FINGERS

Une aventure de Lucky Luke par
Lo Hartog Van Banda et Morris

Extrait : LUCKY LUKE FINGERS, scénario : Lo Hartog Van Banda, dessins : Morris. Lucky comics éditeur, 2001, bande dessinée, 47 pages. Numérique et papier.


Lucky Luke apprend que cinq (!) Dalton viennent de s’évader. En effet, un habile prestidigitateur du nom de Fingers a participé à l’évasion des Dalton mais c’est aussi lui qui va permettre de les renvoyer en prison. Se prétendant injustement condamné, ce « gentleman cambrioleur » a besoin de l’appui de Lucky Luke pour son recours en grâce. Il obtiendra gain de cause mais Lucky Luke gardera un œil sur lui car ses mains échappent à tout contrôle !

 

Le parfait héros

J’ai adulé Lucky Luke pendant de nombreuses années. Je l’aime toujours mais mon intérêt a baissé d’un cran. Comme tous les inconditionnels de l’homme qui tire plus vite que son ombre, j’ai dû subir deux sevrages avec cette série de BD qui réussit à garder la tête hors de l’eau. D’abord, Morris a troqué la cigarette pur une brindille de paille. Je peux comprendre Morris, il ne faisait que devancer les exigences de la loi Elvin, adoptée au début des années 1980 en France et encadrant sévèrement la publicité sur le tabac. C’est un détail, loin d’être malsain mais je ne m’y suis jamais fait.

Autre sevrage important, le décès de Goscinny en 1977. Depuis ce jour, la série a perdu un peu de ses étincelles et a commencé à vieillir à mes yeux. La subtilité et la spontanéité de Goscinny manquent cruellement au scénario de FINGERS. Ça reste une bonne histoire, drôle par moment, pas désagréable à lire au contraire. Malheureusement, le personnage de Lucky Luke s’est affadit avec le temps. Il reste stoïque, sûr de lui mais il est devenu prévisible et sans éclat. Toujours vedette, mais d’une série essoufflée. Dans FINGERS, Luke est plus effacé, trop,  en fait, par rapport au prestidigitateur à qui le scénariste a donné des pouvoirs surdimensionnés

Morris, très différent aussi de son prédécesseur Uderzo a fait quand même de son mieux pour rehausser le scénario de Van Banda et a réussi à rendre l’ensemble plus rigolo. L’histoire de Lucky Luke est quand même extraordinaire.

Plus de 80 albums. Malgré une certaine baisse d’intérêt, j’ai apprécié la lecture de FINGERS. Je sens que je n’en ai pas terminé avec le <poor lonesome cowboy> car j’aime particulièrement l’environnement dans lequel il évolue, une espèce de carricature du far ouest qui m’a toujours fait rire.

À gauche, le scénariste Lo Hartog Van Banda, à droite, le dessinateur Morris, créateur de la série LUCKY LUKE

BONNE LECTURE
CLAUDE LAMBERT

Le vendredi 17 janvier 2025

 

300 MINUTES DE DANGER, de JACK HEATH

*La peur s’installa en Nassim. -Vous n’êtes pas
ici pour réparer la télévision ? -Tu perds ton
temps. Bientôt, l’agent neurotoxique que tu
viens de boire va bloquer les signaux qui vont
de ton cerveau à tes organes…*
(Extrait : 300 MINUTES DE DANGER, Jack Heath,
Éditions ADA, 2018, édition de papier, 210 pages
extrait de la nouvelle POISON)

Ce livre est un recueil de dix histoires fictives d’enfants braves vivant chacun une situation dangereuse et ayant trente minutes pour s’en échapper. Par exemple, l’histoire de George, coincé dans un avion en chute libre sans moteur et sans pilote. Ou Mila, recouverte de déchets radioactifs et dont la combinaison de sécurité commence à manquer d’oxygène. Chaque histoire nécessite environ trente minutes de lecture. Les titres : L’école de snow, sous-humain, famille nucléaire, coffré, gelées, inferno, le viroumouche, train en cavale, poison et course vers l’espace. Trente minutes, dix histoires, 300 minutes de danger.

L’ABC DE L’ÉVASION
*Le gorille claqua le coffre qui se referma
avec un énorme <fouish>. Kim se trouva
coincé dans la noirceur et la
claustrophobie s’installa. *
(Extrait : 300 MINUTES DE DANGER, COFFRÉ)

Comme on l’a vu plus haut, ce livre regroupe dix nouvelles. Ces récits ont plusieurs points en commun : ils sont limités à trente minutes de lecture chacun. Chaque texte présente un compte à rebours de temps de lecture. Dans chaque histoire, un enfant est confronté à une situation dangereuse. Les parents sont présents dans plusieurs récits, plus ou moins effacés dans d’autres. L’évasion est le thème général par le biais de la débrouillardise et de l’ingéniosité.

Un seul thème est récurrent pour quelques nouvelles : le virumouche, un virus apocalyptique foudroyant et mortel, véhiculé par des mouches et hautement contagieux. Pour chaque histoire, les enfants ont trente minutes pour se sortir d’une situation potentiellement mortelle.

*Le virus le tuait. Il ne lui restait pas beaucoup de temps. Il serra sa prise sur la barre de remorquage. Le métal glissait entre ses mains en sueur. S’il relâchait sa prise, il était mort. La route n’était qu’un flou sous les roues de la planche à roulettes. (Extrait)

Le principal point positif de ces histoires est leur intensité dramatique avec suffisamment d’émotion pour capter l’attention du jeune lecteur, de la jeune lectrice. Mon récit préféré s’intitule LE VIRUMOUCHE car il démontre avec une étonnante précision la métamorphose des gens lorsqu’ils sont confrontés à un danger aussi sérieux que l’exposition à un virus mortel.

Parmi les réactions, je note disparition de toute empathie et charité, refus de secours, violence potentielle et même le vol de vaccins pour les revendre à des prix prohibitif, installation graduelle de l’anarchie dans le pire des cas. Une histoire qui n’est pas sans rappeler l’explosion du sida, devenu pandémique à la fin des années 70.

C’est toute une société qui est abaissée par la peur : *Tony, ahuri, se trouvait maintenant seul dans le square déserté. Il ne pouvait croire à quelle rapidité les gens étaient devenus comme des animaux. Comment Shane s’était retourné contre lui sans hésiter un seul moment. * (Extrait)

Malheureusement, il y a des irritants, le principal étant la qualité des finales. Pour chaque texte, la finale est bâclée, expédiée et extrêmement limitée. Tout ça afin de respecter un temps de lecture qui ne dépasse pas trente minutes. C’est très dommage car la plupart des textes sont bien bâtis. Je trouve ça ordinaire et simpliste, sacrifier la qualité du texte au profit du temps de lecture. La présence d’un compte à rebours de lecture à chaque page m’a irrité plus qu’autre chose.

Je n’ai jamais compté mon temps de lecture et je ne crois pas que ce soit une bonne chose d’encourager les jeunes lecteurs et lectrices à limiter le leur. Peut-être que l’auteur a voulu faire original, ou son éditeur. En ce qui me concerne, terminer un récit par une queue de poisson pour ne pas dépasser trente minutes n’a rien d’original. Heureusement, tous les textes comportent des éléments grâce auxquels les jeunes pourront se reconnaître, l’héroïsme étant omniprésent dans tous les textes.

L’auteur Jack Heath a dû trouver comme une espèce de filon dans ce type de développement littéraire car il a publier également 400 minutes de danger et 500 minutes de danger et que ces livres sont en général de bons vendeurs. J’admets donc que le style plait jusqu’à un certain point.

Le chrono n’est pas une nouveauté en littérature. Je pense à la collection 30 MINUTES POUR SURVIVRE qui va un peu plus loin sans oublier 30 MINUTES CHRONO, une approche soi-disant révolutionnaire pour cuisiner vite et bien. Comme je le dis souvent, la balle est dans le camp des lecteurs. Il y a du bon dans ce livre. Suffisamment pour la note de passage. Alors je vous suggère de suivre votre instinct de lecteur/lectrice. Vous pourriez aimer.

Suggestion d’écoute : DERNIÈRE TERRE, série audio de Clément Rivière

Jack Heath est un écrivain australien né à Sydney en 1986. Il a publié son premier roman lorsqu’il était adolescent. Il est maintenant l’auteur primé de quatorze romans pour jeunes. Marié, un garçon. Habite Canberra en Australie.

Bonne lecture
Claude Lambert
Le samedi 17 avril 2021