*Jon tenta de réprimer la vague de terreur qui
le submergeait au souvenir de la description
que lui avait faite Jerzy Domalewski du complexe
souterrain de six étages où on pratiquait la torture
et les exécutions. Il échangea un regard avec Randi…
elle aussi savait. On ne survivait pas à cet enfer.*
(Extrait : OPÉRATION HADÈS, Robert Ludlum, Gayle Linds,
t.f. Éditions Grasset et Fasquelle, 2001, 325 pages)
Aux États-Unis, trois morts, provoqués par un virus inconnu se produisent en trois lieux différents. On confie à une biologiste une analyse en laboratoire mais elle meurt à son tour, victime du mystérieux virus. Son fiancé, médecin militaire et chercheur assiste impuissant à l’agonie et la mort de Sophia. Malgré les conclusions médicales, Jon est persuadé que Sophia a été assassinée et décide d’entreprendre avec d’anciens amis une enquête clandestine. Le commando a développé la conviction qu’un homme possède le virus et compte s’en servir pour déclencher une pandémie.
LE FRUIT DE LA MÉGALOMANIE
*Pourquoi se soucier de ces millions de gens sans
visage? Ils mourraient de toute façon…en outre,
la terre était surpeuplée…en conséquence, la
nature se vengerait, comme toujours à coups de
famines, fléaux…quel inconvénient à ce que lui,
Victor et la société s’enrichissent sur la mort de
millions de gens?
(Extrait : Opération Hadès)
Le livre est intéressant, l’intrigue est bien menée. Toutefois, à plusieurs reprises au cours de ma lecture, j’avais une impression de déjà vu avec des passages clichés et un thème un peu éculé, c’est-à-dire la lutte de l’agent secret intègre, lui-même médecin empathique et humaniste contre un homme à la puissance et à l’ambition démesurées, prêt à sacrifier des millions de vies pour satisfaire son intarissable soif de profits. L’instrument de sa convoitise : un virus mortel menaçant la terre entière.
Il y a cependant des variantes intéressantes. Le développement de l’intrigue relève du style plus personnel de Robert Ludlum : beaucoup de rebondissements, une touche d’imprévu et la façon dont le héros de l’histoire Jon Smith traque les bandits pendant qu’il est lui-même traqué donnent à l’ensemble un rythme élevé et comme le fil conducteur du récit est assez solide, mon attention a été assez soutenue.
J’ajoute que dans le récit, le risque de perdre le contrôle du virus mortel est omniprésent et concerne autant les héros que les criminels. Tout le monde a un désir commun : survivre. Ce fait, bien ancré dans le développement est une force du livre.
Du côté des faiblesses, disons que certains éléments m’ont agacé : des passages rocambolesques parfois surréalistes, des personnages un peu archétypiques à l’exception peut-être du génie de l’informatique, Marty que j’ai trouvé drôle et attachant. Certains passages m’ont semblé aussi bâclés.
Enfin, j’aurais souhaité que les auteurs ajoutent une touche de réalisme au récit. La propagation à dessein d’un virus mortel dans le monde est techniquement possible mais il y a trop d’invraisemblances dans l’histoire pour s’y projeter totalement.
Peut-être bien que OPÉRATION HADÈS a un petit caractère expérimental. Robert Ludlum est mort en 2001 mais je suis à peu près certain qu’il aurait fait de Jonathan Smith un personnage récurrent dans son oeuvre, comme spécialiste de la lutte contre les attaques épidémiologiques d’origine humaine, à la tête du Réseau Bouclier. Je ne doute pas que Ludlum aurait fait des ajustements pour rendre l’œuvre encore plus attractive.
Il est très rare que je chiffre mon appréciation pour un livre, mais dans ce cas-ci, je donnerais 70% à cause surtout du style marqué de Ludlum et du rythme de son écriture. OPÉRATION HADÈS reste un bon divertissement.
Suggestion de lecture : LA 5e VAGUE, de Rick Yancey
Robert Ludlum (1927-2001) est un écrivain, metteur en scène et comédien américain. Il s’est tourné vers l’écriture à l’âge de 40 ans. Son premier roman L’HÉRITAGE SCARLATTI publié en 1971 obtient un succès immédiat et l’imposera comme un des grands maîtres du suspense d’espionnage. Vingt-cinq autres romans suivront qui sont autant de chefs d’œuvre dans le genre. Il a vendu plus de 200 millions de livres dans le monde, traduits en plus d’une trentaine de langues.
Ancienne journaliste, éditrice et conseillère militaire, Gayle Lynds a elle aussi versé dans l’écriture de romans d’espionnage. Son nom figure dans le prestigieux NEW-YORK TIMES BEST-SELLING AUTHORS. Elle s’est vue attribuée plusieurs prix prestigieux et fait partie du TOP 10 des romans d’espionnage de tous les temps du PUBLISHER’WEEKLY. Avec Robert Ludlum, elle a coécrit trois romans qui ont obtenu un succès fulgurant : OBJECTIF PARIS, LE CODE ALTMAN et bien sûr OPÉRATION HADÈS.
En complément, je signale qu’OPÉRATION HADÈS a été adapté à la télé sous forme de mini-série.
La série réalisée en 2006 par Mick Jackson met en vedette Stephen Dorf, Mira Sorvino, Sophia Myles et Blair Underwood
BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
Le 11 septembre 2016