Nous sommes là

Commentaire sur le livre de
MICHAEL MARSHALL

*Tandis que Dawn s’endormait pour de bon et que le train atteignait sa vitesse de croisière pour ce trajet d’une heure jusqu’à Rockbridge, chez eux, David ne parvenait pas à oublier un détail. Ce que l’inconnu lui avait dit avant de se fondre dans la cohue… quatre petits mots, assénés comme un ordre. Ou une menace.
―Souviens-toi de moi, avait-il dit. *

Extrait : NOUS SOMMES LÀ, Michael Marshall, publié à l’origine par Orion éditeur en 2013, traduit en 2015 chez Bragelonne éditeur. Format numérique pour la présente, 1084 pages.


Lorsque David bouscule un inconnu à New York, ce qu’il entend va changer sa vie pour toujours : Souviens-toi de moi. A présent, des phénomènes étranges ne cessent de se produire, et David ne parvient pas à se départir de l’impression que quelqu’un l’observe.

Puis John et sa compagne Kristina viennent en aide à une amie se sentant suivie en permanence. En creusant un peu, ils déterrent quelque chose d’inimaginable. Il existe des êtres cachés dans l’ombre, qui observent, attendent. Prêts à sortir…

Dans l’ombre
Nous avons passé notre vie à vos côtés.
Nous savons qui vous êtes.
Nous savons où vous vivez.
Vous ne pouvez pas nous voir,
mais soyez-en sûrs :
Nous sommes là.


Un thriller fantastique
qui appelle à la patience

L’objet du livre est intéressant : une espèce de sixième sens, perception extra-sensorielle, une impression obsédante. Maintenant, ajoutons à cela un peu de tangibilité avec des phénomènes aux limites du palpable : *…Ils disparurent de nouveau…David ne les voyait plus mais il sentait leur présence. Il y avait des gens dans le parc, des gens qu’il ne pouvait pas voir. * (extrait)

Bien sûr, certains évènements mettent la puce à l’oreille et lancent l’intrigue : David qui bouscule un inconnu qui lui dit *souviens-toi de moi* ou une jeune femme qui à la lourde impression d’être suivie et qui a besoin d’aide.

Ils découvrent alors quelque chose d’impensable…monde parallèle, autre dimension, anges ou démons, ami imaginaire, fantôme, hallucinations ou disons une imagination débordante ou simple supposition… : *Elle avait émis l’hypothèse que les gens ne partaient pas vraiment quand ils décédaient ou quelque chose comme ça…Oh Seigneur. (Extrait)

C’est une intrigue assez bien développée. Je l’ai trouvé originale. Malheureusement, le récit a une faiblesse pour le moins irritante : un important déficit dans le rythme. En effet, le développement de l’histoire est d’une lenteur éprouvante. Il n’y a pas d’action dans cette histoire. Heureusement, L’intrigue a un certain caractère addictif. L’histoire est très longue à démarrer et prendre un sens.

Si l’intrigue garde en haleine jusqu’à un certain point, il faut rester concentré à cause d’une imposante galerie de personnages qui a tendance à noyer l’intérêt. Toutefois, certains personnages forcent l’attention, mon préféré étant Reinhart, le genre vilain. Qui dans cette histoire semble n’avoir sa place nulle part et pourtant son rôle est capital… un rebelle qui met du piquant dans le récit. J’aime bien. Malgré ses lacunes, le récit vaut la peine d’être lu car il évoque et met en perspective les éléments non-palpables de notre vie : l’imaginaire, l’intuition, le ressenti, la perception, les apparences, les impressions tenaces et jusqu’à un certain point, la prémonition.

Ça pousse au questionnement. Par exemple, savons-nous toujours exactement où nous mettons les pieds? *… y avait une bonne femme. Je l’ai vue. Il n’y avait d’abord personne, et puis elle est apparue de nulle part. Je viens de luis passer à travers, mec. *

Un livre à l’atmosphère très particulière.

Suggestion de lecture : LA FANTASTIQUE ODYSSÉE, de Chérif Arbouz


L’auteur Michael Marshall

Du même auteur

Bonne lecture
Claude Lambert
le samedi 22 juin 2025

TROIS, le livre thriller de Sarah Lotz

*Nous savons par Mathieu, chapitre 24, que «Une nation
s’élèvera contre une nation, et un royaume contre un
royaume, et il y aura, en divers lieux, des famines et des
tremblements de terre. Tout cela ne sera que le
commencement des douleurs.»…Et nous savons que ces
douleurs signifient l’ouverture des quatre premiers sceaux.*
(Extrait : TROIS, Sarah Lotz, Fleuve éditions, Pocket, 2014,
édition de papier, 570 pages.)

La terre vit la plus troublante coïncidence de son histoire alors que quatre avions de ligne s’écrasent presqu’au même moment sur quatre continents différents. Sur trois des sites de crash, les secouristes découvrent un rescapé : un enfant, chaque fois. Des fanatiques religieux voient en eux l’incarnation des Cavaliers de l’Apocalypse. Sauf que…les Cavaliers de l’Apocalypse étaient…quatre. Des familles recueillent les petits rescapés mais deviennent vite confrontées à des évènements étranges. Elspeth martins enquête et tente de répondre à deux questions : Qui sont ces enfants et qu’est-ce qu’ils veulent?

CHOCS POUR LIVRE-CHOC
*La suite s’est déroulée très vite mais aussi
comme au ralenti…Le mec bizarre a sorti
un flingue…Et il s’est mis à traverser la rue
sans s’occuper de la circulation. Je n’ai pas
réfléchi. J’ai couru droit vers lui, j’ai fait
sauter le couvercle de mon gobelet de café
et j’en ai balancé le contenu sur cet enculé.
En pleine face. Il a quand même eu le temps
de tirer une fois…*
(Extrait : TROIS)

C’est le quatrième de couverture qui m’a convaincu de lire ce livre mais je n’ai pas tardé à réaliser que le quatrième de couverture est complètement dans le champ et ne remplit pas ses promesses. En fait, c’est l’originalité du sujet qui sauve les meubles. Nous avons ici quatre accidents d’avion qui se produisent à peu près au même moment, sur quatre continents différents.

Pour trois des crashs, il y a un rescapé : en tout trois rescapés, et ce sont trois enfants. Pour les habitants de la planète, il est très difficile de croire au hasard. Alors des églises et sectes religieuses décrètent que ces enfants sont les Cavaliers de l’Apocalypse. Dans l’Apocalypse de Jean comme on le sait, il y a quatre cavaliers. Alors qu’à cela ne tienne, les fanatiques religieux inventent un quatrième rescapé pour faire le compte.

Avec un tel sujet, l’auteure avait tout ce qu’il faut pour bâtir un thriller de premier ordre, haletant, intense, palpitant, bref, bâtir quelque chose que le lecteur aurait gardé en mémoire longtemps.

J’ai même imaginé à un moment donné que Sarah Lotz travaillait pour faire le contraire de ce que propose un bon thriller en choisissant un support littéraire douteux dans les circonstances. En effet, le récit est présenté sous forme de compte-rendu journalistique de témoignages et d’interviews. Avec un style pareil, rien ne m’a permis de m’accrocher à l’histoire.

Il n’y a pas vraiment d’action dans ce roman à part ce qui est rapporté dans les articles de journaux qui forment le roman. Donc le lecteur est témoin de l’action par un tiers. Donc, il n’est témoin de rien du tout. Puisque le récit est bâti dans un style journalistique, télégraphique et froid, il n’y a pas de fil conducteur dans l’histoire.

Le récit souffre de longueurs et d’incohérences et c’est très long avant de pouvoir s’accrocher à quelque chose, comme si l’histoire ne démarrait pas vraiment.

Mais tout n’est pas noir. Malgré son aspect documentaire, le récit comporte quelques forces dont celle de mettre en perspective l’incroyable appétit de la Presse, de certaines églises, sectes et des télévangélistes dont l’auteure ne donne pas une très bonne image, sentiment que je partage.

Ce sont ces hommes soi-disant de foi qui ont vu dans les enfants rescapés un signe évident en lien avec les Cavaliers de l’Apocalypse qui n’ont de Cavaliers que le nom finalement. Le récit évoque également le besoin très humain de croire à quelque chose. Les messages livrés par les prédicateurs de malheur sont souvent agressifs et persuasifs. C’est n’importe quoi comme le démontre le récit.

L’écriture est quand même fluide et les chapitres, qui sont des articles ou des interviews, sont brefs et se lisent assez bien. Si L’auteure a pu se concentrer davantage sur le sort des enfants au milieu du récit, elle nous laisse malheureusement sur une finale peu vraisemblable, sans conclusion vraiment satisfaisante, allant jusqu’à étriller le personnage principal, la journaliste Elspeth Martins :

*Vous avez publié tous ces récits incendiaires sur les changements de personnalité des enfants, vous avez lâché la bombe et vous êtes partie. Vous n’avez pas cherché plus loin : vous étiez persuadé que tout avait une explication rationnelle et vous pensiez naïvement que vos lecteurs seraient aussi de cet avis. (Extrait)

Ma déception m’appartient évidemment. Les différentes critiques que j’ai lues sur TROIS sont passablement disparates. Il est très possibles que vous aimiez ce livre, à cause par exemple, de son sujet qui est quand même original. Mais il y a une chose sur laquelle je ne crois pas me tromper : ne vous fiez pas au quatrième de couverture. Il en promet beaucoup trop pour ce que le livre donne en réalité.

Suggestion de lecture : LE SANCTUAIRE DU MAL, de Terry Goodkind

Sarah Lotz est une auteure et scénariste originaire du Royaume-Uni. Elle a écrit sous plusieurs pseudonymes bizarres dont des romans d’horreur urbaine sous le pseudonyme SL GRIS et des romans érotiques avec Helene Moffet et Paige Nick sous le pseudo Helena S Paige. Après une série à l’écriture étrange et peu engageante, Lotz sort son premier thriller en 2014 : TROIS, suivi de JOUR QUATRE en 2016, des ouvrages nettement supérieurs qui consacrent leur auteur sur la scène littéraire internationale.

BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
LE 17 SEPTEMBRE 2016