RÉCITS DE NOIREPIERRE

Commentaire sur le livre de
TRISTAN MORLAËS

<Ils avaient donné forme à leur cupidité, leurs désirs et leurs vices ; et en retour, cette bête noire se délecta de leurs âmes. Il se terra en ce pays maudit, et l’on ne tarda guère à parler des Terres du mal ; il prit possession de cette forteresse, et partout le nom de Noirepierre devint une peur que l’on agite pour calmer les enfants capricieux.

Mais en ses murs, l’expression même du mal se mit à mûrir, et un jour, il débordera de ses remparts pour se déverser à travers les paysages, embrasser les hommes fautifs et dévorer les pouvoirs secrets des véritables Éternels. >

Extrait : RÉCITS DE NOIREPIERRE, Tristan Morlaës, Les éditions du 38, 2021, Collection du Fou, format numérique, 625 pages.

La Citadelle de Noirepierre. Une vieille forteresse en ruine, habitée par Dieu sait quel esprit maléfique. Du village misérable qui gît à sa frontière, jusqu’à ses marécages hantés, il faudrait être fou pour s’aventurer en pareille contrée. Pourtant, des héros venus de royaumes lointains y ont traîné leurs basques, en quête de richesse et de gloire : ceux qui en sont revenus se comptent sur les doigts d’une main. Que viennent-ils donc chercher en ces lieux désolés ? La rédemption, pour ce chevalier déchu ? Une vie de solitude, pour cette enfant que l’on nomme sorcière ? Quelques âmes à importuner, pour ce farfadet facétieux ?

Le noir, le mal et la peur

J’ai été accro à ce livre parce que, c’est le moins que je puisse dire, l’imaginaire de son auteur, Tristan Morlaës est tout à fait fascinant. De cet imaginaire est issue NOIREPIERRE, une citadelle macabre avec, en son centre une sombre et vieille forteresse en ruine. Le tout, perdu au milieu de marais puants et gluants et d’une forêt dense, inquiétante, lugubre, et bourrée de créatures étranges, bref, perdue au milieu de nulle part. Le mal, le diable ont rendu l’endroit imprenable et peu en reviennent vivants.

*Les terres du mal sont un environnement profondément dépressif. Les humains qui s’y aventurent ne peuvent espérer en sortir indemnes, comme contaminés par la négativité du lieu et de la créature qui y réside. Dans ce marécage mental, il n’y a aucun espoir… * Extrait

(Tristan Morlaës, dans la postface de son livre précise qu’on peut prêter plusieurs sens à son histoire, qu’on a le choix des clés de lecture. Dans l’extrait, il fait référence à la santé mentale. Une cause qui lui tient à cœur. Un personnage bien précis de l’histoire pourrait être au cœur de cette clé de compréhension : Maleaume, le guerrier chef des Corbeaux.)

À proximité de Noirepierre, se trouve une petite bourgade miteuse et délabrée appelée CENDRESPOIR, l’étape ultime pour les chevaliers, aventuriers, braves, héros, exorcistes, justiciers et redresseurs de torts venus affronter la périlleuse obscurité de Noirepierre.

RÉCITS DE NOIRPIERRE est exactement ce que son titre suppose : un recueil de courtes histoires, récits et contes qui tous, convergent vers l’affrontement final avec des personnages récurrents. L’auteur a déployé beaucoup d’imagination dans la description du malin allant jusqu’à lui opposer l’armée du pape.

La grande force de cette histoire est son atmosphère, le non-dit, une ambiance génératrice d’angoisse et d’inconfort, moteur d’émotions, d’intensité voire d’exaltation et c’est exactement ce que cherchent les amateurs de *dark fantasy*.

Ceux et celles qui ont vu les films PROJET BLAIR vont peut-être comprendre plus facilement ce que je veux dire. Ça joue exactement de la même façon sur la pression psychologique du lecteur et de la lectrice. C’est un livre qui brasse les émotions et pourrait ébranler même les plus endurcis.

C’est un livre fort, très noir et j’ai trouvé l’écriture très belle et descriptive sans exagération, plaisant à lire pour les lecteurs et lectrices qui aiment être confronté au surnaturel et à l’invraisemblable même si le thème développé est vieux comme le monde. Il y a quand même d’intéressantes touches d’originalité.

La seule faiblesse notable de l’œuvre pour moi est sa finale que j’ai trouvée sensiblement nonchalante, pas trop facile à suivre car tous les personnages des contes s’y retrouvent. Manque un peu de détails, de fini, d’abouti. C’est tout. Dans l’ensemble, c’est un excellent livre, ajusté au ressenti et à l’interprétation personnelle de chaque lecteur et lectrice.

Né en 1992, Tristan Morlaës mène une première vie de bibliothécaire à Paris et Strasbourg, durant laquelle il écrit des articles sur le jeu vidéo pour La revue des livres pour enfants et participe au podcast culturel Le PostCast. En août 2019, il délaisse son quotidien bien rangé pour partir sur les routes d’Europe et d’Asie. Depuis, le goût du voyage s’est mêlé à celui de l’écriture, et il continue de noircir le papier au fil des kilomètres.

Les secrets d’écriture de MORLAËS

L’auteur Tristan Morlaës dévoile ses secrets d’écriture de RÉCITS DE NOIREPIERRE dans une très intéressante entrevue accordée actusf.com.

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 16 février 2025