer. Robbie est un sportif, garçon énergique. Priya est une fille plutôt solitaire et enfin il y a Sasha, égocentrique jusqu’au nombrilisme, narcissique et une habile manipulatrice. Pendant une heure, les secrets de chaque personnage vont s’imbriquer dans cette tragédie anxiogène et intrigante.

C’est un récit qui est venu me chercher rapidement à cause de la justesse de la description des évènements en vase clos car le caractère dramatique de leur situation poussera les jeunes à toutes sortes de bassesses à commencer par la nécessité ressentie de déterminer rapidement qui doit mourir, qui sera sacrifié. Dans un tel moment, on ne peut plus vraiment cacher sa vraie nature. Comprendre ce qui se passe est aussi un beau défi pour le lecteur : complot, canular, vengeance, blague, expérience ?

Dans son livre, Diana Urban redéfinit la méchanceté. Les personnages manquent de profondeur mais ce n’est pas un critère forcément recherché par les ados. Les sous-thèmes sont efficacement développés et suscitent une saine réflexion : harcèlement, manipulation et suicide des ados principalement. La finale est une longue justification, un peu ampoulée mais la tension dramatique et la surprenante découverte de la véritable nature d’un des personnages créent un filet qui saisit les lecteurs.

QUI DOIT MOURIR ?  Est un roman fort et dérangeant qui accroche et questionne.

En fait, si vous êtes comme moi, vous vous poserez sans doute la question qu’on aimerait mieux, au fond, éviter, à savoir : qu’est-ce que je ferais à leur place. Je crois que mes souliers seraient très, très petits. Je recommande donc ce roman. Il décoiffe…pas de doute.

Brièvement, un mot sur la version audio. Je ne l’ai pas aimée. Le narrateur n’a pas réussi à transmettre les émotions générées par l’histoire. Il narre presque comme si c’était un conte. Et puis dans l’histoire, c’est Amber qui fait la narration. C’est une fille. Pourquoi a-t-on choisi un homme pour la version audio. Mauvais choix à mon avis.


L’auteure DIANA URBAN


BONNE LECTURE
BONE ÉCOUTE
Le vendredi 29 novembre 2024

MALFOSSE

Commentaire sur le
collectif audio multicast

Lugubre…opaque…captivant

Entre 1948 et 1949, dans un petit village français, des meurtres d’une rare violence ont été commis. 70 ans plus tard, cette affaire reste un mystère. Thomas Loreau, chroniqueur judiciaire, compte la résoudre et partage ses recherches sur les réseaux sociaux. Après un an de travail méticuleux, il décide de se rendre enfin au village de Malfosse pour élucider le mystère.

Version audio : Audible originals éditeur, durée d’écoute : 5 heures 41 minutes.

Une série sonore audio en 13 épisodes.

Épisode 1
Un chroniqueur judiciaire, Thomas Loreau, débarque à Malfosse pour tenter d’éclaircir un épais mystère
Épisode 2
Le cadavre de Thomas Loreau est retrouvé dans la forêt, des symboles païens sont gravés sur son corps et sa tête a été coupée. La chroniqueuse judiciaire Anna Gélis décide de mener une enquête parallèle
Épisode 3
Franck Beaumont et David Chalmer assistent à l’autopsie du corps de Thomas Loreau. Lors de leur visite ils croisent une célèbre profileuse et essayent de dresser le portrait psychologique du tueur.
Épisode 4
Anna Gélis s’intéresse de près à l’écrivain et philosophe Bernard Cloisot, qui habite depuis peu Malfosse. Collectionneur de livres anciens dont un fameux exemplaire du manuel d’invocation satanique, il partage sa terrible histoire qui débute à Venise en 1666.
Épisode 5
Juillet 1947. Jeanne Gaillard (42 ans), mère de 4 enfants, accusée de sorcellerie et de propagation de paganisme, la jeune voit s’ouvrir un procès dont l’issue semble s’annoncer abominable.
Épisode 6
Beaumont et Chalmer interrogent les derniers habitants de Malfosse en les réunissant tous ensemble dans une seule et même pièce. De lourds secrets ne tardent pas à se révéler.
Épisode 7
Le folkloriste Patrick Baud, s’intéresse à Nathaniel Huntingdon. Personnage étrange débarqué à Malfosse en 1669. Depuis lors d’étranges événements y surviennent par la suite tous les 70 ans.
Épisode 8
L’enquêteur Chalmer apprend que le lieu du rituel final ne sera pas choisi par hasard. En parallèle, Franck Beaumont découvre dans l’église et le cimetière quelque chose de suspect.
Épisode 9
Enquête sur les meurtres. De nouveaux suspects apparaissent dont un livre, un terrible secret gardé depuis 70 ans.
Épisode 10
Le tueur décide de commencer son rituel afin de changer le monde de demain. Il adresse un message aux internautes…
Épisode 11
Mars 1949, Lucien Morin est jugé pour les 6 meurtres de Malfosse. Acte de barbarie, actes de violence, etc. Mais est-il vraiment coupable ?
Épisode 12
Dans le château qui domine le hameau de Malfosse, un passage secret est découvert. Il mène dans une salle où est exposée l’horrible reconstitution d’un corps hybride. Une traque s’organise
Épisode 13
Franck Beaumont comprend tout et décide de rencontrer la seule personne qui à Malfosse sait tout. Il découvre alors l’identité des trois meurtriers mais surtout la triste histoire qui les lient entre eux…

Auteurs : Patrick Baud, Christian Carayon, Jérôme Camut, Cédric Sire, Elise Costa, Ingrid Desjours, Nathalie Hug, Sophie Loubière, Anne-Sophie Martin, Gipsy Paladini, Laurent Scalese, Franck Thilliez.

Comédiens et comédiennes : Cyrille Artaux, Patrick Baud, Nathalie Bleynie, Bernard Bollet, Jean-Paul Bordes, Mathieu Buscatto, Pascal Casanova, Philippe Catoire, Georges Caudron, Frédéric Cerdal, Guy Chapellier, Catherine Davenier, Hubert Drac, Michel Dupuis, Bernard Gabay, Yvan Garouel, Amaury Guilley, Jochen Hägele, Peter Hudson, Odile Jacqmin, Morgan Jacqmin, Mathias Kozlowski, Margaux Laplace, Virginie Ledieu, Christophe Lemoine, Charlie Lenormand, Gilbert Levy, Sophie Loubiere, Damien Maric, Marie Martine, Anne Rochant, Philippe Roullier, Odile Schmitt, Julien Sibre, Audrey Sourdive, Barbara Tissier, Vincent Violette.

3 années, 3 affaires, 3 meurtriers

 

C’est une histoire étrange, glauque. La production est omni sonore avec voix, effets sonores, bruits d’atmosphère, musique. Il y a au moins un point en commun dans ces 13 épisodes, l’atmosphère est lourde de mystère et m’a rappelé un peu ma lecture de L’EXORCISTE de William Peter Blatty ou mon visionnement de DAMIEN LA MALÉDICTION de Richard Donner (novellisé en anglais). L’atmosphère et le jeu des acteurs sont ce qu’il y a de plus réussi dans l’œuvre. Pour ce qui est de l’histoire…eh bien…c’est une autre histoire.

L’œuvre évoque l’obscurantisme si longtemps entretenu par l’église avec ce que ça comporte d’hérésie, de chasse aux sorcières et d’inquisition. Dans MALFOSSE, on parle de démonologie, de messes noires, d’invocation du démon. Bref, on parle du mal. Rien de neuf. Il y a beaucoup d’irritants : en particulier des sauts temporels qui m’ont donné le vertige, de brusques changements de rythme, un fil conducteur déficient laissant à entendre que les auteurs ne se sont pas entendus entre eux. Les chapitres sont disparates, inégaux en longueur et en intensité comme un enchaînement de nouvelles différentes mais qui parlent de la même chose.

Enfin, j’aurais souhaité qu’Audible présente la série en un seul livre et en respectant la chronologie au lieu de télécharger chaque épisode et de repérer l’ordre de ces épisodes à chaque fois qu’on veut en écouter un. Je n’ai pas compris l’ordre dans lequel les épisodes sont inscrits. La présentation éditoriale est bâclée et ne prête pas, dans l’ensemble, à une présentation satisfaisante.

Les acteurs m’on tenu dans le coup. Leur jeu, parfois impressionnant mais sans jamais tomber dans l’excès a donné à l’ensemble un petit quelque chose d’immersif.  Voix et expression agréables. Autrement dit, ils ont sauvé les meubles. Pour le reste, ou bien quelque chose m’a échappé dans le concept ou bien le concepteur devrait refaire ses devoirs. C’est dommage car le premier épisode était prometteur et la finale, intéressante…improbable. Au final, je crois que le jeu des acteurs vaut l’écoute.

Suggestion de lecture : L’Exorciste, de William Peter Blatty

Deux des auteurs participants

                                   Frank Thilliez                                     Patrick Baud

Bonne écoute
Claude Lambert
le dimanche 24 novembre 2024

 

 

 

LA SCRIBE, Antonio Garrido

Un poids lourd du Moyen-Âge :
Le christianisme

Franconie, an 799, à la veille du sacre de Charlemagne. Fille d’un célèbre scribe byzantin, Theresa est apprentie parcheminière. Contrairement aux jeunes femmes de son âge dont le rêve est de fonder une famille, elle n’aspire qu’à une chose : vivre parmi les livres. Mais un drame l’oblige à quitter sa ville et à se réfugier dans la cité abbatiale de Fulda. Là, elle devient la scribe du moine Alcuin d’York, véritable Sherlock Holmes en robe de bure. Alors que Theresa l’assiste dans ses enquêtes, elle découvre qu’à son insu elle a emporté dans sa fuite un précieux parchemin qui pourrait bien sceller l’avenir de la chrétienté…

*J’aime les romans historiques, d’autant qu’il y a un effort notable de documentation sur cette époque. On sent bien aussi la volonté d’apporter des rebondissements au lecteur et pourtant ça n’a malheureusement pas pris pour moi. Le ton didactique du moine-qui-sait-tout ? L’héroïne intelligente mais pas fut-fut ? Bref c’est dommage mais tant pis. *

(LA SCRIBE, Antonio Garrido, version audio, Audible studios, 2019, durée d’écoute : 16 heures 2 minutes. Édition de papier : Presses de la Cité 2010, 640 pages. Format numérique : Presses de la Cité, 2019, 587 pages 3435 KB)

Une page décisive du christianisme

L’histoire tourne autour de Thérèsa, fille du scribe Gorgia qui travaille sur un document de la plus haute importance et dont la vie est menacée. Thérèsa est apprentie parcheminière, mais elle deviendra, au fil des évènements, adjointe du frère diacre Alcuin d’York qui enquête sur des meurtres et divers évènements, tous liés au parchemin sur lequel travaille Gorgia : rien de moins que la donation de Constantin. Autant de mort et de souffrance pour la gloire des papes, représentant sur terre Jésus qui prêchait la pauvreté.

Sans trop le savoir, la jeune scribe tient entre ses mains le destin de l’occident et l’avenir de la chrétienté. Un rôle très lourd et très meurtrier. C’est une histoire lourde, complexe, au fil conducteur fragile parce que trop tentaculaire. Le regard sur l’histoire est intéressant mais manque de fini. Comme le dit l’auteur lui-même, un roman historique est avant tout un roman. Plusieurs passages sont exagérés et emphatiques. Les personnages ne sont pas d’une même profondeur, même Thérèsa, mais le frère Alcuin d’York est intéressant.

D’abord, Alcuin d’York (732-804) est un personnage historique authentique. Célèbre théologien, conseiller de Charlemagne sous l’empire, sa tutelle intellectuelle aura largement influencé une Europe en devenir. Mais dans le roman de Garrido, sa nature est un peu différente, plus obscure, pas très nette et très ampoulée.

Son raisonnement me rappelle un peu Sherlock Holmes et dans une moindre mesure, Guillaume de Baskerville, personnage central du livre de Umberto Eco LE NOM DE LA ROSE mais là s’arrête la comparaison, D’York étant loin d’avoir la pureté du célèbre franciscain enquêteur créé par le grand Eco. Le langage que Garrido prête dans son livre à Alcuin D’York est déclamé, long, prétentieux et très technique.

Trop pour un roman dont le centre est un parchemin capital pour la chrétienté. Il est vrai que même si ses déductions ne finissent pas de finir, elles entraînent les auditeurs/auditrices, lecteurs-lectrices dans une intéressante suite de rebondissements. C’est la principale force de l’œuvre à laquelle j’ajoute une excellente prestation de la narratrice Ana Piévic pour la version audio, qui a mis dans sa prestation force, cœur et talent…largement suffisant pour écouter ou lire le livre.

Suggestion de lecture : LA RELIGION, de Tim Willocks

Pour en savoir plus sur l’auteur, Antonio Garrido, cliquez ici.

Pour amorcer une recherche sur le christianisme, je vous invite à consulter le dossier wikipédia à ce sujet et à visiter le site de *ladissertation*.

Du même auteur

Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert
le samedi 23 novembre 2024

Un voisin étrange

Commentaire sur le livre de
FLORIAN DENNISSON

*j’AI ZOOMÉ SUR LES PETITES CAISSES. Sur chacune d’elles, il y avait une sorte d’autocollant carré, jaune et noir, sur lequel était imprimé un logo. Un logo que j’avais déjà vu auparavant. Un logo qui m’a toujours fait peur.

(Extrait : UN VOISIN ÉTRANGE, Florian Dennisson, livre 1 de la série HISTOIRES ÉTRANGES, Florian Dennisson et Chambre noire Éditeurs, 2019, version numérique, équivalence : 130 pages brochées, littérature jeunesse.)

  

Pendant les vacances de la Toussaint, Olivier Leroy pénètre sans en avoir le droit sur le terrain d’une des maisons de son village et fait une découverte étrange ayant peut-être un rapport avec l’une des énigmes les plus célèbres de l’Histoire. Le lendemain, un voisin bizarre vient s’installer en face de chez lui, dans une maison délabrée dont personne n’a jamais voulu depuis des décennies. Puni et ayant interdiction de sortir de chez lui, Olivier va avoir beaucoup de mal à mener son enquête et résoudre les mystères qui s’accumulent autour de lui.

 Olivier et les templiers

UN VOISIN ÉTRANGE est un roman court, léger, agréable à lire, un récit parfait pour introduire les jeunes au polar et pour les encourager à aller plus loin dans leurs lectures. Voici l’histoire d’olivier Leroy, un ado de 13 ans. Un jour, Olivier observe une pelleteuse tomber dans un énorme trou sur le terrain des Imbert, les voisins qui voulaient se faire construire une piscine. Une fois le terrain déserté, c’était plus fort que lui, Olivier s’y est aventuré et a découvert une grande quantité de caisses portant un drôle de dessin sur leurs côtés. C’était un sigle.

Pour sa curiosité, Olivier a été puni par son père qui lui interdit de sortir pendant plusieurs jours, mais décide tout de même de faire enquête avec l’aide de sa nouvelle amie Amanda. Le duo observe également un drôle de voisin dans de mystérieuses activités nocturnes dans sa grange.

Entre temps, la mère d’Olivier, qui est prof d’histoire, apprend à son fils que le sigle qu’il a observé sur les caisses est celui des templiers, un ordre religieux et militaire issu de la chevalerie du Moyen-âge, chargés de protéger les pèlerins sur la route de Jérusalem et ayant accumulé au fil du temps de fabuleuses richesses, jamais retrouvées à ce jour. Amanda et Olivier mettront ainsi à jour un inimaginable complot.

Brillante, l’idée de Florian Dennisson d’introduire dans son récit une notion d’histoire avérée, intrigante et de nature à stimuler l’imagination du jeune lectorat d’autant que l’Ordre des Templiers est encore de nos jours, entouré de mystère, de secrets et d’énigmes.

Les pré-ados et jeunes ados vont se reconnaître dans cette belle aventure et s’identifieront facilement à Olivier et Amanda. Ils découvriront dans ce petit livre ce qu’ils aiment en général : de l’intrigue, du mystère, du danger et surtout, la douceur et l’efficacité d’un bel esprit d’équipe et de l’amitié. Dans cet opus, tous les éléments sont réunis pour donner aux jeunes le goût de la lecture.

C’est un bon roman pour les jeunes qui pourrait être aussi un baume pour le cœur des adultes…à une condition toutefois, il ne faut pas le lire avec des yeux et un esprit d’adulte car vous y découvririez un sérieux manque de profondeur, qualité qui ne figure pas dans les priorités des jeunes lecteurs de 8 à 13 ans et c’est normal. Il faut bien commencer par le commencement. L’important est de lire.

Enfin, dans son livre, l’auteur a bien résumé l’histoire et l’objectif des templiers, mais j’invite les jeunes qui veulent pousser leurs recherches à ce sujet à consulter le dossier publié par Vikidia.

Suggestion de lecture : LE LIVRE QU’IL NE FAUT SURTOUT,SURTOUT,SURTOUT PAS LIRE, de Sylvie Laroche

DU MÊME AUTEUR


L’auteur Florian Dennisson

Bonne lecture
Claude Lambert

LE CRI, Nicolas Beuglet

<Comme on le pensait, cette affaire nous emmène bien plus loin que prévu.>

<Sarah croisa le regard de Christopher. L’un comme l’autre mesurait leurs très faibles chances de réussite. Mais leurs mains ne se séparèrent pas.>

Extraits : LE CRI, Nicolas Beuglet, Poscket éditeur, papier, 2018. Version audio : Audiolib éditeur, 2017. Durée d’écoute : 13 heures 52 minutes, narrateur : Olivier Prémel

Hôpital psychiatrique de Gaustad, Oslo. À l’aube d’une nuit glaciale, le corps d’un patient est retrouvé étranglé dans sa cellule, la bouche ouverte dans un hurlement muet. Dépêchée sur place, la troublante inspectrice Sarah Geringën le sent aussitôt : cette affaire ne ressemble à aucune autre… Et les énigmes se succèdent : pourquoi la victime a-t-elle une cicatrice formant le nombre 488 sur le front ? Que signifient ces dessins indéchiffrables sur le mur de sa cellule ?

Pourquoi le personnel de l’hôpital semble si peu à l’aise avec l’identité de cet homme interné à Gaustad depuis plus de trente ans ? Soumise à un compte à rebours implacable, Sarah va lier son destin à celui d’un journaliste d’investigation français, Christopher, et découvrir, en exhumant des dossiers de la CIA, une vérité vertigineuse…

Les dérives de la science

LE CRI est un thriller psychologique et techno-médical sur fond de religion, d’une forte intensité. L’auteur a tout mis en place pour me saisir et me garder sous son influence tout le long du récit. Tout va vite. Même très vite. Ça commence par la mort d’un patient interné dans un hôpital psychiatrique depuis 30 ans. Le directeur dit que c’est un suicide, l’inspectrice pense tout le contraire et se demande d’abord pourquoi l’homme est marqué au front du chiffre 488.

Le directeur sait des choses. Démasqué, il se sauve et met le feu à l’institution, tuant des dizaines de personnes. Il en réchappe, mais il est gravement blessé. Il est interrogé. L’inspectrice apprend des choses surprenantes et elle n’est pas au bout de ses peines car elle a mis le doigt dans un engrenage malsain et terrifiant, allant de découverte en découverte pour plonger finalement dans un cauchemar.

Tout y est et attendez-vous à avoir le vertige : des énigmes complexes à résoudre, un enfant en danger de mort, des révélations fracassantes, des poursuites effrénées, des expériences barbares et cruelles, des menaces, des morts et j’en passe…tout cela pour aboutir à la révélation d’un inimaginable secret que les êtres humains ne doivent absolument pas connaître. Ce fameux secret fait suite à une obscure recherche faite sur l’île de l’Ascension ou la CIA a déjà commandité d’obscures recherches.

L’idée centrale de ce polar est la vie après la mort qui obnubile un milliardaire tordu. C’est un thriller fortement anxiogène, développé sur des chapeaux de roues et qui ne laisse aucun répit au lecteur/auditeur. Cette fébrilité se manifeste au détriment de la profondeur malheureusement. Trop rapide, trop chronométré et par moment, abracadabrant.

On a mis de côté la psychologie des personnages, les questions d’éthique scientifique, pas beaucoup d’émotions, sauf dans le dernier quart du récit. Le fil conducteur est solide mais l’ouvrage manque définitivement de ventilation.

Je suis d’accord avec les critiques sur plusieurs points, plus particulièrement sur le fait que le thème de la vie après la mort est en surchauffe sur le plan littéraire. Mais on ne doit pas s’arrêter là. C’ici que je deviens un peu plus à contre-courant de la critique car l’auteur a déployé une imagination incroyable appuyée par une recherche sérieuse et crédible sur le plan scientifique ce qui lui a permis d’être efficace sur le plan de la fiction.

C’est ainsi que Beuglet a redéfini la nature des neutrinos et de la matière noire au bénéfice de l’intrigue. Il y a dans l’histoire de remarquables trouvailles.

Un autre fait très intéressant fortement imbriqué dans l’intrigue concerne la religion. Il ne s’agit pas ici de guerres de religion mais de LA religion peu importe l’étiquette. L’auteur propose une conclusion aussi osée que troublante sur le sort de l’âme après la mort physique et le rôle de Dieu dans le cycle. C’est à glacer le sang. Vous comprendrez alors pourquoi l’auteur a choisi LE CRI comme titre.

Donc c’est un roman très fort, addictif, très rapide, recherché et angoissant. Variation sur un thème très répandu en littérature. Impressionnant déploiement d’imagination. Récit puissant sur le plan évènementiel mais plus pauvre sur le plan psychologique. Les personnages sont peu approfondis et la question du sort de Simon, l’enfant pris en otage est plutôt sous-développé. Il n’y a pas de longueur mais quelques passages sont…disons tirés par les cheveux.

C’est un livre qui agrippe et qui ne laisse pas indifférent. J’ai beaucoup aimé. En passant, la version audio est excellente. Superbe performance du narrateur Olivier Prémel

Suggestion de lecture : LA MORT HEUREUSE, de Hans Küng



L’auteur Nicolas Beuglet

Du même auteur

Bonne lecture
Bonne écoute

Claude Lambert
le dimanche 19 mai 2024

POPULATION : 48

Commentaire sur le livre
d’ADAM STERNBERGH

version audio

*L’existence de cette ville – notre survie – repose sur des principes partagés, des intérêts et une confiance mutuelle, comme dans n’importe quelle autre communauté. Sauf que dans cette communauté, quand ces principes ne sont pas respectés, les gens souffrent et meurent. * (Extrait de POPULATION : 48  d’Adam Sternbergh, version audio, Audible studios éditeur, 2019, durée d’écoute : 11 heures 11 minutes. Narrateur : Erwan Zamor

Caesura Texas – une minuscule bourgade clôturée, au fin fond du désert. Population ? 48 habitants. Des criminels, a priori. Ou des témoins. Comment savoir ? Tous ces gens ont changé d’identité, et leur mémoire a été effacée. Pour leur bien. Dans l’optique d’un nouveau départ.

En échange de l’amnistie, les résidents doivent accepter trois règles simples : aucun contact avec l’extérieur, aucun visiteur, et aucun retour possible en cas de départ. Une expérience unique, menée par un mystérieux institut. Pendant huit ans, tout ce petit monde est resté à peu près en place. Jusqu’à aujourd’hui.

Errol Colfax, en effet, s’est suicidé… avec une arme qu’il n’aurait jamais dû posséder. Puis Hubert Humphrey Gable est assassiné. Calvin Cooper, le shérif local, est contraint de mener l’enquête. Ce faisant, il risque de déterrer des secrets que l’essentiel des habitants auraient préféré voir rester enfouis. 

Chaos en vase clos

Cette histoire est une variation d’un thème déjà connu : une mystérieuse institution dirigée par une psychiatre du type *savant fou* et bénéficiant d’un obscur financement, crée une petite agglomération où on entasse les pires criminels : meurtriers, tueurs en série, psychopathes violents, pédophiles et violeurs d’enfants, bref, une variété de monstres à qui on a enlevé la mémoire. 48 cervelles qui n’ont aucune idée des horreurs inimaginables qu’ils ont pu commettre et à qui on offre sursis et confort grâce à un programme appelé CEASURA dont les motivations sont plus ou moins définies.

Un seul résident échappe à ces définitions : un jeune garçon nommé Isaac qui tient sans le savoir le destin de CEASURA dans ses mains. On appellera cette agglomération une ville portant le nom du programme : CEASURA. Personne d’autres ne peut y entrer mais les habitants peuvent en sortir, sans toutefois jamais y revenir. Les règles sont clairement établies dès le départ par le personnage central de l’histoire, le shérif Cooper. Cet aspect du récit place les lecteurs-lectrices dans une zone de confort appréciable.

Ce que j’ai compris assez vite c’est que le traitement infligé aux criminels par la psychiatre Judi Halliday n’empêche pas la vérité de se camoufler près de la surface et je suis resté en haleine pour savoir quand ça se produira et surtout COMMENT ça se produira et qu’est-ce qui se passera, en particulier avec Isaac.

C’est un récit d’une incroyable violence et j’ai été rivé à mon livre par une plume qui frappe très fort au point de me donner des frissons. J’ai déchanté un peu à la finale avec la description crue et froide d’un carnage qui dépasse l’entendement et dont je n’ai pas saisi tout à fait l’utilité à part peut-être me conforter dans l’idée qu’il n’y a pas de limite à la folie.

Bien sûr la vérité finit par éclater mais il faut voir comment… j’ai trouvé la finale simpliste, lourde, chargée d’informations données par une impressionnante quantité de personnages qui s’entrecoupent et…s’entretuent. Bref, une finale qui ne finit pas de finir me laissant à penser que l’esprit le plus dérangé de cette histoire est encore celui de la psychiatre qui révèle sa vraie nature dans un dialogue très édifiant.

C’est un récit un peu atypique mais féroce et qui frappe fort. Le sujet développé n’est pas nouveau mais son développement laisse place à beaucoup de rebondissements et il est intéressant pour les lecteurs/lectrices de connaître graduellement les détails de la vie des résidents et les raisons pour lesquelles ils choisissent de rester à CEASURA et le jeune Isaac m’a gardé dans l’histoire plus que les autres car jusqu’’aux dernières pages, on n’est pas fixé ni sur ses origines, ni sur son sort on sait simplement qu’il a un rôle à jouer et qu’un cœur pur n’a pas sa place dans une colonie d’esprits aussi sordides.

Bref, c’est un polar fort, intrigant, démesuré sur le plan de la violence, bien ficelé sur le plan psychologique, le récit est immersif et m’a fait beaucoup ressentir de *non-dit* un élément qui laisse une large place à l’imagination des lecteurs à cause de l’épaisseur du mystère qui entoure CEASURA. POPULATION : 48, un huis-clos que je garderai en mémoire.

Suggestion de lecture : LE LIVRE SANS NOM, anonyme

Adam Sternbergh a passé son enfance et une partie de son adolescence à Toronto. Puis Il s’est installé à Brooklyn où il a travaillé comme journaliste entre autres au Times de New-York. Il se décrit tantôt génial, tantôt méprisant mais il ne laisse pas indifférent en particulier avec LE FOSSOYEUR et maintenant POPULATION : 48.

Bonne écoute
Claude Lambert
le samedi 18 mai 2024

LE SECRET DE DIEU, d’Yves La liberté

Commentaire sur les

Tome 1 : Le message des templiers
Tome 2 : Le trésor enfoui

*Les caïnites prétendaient que la perfection consistait
à commettre le plus d’infamies possibles. *
(Extrait : LE MESSAGE DES TEMPLIERS, Yves Laliberté,
Les éditions Coup d’œil, 2014, LE SECRET DE DIEU,
LIVRE 1 format numérique, 718 pages)

Après avoir déjoué de justesse un attentat à l’anthrax à Ottawa, l’agente fédérale Kristen Vale est chargée de l’enquête sur la mort d’élèves atteints d’une nouvelle forme de peste pulmonaire. De son côté, le jeune historien de la Chambre des communes, Quentin DeFoix, reçoit un courriel obscur qui le mènera sur les traces d’un signe mystérieux et du cadavre d’un sénateur au parlement canadien. Ensemble, Kristen et Quentin feront tout pour gagner une incroyable course contre la montre qui les entraînera d’Ottawa à Niagara Falls et les mettra sur le chemin des Templiers. La sécurité de la population en dépend.

Bien qu’ils aient échappé à des pièges infernaux, l’agente Kristen Vale et l’historien Quentin DeFoix sont loin d’avoir terminé leur mission : découvrir le secret de Dieu. Le temps est compté. Attentat, tentatives de meurtre et prise d’otages, les événements s’enchaînent, et dans cette atmosphère de panique, on ne sait plus qui dit vrai. Pendant que l’équipe continue son enquête qui l’entraîne toujours plus loin dans le passé et dans les souterrains cachés d’Ottawa et de Montréal, le neveu de l’agente Vale, Grady, dont l’état de santé est fort inquiétant, perçoit d’étranges phénomènes que personne d’autre ne semble comprendre.

Les aventuriers de l’histoire
*Vous m’impressionnez vivement, d’abord pour avoir
décodé le texte gravé sur la tour de la paix. Il fallait un
historien de votre trempe pour retourner un siècle en
arrière *
(Extrait livre 2, LE TRÉSOR ENFOUI)

J’ai toujours été intrigué par les templiers, qui étaient, au départ, un petit groupe de chevaliers pauvres du Christ, vivant spirituellement, dans le dénuement. Leur premier but était d’escorter les pèlerins sur la route de Jérusalem vers les lieux emblématiques de la vie de Jésus.

On sait que par la suite, les Templiers sont devenus un ordre, qui a grandi et s’est enrichi mais toujours en gardant l’objectif premier. Comme on le sait, les choses ont beaucoup évolué jusqu’au reniement par le pape et l’exécution des templiers par le roi de France Philippe IV Lebel qui, ce faisant, a pu regarnir un peu les coffres de l’état. C’est vite dit, mais dans les faits, c’est un peu plus compliqué.

L’auteur Yves Laliberté nous en apprend beaucoup plus dans son roman LE SECRET DE DIEU, une fiction mais évoquant des hypothèses intéressantes. Tout débute de nos jours avec un courriel mystérieux reçu par un jeune historien, Quentin Defoix qui formera un binôme avec l’agente fédérale Kristen Vale qui enquête sur la mort d’enfants atteints d’une nouvelle forme de peste pulmonaire. Sans le savoir, les deux enquêteurs prendront la route du SECRET DE DIEU.

Ce sont les mystères entourant les templiers qui m’ont attiré vers ces livres. Ils sont très riches en explications, en idées, en hypothèses et assez bien en accord avec le contexte historique. L’intrigue de base est intéressante et même captivante. Malheureusement, elle est noyée dans des explications qui ne finissent pas de finir.

Bien qu’intéressants, les exposés historiques sont beaucoup trop longs. Quentin et Kristen m’on plusieurs fois donné l’impression qu’ils s’écoutaient parler. Heureusement, les chapitres sont courts et assez bien ventilés.

J’aurais préféré que l’auteur vulgarise davantage, simplifie les exposés, fasse un peu plus court et donne davantage de place à l’intrigue au centre de laquelle se trouve LE SECRET DE DIEU. Pour ceux qui aiment les longues descriptions parfois stylisées, ce sera parfait.

Malheureusement, l’auteur m’a perdu. En simplifiant un peu la science qui garnit son œuvre, il aurait pu me surprendre, ce qu’il a tout de même réussi à faire un peu dans le second volume dans lequel il y a plus d’action. Je crois que l’œuvre aurait pu être réduite à un volume.

Bref, intéressant mais trop long, répétitif avec beaucoup de dialogues statiques. Le sujet reste toutefois digne d’intérêt.

Suggestion de lecture : LES ROIS MAUDITS, de Maurice Druon

Détenteur d’un doctorat en lettres françaises et sémiotique, enseignant de littérature québécoise à l’Université, Yves Laliberté est l’auteur de deux essais et quatre thrillers. Il a œuvré toute sa vie dans le domaine de l’information. Il a été plongé dans le roman d’aventure dès son jeune âge. À onze ans, il aimait déjà écrire des romans et des histoires pour bandes dessinées. Aujourd’hui, il se sent animé par la passion du détective dans les recherches qu’il mène en criminologie, en médecine légale et en histoire québécoise.

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 17 mars 2024

LONGWOR, L’ARCHIPEL-MONDE, de Denis Duclos

*«Tlacacalilizli ! Les flèches, les flèches vivantes
qui tuent !… Ah, malheur, il est mort ! » hurlait
maintenant la sorcière, des sanglots dans la
gorge. Elle secouait en tous sens sa chevelure
épineuse.*

(Extrait : LONGWOR, L’ARCHIPEL-MONDE,
Le Cycle de l’Ancien Futur, livre 1, Denis Duclos, édition
de papier, J’ai lu éditeur, édition numérique mai 2001,
Rivages/Fantasy éditeur 1999, 345 pages)

Longwor : un minuscule archipel au nord-est de la Guyane, que les courants marins et les anomalies magnétiques ont caché aux yeux du monde. Augustin Coriac, disparu dans ces parages voici un siècle, y aurait-il surpris des secrets encore plus étranges que ceux qui l’ont guidé jusque-là ? Sur la Majeure, la plus grande île de l’archipel, Augustin découvre chemins forestiers, passages souterrains et marais pestilentiels. Mais il est vite confronté à la violence des jeux de pouvoir qui agitent ce micro monde. Il échappera à mille dangers tout en découvrant le pouvoir secret du « Grand Dragon » qui régit la destinée de l’archipel.

Un surprenant microcosme
*« Buvons, mes amis, au Grand Équilibre, qui, comme par miracle,
interdit aux puissances de ce monde de nous faire sombrer dans
l’apocalypse ! Buvons à la vie qui permet à ce pauvre être de
résister à tous les traitements inhumains qu’on lui a fait subir !»
On trinqua à l’adresse du thrombe endormi. *
(Extrait)

LONGWOR, L’ARCHIPEL-MONDE est le premier opus d’une série appelée LE CYCLE DE L’ANCIEN FUTUR. C’est un grand récit aventurier qui a attiré mon attention pour plusieurs raisons. Il s’agit de la démarche d’un aventurier. Ça n’a rien d’extraordinaire comme récit, cependant, l’histoire a certains attributs très intéressants. Voyons d’abord le synopsis.

À la fin du XIXe siècle, un aventurier appelé Augustin Coriac trouve le moyen d’atteindre et d’explorer un endroit légendaire quelque part au nord-est de la Guyane, mais pourtant caché aux yeux du monde par des courants marins capricieux et des anomalies magnétiques.

Dès son arrivée, il rencontre Phial d’Atoy de Parinofle qui deviendra guide officiel de cette odyssée extraordinaire dans cet archipel à la beauté aussi luxuriante qu’hostile. L’objectif de Coriac est d’atteindre Clotone, la capitale de l’Archipel mais il devra affronter de nombreux dangers, les subtils jeux de pouvoirs des principaux acteurs étant les moindres.

Le premier élément qui m’a sauté aux yeux est le soin particulier que Denis Duclos a mis dans la création de Longwor. Il a donné à l’archipel une histoire, des légendes, des mœurs, une géographie, un système politique, une mythologie, toutes sortes de créatures, espèces et sous-espèces et j’en passe mais non sans mentionner le plus important : LE GRAND ÉQUILIBRE, une expression rituelle qui se réfère à des croyances partagées dans tout Longwor.

C’est la caractéristique majeure de l’Archipel qui rend capital le souhait des insulaires de ne jamais entrer en contact avec le Nouveau-Monde. *On m’a parlé d’un jeu entre les îles, d’un lien compliqué entre la politique et les courants marin…* (Extrait)

toutes ces caractéristiques attribuées à Longwor sont tellement vastes et, je dois le dire, inutilement compliquées, que l’auteur a consacré 20% de son livre (un cinquième…je trouve ça énorme) à une petite encyclopédie des Îles de Longwor, c’est-à-dire un dictionnaire d’êtres de toutes sortes peuplant l’imaginaire de l’archipel : hommes, dieux, fées, chevaux, navires, thrombes et même des morts vivants. Ajoutons à cela trois dictionnaires thématiques spécifiques à Longwor.

Autre élément qui m’a frappé dans ce livre est la beauté de l’écriture. L’auteur y décrit un microcosme qui n’est pas sans rappeler les envolées descriptives de Jules Verne : *Vous ne le connaissez pas dit fièrement Propio. « Elle court comme une brenèle, grimpe comme une chevirelle et nage comme un phomar. Éventuellement, elle mord comme un petit traquart… » (Extrait)

Beaucoup de mots sont des déformations ou des extensions de mots courants comme *gouvernoral* au lieu de gouvernemental ou *BLIN* au lieu de lin. Évidemment, donner autant d’attributs à un peuple caché comme l’histoire et la mythologie nécessitait qu’on lui attribue également un langage.

Voilà. Je vous ai donné les principales raisons qui me poussent à vous recommander ce livre…des raisons qui constituent un côté dépaysant avec beaucoup de trouvailles. Sur le plan de l’histoire, c’est plus ordinaire…un aventurier qui découvre et explore un monde nouveau, étrange et pouvant être dangereux. Ordinaire, et courant en littérature. Mais il y a beaucoup d’autres choses que l’histoire dans Longwor et ça fait de cette lecture une belle diversion.

Suggestion de lecture : SAUVAGE, de Jamey Bradbury

Denis Duclos est sociologue, docteur d’État, directeur de recherche au CNRS à Paris, écrivain et chercheur associé à un groupe de recherche de l’Institut Télécom. Denis Duclos est intervenu régulièrement dans le Monde diplomatique depuis 1993. Il a écrit des récits mythiques et d’Heroic fantasy inspirés par sa réflexion sur le concept de pluralité. Le « cycle de Longwor » est inspiré du cycle homérique. Il décrit des aventures épiques dans un archipel imaginaire, où la liberté des personnages se confronte à la « machine » des fonctions identitaires de chaque île.

LA SUITE

Bonne lecture
Claude Lambert

le samedi 25 novembre 2023

SAUVAGE, le livre de Jamey Bradbury

*…c’était la chose la plus jolie que j’ai jamais vue et je
brûlais d’envie de le fourrer dans ma poche, mais
j’avais peur de le prendre, peur de passer la porte
avec le sac et le couteau…peur de ne pas pouvoir
revenir si je le faisais. *
(Extrait : SAUVAGE de Jamey Bradbury, à l’origine,
Galmeister éditeur, 2019, 313 pages. Version audio :
Lizzie éditeur, 2019, durée d’écoute : 11 heures 17
minutes. Narratrice : Karl-Line Heller)

À dix-sept ans, Tracy Petrikoff possède un don inné pour la chasse et les pièges. Elle vit à l’écart du reste du monde et sillonne avec ses chiens de traîneau les immensités sauvages de l’Alaska. Elle respecte les trois règles que sa mère lui a dictées : «ne jamais perdre la maison de vue », «ne jamais rentrer avec les mains sales » et surtout «ne jamais faire saigner un humain ». Jusqu’au jour où, attaquée en pleine forêt, Tracy reprend connaissance, couverte de sang, persuadée d’avoir tué son agresseur. Ce lourd secret la hante jour et nuit. Une ambiance de doute et d’angoisse s’installe dans la famille, tandis que Tracy prend peu à peu conscience de ses propres facultés hors du commun.

Du rouge et du blanc
* On ne peut pas fuir la sauvagerie qu’on a en soi. *
(Extrait)

C’est un roman étrange mais très fort, développé dans un cadre glacial et pourtant, l’histoire est chaude et imprégnante. Le personnage principal me rappelle Turtle Alveston, l’héroïne de MY ABSOLUTE DARLING. Ceux et celles qui ont pu lire ce chef d’oeuvre de Gabriel Tallent se rappelleront cette jeune fille que son père abuseur appelait Croquette. Une jeune caractérielle de 14 ans, attachante, une battante.

Dans SAUVAGE, nous entrons dans l’intimité d’une jeune fille de 17 ans, Tracy, rebelle, agressive, volontaire et c’est aussi une battante. Les ressemblances s’arrêtent là mais le lien demeure enveloppant et intéressant. Dans SAUVAGE, après avoir été attaquée dans une intense forêt de l’Alaska, Tracy se réveille couverte de sang, certaine d’avoir tué son agresseur. Elle décide de garder le secret, mais il pèsera lourd.

Alors qu’entreront dans sa vie des personnages mystérieux et inquiétants : Tom, agresseur en liberté, Jesse, arrivé de nulle part pour s’installer dans la famille Perikov, le tout assorti d’une passion pour les chiens et les courses, Tracy prend graduellement conscience d’une faculté exceptionnelle qu’elle développe tout au long du récit. Vous dire de quoi il s’agit équivaudrait à tout révéler mais ce don vient donner au récit un caractère fantastique qui cadre bien avec les forêts de l’Alaska, enveloppées de neige et de mystère.

J’ai été captif de cette histoire qui n’est pas sans rappeler certains romans de Stephen King qui prête à des jeunes personnages des pouvoirs surnaturels, CARRIE ou LES ENFANTS DU MAÏS par exemple. SAUVAGE est un thriller psychologique à tension élevé qui regroupe plusieurs éléments du conte initiatique. La pièce maîtresse de l’oeuvre est encore l’imagination de l’auditeur et de l’auditrice, l’auteure y a vu, à cause du non-dit, de l’atmosphère, d’une espèce de vide autour de Tracy qu’il appartient à l’auditeur de combler.

J’ai trouvé le suspense totalement immersif. Le dernier quart du récit m’a particulièrement impressionné jusqu’à une finale que je n’aurais jamais pu prévoir, dure, déroutante mais parfaitement cohérente. Autre élément important, la nature alaskaine tient une place importante et ajoute au caractère attractif de l’histoire et puis, il y a les chiens, l’affection de Tracy pour cet animal qui tient une place si importante dans la vie de l’Alaska à cause des courses mais aussi à cause du fait que dans cette histoire, les chiens symbolisent une irrésistible recherche de liberté et de compréhension dans tout ce qui dépasse Tracy.

C’est un roman fort, troublant et profond qui ne vous laissera pas indifférent. Je le recommande sans hésiter.

Jamey Bradbury est née en 1979 dans le Midwest. Après avoir obtenu une maîtrise en beaux-arts de l’Université de Caroline du Nord, elle est tombée amoureuse de l’Alaska et s’y est installée. Elle partage son temps entre l’écriture et l’engagement auprès des services sociaux qui soutiennent les peuples natifs de l’Alaska. Chaque année, elle fait partie de l’équipe des bénévoles encadrant l’Iditarod, la célèbre course de chiens de traîneau dont elle s’est inspirée pour écrire son œuvre. Sauvage est son premier roman et a reçu le Prix Littérature Monde Étonnants Voyageurs de Télérama.

Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert

LES AVENTURES EXTRAORDINAIRES D’ARSÈNE LUPIN

COMMENTAIRE SUR LE RECUEIL
L’AIGUILLE CREUSE et autres histoires

De Maurice Leblanc

*Est-ce qu’il ne s’agit pas d’Arsène Lupin ? Est-ce que nous ne devons pas, avec lui, nous attendre justement à ce qui est invraisemblable et stupéfiant. Ne devons-nous pas nous orienter vers l’hypothèse la plus folle ? Et quand je dis la plus folle, le mot n’est pas exact. * (Extrait :  Les aventures extraordinaires d’Arsène Lupin, tome II, Jean-Claude Gawsewitch éditeur, 2012, édition de papier, 370 p.)

Arsène Lupin évoque des énigmes, des secrets enfouis et des cachettes mystérieuses, des machinations, des courses-poursuites et des coups de théâtre. Un héros désinvolte et raffiné, cambrioleur mais gentleman, hors-la-loi autant que justicier, Arsène Lupin, en passionnant des générations de lecteurs par sa verve et ses exploits, figure en bonne place au panthéon de la littérature populaire. »

Le voleur honnête

Je me suis finalement décidé à lire LES AVENTURES EXTRAORDINAIRES d’Arsène Lupin dans leur version originale. Sur le personnage lui-même, je suis un peu mitigé en ce sens que j’ai eu de la difficulté à m’y attacher. Lupin est une légende plus grande que nature, presque trop parfait, arrogant, mufle à ses heures, prétentieux, manipulateur et imbu mais tellement brillant, subtil, intelligent et malin.

Ce sont les histoires qui m’on subjugué, la plume incroyablement maîtrisée de Maurice Leblanc qui a créé un *gentil bandit* tellement magnétique, travaillé en profondeur et si génial qu’il est devenu un monstre sacré, un immortel incontournable de la littérature et de l’écran. Le tome 2 des aventures de Lupin est particulièrement important car on y retrouve un chef d’œuvre de la littérature policière : L’AIGUILLE CREUSE, un roman phare qu’il faut absolument lire si on veut pénétrer en profondeur l’âme de Lupin et saisir l’esprit de l’auteur.

J’ai beaucoup aimé L’AIGUILLE CREUSE pour plusieurs raisons. Il est question, dans ce récit, d’un épais mystère comportant un secret que les rois de France se transmettaient et dont Arsène Lupin s’est approprié. La fameuse « aiguille » contient le plus fabuleux trésor jamais imaginé. Voilà qui explique, en partie seulement, la puissance du personnage et ses moyens d’agir.

J’ai trouvé le récit aussi particulièrement captivant parce qu’il introduit un personnage à la fin de son adolescence : Isidore Beautrelet, élève de rhétorique surdoué, ce qui est incongru au départ. Il se trouve qu’Isidore est devenu mon héros dans cette aventure parce qu’il a tenu tête à Lupin et a fait la barbe à un policier obsédé par la capture du célèbre voleur : le détective Ganimard.

L’ouvrage comporte plusieurs petites curiosités. J’en citerai une dernière, qui donne une saveur particulière à L’AIGUILLE CREUSE : Leblanc parodie Sherlock Holmes. L’antihéros devient Herlock Sholmès, un détective particulièrement antipathique et imbu. J’ai adoré.

L’œuvre, parue entre 1908 et 1909 n’a pas vieilli. Ça se lit sans prendre conscience du temps qui passe et j’ai compris très vite pourquoi, à travers les mystères, revirements et rebondissements, par sa manière d’être et sa psychologie, Arsène Lupin est devenu le GENTLEMAN CAMBRIOLEUR, terme qui sera consacré d’ailleurs par la célèbre chanson de Jacques Dutronc et qui deviendra le thème de la célèbre télésérie.

Je vous souhaite sincèrement de lire ces aventures avec le même enchantement que je celui que j’ai ressenti et les émotions qui l’accompagnent évidemment.

C’est le plus grand des voleursOui, mais c’est un gentlemanEt chaque femme à son heureRêve de voir son visage
De l’actrice à la danseuseÀ l’épouse la meilleureGentleman cambrioleurA gagné le cœur
C’est le plus grand des voleursOui, mais c’est un gentlemanIl s’empare de vos valeursSans vous menacer d’une arme
Quand il détrousse une femmeIl lui fait porter des fleursGentleman cambrioleurEst un vrai seigneur
Extrait de la chanson GENTLEMAN CAMBRIOLEUR : Yves Dessca/Jean-Pierre Bourtayre/Frank Harvel
 
Suggestion de lecture : LE CHIEN DES BASKERVILLE, d’Arthur Conan-Doyle
 

Explorez la biographie de Maurice Leblanc ici.

Bonne lecture
Claude Lambert
Le dimanche 27 août 2023