CRÉATURE, le 6e livre de JOHN SAUL

Gratifié d’une promotion au travail, Blake Tanner s’installe dans la petite ville de Silverdale avec sa femme Sharon et ses enfants Mark et Kelly…cadre paisible, ville propre voire impeccable et où il ne se passe à peu près jamais rien…une ville où le sport règne en roi et maître, particulièrement le football, l’équipe locale faisant la pluie et le beau temps. Tout est parfait dans cette ville…en fait trop parfait…

Sharon développe des doutes sur ce cadre enchanteur et commence à se poser des questions sur des hurlements de douleur et de rage qu’on entend dans la nuit et sur ce qu’on fait dans les laboratoires d’une entreprise qui a tellement à cœur le bien-être de ses employés que c’est trop beau pour être vrai. 

Dans les faits, la petite ville modèle cache un secret troublant. La vie heureuse d’une petite famille sympathique pourrait bien se transformer en cauchemar.

J’ai lu plusieurs critiques négatives sur ce livre entre autres parce qu’il comporte du déjà vu, ce qui n’est pas entièrement faux. Toutefois, je vais aller à contre-courant aujourd’hui parce que ce livre m’a plu. Il se lit vite et bien grâce à l’excellente traduction de Dominique Wattwiller mais aussi parce que l’écriture est simple et directe. En effet, dans son livre, Saul va droit au but…il entre rapidement dans le vif du sujet et maintient une tension constante.

Bien que l’ouvrage ait un petit côté prévisible, il laisse peu de répit et aboutit à une conclusion originale. De plus, l’auteur a créé des personnages attachants…

Je pense en particulier auzx les mères qui passent un sale quart d’heure dans cette histoire où tout est trop parfait au départ et où on fait du sport une étrange obsession et qui amène la famille Tanner à déchanter rapidement.

Évidemment, c’est vite lu, mais je pense que vous allez passer un bon moment.

Suggestion de lecture : CELUI QUI BAVE ET QUI GLOUGLOUTE de R.C. Wagner

JAILU
Décembre 2012

(En Complément…)

RUMEURS et légendes urbaines, d’ALBERT JACK

Le livre dont je vous parle aujourd’hui n’est pas un chef d’oeuvre, et je ne le qualifierais même pas d’ouvrage. Il s’agit de RUMEURS ET LÉGENDES URBAINES de Albert Jack, un petit recueil de légendes urbaines pour lesquelles l’auteur donne tantôt le maigre résultat de ses recherches, tantôt son commentaire personnel.

Je vous partage cette lecture car je l’ai tout de même trouvé divertissante. Les légendes urbaines sont un peu comme des blagues: des histoires courtes qui retiennent l’attention et dont la chute est inattendue (ou presque). Plusieurs types de légendes sont abordés: des histoires d’épouvantes aux  anecdotes embarrassantes en passant par les histoires obscures de personnalités célèbres.

Comme je disais, il ne s’agit que d’un recueil. Il y a très peu de mythes démystifiés ou dont l’origine est détaillée. Et soyons franc, une recherche google suffit à trouver une source encore plus riche de légendes urbaines. Je pense à un vieux site qui date du début du siècle et qui est encore en ligne: http://pages.infinit.net/ginov/legende.htm (allez y jeter un coup d’oeil, c’est difficile de décrocher!)

Ce que j’aimerais maintenant, c’est un livre qui explique, décortique, définit, détaille le phénomène des légendes urbaines, en donnant des exemples. Bref j’aimerais un véritable ouvrage sur ce sujet qui m’intéresse beaucoup.

Pour finir, je peux vous recommander l’achat de RUMEURS ET LÉGENDES URBAINES, car même si ça ne sera pas le joyau de votre bibliothèque, il pourrait bien avoir une place de choix dans votre salle de bain!

Suggestion de lecture : PEURS SUR LA VILLE, recueil de nouvelles

Phenixgoglu
Décembre 2012

(En Complément…)

L’ORANGE MÉCANIQUE, livre d’ANTHONY BURGESS

Il serait inutile de me creuser le rassoudok à faire une interminable analyse du roman que je viens de terminer zoom, Ô mes frères. Car malgré le nadsat (argot inventé par Burgess) qui semble complexifier le récit, il s’agit d’une histoire simple, que j’ai vraiment appréciée.

J’avais été captivé par L’Orange Mécanique porté à l’écran par Stanley Kubrick, et c’est sur le tard que j’ai appris l’existence du roman. En commençant la lecture de ce dernier, je ne pouvais m’empêcher de faire des comparaisons avec le film, mais j’ai rapidement cessé quand l’incroyable univers décrit par Burgess m’a englouti. De toute façon, à quelques détails près, le film en est une fidèle adaptation.

Avant même les scènes de violence, et la psychologie déstabilisante du personnage principal et narrateur, c’est le nadsat qui est le plus frappant

. Ce langage d’inspiration anglo-russe est aussi agrémenté d’autres expressions stylisées des plus savoureuses, telles mes exquis cucuses usées pour des excuses, beuheuheuher pour pleurer. N’importe qui peut inventer des mots pour en désigner d’autres, mais ça prend un maître pour créer un langage à ce point intelligible, et ajoutant carrément une nouvelle dimension au récit.

Le roman parle d’un garçon, un voyou comme disent les Français, un jeune délinquant qui commet des vols, meurtres, viols, qui sème le désordre. Un jour l’état l’attrape et lui dit nous allons vous métamorphoser, grâce à des techniques de conditionnement Pavlovienne, de façon à ce que désormais le mal vous révulse.

Anthony Burgess , 1985

Ce qui est extraordinaire de ce roman, c’est que Burgess nous amène , sans qu’on comprenne de quelle façon au premier abord, à éprouver de la sympathie pour le narrateur et personnage principal, le jeune Alex, adepte de l’ultra-violence, manipulateur et vandale.

En y repensant bien, et aidé par la lecture d’analyses plus poussées, j’ai compris comment. Malgré son sadisme et sa cruauté, le fait qu’Alex passe de bourreau à victime, le fait qu’il s’adresse au lecteur comme à un ami et aux autres dans un parler distingué, et aussi le fait qu’il aime la musique classique contribuent à nous le faire voir sous un angle biaisé.

L’Orange mécanique est le genre de livre qu’on aime ou qu’on aime pas. Si cet article vous a intrigué ou que vous avez aimé le film culte de Kubrick, vous ne serez pas déçu par le roman.

Après la lecture, je vous recommande d’écouter le film, et finalement d’aller visionner le documentaire Il était une fois Orange Mécanique, documentaire très intéressant disponible sur les streamings et les torrents.

 voir ce qu’en pense JAILU>

Suggestion de lecture : PROIES de Mo Hayder

Phenixgoglu
Décembre 2012

LA TOUR SOMBRE, septologie de STEPHEN KING

Attends que ta légende t’ait précédé. D’autres
Que toi se chargeront de la répandre. Les idiots
ne manquent pas. Laisse-toi devancer par ta
réputation. Que grandisse ton ombre. Qu’elle
s’étoffe. Laisse-là se faire diffuse…Avec le temps,
les mots peuvent enchanter jusqu’à un enchanteur.

Le pistolero, La Tour Sombre no 1, 1993, J’ai lu

TOUR D’HORIZON

LA TOUR SOMBRE est une septologie qui m’a permis d’atteindre un peu mieux l’esprit de Stephen King. C’est une œuvre à part. Non qu’on ne reconnaît pas King, au contraire. On trouve dans LA TOUR SOMBRE de nombreux liens, et évidents encore, avec de nombreuses œuvre de KING. Pourtant, LA TOUR SOMBRE, c’est différent…comme un aboutissement où on découvre, entre autres, une symbiose parfaite entre l’auteur et ses personnages, en particulier, le personnage principal, le Héros : Rolland Deschain de Gilead, le dernier pistolero, qui rappelle un peu les personnages des films de Sergio Leone : un dur, typique du far-ouest américain et qui ne se sépare jamais de ses révolvers.

C’est une œuvre complexe, très élaborée, avec un petit quelque chose d’autobiographique et dont la réalisation a un peu souffert de procrastination…en effet, poussé au départ par sa fascination pour le Seigneur des anneaux, King a mis près de 35 ans pour réaliser LA TOUR SOMBRE. C’est très long pour un auteur aussi prolifique.

LA TOUR SOMBRE est inspirée du
Poème de Robert Browning Le Chevalier
Rolland s’en vint à la Tour Noire, publié
À la fin du dernier tome.

L’œuvre comprend donc 7 tomes :

Globalement, suite à sa rencontre avec le mystérieux homme en noir, porteur de visions d’un avenir chaotique, Rolland réalise que la Tour Sombre est malade et même en péril. La tour est un espèce de pivot central qui maintient tous les mondes en équilibre. Tous les univers sont en péril parce que la Tour est régentée par un dément qu’on appelle LE ROI CRAMOISI. Rolland entreprendra alors une quête longue et très dure : atteindre la Tour et régler le problème. Cette quête deviendra une obsession qui forcera Rolland à faire des choix très pénibles.

1)     LE PISTOLERO : C’est ici que Rolland rencontre Walter, le mystérieux homme en noir. C’est ici que Rolland décide d’entreprendre sa quête : atteindre la Tour Sombre et ramener l’équilibre entre les mondes. Il se verra attribuer trois cartes maîtresses pour l’accomplissement de cette quête.

2)     LES TROIS CARTES : Les trois cartes représentent trois personnages que Rolland devra arracher à leur monde d’origine, par le biais de portes spatio-temporelles : un toxicomane nommé Eddie, une femme aux prises avec une double personnalité nommée Suzannah et un ado nommé Jake. Ils formeront équipe avec Rolland (Ce que Rolland appelle un ka-tet) pour cheminer vers la Tour Sombre. En réalité, il sera plus compliqué de récupérer Jake. Ce n’est que dans le tome 3 que le ka-tet sera formé définitivement.

3)     TERRES PERDUES :  Ici, Rolland réussit à sauver Jake d’une mort certaine en l’arrachant à son monde pour le ramener dans le monde de Rolland. Il y parviendra en grande partie grâce à Suzannah qui devra distraire sexuellement un démon. Il s’ensuivra une grossesse qui influencera de façon importante le reste du récit. Par la suite, le nouveau Ka-tet fera la rencontre de Blaine Le Mono, un train doté d’une intelligence artificielle mais rendu fou par la dégradation de ses systèmes. Blaine menace de s’autodétruire et de tuer tout le Ka-tet si celui-ci ne réussit pas à vaincre Blaine dans un concours de devinettes.

4)     MAGIE ET CRISTAL : Dans ce tome, Rolland entreprend un long palabre. En effet, il raconte sa jeunesse à ses compagnons. Après ce discours qui dure des heures, Rolland et ses compagnons poursuivent leur quête en suivant le sentier du rayon non sans avoir déjoué le piège que leur a tendu un mystérieux personnage malfaisant : Randall Flagg. Dans MAGIE ET CRISTAL, l’auteur s’étend surtout sur la psychologie de ses personnages.

5)     LES LOUPS DE LA CALLA : Dans son cheminement sur le sentier du rayon, le Ka-tet de Rolland est intercepté par une délégation dirigée par le Père Callahan. Celui-ci demande à Rolland de les aider à combattre les Loups de Tonnefoudre, des créatures monstrueuses qui doivent bientôt venir enlever des enfants de la Calla pour les renvoyer peu de temps après à leur famille complètement décérébrés. Rolland accepte d’aider la Calla, ce qui fera faire au Ka-tet un pas de géant vers la Tour Sombre. À la fin de cet épisode, Suzannah disparaît.

6)     LE CHANT DE SUZANNAH : Les Loups de la Calla sont vaincus. Le Ka-tet doit reprendre la route non sans régler des problèmes majeurs : retrouver et récupérer Suzannah qui partage son corps avec Mia, un ancien démon, retrouver Calvin Tower, propriétaire du terrain abritant la rose qui est la représentation de la Tour dans notre monde, et retrouver un certain auteur nommé Steven King qui relate la quête de Rolland dans un livre intitulé LA TOUR SOMBRE afin de le persuader de ne pas abandonner.

7)     LA TOUR SOMBRE : après de nombreuses péripéties le ka-tet est réuni, mais péril et mort l’attendent. De nombreux devoirs sont nécessaires avant d’atteindre la tour : Mia accouche d’un monstre, il faut protéger la rose, donc la Tour Sombre elle-même, échapper aux hommes du Roi Cramoisi qui détraque les rayons de la Tour, sauver Stephen King qui est sur le point d’avoir un accident mortel (ce qui  l’empêcherait d’amener son livre LA TOUR SOMBRE à sa conclusion…inutile de dire que ce serait dramatique. Enfin, c’est au nom de ses amis morts que Rolland pénètrera enfin dans la tour.

Évidemment, ces résumés sont coupés au couteau car il serait trop long d’entrer dans les détails ici, mais ça donne une bonne idée. Il y a une grande quantité de sites qui offrent des synopsis complets. Je vous propose quelques liens à la fin de cet article.

LE MONDE À PART DE STEPHEN KING

C’est vraiment pas facile de critiquer une œuvre aussi magistrale que la Tour Sombre, mais je me lance. Pour apprécier l’ensemble, j’ai dû surmonter quelques petites manies qui m’agacent chez King, en particulier le temps et l’espace considérables qu’il investit dans la psychologie de ses personnages, spécialement dans MAGIE ET CRISTAL…j’avais parfois l’impression de me noyer dans la description des personnages, dans l’allure des décors et de l’environnement, dans la description de l’état d’esprit des héros, spécialement quand ils passent d’un monde à l’autre…pas toujours facile à suivre…je perdais le fil…il fallait parfois lire et relire. Mais j’ai été récompensé pour plusieurs raisons.

D’abord, il ne faut pas oublier que LA TOUR SOMBRE a 35 ans d’histoire. Certains chroniqueurs pensent que l’œuvre a souffert de procrastination, moi je serais plutôt enclin à penser qu’il en a bénéficié. En cours de lecture j’ai réalisé que LA TOUR SOMBRE est au Centre de l’œuvre de King. En fait la carrière littéraire de King est comparable à la TOUR SOMBRE elle-même. Si la tour est un pivot qui garde les mondes en équilibre, elle est aussi le centre référentiel de l’ensemble de l’œuvre de King car elle est liée à la plupart de ses livres, directement ou indirectement. Il me vient à l’esprit des titres comme LE FLÉAU (1978), SALEM (1975) et INSOMNIE (1994). Ce sont les exemples les plus frappants peut-être, mais pour faire bref, je crois que dans tous les livres de King, il y a un petit peu de la TOUR.

Autre élément important dans l’œuvre de King : la force de caractère de ses personnages, on s’y attache vite, même à l’imprévisible Suzannah. S’ils sont forts et racés, ils sont aussi profondément humains, même Rolland qui est probablement le personnage le plus complexe. Je pense en particulier à Jake, un jeune ado à qui on demande de *maturer* un peu trop vite. La nature même de ses personnages nous plonge et nous maintient dans l’histoire. On pense à eux, on tremble pour eux, on a de l’affection pour eux…et on espère pour eux… (attendez-vous à des moments déchirants dans le tome 7).

Mon dernier élément majeur réside dans le fait que King s’est immiscé personnellement dans son œuvre. Au départ, ça m’a agacé de le voir apparaître dans l’histoire, mais en lisant consciencieusement l’histoire, j’ai compris qu’à défaut d’être géniale, c’était une excellente idée. En effet, si King a pris autant d’années pour conclure son œuvre (35), c’est que l’histoire était en danger…le danger de ne jamais aboutir. Donc si Rolland était obsédé à l’idée de sauver la Tour, il devait forcer l’auteur à boucler la boucle….c’est bien pensé…

Enfin brièvement, malgré des longueurs et l’étendue des détails, l’écriture est vivante, les personnages intenses et dans l’ensemble, le lecteur ne peut qu’être captif…c’était mon cas.

Enfin, je rappelle que LA TOUR SOMBRE a été adapté à l’écran. Voir les détails ici.

Suggestion de lecture : LA CHAMBRE DES MERVEILLES de Julien Sandrel

Bonne lecture

Claude Lambert
Décembre 2012

(En Complément…)

LE MONDE À PART DE STEPHEN KING

Bonjour amies lectrices. Bonjour amis lecteurs.

Je vous propose cette fois la lecture d’une œuvre qui sort vraiment de l’ordinaire.

LA TOUR SOMBRE, œuvre de Stephen King en sept volumes est un long et passionnant voyage dans des mondes accessibles par des brèches spatio-temporelles…des mondes bouleversés et chaotiques.

LA TOUR SOMBRE, c’est aussi et surtout une odyssée dans l’esprit humain, une recherche constante de l’équilibre.

LA TOUR SOMBRE, c’est *L’œuvre qui explique l’œuvre*.

De tout ce qui est issu du génie de King, LA TOUR SOMBRE est vraiment un monde à part.

Je vous invite à lire mon article pour partir à votre tour à la découverte de LA TOUR SOMBRE. Il se pourrait que ça vous occupe les yeux et l’Esprit un bon moment en 2013…

Aller lire l’article LA TOUR SOMBRE DE STEPHEN KING

JAILU
DÉCEMBRE 2012

Un cadavre de classe, de ROBERT SOULIÈRES

Voici un roman jeunesse fou et niaiseux, mais dans ce que ces termes ont de meilleur! En vulgarisant, il s’agit d’un roman policier, mais il est bourré d’humour! Je le recommande grandement, surtout pour les petits lecteurs, ceux qui sont intimidés ou écœurés par le côté parfois sérieux et intello de l’univers des romans.

Si vous êtes intéressé, l’excellent compte rendu que vous trouverez ICI achèvera de vous convaincre.

Dans le complément je vous présente un extrait que j’ai trouvé particulièrement sweet!

Suggestion de lecture : CAPITAINE STATIC d’Alain M. Bergeron

Phenixgoglu
Décembre 2012

(En Complément…)

Chronos

Chronos

Les tulipes inondaient la plaine, et le soleil de midi n’avançait plus. La brise légère balayait l’herbe mais les quelques nuages ne bronchaient pas. L’odeur de la forêt me parvenait de l’horizon, emportant subtilement le bruissement des feuilles. Chaque élément grossier du décor se voyait atténué, et chaque délicatesse se rendait plus perceptible à mes sens. Tout ne restait que douceur.

Et puis l’alarme retentit. Je ne suis pas personnage ni comédien, et pourtant le décor ne s’effrite que pour laisser place à un autre. C’est le branle bas de combat dans mon cerveau. Est-ce que je m’endors, ou bien je me réveille? D’un clairon strident et intermittent, il sonne ma retraite de ces étendues paisibles. « Ta gueule Chronos! » que je hurle intérieurement. Je l’assomme d’un coup de snooze, sachant bien que le titan ne m’oublierait pas pour autant. Je suis en retard et il le sait. Ses yeux rouges indiquent 8:30AM.

Le clairon de mon cadran resonne mais je suis déjà dans la douche. Puis c’est le téléphone qui poursuit d’un son plus cinglant  C’est la job qui appel mais je peux pas répondre, je suis déjà devant le bus. Je regarde à peine le chauffeur et il me le rend bien. Où suis-je déjà? Ah oui… Il faut que je m’assois, je suis étourdis. Le bus c’est l’enfer, on doit l’attendre sinon il faut attendre le suivant, et pour sûr, le suivant se fera attendre.

L’allée empeste le stress et bien d’autres choses. Je rêve encore à mon auto quand je franchis le seuil de mon bureau. Quelques reproches puis quelques excuses, me voilà oubliant des dossiers, aveuglé par d’autres dossiers, aveuglé par leurs écritures rouges « URGENT! ».
J’ai chaud malgré la climatisation, je dois être malade. Mes collègues s’affairent et ne voient pas mon teint de neige. Je vais vomir mais le téléphone me retient. Une engueulade rapide et la ligne qui coupe. Qu’est-ce que je disais déjà? Ah oui, je suis malade. Inutile de vomir, le mal qui me ronge restera en moi. Nouvelle sonnerie, je ne veux pas, je ne veux plus, je veux retourner chez moi. Nouvelle sonnerie, je mets mon désespoir dans le tiroir et répond. Mon auto est réparée, je dois aller la chercher dès ce midi.

Le garagiste est un brave type, mais il fini a 5h, un peu comme moi. Je fais couler le café, mais je n’ai pas le temps d’y goûter  C’est l’heure de dîner  c’est le moment d’aller chercher le char. Pas le temps de manger, je dois partir tout de suite. Quelle chance qu’un repas soit si facilement déplaçable.

Encore le bus et la nausée, puis le garage m’accueille. J’encaisse le coup de la facture et je suis de nouveau sur le bitume. Libre et vivant, sur les artères bouchées. Ça n’avance pas mais je suis maître de ma ferraille.
Enfin ça débouche et c’est parti. Est ce moi qui avance à 100 ou le monde tourne au ralentit? Oui, tout défile et tout se brouille, je suis encore en retard. Qu’est ce qui m’attend? L’asphalte défile et un petit garçon sort d’une voiture rouge. Je vais trop vite et je l’écrase, puis je m’arrête: la lumière est rouge. Tout est rouge donc, ou est-ce le sang dans mon pare-brise? Qu’est ce que j’ai fais, j’en suis plus certain, je croise le regard d’une mère tétanisée. C’est vert je redécolle.
Je tourne à droite puis à gauche mais que je suis gauche! Y fallait aller tout droit.

Je change de cap maladroitement et tourne sur ma droite, même si j’ai pas le droit…Je suis en retard.

Je suis encore étourdis quand je franchis le seuil de mon bureau, le boss est là et me congédie. Je me souviens soudain des appels oubliés et voilà le téléphone qui sonne. Je répond machinalement mais il n’y a que la tonalité. Quelle folie. Mes collègues s’affairent et ne voient pas mon teint de neige. Je reprend mon désespoir dans mon tiroir et je file, croisant celui qui me remplacera.
Je suis pas un personnage, ceci ne peut être une histoire. Tout s’inscrit trop vite, même pour une main divine. Je ne peux être réel, ceci ne peut être ma vie. Tout défile trop vite pour mon cerveau déconfit.

Je reprend mon auto laquelle, il me semble, n’avait pas de rouille sur le capot au garage. Sur la route une fois de plus, je crois devenir fou, je voudrais aller chez moi, mais je crois avoir oublié ce que cela veut dire. Je ferme les yeux pour me reprendre, ce qui me fit perdre le contrôle de mon char.

Quand j’ouvre les yeux, je vois une porte. Celle du paradis? Non… Celle du Répit Piano Bar. J’ouvre et j’entre. Odeur de tabac froid, ambiance chaleureuse, banquette et table carrée, comptoirs et tabouret. Billard et alcools en tout genre, discutions animées mais discrètes, jolies femmes et gentils hommes. Tout est à la fois élégant et simple. Là, un pianiste joue des mélodies douces, accompagné d’un percussionniste qui est hors de ma vue. Cette scène aussi banale qu’extraordinaire pétrifie mes sens, puis les détend, comme un baume chauffe une plaie avant de l’apaiser.

Je m’avance tranquillement et vais m’asseoir sur une banquette. Je ressens le confort. La musique s’écoule en mes oreilles comme venue d’un oasis, et mon ouïe se sustente comme jamais. Le piano et le tambour que je cherche en vain forment le plus parfait des couples. J’ai à peine remarqué l’homme en face de moi. Il a des yeux très pâles et un air bête, toujours ahuri, avec son sourire de bébé. Il me dit quelque chose et je comprend qu’il est schizophrène.

Je m’en moque car en ses yeux je remarque une image, un sentiment, quelque chose que seul un tableau de Dali saurait démontrer. Je vois dans les yeux du malade mental des horloges, des cadrans, tous mous et tous gluants, flottant au vent ou dégoulinant sur la chaussée. Le temps n’y est plus froid, insensible et immuable. Il n’est plus au-dessus de nous, ni absolu en ces terres…Non, le temps y est mon égal  Je comprends alors pourquoi je ne vois pas de percussionniste: les sons de tambours sont le battement de mon cœur.

Le schizophrène se mit a rire tandis que, d’un air incrédule, je ressens et entend mon cœur battre. Je ne suis pas un personnage, ni même une bande dessinée. Je le sens dans ma poitrine. Et si vivre n’était que ceci, prendre conscience des battements de son cœur et vivre au rythme de celui-ci plutôt qu’à celui de la trotteuse. Je suis ivre de révélation, ce qui rend mon nouveau compagnon hilare. Je n’entend ni ne vois la voiture rouge entrer en folle dans le stationnement.

Je plane toujours quand la porte ouvre en fracas. Je sursaute comme tout le monde et cherche la cause de ce raffut. Une dame là-bas crie d’une voix chargée de haine. « Où est-il! J’ai vu son char dans l’parking, Y’a du sang sur son capot! Du sang d’mon fils! » Elle me vit de loin, et moi je revis certains passage de la journée qui m’avait échappé. Étrangement je ne bronche pas, je reste stoïque. La femme s’avance à grands pas, sortant un revolver. Son visage n’est qu’une masse difforme et rouge.

Jamais je ne me suis sentis aussi seul. Je ne suis pas une création, aucun écrit ne me guide. Deux coups partent et je les attends. Je mourrai de la façon dont j’ai vaincu  dans la vitesse et l’attente. Je ne suis pas un personnage ni même comédien. Aucune main supérieure, aucun scénario ne me sauvera. Aussi sentis-je très bien les balles m’exploser la poitrine et crever le cœur que je sentais battre pour la première fois trois minutes plus tôt.  Je ne suis pas un personnage, ni même un pantin, je n’aurai été réel qu’un instant. Je ne suis plus rien.

Phenixgoglu
Novembre 2009

LA THÉORIE GAÏA, livre de MAXIME CHATTAM

Voici un livre qui ne plaira peut-être pas aux lecteurs impatients. Chattam nous immerge dans une intrigue des plus brumeuse dès la deuxième page, mais ne consent à développer son thème qu’après une centaine de pages. Et quand je dis intrigue brumeuse, je veux dire le genre d’intrigue qui ne nous retient pas lorsqu’on veut fermer le livre, le genre qui ne s’incruste pas dans notre mémoire quand on passe à autre chose.

L’histoire est celle de trois scientifiques, Emma, Peter et Ben, qui seront appelés à aider l’union européenne à enquêter sur une histoire de placements très douteux fait par une firme de tests pharmaceutiques. Emma sera envoyée sur une île de Polynésie française. Peter et Ben, respectivement le mari et le frère d’Emma, seront envoyés dans les Pyrénées. C’est à cet endroit que l’intrigue s’épaissira encore plus. Certains indices nous laissent supposer que des catastrophes météorologiques se préparent, d’autres simplement que la folie des hommes les mènera à leur perte… Encore là, on ne peut que le supposer. Rien de passionnant, rien d’accrocheur.

Jusqu’à ce que…

Jusqu’à ce qu’on en revienne sur l’île tropicale, où Emma débarque avec Tim, son « conducteur ». Mais où est le comité d’accueil qui devait les recevoir? Où sont les habitants du petit village bordant la côte? Alors qu’ils crient à la recherche de signes de vie, ils feront des découvertes terrifiantes qui les convaincront  rapidement qu’il serait préférable de ne pas se faire remarquer.

Là j’ai commencé à être nerveux, alerte. J’ai commencé à avoir peur, et m’imaginer être avec eux sur l’île. Une fois même, cette idée m’a suivi jusque dans mes rêves. Et alors que la peur est constante sur l’île, aux Pyrénées monte une tension générale tandis que Ben et Peter font des découvertes inquiétantes sur les activités réelles de l’entreprise testant soi-disant les produits pharmaceutiques.

De façon générale, j’ai aimé ce livre, mais je le trouve quelque peu mal ficelé. L’auteur semble vouloir exploiter plusieurs idées, mais ne parvient pas à en faire un bon alliage. Par contre, les scènes sur l’île suffisent à me faire pencher vers une note positive. Avant de lire La théorie Gaïa, je pensais avoir à faire à un thriller écologique, mais il n’en est rien. Si je devais absolument donner qu’un seul thème à ce livre, je dirais que c’est l’origine et le statut de la violence de l’homme. 

A ce propos, j’ai mis en complément un extrait qui m’a particulièrement intéressé.

Suggestion de lecture : ARCHE de Stephen Baxter

Phenixgoglu
Décembre 2012

(En Complément…)