Le scandaleux Héliogabale d’EMMA LOCATELLI

Empereur, prêtre et pornocrate

*Un seul mot et tu peux faire tomber toutes ces têtes.
Tu es l’empereur.
Il se souvint alors de tous ceux qu’il avait raillés et
humiliés au cours de ses banquets, victimes tremblantes
et pathétiques de ses farces cruelles.*
(extrait LE SCANDALEUX HÉLIOGABALE, Emma Locatelli,
Nouveau Monde éditions, 2006, num. 510 pages)

Rome, en 217 de l’ère chrétienne. Varius devient empereur. Adorateur mystique d’une obscure divinité orientale appelée l’Elagabal solaire, il prendra le nome de HÉLIOGABALE. Ainsi commence le règne qui durera un peu moins de quatre ans d’un monstre homosexuel, travesti, débauché, excentrique et cruel, totalement dépourvu d’empathie et de toutes morales. Dans son livre, Locatelli décrit toute la démesure de ce jeune homme âgé de 14 ans au début de son règne…le règne décadent d’un couronné perturbé, capricieux, instable et immature, exécré par le Sénat et l’armée. L’empire romain n’aura jamais connu pire… 

Fou à attacher…
*Jamais je n’aurais pu me décider à écrire la vie
d’Héliogabale Antonin, qui fût aussi appelé Varius,
et à faire connaître au monde que les romains ont
eu pour prince un pareil monstre, si déjà avant lui
ce même empire avait eu les Caligula,  les Néron et
les Vitellius.
(Aelius Lampridius, historien, contemporain de Dioclétien et
Constantin le Grand. Bibliothèque latine, HISTOIRE AUGUSTE
tome 2, seconde série.  Remacle.org )

Héliogabale ou Élagabal est empereur romain de 218 à 222 sous le nom de Marcus Aurelius Antoninus (Héliogabale Antonin). Il nait, vers 203, à Émèse, en Syrie. C’est le fils de Julia Soemias et de Varius Marcellus

HELIOGABALE est un roman historique…une histoire tellement incroyable que j’ai dû consulter les différents textes, récits et analyses issus des bibliothèques latines et grecques sur la vie et le règne de Marcus Aurelius Antoninus dit Héliogabale afin de m’assurer de la crédibilité du roman d’Emma Locatelli.

Effectivement, le roman est crédible, je dirais même que Locatelli a fait preuve d’une certaine retenue, évitant un penchant disons trop croustillant et spectaculaire, misant davantage sur la cruauté et la violence psychologique exercée par le jeune Héliogabale et là encore, l’auteure n’a pu éviter des passages choquants allant jusqu’à soulever le cœur par moment.

Cela dit, Emma Locatelli nous raconte l’histoire d’un inimaginable monstre : Marcus Aurelius Antonius, devenu le 29e empereur de l’empire romain à l’âge de 15 ans, un garçon dégénéré, apathique, capricieux, cruel, mentalement instable et misanthrope endurci.

Non seulement il rejoint les tyrans qui ont ensanglanté l’histoire de l’empire, tels Néron, Caligula, Tibère et Dioclétien mais il les dépasse largement par le raffinement de sa cruauté et de son despotisme. Heliogabale n’avait de respect ni pour la vie, ni pour les lois, ni pour la tradition.

De plus, il était manipulable et à ce titre, les femmes de son entourage, sa mère, sa grand-mère et sa tante s’en sont servi pour leurs basses ambitions. Bien sûr, elles n’avaient pas prévu perdre le contrôle d’un être aussi fourbe et avide. L’atmosphère de la Cour était carrément pourrie et l’empire en souffrait.

C’est un bon livre qui lève le voile sur un sale moment de l’histoire…l’auteure décrit sans concession le règne d’un enfant-roi dominé par la débauche et la démesure. La plume est habile et pousse le lecteur à se demander jusqu’au ira l’empereur fou et décadent. Il est par conséquent difficile de fermer le livre sans l’avoir terminé. C’est un livre violent, une histoire que je ne conseille pas aux âmes sensibles d’autant qu’elle est historiquement vraie.

J’ai senti que l’auteure ne porte pas de jugement. Elle rapporte, tout simplement, durement, mais objectivement, allant même jusqu’à préciser dans son prologue que si des empereurs ont souillé le nom de Rome par leur cruauté et leur fourberie tels Héliogabale, Néron, Caligula et Commode, d’autres furent des législateurs et des administrateurs sages et avisés, tels César Auguste, Vespasien, Trajan, Marc-Aurèle pour ne nommer que ceux-là.

Bien que ce ne soit pas dramatique, ce qui manque le plus à cet ouvrage est un développement sur la mentalité de l’époque car je dois le confesser, j’ai beaucoup de difficulté à saisir la réalité culturelle de l’époque des empereurs romains.

Je me pose encore les mêmes questions : comment pouvait-on permettre à un enfant de régner sur un aussi vaste empire sans régence sérieuse et surtout, comment a-t-on fait pour tolérer pendant trois ans un être aussi brutal, cruel et incompétent?

Un livre dur, déroutant mais fascinant…

Suggestion de lecture : BORGIA, de Michel Zévaco

Emma Locatelli est française. Femme de lettre, romancière et enseignante, elle partage son temps entre l’écriture et son métier d’enseignante. Outre la biographie romancée d’Héliogabale, elle a aussi écrit un thriller historique : MALEFICUS qui évoque une affaire de sorcellerie au XVIIe siècle et son roman LES HAINES PURES (roman historique sur l’après-guerre et ses blessures) sorti en 2013 chez Albin Michel a reçu le prix des lecteurs du Festival du Livre de Mouans Sartoux ainsi que le prix Coup de Cœur de la 25e heure du Livre du Mans

BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
NOVEMBRE 2015