LES DAMES DU LAC & LES BRUMES D’AVALON

Le Cycle d’Avalon 1 & 2, version audio

Commentaire sur le livre de
Marion Zimmer BRADLEY

*Cette histoire doit être racontée telle qu’elle se
déroula vraiment, avant que les prêtres du Christ
blanc ne l’efface pour toujours avec leurs saints
et leurs légendes*.
(Extrait : LE CYCLE D’AVALON, livres 1 et 2, LES DAMES
DU LAC & LES BRUMES D’AVALON, de Marion Zimmer
Bradley, version audio, Audible studio éditeur, 2019, durée
d’écoute : 25 heures et 32 minutes. Narratrice : Bénédicte
Charton.)

Quand Viviane, prêtresse d’Avalon, arrive accompagnée du grand sage Merlin, Ygerne, femme du duc de Tintagel, ne peut contenir la joie de revoir sa sœur. Mais elle est de courte durée. La Dame du Lac lui annonce sa prochaine grossesse – fruit d’une union avec un autre homme – et le destin de l’enfant qu’elle portera : futur Haut Roi de Grande Bretagne, il unira et protégera les peuples présents sur ses terres ainsi que leurs croyances contre les assauts des envahisseurs.

Consciente de ne pouvoir échapper aux forces d’un inéluctable destin, Ygerne se soumet à la volonté de la Déesse… Mais dans un monde où chacun défend son Dieu et où temps anciens et modernes s’affrontent, la paix entre tous ne pourra régner qu’au prix de nombreux sacrifices.

La grandeur d’Arthur
*Guenièvre, surmontant sa fatigue déclara d’une voix
ferme à ses hôtes : <dans le plus grand chariot de
notre convoi, se trouve une immense table ronde.
C’est le cadeau de mariage de mon père au roi. Prise
de guerre très ancienne et de grande valeur, elle vient
D’Irlande. Prenez-en très grand soin messire. > *
(Extrait)

C’est un ouvrage qui s’ajoute à une imposante bibliothèque essentiellement consacrée au cycle arthurien. J’ai lu plusieurs des livres consacrés au Haut-Roi Arthur et à la Table Ronde, le meilleur, à mon avis, étant LE CYLE DU GRAAL de Jean Markale. Le livre que je viens d’écouter est sans doute le plus sombre des récits du cycle arthurien portés à mon attention et pour cette raison, j’ai été un peu déçu.

La hardiesse, le courage, les prouesses, les quêtes audacieuses et la chevalerie ont été mis de côté au profit des intrigues de cour, complots, trahison, infidélité, amours illégitimes, triangle amoureux, inceste et manœuvres politiques. Il y a un net déséquilibre entre les périls qui menacent le royaume de Bretagne et les aspects fiers et merveilleux de la Chevalerie.

On y apprend ce qu’on sait déjà : d’abord Guenièvre, symbole très actuel je dirais d’intolérance religieuse, précipitera la chute du royaume. Elle causera autant de tort que la légendaire Hélène de TROIE évoquée par Homère. On apprend surtout, encore là comme nous l’a appris Homère, que lorsqu’on cesse de croire aux Dieux, ils n’existent plus. Ça, c’est l’aspect le plus intéressant de ce récit en deux volets de Marion Zimmer-Bradley.

Dans ce livre, on voit comment la grande déesse d’Avalon, symbole intransigeant d’équilibre religieux disparaît graduellement au profit du Dieu unique des Chrétiens. C’est une force du livre exploitée très graduellement et avec une grande justesse et qui justifie amplement le titre du deuxième tome. Pour le reste, peut-être suis-je trop imprégné de l’œuvre de Markale, mais j’ai été déçu.

La Table Ronde m’a semblé occultée, Il me semble aussi que Merlin avait un rôle plutôt secondaire. La haine de Mordred pour Arthur s’est manifestée comme un diable sorti d’une boîte. Pas beaucoup de détails non plus sur la quête du Graal. Peu ou pas de détails sur la guerre évoquée à la fin du cycle et la bataille entre Arthur et son fils a été carrément bâclée. Bref, la fin est manquante, ce que je n’ai jamais vu dans aucune version écrite.

Dans l’ensemble, c’est bien écrit mais l’histoire est sous-développée. Avant d’entreprendre l’audition du livre, il faut se rappeler que la légende arthurienne a été revisitée donnant un rôle accru à l’île mythique d’Avalon, aussi inutile que nuisible dans le développement de la Bretagne, ainsi qu’aux intrigues et manigances de cour. Ce choix a malheureusement mis de côté le caractère féérique, majestueux et merveilleux du cycle arthurien avec ses valeureux chevaliers portés à la défense des opprimés et du bon droit. Ce n’est pas mauvais en soi.

Que le livre soit porté surtout sur la politique, les exactions et la stupidité religieuse pourrait rejoindre une grande quantité de lecteurs et d’auditeurs et j’en profite pour mentionner ici que, sans être un chef d’œuvre, la performance narrative de Bénédicte Charton est fort satisfaisante. Je suis déçu du manque d’équilibre dans le récit. Au moins j’ai beaucoup apprécié le développement et l’évolution de la transition religieuse.

Suggestion de lecture : LE CERCLE DE DANTE, de Matthew Pearl

Marion Zimmer Bradley est née en 1930 dans l’État de New York. À dix-huit ans, elle remporte un prix décerné chaque année en Amérique à l’auteur de la meilleure nouvelle. Elle a publié de nombreux ouvrages de science-fiction mais c’est avec ses romans historiques, best-sellers internationaux racontant la merveilleuse légende du Graal, qu’elle est devenue célèbre dans le monde entier. Cette légende fait d’ailleurs l’objet d’une abondante littérature. J’ai déjà commenté sur ce site le Cycle du graal d’après Jean Markale. Pour lire ce commentaire, cliquez ici.  Pour en savoir plus sur la carrière et la bibliographie de Marion Zimmer Bradley, cliquez ici.


La narratrice Bénédicte Charton, comédienne de théâtre
passionnée par la lecture sur scène.

Bonne écoute
Claude Lambert
janvier 2021

SURTOUT N’Y ALLEZ PAS, de ANTOINE FILISSIADIS

*Voici un livre à ne pas mettre entre toutes les mains.
Sa lecture peut-être une épreuve bouleversante pour
les femmes et les hommes qui aiment trop. *
(Extrait : SURTOUT N’Y ALLEZ PAS, Antoine Filissiadis,
2005, Éditions internationales Stanké, papier, 430 p.)

Abonnée aux histoires d’amour qui finissent mal, Corinne aime trop. Sa troisième tentative de suicide l’entraîne une nouvelle fois à l’hôpital, où une femme étrange lui donne l’adresse d’un docteur tout aussi étrange, Gérard Rickson. Puis, sa meilleure amie lui prodigue un mystérieux conseil : « Seul le Docteur Rickson peut te sauver, n’y va surtout pas. » Le désir de Corinne de se libérer de la dépendance à l’amour est plus fort que tout. Corinne se porte finalement à la rencontre de ce psychiatre peu orthodoxe, qui va l’entraîner dans une thérapie de choc, la contraignant à oublier ses proches, son métier, ses biens matériels pour mieux renouer avec elle-même. Le prix est lourd à payer pour briser le cycle de la dépendance.

EN AMOUR AVEC L’AMOUR
*Les choses s’arrangeraient avec le temps.
Le temps, miroir aux alouettes des
femmes qui aiment sans vraiment savoir
aimer. *
(Extrait)

Ce livre est un roman. Un thriller psychologique qui développe le sujet spécifique de la dépendance affective, particulièrement les femmes qui aiment trop. C’est loin d’être mon genre de littérature mais j’ai été fort intrigué par le titre et comme l’ouvrage était présenté comme un thriller, alors je me suis lancé. Je suis mitigé je dois l’avouer.

Voici l’histoire de Corinne, une trentenaire psychologiquement instable, divorcée, alcoolique, mère d’une fille qu’elle ne voit plus et pour finir, suicidaire. Lors de son séjour à l’hôpital psychiatrique après sa troisième tentative de suicide, elle découvre dans sa chambre une carte portant le nom et les coordonnées d’un psychiatre appelé Gérard Rickson avec, au verso, une inscription étonnante : *n’y allez surtout pas*.

Elle cherche à savoir qui est ce psy que personne ne connait sauf sa meilleure amie et en désespoir de cause, malgré les exhortations à ne pas y aller, <*Si jamais tu y vas, accroche-toi bien : il besogne dans l’extrême. C’est tout ce que je peux te dire> (extrait) Corinne décide de le consulter.

Attendez-vous à une thérapie hors-norme, une succession de mises en scène surprenantes dans lesquelles le sexe prend le pas sur les sentiments. Une thérapie utopique avec des conditions imposées par le psy qui sentent l’arnaque : *Cet homme frappe fort. Il ne fait pas dans la dentelle. Tout ce que tu as vécu, il l’a manigancé pour ton bien. * (Extrait)

Il ne faut pas perdre de vue que ce livre est une fiction. La thérapie est au cœur de l’histoire. Elle est improbable, démesurée, mais elle tient lieu de fil conducteur et je dois dire que l’écriture est assez efficace. Ça reste une histoire divertissante, intéressante jusqu’à un certain point mais malheureusement, elle est bourrée d’irritants.

Ce livre ressemble à un vaste exercice de vente des ateliers de développement de la personnalité dans la spécialité *amour et séduction*. C’est après ma lecture que j’ai découvert que l’auteur est conférencier dans le domaine. Un adon qui m’a tapé sur les nerfs.

Deuxième point, le tableau que dresse l’auteur sur les hommes est démesurément sombre. Bien sûr, les manipulateurs existent et ils font des ravages, j’en conviens mais j’ai été irrité de cette façon qu’a l’auteur de généraliser.

J’ai trouvé aussi exagéré que Corinne fasse cession de tous ses avoirs pour payer la thérapie. De plus, l’auteur semble magnifié le sexe et lui donner une prépondérance qui débouche sur des passages d’une crudité savamment déployée. Je pourrais aussi parler de la finale, une magnifique queue de poisson qui tient sur une page.

Je n’ai pas pu vraiment adhérer à cette histoire tirée par les cheveux et parsemée d’eau de rose qui tente de cerner les pièges de la dépendance amoureuse. Les personnages sont mal développés, certains même m’ont semblé tout à fait insignifiants. L’argumentaire ne m’a pas tellement convaincu, en particulier de faire copain-copain avec les passionnés du développement de la personnalité. En fait, ce livre a à peine la note de passage.

Suggestion de lecture : LE LIVRE QU’IL NE FAUT SURTOUT, SURTOUT, SURTOUT PAS LIRE, de Sophie Laroche

Antoine Filissiadis est né en 1951. Il vit à Chypre, sur l’île d’Aphrodite. Écrivain, conférencier et formateur, il anime des stages de développement personnel depuis 1983. Une formation constante lui permet d’enrichir en permanence ses ateliers des plus récentes expériences faites en matière de relations humaines et de communication. Son niveau de compétence crée un climat de confiance dans lequel chaque participant est amené à évoluer.

Bonne lecture
Claude Lambert
le jeudi 1er octobre 2020

HISTOIRE DE LA PAPAUTÉ, ouvrage collectif

Commentaire sur le collectif dirigé
par YVES-MARIE HILAIRE

*Cette histoire de la papauté n’est ni une apologie
ni une présentation partisane de la papauté, c’est
vraiment une histoire accessible à tous et
solidement documentée de deux millénaires. Car à
travers l’histoire de la papauté, c’est l’histoire du
monde qui s’offre à nous, avec ses heures de gloire
et de peine, ses ombres et ses lumières*
(Extrait : HISTOIRE DE LA PAPAUTÉ, citation du Cardinal
Paul Poupard dans sa préface du livre, œuvre collective
dirigée par Yvea-Marie Hilaire, Éditions Tallandier, 2003,
édition de papier, 580 pages)

Yves-Marie Hilaire dirige un collectif d’universitaires, professeurs et historiens pour offrir une grande histoire synthétique de la papauté, dépourvue de fantasmes et de jugements. Héritière de la Rome impériale, la papauté est devenue, au fil du temps, le centre nerveux du catholicisme. Son magistère moral deviendra international au XXe siècle.

L’histoire de la papauté montre comment cette institution, porteuse de renaissance culturelle à travers l’Histoire, a facilité le passage de l’Antiquité au monde médiéval et comment, aujourd’hui, à l’ère de la mondialisation, elle tente de faire face aux nombreux défis du XXIe siècle.

2000 ans de jeu
théologico-politico-ecclésiastique

*La papauté est l’héritière d’une longue histoire, d’un « principe de continuité et d’identité d’un esprit à travers la succession des générations » (Y.-M. Congar)… elle est appelée à un nouveau rôle dans le cadre d’une ecclésiologie de communion, …avec les églises sœurs, portée par le mouvement œcuménique* (Extrait)

À gauche, Pierre, premier pape en l’an 1.
Au centre, Sylvestre II, pape régnant en l’an 1000.
À droite, Jean-Paul II, pape régnant en l’an 2000.

C’est un livre rare, un ouvrage aussi complexe que complet. Cet ouvrage ne juge pas, se met à l’écart de toute partisannerie, évite les rumeurs, histoires obscures ou secrètes. Il n’est pas question non plus des abus de plusieurs papes relatifs au sexe, à l’argent et à la violence.

Le collectif dirigé par monsieur Hilaire s’est essentiellement appliqué à à réunir les éléments qui ont présidé à l’évolution de l’Église Catholique. Autrement dit, comment l’Église et la papauté sont passé de Pierre à Jean-Paul II*, au prix de quelles peines et il faut bien le dire, d’intrigues, de trahison, d’hypocrisie.

J’ai trouvé ce livre intéressant. C’est vrai. Il ne prend pas parti. Il ne juge pas. Il rapporte des faits, vérifiables le plus possible. Notez que pour des raisons évidentes de déformation dans la transmission orale et écrite de l’antiquité au Moyen-Âge, le premier millénaire porte à confusion.

Les auteurs ont donc travaillé très fort à recouper les informations issues des manuscrits, procéder à de multiples vérifications et révéler l’essentiel par la logique des faits. Cette constatation fait de *HISTOIRE DE LA PAPAUTÉ* une fresque majeure et crédible.

emblème de la papauté

Ce qui m’a le plus frappé dans ce livre, c’est qu’il couvre 2000 ans de mésententes, de chicanes, de schismes, de papes et d’anti-papes, de tractations politiques obscures, de querelles théologiques et j’en passe.

Il est remarquable que l’Église ait survécu à autant de tribulations surtout si on ajoute les conséquences qui ne résistent pas aux analyses : fourberie, manigances politiques, jeux de pouvoir et d’influence, violence, intimidation, assassinats, exécutions et j’en passe.

Il n’est pas facile de comprendre pourquoi l’histoire de l’Église est si agitée. Pourquoi autant de mésententes théologiques. Le message de Jésus n’était-il pas simple : Aimez-vous les uns les autres, Croyez en Dieu. La mission de Pierre n’était-elle pas simple : Faire passer le message de Jésus.

Peut-être me voyez-vous venir…la principale faiblesse du livre et c’est une grande déception pour moi, réside dans la fragilité de sa dimension intellectuelle et spirituelle. Le passage de plusieurs papes mystiques qui ont travaillé fort à définir le rôle spirituel et de guide de l’Église a été pratiquement occulté. Dommage.

J’ai quand même appris des choses intéressantes. Par exemple, comment est né le conclave et comment il a évolué. Comment le Vatican est devenu un état? Comment fonctionne un concile (et Dieu sait que ce n’est pas simple) avec un chapitre intéressant sur le concile le plus complexe de l’histoire, le concile de Trente.

J’ai trouvé très intéressant quoique très choquant le passage sur les Borgia et sur le silence de Pie XII pendant la deuxième guerre mondiale.

Vous voyez donc que le livre répond à beaucoup de questions mais sur chaque question, il ne s’étend que très brièvement. Par conséquent, le livre pousse à la recherche. Mais ces questions abordent très peu la dimension spirituelle qui ne préoccupe les auteurs qu’à partir de la restauration amorcée au XIXe siècle.

Le livre couvre 2000 ans d’histoire. C’est quand même un défi extraordinaire du collectif qui tend à démontrer physiquement, comment l’Église a fait pour survivre jusqu’à nos jours. À ce titre, c’est un ouvrage remarquable. Il me reste à vous prévenir que le récit est lourd, complexe, plutôt mal ventilé. La complexité de l’œuvre exige de la patience.

Suggestion de lecture : BORGIA, de Michel Zévaco

Yves-Marie Hilaire (1927-2014) est un historien français, spécialiste d’histoire des religions. Sa thèse de 1976 sur La vie religieuse des populations du diocèse d’Arras a contribué à élargir de manière significative le champ d’étude du fait religieux en France. Yves-Marie Hilaire a aussi dirigé et contribué à de nombreuses publications collectives portant sur la vie chrétienne dont HISTOIRE DE LA PAPAUTÉ.

Bonne lecture
Claude Lambert
le samedi 21 mars 2020