LE TOUR DU MONDE EN QUATRE-VINGTS JOURS

Commentaire sur le livre de
JULES VERNE

*Un bon anglais ne plaisante jamais, quand il s’agit d’une
chose aussi sérieuse qu’un pari, répondit Phileas Fogg.
Je parie vingt mille livres contre qui voudra que je ferai le
tour de la terre en quatre-vingts jours ou moins, soit dix-
neuf cent vingt heures ou cent quinze mille deux cents
minutes. Acceptez-vous ? *
(Extrait : LE TOUR DU MONDE EN QUATRE VINGTS JOURS,
Jules Verne, édition de 1997 chez Gallimard jeunesse, collection
Folio junior. Édition de papier, 332 pages. Littérature jeunesse)


« Je parie vingt mille livres que je ferai le tour de la terre en quatre-vingts jours au moins. » Ainsi s’adressait Phileas Fogg, en cette soirée du 2 octobre 1872, à ses compagnons du Reform-Club de Londres. Et le voilà parti avec son domestique Passepartout. Le gentleman anglais, avare de paroles, précis comme une mécanique, et le Français, vif, malin et bavard, s’accordent à merveille ! Mais nombreux sont les périls qui les attendent sur la route des Indes, de la Chine et des Amériques…

Un pari sur le monde
* Dans ce singulier pays ou les hommes ne sont
certainement pas à la hauteur des institutions,
tout se fait «carrément», les villes, les maisons
et les sottises. *
(Extrait)

J’ai reconnu très vite et avec plaisir la plume visionnaire et onirique de Jules Verne, qui a embelli mon adolescence et jusqu’à aujourd’hui encore en me faisant voyager dans des univers extraordinaires : DE LA TERRE À LA LUNE, CINQ SEMAINES EN BALLONS, VING-MILLE LIEUES SOUS LES MERS, MICHEL STROGOFF, VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE…*Avec Jules Verne, vous pouvez aller partout et de toutes les façons possibles…par tous les temps : il vous suffit de puiser dans le trésor des voyages extraordinaires.* (Extrait du supplément)

Dans LE TOUR DU MONDE EN QUATRE-VINGT JOURS, nous suivons quatre personnages : le principal, PHILEAS FOGG, un richissime gentleman, son valet, Passepartout, l’officier de police FIX et MISS AOUDA, une jeune femme sauvée d’un cruel rituel indou par Passepartout et ramenée en Angleterre par Fogg et qui donnera un sens à toute cette aventure.

FOGG est plutôt égocentrique, peu intéressé à ce qui l’entoure, ne montre jamais ses émotions et sa maîtrise de soi pousse un peu à la caricature. C’est un personnage plus grand que nature un peu comme les personnages de L’ÎLE MYSTÉRIEUSE ou comme Dick Sand, le jeune marin du roman UN CAPITAINE À 15 ANS.

Pour moi, ce n’est pas le meilleur de Verne à cause du personnage principal que l’auteur a imaginé trop mécanique, trop stoïque. Peu sympathique et à peu près pas attachant. Mais ma lecture a été sauvée par deux éléments en particulier. Premièrement, le deuxième personnage en importance : Jean Passepartout, valet de Fogg, un sympathique bavard rusé et surtout extrêmement intuitif. Il est sympathique, drôle, attachant et fera la différence dans cette extraordinaire aventure.

Deuxièmement, mon esprit a voyagé et je n’ai jamais vu le temps passer : Londres, Suez, Bombay, Calcutta, Hong Kong, Yokohama, San-Francisco, New-York avec, pour chaque coin du monde, une généreuse part de surprises, revirement, obstacles de toutes sortes. Et dire que cette merveilleuse odyssée repose sur un pari extrêmement risqué pour Fogg pour qui l’imprévu n’existe pas. Bien sûr, les évènements vont lui démontrer le contraire bien évidemment. Mais l’admettra-t-il ?

Malgré un personnage principal plutôt froid et très *british* j’ai beaucoup aimé ma lecture. Ce livre n’a pas vieilli et pourtant, il décrit la géographie physique et sociale du XIXe siècle. Comme tout ce qui est signé Jules Verne, il induit le rêve et incite aux voyages même les plus inusités. L’écriture n’est pas très actuelle dans le style mais j’ai trouvé la plume fluide et vivante, avec un soupçon d’humour. Toutes les péripéties de ces valeureux personnages ainsi que la finale à laquelle je n’aurais jamais pensé font de LE TOUR DU MONDE EN QUATRE-VINGT JOURS un incontournable roman d’aventure qui constitue une course effrénée contre la montre.

Jules Verne est né à Nantes en 1828.  Après son mariage en 1857, il devient agent de change à la Bourse pour vivre. Travaillant le jour, il étudie la nuit, les mathématiques, la physique, la géographie, la botanique pour construire son œuvre. En 1863, il apporte le manuscrit de « Cinq semaines en ballon » à l’éditeur Hetzel. Cette rencontre sera décisive : ce grand éditeur, enthousiasmé par les manuscrits de Jules Verne, lui propose un contrat propre à stimuler le génie de l’auteur de « Vingt Mille Lieues sous les mers », un contrat qui l’attache à sa maison.

Ainsi, Verne élabore une œuvre immense,  démontrant que la science est le mouvement incessant qui part de l’homme et y revient avec une provision de connaissances, d’images et de rêves. Jules Verne est mort le 24 mars 1905 à Amiens la ville natale de sa femme, où il s’était installé en 1871.

Suggestion de lecture, du même auteur : DE LA TERRE À LA LUNE

C’est la plus célèbre adaptation du classique de Verne : LE TOUR DU MONDE EN 80 JOURS, sorti en 2007. Une saga de 2 heures 50 minutes réalisée par Michael Anderson avec David Niven, Mario Moreno et Shirley MacLaine.

La version de 2004 réalisée par Frank Coraci a aussi atteint des sommets grâce, entre autres à la performance de Jackie Chan. Je n’ai pas tout à fait compris pourquoi, mais la notoriété de Jules Verne y était sûrement pour quelque chose.

Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert
le samedi 16 septembre 2023

 

IMMORTELLE RANDONNÉE (1) Compostelle malgré moi

Commentaire (partie 1) sur le livre de
JEAN-CHRISTOPHE RUFIN

*Le Chemin est une alchimie du temps sur l’âme. C’est
un processus qui ne peut être immédiat ni même rapide.
Le pèlerin qui enchaîne les semaines à pied en fait
l’expérience. *
(Extrait : IMMORTELLE RANDONNÉE, Jean-Christophe Rufin,
Édition de papier, illustrée, Gallimard éditeur, 2013, 240 pages)

La marche de Compostelle a comme but d’atteindre le tombeau de l’apôtre Saint Jacques le Majeur situé dans la crypte de la cathédrale de Saint-Jacques de Compostelle en Galice (Espagne). Semé de nombreuses démonstrations de ferveur, de pénitence, d’hospitalité, d’art et de culture, le chemin de Compostelle évoque de manière éloquente les racines spirituelles du vieux continent.

La photo montre la cathédrale de Saint-Jacques de Compostelle, aboutissement ultime du pèlerinage, la plus importante route de pèlerinage au monde. Cet imposant bâtiment est le foyer de la plus profonde dévotion catholique.

APRÈS LE RÉCIT, L’ALBUM DE L’ÉTONNANT VOYAGE D’UN ÉCRIVAIN NOMADE, ASSORTI D’ILLUSTRATIONS DE L’AUTEUR ET DE PHOTOS INÉDITES. Le texte intégral accompagné de 130 photos et dessins. Un mois sur le Camino del Norte, de Bayonne à Santiago, 40 kilomètres de marche par jour : étape après étape, Jean-Christophe Rufin, infecté par le virus de Saint-Jacques, se transforme en clochard céleste, en routard de Compostelle.

Une forte aura spirituelle
*Et là, dans ces splendeurs, le chemin m’a confié son secret.
Il m’a glissé sa vérité qui est tout aussitôt devenue la mienne.
Compostelle n’est pas un pèlerinage chrétien mais bien plus,
ou bien moins selon la manière dont on accueille cette
révélation. Il n’appartient en propre à aucun culte et, à vrai
dire, on peut y mettre tout ce que l’on souhaite.
(Extrait)

Comment définir IMMORTELLE RANDONNÉE ? Un carnet de voyage ? Un journal de bord ? Un témoignage ? Une aventure ? Un exercice d’introspection ? Je dirais tout cela à la fois en plus d’adhérer au sentiment de l’auteur : *Le Chemin est une alchimie du temps sur l’âme* (Extrait)

Il y a une personne très proche de moi qui a fait le chemin de Compostelle et qui m’a raconté son périple et les effets qu’il a ressenti. Effectivement, le Chemin de Compostelle transforme et Jean-Christophe Rufin insiste sur ce point : La marche est beaucoup plus qu’un exercice chrétien ou une dévotion catholique, elle transcende la religion. Elle est avant tout une démarche spirituelle…un exercice éprouvant qui amène le pèlerin au dépouillement :

*La clochardisation du marcheur se fait très vite. Si délicat et policé que l’on parte, on ne tarde guère, sous l’effet du Chemin, à perdre sa pudeur, en même temps que sa dignité. Sans devenir tout à fait une bête, on est déjà plus complètement un homme. Ce pourrait être la définition du pèlerin.*  Extrait.

Je précise ici que j’ai été quelque peu surpris du regard critique que jette l’auteur sur le pèlerinage mais je crois son récit authentique, honnête et sincère, mis en perspective par les magnifiques photos de Marc Vachon et même un certain sens de l’humour. Plusieurs passages m’ont en effet arraché un sourire.

Je n’ai pas senti d’emballement dans le récit de Rufin, pas de sensationnalisme mais plutôt l’expression d’un cheminement graduel vers l’humilité. *En une journée, j’avais tout perdu : mes repères géographiques, la stupide dignité que pouvaient me conférer ma position sociale et mes titres. Cette expérience n’était pas la coquetterie d’un week-end mais bien un nouvel état, qui allait durer.* (Extrait)

Même si Jean-Christophe Rufin passe des remarques parfois acerbes sur les *effets Compostelle* j’ai senti dans son récit une fierté du dépouillement dont il était l’objet ce qui m’a procuré un bien être stimulant en cours de lecture et l’impression d’être quelque part en quête de Compostelle aux côtés de l’auteur ou pas loin. J’ai pu ressentir sa fatigue, sa solitude.

À bien des égards, Jean-Christophe Rufin a le ton juste. Il n’essaie pas de convaincre. Ce livre n’est pas un exercice de vente. C’est un témoignage. *Mon propos n’a pas pour but de convaincre mais seulement de décrire ce que fut pour moi ce voyage. Pour le dire d’une formule qui n’est plaisante qu’en apparence : en partant pour Saint-Jacques, je ne cherchais rien et je l’ai trouvé.* (Extrait)

Suggestion de lecture : L’ALCHIMISTE, de Paulo Coelho

Le pèlerinage de Compostelle propose principalement quatre itinéraires majeurs. Le départ le plus au nord est la VOIE DE TOURS, Paris Saint-Jean-Pied-de-Port. 960 kilomètres, 39 jours de marche. Ensuite, un peu plus bas sur la carte, il y a un trajet en deux embranchements : LA VOIE DE VÉZELAY, Saint-Jean-Pied-de-Port 884 kilomètres par Bourges, ou 923 kilomètres par Nevers. 36 jours de marche. 

Toujours plus bas sur la carte, le troisième trajet est LA VOIE DU PUY-EN-VELAY, Saint-Jean-Pied-de-Port. 750 kilomètres, 30 jours de marche. Enfin, le départ le plus au sud est la VOIE D’ARLES, Col du Somport, 740 kilomètres, 30 jours de marche. 

 À suivre…

Bonne lecture
Claude Lambert