Les malheurs de Sophie

Commentaire sur le livre de
LA COMTESSE DE SÉGUR

*On n’avait jamais vu un enterrement plus gai. Il est vrai que la morte était une vieille poupée, sans couleur, sans cheveux, sans jambes et sans tête, et que personne ne l’aimait ni ne la regrettait. La journée se termina gaiement ; et, lorsque Camille et Madeleine s’en allèrent, elles demandèrent à Paul et à Sophie de casser une autre poupée pour pouvoir recommencer un enterrement aussi amusant. *

Extrait : LES MALHEURS DE SOPHIE, par la Comtesse de Ségur. Publié à l’origine chez Hachette en 1858, collection rose. Réédité plusieurs fois. Pour la présente, CreateSpace éditeur, 2013, 88 pages. Édition numérique libre de droit, 152 pages. Version audio : Audiolud éditeur, 2020, narratrice, Lucille Delanne, durée d’écoute, 3 heures 13 minutes. Disponible en Bd chez Glenat éditeur, 2021, 56 pages. Littérature jeunesse.

Précurseur de la littérature pour enfants

Je lisais récemment sur internet un dossier littéraire qui réactualisait les écrits de la comtesse de Ségur, qualifiant son œuvre d’indémodable. S’il est vrai que la comtesse de Ségur fut précurseur de la littérature moderne pour enfant, je suis heureux de constater que les thèmes qu’elle développe ont été mis au goût du jour par nos auteurs contemporains. L’œuvre de la comtesse a vieilli, il faut bien le dire.

J’ai moi-même lu LES MALHEURS DE SOPHIE quand j’étais à l’école primaire. Je me rappelle que le livre m’avait atteint. Je l’avais apprécié car il correspondait parfaitement aux courants sociaux de l’époque qui mettaient surtout les garçons en valeur. Le machisme couvait.

En effet, Sophie est une petite fille de quatre ans, caractérielle, égoïste, colérique et qui accumule les gaffes et les bêtises parfois cruelles. Le deuxième héros du petit roman est son cousin, Paul, un petit garçon bon, doux, facile et agréable à vivre. Sophie énerve tout le monde et tout le monde magnifie Paul. Classique d’un temps révolu, du moins pour les occidentaux.

Donc par curiosité et soixante ans plus tard, j’ai relu LES MALHEURS DE SOPHIE. J’ai aussi écouté la version audio narrée par Angèle Coutu. J’ai relevé des irritants comme par exemple le niveau de langage de Sophie, 4 ans, beaucoup trop haut perché pour être vraisemblable. L’imagination de ses bêtises est aussi poussée. Il eut été inadmissible que mes parents m’aient laissé jouer avec un couteau et encore moins boire du vin, entre autres.

LES MALHEURS DE SOPHIE est un livre du XIXe siècle et se cantonne encore au XIXe siècle. Toutefois, l’œuvre m’a encore atteint, mais pour des raisons différentes.

L’histoire de Sophie est porteuse de réflexions sur de nombreux thèmes qui ont conservé toute leur actualité : sur les personnes qui ont un irrésistible besoin d’avoir l’attention des autres par exemple, l’inutilité des châtiments corporels, l’équité et l’égalité entre garçons et filles, la place des femmes dans la Société.

L’ouvrage porte également à réfléchir sur des troubles qui n’étaient pas identifiés à l’époque mais qui sont courants aujourd’hui comme les déficits d’attention et l’hyperactivité. C’est un concept d’éducation à parfaire qui sous-tend l’œuvre de la Comtesse de Ségur.

LES MALHEURS DE SOPHIE est un récit intéressant, d’autant qu’il est autobiographique. Il est aussi divertissant même si l’imagination de Sophie est parfois poussée. Je pense qu’on peut faire confiance à l’intelligence des enfants de 7 ans et plus pour faire la part des choses.

Suggestion de lecture : UN VOISIN ÉTRANGE, de Florian Dennisson


Après avoir épousé le comte Eugène de Ségur
Sophie Rostopchine devient
LA COMTESSE DE SÉGUR

Bonne lecture
Bonne écoute

Claude Lambert
le samedi 7 juin 2025