LA MYSTÉRIEUSE BIBLIOTHÉCAIRE, DOMINIQUE DEMERS

VERSION AUDIO

*<Je viens eeuh pour le poste de bibliothécaire, murmura-
t-elle d’une voix de souris.> Marcel Lenragé s’étouffa de
surprise, ses pieds retombèrent sur le tapis, et sa
fabuleuse pyramide formée de 64 tranches de viande
 dégoulinante de moutarde et de gras, s’effondra brusque-
ment sur son bureau.*

(Extrait LA MYSTÉRIEUSE
BIBLIOTHÉCAIRE, Dominique Demers. Éditeur à l’origine, Québec
Amérique, 1997, 123 pages. Version audio : Audible studio Éditeur,
2018. Durée d’écoute 55 minutes, narratrice : Dominique Demers)


Après avoir été nouvelle maîtresse et factrice, mademoiselle Charlotte est de retour dans un nouveau rôle tout aussi hilarant, celui de bibliothécaire et elle
est très spéciale dans sa nouvelle fonction. Mademoiselle Charlotte est une grand-mère drôle et un brin rebelle qui a inspiré le film à succès La mystérieuse mademoiselle C. Ce classique de Dominique Demers pour les 8 à 11 ans a reçu le prix du livre M. Christie.


UNE INTARISSABLE SOURCE D’HISTOIRES

*Vite ! <Montre nous des fesses> réclama Martin *la 
Boucane* tout essoufflé. Mademoiselle charlotte qui
adressa un sourire espiègle en choisissant un livre
intitulé le grand amour d’odilon cochon. Quoi ?
S’offusqua Martin, <c’est pas cochon ça.> !  <C’est
pourtant plein de cochons> répliqua mademoiselle
Charlotte malicieuse…*

Beaucoup d’enfants de 7 à 11 ans connaissent déjà mademoiselle Charlotte, une vieille dame un peu excentrique, imaginative et terriblement attachante. Ils l’ont connu dans leur bibliothèque scolaire ou encore dans un atelier de lecture animée avec UNE BIEN CURIEUSE FACTRICE et LA NOUVELLE MAÎTRESSE.

Charlotte nous revient cette fois dans un nouveau rôle: bibliothécaire à Saint Anatole. Avant d’écouter ce récit qui dure moins d’une heure. Je me suis mis dans la peau d’un enfant.

À ce titre, j’ai un peu d’expérience et à l’écoute de ce récit, j’ai vécu vraiment de belles émotions. J’ai écouté le récit de Dominique avec ravissement et je me suis attaché à des personnages sympathiques et drôles dont Martin La Boucane, un petit rebelle qui joue les durs et qui n’espère trouver à la bibliothèque que des livres qui montrent des fesses. J’ai pu assister à une magnifique transformation graduelle et toute en douceur du garçon.

Mademoiselle Charlotte est une vieille dame un peu bizarre, très anticonformiste et possédant une imagination débordante. Elle adore les enfants et elle adore les livres. Elle s’active à compléter l’équation en faisant en sorte que les enfants adorent les livres. De plus la vieille dame a une particularité.

Occasionnellement, elle est aspirée par le livre qu’elle lit. Son corps devient comme absent et son esprit voyage dans le récit au risque de ne plus revenir ou de ne plus faire la différence entre la fiction et la réalité. Elle travaille à ce que les enfants développent le goût de la lecture, 

De l’ensemble du récit de Dominique Demers transpire une passion extrêmement forte pour les livres. Rien de forcé, d’insistant. Juste un argumentaire développé dans une sorte de jeu de rôle plein d’humour et de tendresse pour amener les enfants à entrer dans le monde merveilleux des livres.

Le dernier point que je veux aborder ici concerne la narration faite par l’auteure elle-même. Elle déclame magnifiquement son histoire en stimulant la capacité d’émerveillement des enfants. Elle fait plus que raconter une histoire. Elle la vit et la transmet. L’humour qui caractérise l’histoire semble créer une forme de symbiose entre l’enfant et le livre. 

<C’est bébé niaiseux ! grogna Martin…malgré tout, il resta là à observer mademoiselle Charlotte pendant qu’elle étalait les livres sur la pelouse. Les titres et les pages de couverture donnaient vraiment envie qu’on les ouvre… entre autres…<cadavre au dessert>…<À chacun sa crotte> ainsi que <LE CHAMPION FARCEUR> un livre bourré d’idées pour mille tours pendables.> extrait

L’attirance des enfants pour les livres n’est pas automatique. L’auteur doit gagner leur confiance en proposant une présentation qui stimule l’imaginaire des petits. L’oeuvre de Dominique Demers me conforte dans ma certitude qu’utiliser un support audio pour introduire les enfants à la lecture est une bonne idée.

Cette idée a d’ailleurs déjà été évoquée dans un chouette petit livre pour enfant : LE LIVRE QU’IL NE FAUT SURTOUT, SURTOUT, SURTOUT PAS LIRE de Sophie Laroche. Les récits audios de Dominique Demers constituent un outil motivant et stimulant pour introduire les enfants dans l’univers du livre.

Suggestion de lecture : LE PETIT MOZART, BD de William Augel

Écrivaine, conférencière et formatrice, Dominique Demers a signé plus de 50 œuvres de fiction pour enfants, adolescents et adultes. 

Fruit de trente années d’expérience sur le terrain, Dominique Demers livre, en 2009, l’œuvre d’une vie : AU BONHEUR DE LIRE. Sous-titré Comment donner le goût de lire à son enfant de 0 à 8 ans, l’ouvrage livre de précieux conseils aux parents et éducateurs. Cette même année, madame Demers reçoit le prix Raymond Plante soulignant un engagement remarquable envers la littérature jeunesse.

 ÉGALEMENT À LIRE OU À ÉCOUTER

Bonne écoute
Claude Lambert

FIFI BRINDACIER, le livre d’ASTRID LINDGREN

*Regardez-moi un peu le plancher de la cuisine!…Fifi
fit bouillir une grande bassine d’eau qu’elle renversa
sans cérémonie sur le plancher de la cuisine. Puis elle
ôta ses grandes chaussures et les déposa sur la planche
à pain. Puis elle attacha deux grosses brosses à lessiver
à ses pieds nus et patina sur le plancher-splash, splash!*
(Extrait : FIFI BRINDACIER, Astrid Lindgren, Hachette-livre, 1995,
réédition et traduction, Hachette-livre, 2007, num., 90 pages.)

FIFI BRINDACIER est une enfant hors du commun. C’est une petite fille rousse de 9 ans, intelligente, énergique, audacieuse et astucieuse. Elle est aussi dotée d’une extraordinaire force physique. Elle vit avec monsieur Dupont, ainsi qu’un petit singe et un cheval. Fifi a aussi deux amis qui habitent la maison voisine : Tommy et Annika qui sont impressionnés par Fifi car elle n’a pas d’heure pour se coucher et  fait tout ce qui lui plait. Fifi est attachante et a un irrésistible petit côté irrévérencieux.  FIFI BRINDACIER nous entraîne dans ses aventures où la fantaisie côtoie la réalité.

Fififolotte Victuaille Cataplasme Tampon
fille d’Efraïm Brindacier
*Dans l’univers bien sage de ce que l’on appelait
alors la «littérature enfantine», le personnage
si neuf et si exceptionnel qu’était Fifi
Brindacier, libre, primesautier, imprévisible,
faisait irruption avec une joyeuse hardiesse.
Ce fut un coup de vent émoustillant.
(Extrait : FIFI BRINDACIER, avant-propos de l’éditeur)

FIFI BRINDACIER est connue dans le monde entier. Elle amuse et fait rire les enfants et les nombreuses rééditions permettent aux enfants d’aujourd’hui de faire connaissance avec la petite suédoise. Je suis sûr que les enfants se régaleront des aventures de FIFI.

Pour ce qui est des adultes, je vous préviens qu’il est de loin préférable de lire ce livre avec les yeux et le cœur d’un enfant. Sinon, ça risque de vous déplaire ou tout au moins de vous faire trouver le temps long.

Pour comprendre le sentiment des enfants à l’égard de FIFI BRINDACIER, je me permets de décrire FIFI avec mes yeux d’adulte : FIFI a 9 ans, sa mère est morte et son père a fait naufrage quelque part. Elle vit donc seule…eh oui…à 9 ans, dans la villa familiale.

Elle fait ce qui lui plait, quand ça lui plait, ne va pas à l’école, éducation déficiente, arrogante avec les adultes, propos incohérents, indépendante et riche, son père lui ayant laissé un plein coffre de pièces d’or.

Elle vit avec un cheval et un singe et est proche de ses deux jeunes voisins Tommy et Anika. Elle est excentrique, insouciante et mal élevée. Enfin, FIFI est dotée d’une force physique surnaturelle. Elle a aussi de belles qualités : elle a beaucoup d’imagination, c’est une petite fille très généreuse, elle est aussi courageuse, énergique et volontaire.

Par défaut, les enfants sont peu soucieux des règles, des consignes et de l’étiquette. Ce phénomène se résorbe pendant un processus normal d’éducation mais entre-temps, les enfants ont des tendances anti conformistes. On comprend un peu mieux maintenant pourquoi FIFI BRINDACIER est appréciée des enfants du monde entier.

FIFI BRINDACIER a été publié en 1945 en Suède. C’était une époque où la littérature enfantine avait besoin d’être dépoussiérée, modernisée, où on voulait servir aux enfants autre chose que des contes.

Astrid Lindgren a imaginé un jeune personnage, féminin, capable d’en montrer aux garçons, qui défie le conformisme et se moque des adultes. Il n’en fallait pas plus pour que la popularité de FIFI gagne l’Europe, puis le monde entier.

C’est probablement la raison pour laquelle l’œuvre a été inscrite dans le top 100 des meilleurs livres à vie et dans l’édition de Peter Boxall des *1001 LIVRES QU’IL FAUT AVOIR LUS DANS SA VIE*.

Personnellement, je n’ai pas été emballé par FIFI BRINDACIER, ni par le livre ni par la série télévisée que j’ai eu l’occasion de regarder pendant mon adolescence. Peut-être suis-je trop conformiste, mais une petite fille de 9 ans qui peut lever un cheval, marcher aisément sur un fil de fer, qui vit seule, qui ne va pas à l’école, qui est capable d’envoyer promener les adultes et qui est affublée de deux tresses plus que voyantes qui me donnaient l’impression d’être tenues par des broches…un petit air punk…tout ça est un peu trop surréaliste pour moi dans le cadre d’une littérature enfantine.

Mais il est évident que les enfants ne voient pas ça du même œil si je tiens compte de l’accueil extraordinaire qui a été réservé à FIFI BRINDACIER de par le monde. Je dois tenir compte aussi du fait qu’Astrid Lindgren a reçu en 1958 le prix Hans Christian Andersen qui est presque l’équivalent d’un prix Nobel en littérature pour sa contribution durable à la littérature enfantine qui s’est vue d’une certaine façon révolutionnée.

C’est donc une lecture sortie des sentiers battus qui est proposée aux enfants avec FIFI BRINDACIER qui fait peur aux garçons et qui projette les petits lecteurs dans un monde de fantaisie et d’humour.

Astrid Anna Emilia Lindgren, née Ericsson (1907-2002) était une écrivaine suédoise, romancière, scénariste et auteure d’ouvrages pour les enfants. Elle s’est fait connaître dans le monde entier par ses personnages originaux, à la fois attachants et impertinents : Zozo la Tornade, Karlssom Pa taket, et bien sûr, la plus connue : FIFI BRINDACIER par laquelle elle a largement contribué à donner un nouveau souffle à la littérature pour enfants. Lindgren a créé FIFI BRINDACIER alors que sa fille était atteinte de pneumonie. Elle fera par la suite l’objet d’un roman publié en 1945. En 2003, le gouvernement suédois crée un prix portant son nom : le Prix commémoratif Astrid Lindgren 

FIFI BRINDACIER À L’ÉCRAN

                
                   1                                              2                                            3

PIPPI LANGSTRUM est une série télévisée germano-suédoise traduite sous le titre de FIFI BRINDACIER (photo 2) réalisée par Olle Hellboom et diffusée en 13 épisodes en 1969 sur la chaîne suédoise SVT, puis par la suite, dans les années 70 pour la francophonie.

Par la suite, une série d’animation (photo 1) de 26 épisodes de 26 minutes a été diffusée en première au Canada en 1998, puis rediffusée à plusieurs reprises sur Teletoon. Enfin, le film (photo 3) réalisé par Olle Helboom est sorti le premier janvier 1970, toujours avec Inger Nilsson dans le rôle de FIFI BRINDACIER, personnage éponyme d’Astrid Lindgren.

Inger Nilsson à l’âge de 10 ans en pleine gloire, puis à l’âge de 57 ans. On la voit encore régulièrement à la télévision suédoise.

Bonne lecture
Claude Lambert
Le dimanche 6 mai 2018