Les mystères d’Avebury, de ROBERT GODDART

*Tout commence donc dans un paysage où
 L’inexpliqué et l’inexplicable se confondent,
où les témoignages d’un lointain passé,
construit  par l’homme, se rient du monde
réglé et ordonné que voudrait être
l’insaisissable, l’éphémère présent.*
(Extrait : LES MYSTÈRES D’AVEBURY, Robert Goddart,
Sonatine éditeur, 2017, 400 pages. Version audio :
Audible studios éditeur, 2017, narrateur : Emmanuel
Bonami. Duré d’écoute : 10 heures 27 minutes)

Les souvenirs peuvent parfois être aussi irréels que l’imagination.
Été 1981. Alors qu’il attend à la terrasse d’un café, David Umber est témoin d’un fait divers qui va bouleverser son existence. Trois jeunes enfants qui se promenaient avec leur baby-sitter sont victimes d’une terrible agression. Un homme kidnappe Tamsin, deux ans, et s’enfuit à bord de son van. Alors qu’elle essaye de s’interposer, la petite Miranda, sept ans, est percutée par le véhicule. Tout se passe en quelques secondes. David, comme les deux autres témoins de la scène, n’a pas le temps de réagir. À peine peuvent-ils donner une vague description de l’agresseur.

Printemps 2004. Prague. Après une histoire d’amour avortée avec la baby-sitter des enfants, David a tout quitté pour refaire sa vie. Il est contacté par l’inspecteur-chef Sharp, chargé à l’époque de l’enquête. Sharp lui demande de l’accompagner en Angleterre pour essayer de faire enfin toute la lumière sur la disparition de Tamsin. Littéralement hantés par cette affaire, les deux hommes reprennent un à un tous les faits. Bientôt de nouvelles questions se posent sur la configuration des lieux, sur la présence des témoins, sur la personnalité des victimes. Le drame cache en réalité encore bien des secrets.

De la poussière ressortira…
Rouvrir le carton de Umber ramena Junius, le temps d’une
nuit blanche à un passé longtemps laissé de côté. Son passé.
Avant Avebury, avant le dernier lundi du mois de juillet 1981.

(Extrait)

C’est la première fois que je lis Robert Goddard et ma foi, j’ai été déçu. C’est un roman long, compliqué et ennuyant par moment. Pourtant, l’auteur frappe fort dès le départ : La vie de David Umber bascule lorsque celui-ci voit des enfants être victime d’une fulgurante agression. Tamsin, deux ans est kidnappé. En voulant sauver son petit frère, Miranda est frappée par le véhicule du ou des kidnappeurs.

Tout se passe très vite, personne n’a le temps de réagir. Vingt-cinq ans plus tard, David Umber, qui tente de reconstruire sa vie, est contacté par l’inspecteur Sharp qui était chargé de l’enquête à l’époque et qui est maintenant à la retraite. Sharp soupçonne d’abord Umber. Finalement, les deux hommes feront équipe pour reconstituer les faits et trouver des réponses. Ils trouveront plus que des réponses, déterrant des secrets qu’il eut mieux fallu garder enfouis.

En cours d’enquête, Sharp est victime d’un coup monté et se retrouve en prison pour trafic de drogue. Peut-être a-t-il été jugé un peu trop fouineur. Toujours est-il que David Umber poursuivra l’enquête seul. Dès ce moment, le récit prend toutes sortes de directions et dévoile une impressionnante galerie de personnages. C’est une des raisons qui exige une attention soutenue de la part des lecteurs/lectrices et une bonne concentration.

Comme un quart de siècle après les terribles évènements, le mystère n’est toujours pas résolu, les hypothèses les plus improbables son avancées…Avebury étant un site néolithique comme Stonehenge, on attribuerait le drame à une puissance magnétique inconnue, de source surnaturelle possible. On avance même la possibilité que Tamsin ait été enlevé par des extra-terrestres en évoquant l’affaire Roswell

Les choix de l’auteur sont un peu difficiles à comprendre. Les lettres de Junius par exemple. L’histoire reconnait que ces lettres de Junius, pamphlétaire et polémiste anonyme, constituent un des chef-d ’œuvres de la littérature pamphlétaire anglaise. Elles datent de la fin du XVIIIe siècle. Elles sont censées aider à la compréhension du récit. Ça ne m’a pas aidé. Le rôle de l’ancien commissaire Sharp est malheureusement sous-exploité.

Lorsqu’il devient victime d’un coup monté, le récit devient multidirectionnel. Dommage parce que dans la partie du récit ou Sharp et Umber travaillent en binôme, le récit est plus facile à suivre. Il y a un fil conducteur. Après l’élimination de Sharp, le récit s’essouffle et dérape. Et le tout amène à une finale qui m’a laissé perplexe.

Le roman a tout de même quelques forces, l’auteur recréant cette atmosphère recherchée par beaucoup de lecteurs-lectrices : lourde, noire, intrigante et mystérieuse. Le roman comporte aussi un aspect historique intéressant. C’est le cas aussi de l’aspect géographique qui enveloppe le lecteur de la mentalité et de l’environnement anglais et d’Avebury, réputé pour ses sites néolithiques.

L’auteur a bâti son intrigue sur des réalités historiques et en accord avec la mentalité britannique. C’est un point positif. Toutefois, peut-être suis-je trop impatient en matière de lecture ou pas assez tolérant, dès que je perçois de l’errance dans le récit, j’ai tendance è décrocher même si je tiens le coup la plupart du temps. Le problème c’est que l’histoire s’empêtre avec trop de voyages, de bonds dans le temps, trop de personnages, trop d’hypothèses, le personnage du policier Sharp qui est sous-développé.

En conclusion, cette histoire, qui contient tout de même une intrigue forte, souffre de confusion et m’a laissé sur ma faim. La narration d’Emmanuel Bonami et plutôt monocorde et peu convaincante, le registre vocal étant à peu près le même pour tous les personnages.

Suggestion de lecture EN SACRIFICE À MOLOCH, D’asa Larsson


Robert Goddard est un romancier anglais né en 1954. Il s’est spécialisé dans le roman à énigmes et policier. Ses récits policiers font habituellement appel à des éléments historiques et sont souvent situés dans les villes et les campagnes d’Angleterre. Ses romans mettent souvent en scène un personnage qui découvre une conspiration longtemps gardée secrète et dont la révélation va bouleverser sa vie. LES MYSTÈRES D’AVEBURY est un livre de cette génération. Tout comme INTO THE BLUE, OUT OF THE SUN et NEVER GO BACK

 

Emmanuel Bonami est un acteur français qui enregistre des voix off publicitaires, des doublages de jeux vidéo, des bandes annonces, des documentaires et des émissions de télé.

<Après avoir passé près de 12 ans à travailler à l’étranger, Angleterre, Turquie et Ukraine, j’ai posé mes valises en France.

Depuis, l’aventure continue devant une caméra, sur des planches… ou derrière un micro. Que du bonheur!>

Emmanuel Bonami

les voix.fr

Bonne écoute
Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 28 novembre 2021

L’ÉNIGME DU MARIE-CAROLE, MICHEL CARBONNEAU

 *Le vieux Frédérik, m’a dit de vous informer d’être extrêmement
vigilants. Il paraîtrait qu’une tempête s’en vient du côté est de
l’océan Atlantique, sans savoir par où elle va frapper, poursuivit-
elle en se rendant compte qu’elle venait de gaffer, son mari ayant
de la haute mer par gros vent.*
(Extrait : L’ÉNIGME DU MARIE-CAROLE, Michel Carbonneau, Les Éditions
Carte Blanche, 2011, numérique, 290 page. Littérature québécoise.)

Dans ce troisième roman historique publié en moins de 10 ans et basé sur une histoire vraie, Michel Carbonneau propulse le lecteur dans l’espace et le temps jusqu’en 1964. Nous sommes aux Îles-de-la-Madeleine. Cinq marins s’embarquent à bord du Marie-Carole. Ils ne reviendront jamais de ce qui devait être la pêche de leur vie. Dans la nuit du premier au 2 décembre, le Marie-Carole disparaît en même temps qu’un autre chalutier qui naviguait dans les parages de l’Île-de-Sable. Personne n’a jamais su ce qui s’est passé cette nuit-là Michel Carbonneau émet néanmoins des hypothèses surprenantes …

ON CHERCHE ENCORE À COMPRENDRE
*Aux Îles, en ce début de soirée du 1er décembre,
la tempête qui avait fait rage pendant plus de
six heures d’affilée se calma peu à peu. Plusieurs
habitants des villages et cantons étaient chagrinés
de constater les dégâts qu’avait faits Dame Nature…
Pour les proches et les amis de l’équipage du
Marie-Carole, les nouvelles restaient très
contradictoires.*
(Extrait : L’ÉNIGME DU MARIE-CAROLE)

Le Marie-Carole, un chalutier de 82 pieds,
sombre au large de la Nouvelle-Écosse
dans la nuit du 1er au 2 décembre 1964
avec ses 5 membres d’équipage.

Le naufrage du Marie-Carole est une réalité historique qui a ébranlé Les Îles-de-la-Madeleine et tout le Québec en 1964. Cette année-là, alors que les pêcheurs des Îles obtenaient pour leurs poissons un prix dérisoire et compte-tenu d’une politique déficiente en matière de pêcheries, Edmond Richard, propriétaire et capitaine du Marie-Carole décide de tenter une expérience de pêche automnale avancée.

Il était accompagné de trois autres capitaines expérimentés en pêche hauturière : Alphonse Doyle, Rosaire Lapierre et Pierre Poirier. S’ajoute à l’équipe Redger Cyr qui fait office de cuisinier. Le 2 décembre, une tempête d’une rare violence vient à bout du Marie-Carole ainsi que d’un autre chalutier à proximité de l’Île de sable.

On dit que le Marie-Carole n’avait pas l’envergure nécessaire pour naviguer dans ces eaux. Mais quelle sorte de bateau de pêche a l’envergure pour affronter la tempête du siècle?

Suite au naufrage du Marie-Carole, beaucoup de questions sont restées sans réponses. Dans son roman historique L’ÉNIGME DU MARIE-CAROLE, l’auteur Michel Carbonneau, après avoir recueilli les confidences des familles des disparus, émet des hypothèses, certaines surprenantes, plusieurs troublantes. Il y a même un chapitre où les tentatives d’explications s’enchaînent à la vitesse grand V.

Comme on ne sait pas vraiment ce qui s’est passé, l’auteur a exploré toutes les possibilités à travers ses personnages : des moins crédibles, comme par exemple un effet pervers du Triangle des Bermudes, jusqu’aux plus sérieuses, comme le fait que le Marie-Carole, tout comme le Acadia Sea Hawq était sur le chemin d’une monstrueuse vague scélérate.

C’est un récit humain et réaliste. C’est un roman bien sûr, mais la deuxième moitié prend presque l’allure d’un documentaire. Quoiqu’il en soit, il s’en dégage une émotion qui m’a enveloppé et qui m’a tenu en haleine aussi car dans ce récit romancé, il y a de l’intrigue, du suspense et des rebondissements.

J’ai trouvé aussi que le récit met en perspective beaucoup de choses qui amènent le lecteur à explorer les possibilités qui expliqueraient pourquoi ce qui devait être une excursion en vue de la pêche du siècle a tourné au drame : les réalités sociales des Îles-de-la-Madeleine sont clairement exposées, les réalités économiques avec entre autres les fameux *timbres* de chômage qui faisaient le désespoir des travailleurs saisonniers.

Ajoutons à cela les réalités politiques qui donnaient l’impression d’une pêche *fonctionnarisée* teintée de traitements inéquitables et les réalités humaines, non moins capitales si on veut explorer toutes les possibilités et qui font ressortir des tendances comme l’orgueil et l’esprit de compétition, le capitaine du Sea Hawq et celui du Marie-Carole se seraient disputés (par hypothèse) le fameux ban d’aiglefin.

En terminant, en annexe du récit, on trouve des recettes culinaires. J’avoue que je n’ai pas très bien saisi ce que ça fait là. Une histoire aussi dramatique n’était pas de nature à stimuler tellement mon appétit, encore moins pour manger du poisson. Peut-être n’ai-je pas l’esprit assez ouvert mais je trouve ce choix éditorial plutôt étrange.

Heureusement, ça n’enlève rien au récit que j’ai trouvé humain, émouvant, palpitant en plus d’être bien documenté.

Suggestion de lecture : L’ÉPICERIE SANSOUCY, de Richard Gougeon

Michel Carbonneau est un auteur québécois, conférencier, vulgarisateur et professeur né le 19 décembre 1939 à Havre-Aubert aux Îles-de-la-Madeleine. Il fut entre autres, diplômé en recherches opérationnelles de l’Université de Montréal. Au fil du temps, sa passion pour la lecture en devient une pour l’écriture. Son premier livre LE BANC DE L’ORPHELIN « La tourmente » tome 1 est publié en 1998, le tome 2 « Le mal d’aimer » suit en 2007. Il publie en juin 2011 L’ÉNIGME DU MARIE-CAROLE. Finalement, LE NADINE « Le début de la fin » paraît en 2015. (Source : le site officiel de Michel Carbonneau

À LIRE ÉGALEMENT

BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
Le dimanche 3 septembre 2017

L’HOMME QUI DEVINT DIEU, GÉRALD MESSADIÉ

*Les Juifs avaient failli aimer leur Dieu.
Mais comme les autres, qui ne survivaient
Qu’à l’aide d’exorcismes, de sacrifices et
D’imprécations, autant de cataplasmes de
Plantain sur des esprits saignant de trouille,
 Ils avaient fini par succomber à la peur.
Yahveh, ç’aurait pu être un père, ce n’était
Plus qu’un policier…
L’HOMME QUI DEVINT DIEU,
Éditions Robert Laffont, 1988

À partir de recherches très poussées et échelonnées sur plus d’une dizaine d’années, Gérald Messadié reconstitue ce qu’aurait pu être en réalité la vie de Jésus. À partir de nouvelles données, l’auteur tente d’éclaircir des points restés obscurs dans les évangiles : des passages éludés, une chronologie incomplète, des personnages et contextes peu ou mal définis. Messadié reprend donc en détail la vie de Jésus pour ce qu’il est d’abord : un homme. Il développe le parcours de cet homme, qui influencera toute l’histoire, dans un contexte politique, social, économique, humain et religieux bien sûr et définira de façon détaillée le rôle de ses proches.

C’est un livre surprenant et très audacieux.  En effet, suivant la logique de faits nouveaux découverts au cours de plusieurs années de recherches intensives, Gérald Messadié a réécrit, sous forme de roman, le parcours de Jésus et ça donne une version complètement différente de celle proposée par les évangiles canoniques. Pour beaucoup de personnes, ce livre est dérangeant à cause de la position de l’auteur face à Jésus et des révélations qui y sont faites.

Je pourrais citer par exemple l’hypothèse selon laquelle Jésus ne serait pas mort sur la Croix. Malgré nombre d’arguments solides qui étayent cette thèse, c’est énorme et plutôt spectaculaire comme *fait nouveau*. Après tout, la Foi catholique ne repose-t-elle pas sur la mort de Jésus crucifié puis ressuscité le troisième jour?

J’aimerais citer aussi le rôle de Marie-Madeleine qui aurait été beaucoup plus actif et intense que le laisse supposer les évangiles de Luc, Mathieu, Jean et Marc. Selon la version de Messadié, elle aurait, à toute fin pratique, présidé à la naissance de l’Église.

J’ai lu ce livre consciencieusement et avec un maximum d’ouverture d’esprit. Je n’ai décelé aucune intention malveillante de l’auteur. Il se garde bien de vouloir bousculer la foi, condamné l’Église ou dénoncer les écritures canoniques. Il le précise très bien dans sa postface.

Ce livre m’a touché parce que Messadié a d’abord considéré Jésus comme un homme. Il a laissé de côté l’essence divine. Il ne s’est pas encombré des dogmes. Il a voulu simplement mettre en évidence ce qui constitue pour lui le vrai parcours de Jésus en posant sur sa vie un regard quasi quotidien quant à son implication dans la communauté, le message qu’il véhiculait et son caractère profondément humain.

Ce livre m’a plus et il devrait vous intéresser dans la mesure où vous gardez l’esprit ouvert. Le point de vue de l’auteur peut être dérangeant, voire offusquant, mais ce n’est qu’un point de vue. Il faut prendre ce livre pour ce qu’il est : la proposition d’une nouvelle version de l’histoire. Pour moi, le livre est bien documenté et ses révélations sont crédibles. Le reste est une question d’interprétation et de Foi.

Suggestion de lecture : LA FORMULE DE DIEU de J.R. Dos Santos

Pour en savoir davantage sur la démarche de Gérald Messadié, je vous recommande de lire L’HOMME QUI DEVINT DIEU LES SOURCES. Vous y trouverez les sources et analyses qui ont permis à l’auteur de reconstituer le parcours de Jésus. Ce livre pourrait répondre à beaucoup de questions et son écriture est très accessible.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
FÉVRIER 2014

(En Complément…)