MAFIA INC.

Grandeur et misère du clan sicilien au Québec

Commentaire sur le livre d’ANDRÉ CÉDILOT ET ANDRÉ NOËL

*L’écoute électronique étalait au grand jour les graves dissentions entre mafiosis calabrais et siciliens. Ces révélations connurent un dénouement sanglant alors qu’éclata une série de règlements de compte qui culminèrent avec l’exécution spectaculaire en janvier 1978 de Paolo Violi. *

(Extrait : MAFIA INC. André Cédilot et André Noël, version audio, Vues et voix éditeur. À l’origine, Les Éditions de l’Homme, 2020. Durée d’écoute : 20 heures 51 minutes. Narrateur : Marco Calliari)

Montréal, 1978. Alors que survient l’assassinat du parrain calabrais Paolo Violi, nul ne devine l’ampleur de la «machine» mafieuse qui se cache derrière ce meurtre. Pour le clan adverse des Siciliens, c’est le début d’une épopée qui va durer plus de 30 ans. Après avoir échappé à la justice pendant des décennies, les chefs mafieux Nicolò et Vito Rizzuto sont arrêtés et condamnés au milieu des années 2000, l’un à Montréal et l’autre aux États-Unis. Or, dans le cœur du clan sicilien, frappé d’une série de meurtres stratégiques, la débandade continue.

UNE GRANDEUR QUI FINIT EN MISÈRE

C’est le fameux livre qui a inspiré le film éponyme qui a connu une notoriété intéressante. En effet, MAFIA INC. réalisé par Daniel Grou a été présenté en première au Festival international du film de Sao Paulo en 2019.

C’est un documentaire qui raconte comment deux parrains montréalais ont bâti, par la corruption et la violence un empire comptant parmi les plus puissants du crime organisé en Amérique du Nord. Tous les grands noms y passent : les Violi, Cotroni, Rizzuto, Lo Presti, Cuntrera et autres.

Les auteurs expliquent aussi les ramifications de la Mafia québécoise avec celle des États-Unis. Là aussi, les grands noms de la Cosa nostra y passent : les Genovese, Lucky Luciano, Capone, Maranzano, Anastasia et autres. J’avais au départ, une certaine connaissance de ces noms grâce au film de Terence Young sorti en 1972, COSA NOSTRA, LE DOSSIER VALACHI.

J’ai choisi la version audio mais j’ai trouvé ça long et redondant parce qu’en fait, le livre est un enchaînement de variations sur le même thème : meurtres, carnage, règlements de compte, guerres de gangs, vengeances, corruption, blanchiment d’argent, drogues, prostitution, paris et jeux et j’en passe…tout ça au nom du pouvoir, du contrôle, de l’enrichissement, sans oublier le Code d’Honneur, la famille et bien sûr l’omerta, à l’origine de temps de morts.

J’ai trouvé l’écoute ardue. Il y a tellement de personnages qu’on s’y perd. J’aurais souhaité un style un peu plus télégraphique avec moins de noms secondaires. La chronologie à la fin est une bonne idée. Outre le fait que le livre passe de manœuvre mafieuse en manœuvre mafieuse, je retiens de l’œuvre que dès qu’un mafioso est éliminé, il est remplacé, simplement. Le recrutement ne semble pas posé de problème. La roue tourne et le Québec n’échappe pas à cette influence.

La narration m’a posé quelques problèmes. Marco Callieri est avant tout un chanteur et spécialiste des tendances musicales émergeantes. C’est un québécois d’origine italienne. Bien qu’il ait une voix très agréable en lecture, sa narration est truffée d’erreurs de prononciation, de liaison (exemple *les cinq-z-années suivantes). L’emphase sur la prononciation des termes et noms italiens est sensiblement exagérée et souvent, la respiration se fait au mauvais endroit.

Le tout est un peu monotone et *grafigne* l’oreille. Ajoutons à cela que le sujet développé me rebute. Je voulais écouter ce livre pour comprendre le développement de la Mafia au Québec et son histoire. Cet aspect est assez bien développé mais malheureusement noyé dans un luxe de détails sur les méthodes de la mafia…violence, cruauté, intimidation, extorsion et élimination. Bref, cet ouvrage ne m’a pas vraiment emballé et j’ai abandonné l’idée de regarder le film issu de ce livre.

Suggestion de lecture : LES GESTIONNAIRES DE L’APOCALYPSE, de Jean-Jacques Pelletier

Les auteurs André Noël et André Cédilot
Photo : Les Éditions de l’Homme

Pour en savoir plus sur le journaliste André Noël, cliquez ici. Pour en savoir plus sur André Cédilot, je vous réfère aux Éditions de l’Homme. Monsieur Cédilot raconte également quelques anecdotes sur Radio-Canada.ca

Mafia inc. au cinéma

Marc-André Grondin, Gilbert Sicotte (à gauche) et Sergio Castellito (à droite) sont à la tête d’une imposante distribution dans ce film québécois réalisé en 2020 par Podz. Pour parcourir le casting complet et la fiche technique, cliquez ici.

Bonne écoute
Claude Lambert
le samedi 2 novembre 2024

LES GESTIONNAIRES DE L’APOCALYPSE

LA CHAIR DISPARUE

Commentaire sur le livre audio de
JEAN-JACQUES PELLETIER

*Quand le mépris pour la politique se généralise et que la confiance dans les institutions disparait quand les appartenances se dissolvent et que l’intérêt personnel devient la seule motivation, quand l’économie souterraine… alors une société est prête à tomber entre les mains de toutes les mafias…* (Extrait : LES GESTIONNAIRES DE L’APOCALYPSE, tome 1 LA CHAIR DISPARUE, réédition papier 1996, 660 pages, éditions ALIRE, publication audio : 2018, éditeur : AUDIBLE STUDIO, durée d’écoute : 20 heures 30 pour le tome 1, version intégrale. NARRATION : JEAN BRASSARD)

1996…Pour avoir démantelé Body Store, une organisation internationale de trafic d’organes, John Paul Hurtubise a subi de terribles représailles : ses enfants ont été « vidés » de tous leurs organes et ses proches, menacés de mort. 1998… Souffrant du syndrome de « personnalités multiples », Hurtubise, devenu Paul Hurt grâce à l’Institut, se terre dans la région de Québec où il tente d’oublier le passé.

Mais voilà : un journaliste offre son cœur – dans une glacière ! – à l’une de ses amies, un artiste fou se met à sculpter dans l’humain, un réseau d’extracteurs sillonne les rues de la ville… Body Store renaîtrait-il de ses cendres ? Les mafias s’unissent à l’échelle mondiale, et si personne n’intervient, elles risquent de prendre le contrôle de la planète entière.

VERS UNE MAFIA GLOBALISÉE ?
*Je sais que la dignité n’est pas indispensable
dans le métier d’ordure, que c’est même un
handicap mais bon…vous essaierez de faire
un effort*
(Extrait)

LA CHAIR DISPARUE est une longue histoire qui a nécessité plus de 20 heures d’écoute et encore, ce n’est que le premier tome d’une longue saga, une tétralogie en fait. Dans ce récit deux entités s’opposent, s’entredéchirent et s’entretuent.

D’une part, il y a le consortium : un rassemblement de groupes mafieux qui travaillent à mondialiser la mafia créant un gouvernement parallèle tellement puissant qu’il deviendrait intouchable, inatteignable : *Sans qu’ils s’en doutent, les gens se retrouveraient bientôt avec l’équivalent mondial des Nations-Unies du crime organisé.> (Extrait)

l’enjeu principal qui semble vouloir sceller les alliances est le trafic d’organes. La coordinatrice de ce jeu infernal est celle qu’on appelle LA DÉLÉGUÉE spéciale, femme froide et sans conscience également inatteignable.

D’autre part, il y a L’INSTITUT qui travaille à contrecarrer l’expansion de la mafia et qui est dirigée par une femme énigmatique et extrêmement puissante, également inatteignable appelée *f*. Le pivot de l’histoire est celui qui a démantelé BODYSTORE, une organisation internationale de trafic d’organes qui veut reprendre du service : John Paul Hurtubise.

Ce dernier ayant subi la vengeance du consortium a subi un choc et a développé le syndrome de dissociation. Une vingtaine de personnalités se bousculent en lui. L’Institut a caché Hurtubise, devenu Paul Hurt dans la région de Québec. Sans le savoir, Hurt se prépare à reprendre du service.

Le consortium se tire dans les pieds à cause de personnages cupides, ambitieux et retors. Un personnage entre autres, un médecin psychopathe, fou à lier qui a inventé L’ART ORGANIQUE en créant des expositions d’un barbarisme innommable à partir de corps humain enlevés et séquestrés : le corps-spectacle qui magnifie les corps dénaturés, désarticulés par les mutilations, les greffes chaotiques, la torture et autres horreurs.

Dans ce premier tome, l’auteur ne fait pas dans la dentelle. La description est directe, tranchante. Pas de censure, pas de ménagement. Dans le récit, il y a beaucoup d’action en parallèle. Le fil conducteur est tentaculaire et c’est un peu difficile à suivre.

L’auteur ne se gêne pas pour y aller de ses petites observations sur la capacité des humains à être pervers mais ça n’ajoute pas grand-chose à un récit déjà chargé de passages plus ou moins nécessaires comme les extraits du traité de l’art organique d’Arto, un détraqué qui valorise la dénaturation du corps humain pour réinventer l’art.

Toutefois, le volume a des points très forts; Paul Hurt qui essaie de composer avec toutes les personnalités qui sommeillent en lui. Je me suis attaché à ce personnage courageux et tout son monde…du 20 pour un. Fort, original et profond. J’ai beaucoup appris sur le syndrome de la personnalité multiple.

J’ai aussi trouvé remarquable et touchant le dialogue entre Hurt et un de ses personnages, appelé le VIEUX à la fin du récit. Pelletier a quand même réussi à faire diversion en créant des personnages un peu burlesques qui viennent alléger le récit. Par exemples, les policiers Grondin et Rondeau.

Le premier étant affublé d’une grattelle quasi permanente et l’autre qui appelle son officier supérieur le chef ordure…toléré parce qu’ici la grossièreté est induite par le syndrome de la Tourette. Ils sont drôles, attachants, pas tout à fait en accord avec l’éthique policière. Mais j’étais toujours heureux de la retrouver eux et les JONES 1, 2 3 et ainsi de suite, des anges de la bonne cause dirigés par le frère Guidon. C’est une trouvaille.

Dans l’ensemble, le roman est âpre, touffu, fil conducteur instable. Assez fluide. D’ailleurs le dernier quart du récit m’a rendu addictif.  En passant, j’ai adoré la narration de Jean Brassard à cause de son harmonique vocale particulière mais surtout à cause de sa capacité à moduler sa voix en fonction de chacun des principaux personnages. C’est parfois subtil, c’est surtout très efficace.

Détenteur d’une maîtrise en philosophie de l’Université Laval Jean-Jacques Pelletier  a enseigné la philosophie de 1970 à 2004 au cégep Lévis-Lauzon. Attentif à l’univers des médias, des arts et de l’informatique, les romans de Jean-Jacques Pelletier s’intéressent de façon particulière à l’embrigadement idéologique, à la manipulation des individus et des foules ainsi qu’aux différentes formes d’exploitation. La passion de l’auteur pour le thriller et la géopolitique ne l’a pas empêché d’explorer l’univers du fantastique – à preuve « la Bouche barbelée », nouvelle qui remportait en 1993 le concours de nouvelles de Radio-Canada.

Pour consulter la bibliographie de Jean-Jacques Pelletier, cliquez ici.

Suggestion de lecture, du même auteur : DIX PETITS HOMMES BLANCS

Voici comment est présenté Jean Brassard sur voices.com : Baryton chaud, profond, romantique, affirmé, amical, animateur sportif, sexy, ludique, jeune, acteur de caractère…, chanteur, narration… Accents français ou canadiens-français… Connaissance pratique de l’espagnol, de l’allemand…Compétences spéciales : Animation, Livres audio…Vidéo Internet, Bande annonce, Baladodiffusion, Radio, Téléphone, Télévision, Jeux vidéo. Expérience : 30 ans d’expérience dans le domaine de la voix off…

Bonne lecture
Claude Lambert
le samedi 25 juillet 2020