MALFOSSE

Commentaire sur le
collectif audio multicast

Lugubre…opaque…captivant

Entre 1948 et 1949, dans un petit village français, des meurtres d’une rare violence ont été commis. 70 ans plus tard, cette affaire reste un mystère. Thomas Loreau, chroniqueur judiciaire, compte la résoudre et partage ses recherches sur les réseaux sociaux. Après un an de travail méticuleux, il décide de se rendre enfin au village de Malfosse pour élucider le mystère.

Version audio : Audible originals éditeur, durée d’écoute : 5 heures 41 minutes.

Une série sonore audio en 13 épisodes.

Épisode 1
Un chroniqueur judiciaire, Thomas Loreau, débarque à Malfosse pour tenter d’éclaircir un épais mystère
Épisode 2
Le cadavre de Thomas Loreau est retrouvé dans la forêt, des symboles païens sont gravés sur son corps et sa tête a été coupée. La chroniqueuse judiciaire Anna Gélis décide de mener une enquête parallèle
Épisode 3
Franck Beaumont et David Chalmer assistent à l’autopsie du corps de Thomas Loreau. Lors de leur visite ils croisent une célèbre profileuse et essayent de dresser le portrait psychologique du tueur.
Épisode 4
Anna Gélis s’intéresse de près à l’écrivain et philosophe Bernard Cloisot, qui habite depuis peu Malfosse. Collectionneur de livres anciens dont un fameux exemplaire du manuel d’invocation satanique, il partage sa terrible histoire qui débute à Venise en 1666.
Épisode 5
Juillet 1947. Jeanne Gaillard (42 ans), mère de 4 enfants, accusée de sorcellerie et de propagation de paganisme, la jeune voit s’ouvrir un procès dont l’issue semble s’annoncer abominable.
Épisode 6
Beaumont et Chalmer interrogent les derniers habitants de Malfosse en les réunissant tous ensemble dans une seule et même pièce. De lourds secrets ne tardent pas à se révéler.
Épisode 7
Le folkloriste Patrick Baud, s’intéresse à Nathaniel Huntingdon. Personnage étrange débarqué à Malfosse en 1669. Depuis lors d’étranges événements y surviennent par la suite tous les 70 ans.
Épisode 8
L’enquêteur Chalmer apprend que le lieu du rituel final ne sera pas choisi par hasard. En parallèle, Franck Beaumont découvre dans l’église et le cimetière quelque chose de suspect.
Épisode 9
Enquête sur les meurtres. De nouveaux suspects apparaissent dont un livre, un terrible secret gardé depuis 70 ans.
Épisode 10
Le tueur décide de commencer son rituel afin de changer le monde de demain. Il adresse un message aux internautes…
Épisode 11
Mars 1949, Lucien Morin est jugé pour les 6 meurtres de Malfosse. Acte de barbarie, actes de violence, etc. Mais est-il vraiment coupable ?
Épisode 12
Dans le château qui domine le hameau de Malfosse, un passage secret est découvert. Il mène dans une salle où est exposée l’horrible reconstitution d’un corps hybride. Une traque s’organise
Épisode 13
Franck Beaumont comprend tout et décide de rencontrer la seule personne qui à Malfosse sait tout. Il découvre alors l’identité des trois meurtriers mais surtout la triste histoire qui les lient entre eux…

Auteurs : Patrick Baud, Christian Carayon, Jérôme Camut, Cédric Sire, Elise Costa, Ingrid Desjours, Nathalie Hug, Sophie Loubière, Anne-Sophie Martin, Gipsy Paladini, Laurent Scalese, Franck Thilliez.

Comédiens et comédiennes : Cyrille Artaux, Patrick Baud, Nathalie Bleynie, Bernard Bollet, Jean-Paul Bordes, Mathieu Buscatto, Pascal Casanova, Philippe Catoire, Georges Caudron, Frédéric Cerdal, Guy Chapellier, Catherine Davenier, Hubert Drac, Michel Dupuis, Bernard Gabay, Yvan Garouel, Amaury Guilley, Jochen Hägele, Peter Hudson, Odile Jacqmin, Morgan Jacqmin, Mathias Kozlowski, Margaux Laplace, Virginie Ledieu, Christophe Lemoine, Charlie Lenormand, Gilbert Levy, Sophie Loubiere, Damien Maric, Marie Martine, Anne Rochant, Philippe Roullier, Odile Schmitt, Julien Sibre, Audrey Sourdive, Barbara Tissier, Vincent Violette.

3 années, 3 affaires, 3 meurtriers

 

C’est une histoire étrange, glauque. La production est omni sonore avec voix, effets sonores, bruits d’atmosphère, musique. Il y a au moins un point en commun dans ces 13 épisodes, l’atmosphère est lourde de mystère et m’a rappelé un peu ma lecture de L’EXORCISTE de William Peter Blatty ou mon visionnement de DAMIEN LA MALÉDICTION de Richard Donner (novellisé en anglais). L’atmosphère et le jeu des acteurs sont ce qu’il y a de plus réussi dans l’œuvre. Pour ce qui est de l’histoire…eh bien…c’est une autre histoire.

L’œuvre évoque l’obscurantisme si longtemps entretenu par l’église avec ce que ça comporte d’hérésie, de chasse aux sorcières et d’inquisition. Dans MALFOSSE, on parle de démonologie, de messes noires, d’invocation du démon. Bref, on parle du mal. Rien de neuf. Il y a beaucoup d’irritants : en particulier des sauts temporels qui m’ont donné le vertige, de brusques changements de rythme, un fil conducteur déficient laissant à entendre que les auteurs ne se sont pas entendus entre eux. Les chapitres sont disparates, inégaux en longueur et en intensité comme un enchaînement de nouvelles différentes mais qui parlent de la même chose.

Enfin, j’aurais souhaité qu’Audible présente la série en un seul livre et en respectant la chronologie au lieu de télécharger chaque épisode et de repérer l’ordre de ces épisodes à chaque fois qu’on veut en écouter un. Je n’ai pas compris l’ordre dans lequel les épisodes sont inscrits. La présentation éditoriale est bâclée et ne prête pas, dans l’ensemble, à une présentation satisfaisante.

Les acteurs m’on tenu dans le coup. Leur jeu, parfois impressionnant mais sans jamais tomber dans l’excès a donné à l’ensemble un petit quelque chose d’immersif.  Voix et expression agréables. Autrement dit, ils ont sauvé les meubles. Pour le reste, ou bien quelque chose m’a échappé dans le concept ou bien le concepteur devrait refaire ses devoirs. C’est dommage car le premier épisode était prometteur et la finale, intéressante…improbable. Au final, je crois que le jeu des acteurs vaut l’écoute.

Suggestion de lecture : L’Exorciste, de William Peter Blatty

Deux des auteurs participants

                                   Frank Thilliez                                     Patrick Baud

Bonne écoute
Claude Lambert
le dimanche 24 novembre 2024

 

 

 

CHIMAERIS, le livre d’Éric Tourville

*D’abord, il y a eu l’odeur, puissante, répugnante : un mélange de viande carbonisée, de merde et de produits chimiques, l’impression d’avoir forcé l’arrière-cuisine du diable. (Extrait : CHIMAERIS, Éric Tourville, Slatkine et cie, éditeur. 2018, 500 pages. Version audio éditée par Audible en 2018. Narration : Thierry Debrune. Durée d’écoute : 14 heures 10 minutes)

La vérité est ailleurs.

Dans l’hiver glacial du Vermont, pas très loin de Salem, une maison abandonnée, quatre cadavres de petites filles carbonisés, la cinquième a disparu… l’enquête commence. La presse joue la piste pédophile, la police, celle de la sorcellerie. La première chose qu’il vit, ce fut le symbole rouge au-dessus de la porte d’entrée. Une étoile à cinq branches dans un cercle dont le lieutenant ignorait la signification. L’impression angoissante d’être devant les portes de l’Enfer. »

À L’OMBRE DE SALEM
*La porte de derrière battait. Un volet
claquait. Tous les voyants d’une
situation anormale s’allumaient
un par un. *
(Extrait)

Chimaeris est une extension du mot latin chimaera qui veut dire chimère dont la définition donne froid dans le dos : être bizarre, organique, constitué d’au moins deux variétés de cellules ayant des origines génétiques différentes. Plusieurs utiliseraient sans hésiter le mot MONSTRE. Il se trouve que le titre CHIMAERIS est tout à fait approprié pour ce récit, sans doute le plus intense qu’il m’a été donné de lire.

Le lecteur entrera brutalement dans l’histoire avec la découverte de six petits tombeaux dans une ferme isolée du Vermont, une ferme maudite dont la lugubre réputation remonte à la colonisation du Vermont à la fin du XVIIe siècle, ce qui correspond à peu près avec le procès historique des sorcières de Salem en 1692. Dans les tombeaux se trouvaient cinq corps calcinés de fillettes. Il manquait donc un corps.

Un homme appelé Gus se retrouve inopinément sur les lieux de cette innommable tragédie. Plus tard, Gus recueillera une jeune fille muette, malade, extrêmement faible et effrayée. Gus lui donne un nom : Dawn…elle deviendra le pivot de cette incroyable histoire, d’autant que Gus et Dawn seront impitoyablement traqués.

L’enquête fut confiée à l’inspecteur Fremont et au médecin légiste Edward Todd dont le travail allait être extrêmement complexe du fait que les corps ont été brûlés au phosphore. La première hypothèse, qui fut la plus coriace, voulait que ce carnage fut l’œuvre d’un réseau de pédophiles. Ça aurait fait l’affaire de tout le monde. Dossier classé et on en parle plus. Mais on était très, très loin de la réalité.

Au fur et à mesure que le médecin légiste faisait part de ses hypothèses et ses découvertes, l’inspecteur Fremont devait se tourner vers des filières de recherche peu courantes en investigation policière : exobiologie, génétique, sorcellerie, ufologie, paranormal et j’en passe, ce qui a amené Fremont jusque dans les hautes sphères militaires qui ont beaucoup à cacher dont la légendaire zone 51 pour ne nommer que celle-là.

J’ai adoré ce livre qui est un *page-turner* captivant jusqu’à l’addiction dans la tradition des X-Files en plus poussé et cette façon qu’a l’auteur de frayer avec le surnaturel en mettant en évidence dès le début de l’histoire un pentagramme peint sur la façade de la ferme maudite mettant dans le doute le lecteur et le poussant vers une insatiable curiosité.

*Certains lieux seraient des portes vers…autre chose. Appelez ça comme vous voulez, univers parallèles, passé ou futur. Toujours est-il que quand ses verrous s’ouvrent, les choses se passent généralement mal. * (Extrait)

Je me suis attaché très rapidement à Fremont mais j’ai surtout apprécié le légiste Edward Todd, brillant, humain et audacieux. Sûrement le personnage le plus fouillé et abouti créé par Tourville. Je n’oublie pas Dawn, le personnage central de l’histoire, qui n’a pas cessé de me mystifier.

Ici, tout y est : départ fulgurant, intrigue à forte densité, beaucoup de rebondissements, de l’inattendu, un caractère multi-facette poussant au questionnement sur les valeurs de notre société et sur un rêve récurrent et tenace de l’homme : la création d’un sur-être humain tout-puissant physiquement et intellectuellement.

C’est aussi un thème récurrent en littérature mais il est développé ici avec intelligence et une grande originalité. Tourville est français, mais il a écrit son roman à l’américaine. Il se démarque de Stephen King mais je n’ai pu m’empêcher de faire le rapprochement à cause en particulier de l’opacité de l’atmosphère et de la psychologie des personnages, Fremont en particulier dont la philosophie ne manque pas de saveur.

Un petit irritant, que je qualifierais d’insignifiant : la longueur de plusieurs dialogues qui s’étendent sur les caractères scientifiques de l’enquête. Rien de bien méchant.

Je recommande fortement CHIMAERIS, premier livre d’un auteur à surveiller, Éric Tourville. La version audio est aussi recommandée avec la très bonne prestation de Thierry Debrune

Suggestion de lecture : CHIMÈRE de Tess Gerritsen.

au sujet d’Éric Tourville

Bonne écoute
Claude Lambert
le dimanche 30 août 2020

LA DANSE DES ÉVÊQUES, d’ANDRÉ K. BABY

*L’un d’entre eux saisit Okeyev par les pieds, les deux autres
par le torse et les trois le lancèrent, gesticulant, tête première
dans l’escalier. Il déboula cul par-dessus tête, atterrissant sur
le coin d’une marche du milieu de l’escalier, et roula jusqu’en
bas dans un fracas d’os brisés.*
(Extrait : LA DANSE DES ÉVÊQUES, tome 1, LE
SANG DE LA CHIMÈRE, André K. BABY,  Collection
Coulée Noire, Marcel Brocquet éditeur, 2010…
édition numérique, 415 pages)

LE SANG DE LA CHIMÈRE TOME 1 : LA DANSE DES ÉVÊQUES. Le petit village de Saas Fee voit sa petite tranquillité fortement bousculée alors qu’on vient de découvrir l’archevêque de Lyon, Mgr Antoine Salvador crucifié et ligoté à un câble de l’Alpin Express. Un deuxième meurtre suit de près. Un autre officier de l’Église. Le policiers inspecteur Thierry Dulac d’Interpol France et une mythologue, Karen Dawson s’engageront dans une course contre la montre pour éviter d’autres meurtres car la façon de faire des assassins rappelle les meurtres en série.

La mythologue est là pour tenter d’interpréter l’étrange rituel avec lequel ont procédé les assassins. En fait, l’enquête s’annonce extrêmement complexe, les indices amenant les limiers de fausse piste en fausse piste qui les amèneront toutefois à comprendre les véritables enjeux et les raisons de ces actes horribles et incompréhensibles. Les découvertes qu’ils feront auront de quoi surprendre…

MYTHOLOGIE ASSASSINE
*-J’ai reçu les confessions des assassins de Salvador et Conti.
-Mon Dieu!
Legano, le souffle coupé, porta la main à sa bouche  et se signa. Le Souverain Pontife s’éclaircit la gorge :
-Jamais, au grand jamais je n’aurais pensé porter un tel fardeau. Vous comprenez que cette conversation ne peut continuer.
-Je comprends.
-Je vous demanderais de ne pas sauter aux conclusions.
-Puis-je savoir si ces personnes ont reçu l’absolution?
-Non, vous ne le pouvez pas…*

(Extrait : LA DANSE DES ÉVÊQUES, tome 1, LE SANG DE LA CHIMÈRE)

C’est un thriller, je ne dirais pas haletant, mais quand même rythmé et très intéressant en raison des liens qu’on peut faire avec l’actualité car il est évident pour moi que l’auteur s’est inspiré en partie de faits réels. Je pense entre autres au scandale de la banque italienne Ambrosiano qui a fait une des plus spectaculaires faillites de l’histoire. Cette faillite a suscité un énorme scandale impliquant la mafia et la banque du Vatican.

Plusieurs pensent que la mort du pape Jean-Paul premier aurait été liée au scandale Ambrosiano, mais ça reste à prouver. Les faits d’actualité ne sont pas développés comme tels dans la danse des évêques, mais le lien est facile à faire.

Ce petit mélange habile de fiction et de réalité m’a beaucoup plus. C’est venu me chercher rapidement d’autant que l’histoire commence de façon abrupte : un évêque est trouvé crucifié et ligoté au câble d’une installation de téléphérique.

Un autre assassinat sordide va suivre puis les meurtres de ce genre s’arrêtent là et c’est l’enquête de Thierry Dulac d’Interpol et Karen Dawson une mythologue qui prendront le relais aux yeux du lecteur qui ira de rebondissement en rebondissement. Je vous laisse découvrir ce qu’une mythologue (qui étudie les mythes historiques et sociaux) vient faire dans l’histoire mais je peux vous dire que c’est extrêmement pertinent.

La petite excursion des policiers de fausse piste en fausse piste les amène de plus en plus haut dans les coulisses du pouvoir non seulement au gouvernement français, mais aussi dans celles du Vatican et même dans les coulisses de la mafia russe et d’une mystérieuse organisation terroriste internationale dans laquelle des gouvernements adhèrent.

L’écriture nerveuse d’André K Baby entraîne le lecteur dans les coins obscurs du pouvoir. Et il sait de quoi il parle car il est avocat de formation, il a été procureur de la couronne et directeur juridique d’une multinationale suisse.

Vers la fin de la première moitié, le thriller tourne à la politique-fiction. À partir de ce moment où la fiction chevauche la réalité, on ne décroche plus. La lecture devient addictive et nous entraîne dans les domaines financiers, les sectes, le blanchiment d’argent, le terrorisme, la finance internationale et bien sûr le Vatican.

En ce qui concerne l’image du Vatican, l’auteur ne fait pas dans la dentelle. Beaucoup de choses qui semblent incroyables et qui sont à faire peur sont inspirées de faits réels.

En plus d’être très satisfaisant sur le plan du rythme, de la fébrilité de l’écriture, du fil conducteur et du caractère puissant de l’intrigue, les différents éléments s’imbriquant dans le récit, qu’ils relèvent de la fiction ou de la réalité, poussent le lecteur et la lectrice au questionnement, et c’est loin d’être simple :

<jusqu’où peut-on aller dans nos agissements au nom de la raison d’état ? Est-ce qu’on peut justifier des meurtres, des détournements, du terrorisme ? Et quelle serait la frontière entre cette justification et la moralité ? Est-ce que la logique de la raison d’état peut nous placer au-dessus des lois ? L’histoire regorge de meurtres, de disparitions et même de massacres au nom de la soi-disant raison d’état.>

En ce sens, LA DANSE DES ÉVÊQUES vient brasser nos émotions sur la justice, le principe le plus malmené dans le monde.

J’ai aimé ce livre. Il m’a procuré d’intenses moments de lecture. Le sujet est original et l’intrigue est bien ficelée. Le tout est bien équilibré. Ce livre appelle une suite : UN PAPE JUIF. J’ai hâte de voir. Entre temps, on peut en savoir plus sur l’auteur en visitant son site officiel : www.andrekbaby.com

André K. Baby est un auteur canadien né à Montréal le 7 octobre 1941. Ses expériences dans le monde parfois intriguant du droit juridique international servent de toile de fond dans son tout premier roman : LA DANSE DES ÉVÊQUES, tome 1, LE SANG DE LA CHIMÈRE. Actuellement, au moment d’écrire ces lignes, l’auteur travaille sur la suite, le tome 2 : UN PAPE JUIF. Vous pouvez visiter son site internet au www.andrekbaby.com Vous pourrez y lire entre une entrevue pas mal intéressante.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
le dimanche 24 mars 2019