L’Arbre Monde, Richard Powers

*Elle prend sa main tremblante dans le noir. C’est si bon au toucher, c’est ce que doit ressentir une racine qui découvre, après des siècles, une autre racine avec qui s’enlacer sous terre. Il y a cent mille espèces d’amour, inventées séparément, toujours plus ingénieuses, et chacune d’entre elles engendre des choses nouvelles. *

(Extrait : L’ARBRE MONDE, Richard Powers, version audio : Lizzie Éditeur, 2018, durée d’écoute : 21 heures 42 minutes, narratrice : Leah Valdis-Bogart. Version papier : Cherchemidi éditeur, 2018, 550 pages.)

Aux frontières de la poésie

C’est un livre magnifique qui m’a touché profondément car il développe avec sensibilité et intelligence, un sujet qui me tient à cœur. Mais résumons d’abord l’histoire.

Après des années passées seule en forêt, une botaniste fait une découverte extraordinaire qui confirme finalement ce que les légendes proclament depuis l’aube des temps : les arbres communiquent entre eux et pas seulement, ils tentent de communiquer avec l’homme depuis les temps anciens. Malheureusement, leur fréquence est incompatible avec la compréhension de l’homme.

L’histoire évoque également le fourmillement d’une vie souterraine qui va jusqu’à supposer que les arbres du monde auraient bien pu prendre racine à partir d’un arbre-mère : l’arbre-monde.

Au fil de cette profonde intimité, nous suivons le destin entrelacé de neuf personnes, représentées par des noms d’arbres, qui convergent vers la Californie pour défendre un séquoia menacé de destruction. Les lecteurs peuvent suivre les défenseurs, un peu comme on lit les nouvelles convergentes d’un recueil.

Ça peut paraître saugrenu, mais je pourrais très bien qualifier cette œuvre de drame d’amour écologique, essai de philosophie environnementale, un roman manifeste. Moi j’appelle ça une alerte écologique, émise sans haine, sans jugement avec une plume poétique à la limite du langage musical. J’ai été ému par la beauté et la profondeur de l’écriture. J’ai été saisi par une émotion d’une rare intensité.

Ce livre met en perspective une véritable tragédie : la déforestation, la coupe à blanc, des pans entiers de forêt qui disparaissent au nom du développement et qui abîment dangereusement la planète.

Il y a plusieurs années de cela, j’enseignais à mes jeunes scouts que lorsqu’on est perdu en forêt et au bord de la panique, faire un câlin à un arbre nous procurait calme et énergie nouvelle. C’est en partie un pouvoir de communication de l’arbre.

 Voilà ce qu’est pour moi ce livre de Richard Powers : un câlin, doublé d’un sérieux avertissement, un plaidoyer d’une profonde sincérité doublé d’un appel au respect et à la reconnaissance. C’est un livre énorme et puissant mais aussi doux et enveloppant.

Le récit comporte quelques faiblesses toutefois. Il y a beaucoup de longueurs qui nuisent au fil conducteur, aussi, des explications scientifiques un peu lourdes. Certains passages frôlent l’extrémisme, sans y plonger vraiment toutefois. Le tout demande une certaine concentration car l’écriture bifurque souvent. La version audio offre une narration monotone qui frôle l’ennui.

Richard Powers consacre ici un genre littéraire appelé à proliférer : le roman écologique. Une chose est sûre, je ne verrai plus jamais les arbres comme avant. Extraordinaire moment de lecture.

Suggestion d’écoute : PAYSAGE SONORE DE LA NATURE CANADIENNE, collectif audio


L’AUTEUR RICHARD POWERS

 Du même auteur

Depuis la mort de sa femme, Theo Byrne, un astrobiologiste, élève seul Robin, leur enfant de neuf ans. Attachant et sensible, le jeune garçon se passionne pour les animaux qu’il peut dessiner des heures durant. Mais il est aussi sujet à des crises de rage qui laissent son père Depuis la mort de sa femme, Theo Byrne, un astrobiologiste, élève seul Robin, leur enfant de neuf ans.

Attachant et sensible, le jeune garçon se passionne pour les animaux qu’il peut dessiner des heures durant. Mais il est aussi sujet à des crises de rage qui laissent son père démuni. Pour l’apaiser, ce dernier l’emmène camper dans la nature ou visiter le cosmos.

Chaque soir, père et fils explorent ensemble une exoplanète et tentent de percer le mystère de la vie. Le retour à la réalité est souvent brutal. Quand Robin est exclu de l’école suite une nouvelle crise, son père est mis en demeure de le faire soigner. Refusant l’option de la médication, Théo se tourne vers un neurologue expérimentant une nouvelle thérapie. Par le biais de l’intelligence artificielle, Robin va s’entraîner à développer son empathie et contrôler ses émotions. 

BONNE LECTURE

BONNE ÉCOUTE
Claude Lambert
le dimanche 6 avril 2025

 

SIGNE DE VIE, de J.R. Dos Santos

*- Un signal ? Le numéro deux du Vatican afficha un sourire nerveux, comme si lui avait du mal à croire ce qu’il était sur le point d’annoncer. *
(Extrait : SIGNE DE VIE, J.R. Dos Santos, HC éditeur, 2018, 700
pages, papier. Version audio : Lizzie éditeur, 2019. Durée
d’écoute : 20 heures 8 minutes. Narrateur : Philippe Allard)

Les immenses radiotélescopes de l’institut SETI en Californie viennent de capter un signal inhabituel venu de l’espace sur la fréquence 1,42 GHz. Un signe de vie. La Nasa, l’Agence spatiale européenne et la CNSA en Chine préparent une mission internationale pour découvrir qui émet ce signal. En tant que cryptanalyste reconnu dans le monde entier, Tomás Noronha est recruté pour faire partie de l’équipe des astronautes qui seront à bord de la navette Atlantis. Loin de s’imaginer ce qu’ont déjà découvert les scientifiques sur la vie extra-terrestre, il plonge alors au cœur du plus grand mystère de l’univers. Le mystère de la vie.

 

À la recherche du premier contact
*Il m’arrive d’avoir envie de tout larguer et de ficher le camp.
-Et pourquoi vous ne le faites pas ?
C’est un jeu de
Patience Tommy ! Nous devons être conscients que des
décennies et des décennies peuvent s’écouler sans qu’on
ne trouve rien d’intéressant. Mais quand on captera
quelque chose, ce sera extraordinaire. Je veux participer
à cette découverte…*
(Extrait)

E.T. a téléphoné… <extrait>

Comme beaucoup de livres de J.R. Dos Santos, SIGNE DE VIE est un mélange de science-fiction, thriller et science vulgarisée expliquée dans de longs dialogues qui constituent autant d’intermèdes dans le roman. J’avais l’impression par moments d’être au banc de l’école et de suivre un cours de science. Quand on lit ou on écoute J.R. Dos Santos, il faut accepter cette réalité qui introduit, de façon fluide, la science, la philosophie, la théologie, le darwinisme et l’évolution, l’ufologie et j’en passe.

J’ai trouvé que l’effort de vulgarisation est magistral. J’ai appris ou compris beaucoup de chose, sur les mathématiques par exemple, le nombre pi 3.1415 suivi d’un tas de décimal, nombre sur lequel repose pratiquement la vie, l’évolution, la physique et évidemment, ce besoin très humain de scruter le ciel. Mais attention, si SIGNE DE VIE a une tendance manifestement documentaire, c’est aussi un roman à haute tension qui m’a accroché dès le départ alors que les immenses radiotélescopes de Seti captaient un signal inhabituel venu de l’espace.

Dès la conclusion à l’effet que le signal est intentionnel et donc qu’il y a signe de vie, les choses se précipitent, le rythme augmente, l’intrigue s’intensifie, les lecteurs-auditeurs deviennent captifs, mus par une brochette d’émotions rendues encore plus intenses par la performance extraordinaire du narrateur Philippe Allard pour la version audio.

Il y a donc signe de vie. Son interprétation est à l’effet qu’un vaisseau approche de la terre. Houston envoie une expédition pour le rencontrer. Les russes s’en mêlent. L’intensité dramatique est en crescendo et atteint son paroxysme au quatrième quart de l’ouvrage avec une surprise inattendue. Toute la finale est inattendue.

Ne vous attendez pas à un vaisseau spatial du genre Enterprise ou Independance day ou Rencontre du troisième type. En fait, ne vous attendez à rien. Laissez-vous aller car ce qui approche de la terre dans SIGNE DE VIE est simplement inimaginable. Donc en bref : livre très bien écrit et fort bien imaginé. Les personnages ne sont pas tous travaillés en profondeur, mais le personnage principal, Thomash Nohrona est très attachant et profondément humain.

Le rythme monte en flèche. L’ouvrage est fortement documenté et bien entendu, l’histoire est ventilée par des palabres scientifiques. Certains sont trop longs mais tous sont en accord avec l’esprit du texte et je les ai trouvés clairs et accessibles. Je vous suggère, même si vous n’aimez pas les sciences, de prendre le temps de bien écouter les dialogues. Personnellement je les ai trouvés passionnants.

Intégrer un documentaire dans un roman est un défi, mais le risque était calculé avec comme facteur-clé l’intensité de l’intrigue et surtout, une façon enrichie de définir et de comprendre la vie. Ce fut un précieux moment d’écoute pour moi.

Suggestion de lecture :  À L’INTÉRIEUR DES VAISSEAUX DE L’ESPACE, de Georges Adamski

Journaliste, reporter de guerre, présentateur vedette du 20H au Portugal depuis plus de vingt-cinq ans, Joseph Rodriguez dos Santos est l’un des plus grands auteurs européens de thrillers. La saga Tomás Noronha, traduite en 18 langues, s’est fait connaître en France avec La Formule de Dieu, vendue à près de 500.000 exemplaires (2 millions dans le monde) et dont les droits d’adaptation au cinéma ont été acquis par Belga Films.
Avec Signe de vie, il signe le 7e roman de la saga.

 

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Bonne lecture
Bonne écoute

Claude Lambert
le dimanche 3 décembre 2023