LES CONTES DU WHISKY, recueil de JEAN RAY

*…deux mains énormes, froides, dures comme
l’acier. Dans un silence immense, sans cri, sans
haine, avec une méthode et une sûreté de
machine, elles serraient mon cou.*
(extrait de LES CONTES DU WHISKY, LA NUIT DE
CAMBERWELL, Jean Ray, Nouvelles Éditions Oswald,
1ère édition : 1925, 134 pages, éd. Num.)

LES CONTES DU WHISKY est le premier livre de Jean Ray paru en 1925 et rééditée plusieurs fois par la suite. C’est un recueil d’histoires noires,  diaboliques, contes d’horreur, de crimes crapuleux. Ces brèves nouvelles sont inspirées du quotidien inquiétant des coins obscurs de Londres : les ports, les docks brumeux, tavernes malfamées, ruelles sombres, le tout dans une atmosphère de malfaisance, de crimes et de déchéance sociale aux limites du surnaturel. Le narrateur est plus souvent qu’autrement ivre, le whisky étant omniprésent dans les récits. 

Vapeurs éthyliques et mort
*Non mon maître. Il était au milieu des siens,
quand il s’est levé subitement en criant :
C’EST L’HEURE! Puis il partit d’un grand
éclat de rire et il est tombé mort…il était
minuit 20.
(MINUIT 20, extrait de LES CONTES DU WHISKY)

Je dois dire que j’ai passé un bon moment avec ce livre qui est présenté en deux parties : LES CONTES DU WHISKY et QUELQUES HISTOIRES DANS LE BROUILLARD. Les nouvelles sont très courtes et se déroulent dans les coins les plus sombres et les plus mystérieux de Londres ou dans le légendaire brouillard ouaté qui recouvre si souvent cette ville.

Bien sûr, les récits sont empreints de mystère, de fantastique. Le tout semble vouloir atteindre presque le surnaturel un peu à la manière d’Edgar Allen Poe. Toutefois, ce qui m’a le plus fasciné dans ce recueil, c’est l’humour particulier qu’on y retrouve…un humour édulcoré, tamisé, un peu noir et sans aucun doute rehaussé par une impressionnante adulation du divin whisky… :

*Il y a des morts galants; souvent même leurs amours portent fruit…Ce sont des mort-nés, cela va sans dire. Jusqu’ici, on s’est fort peu occupé de leur éducation. (extrait LES CONTES DU WHISKY,  MON AMI LE MORT)…C’est bon…fameux…Parmi les choses que je regretterai, il y aura le whisky…je suis trempé…Quelle horreur…un peu de whisky pour me donner du cœur…(extrait LES CONTES DU WHISKY, LA DERNIÈRE GORGÉE)

Ce qui est très spécial aussi dans ces récits, c’est que pour plusieurs d’entre eux, le narrateur est ivre, solidement imbibé de whisky, ce qui favorise le vagabondage de l’esprit du lecteur. On peut de cette façon, relire autant de fois qu’on veut un récit et lui trouver autant d’interprétations.

LES CONTES DU WHISKY est le premier livre de Jean Ray. Sa façon directe et ironique de décrire un univers mystérieux et féroce, un peu onirique, voire surnaturel lui a valu un départ fulgurant dans sa carrière littéraire. Je recommande la lecture de ce livre. Les récits sont très brefs et décrivent un monde de déchéance avec un style particulier où l’horreur, le fantastique et un humour imagé se chevauchent. Je crois que vous passerez un bon moment.

…juste en parler m’a donné une de ces soifs…

Suggestion de lecture : DOUZE CONTES VAGABONDS, de Gabriel Garcia Marquez

Raymond Jean-Marie de Kremer (1887-1964) est un écrivain belge. Jean Ray est le pseudonyme qu’il s’est choisi pour écrire en français. LES CONTES DU WHISKY furent le point de départ d’une carrière fascinante : plus d’une centaine d’aventures d’ Harry Dickson, très populaire dans les années 30 et MALPERTUIS, son premier roman fantastique publié en 1943, œuvre majeure adaptée à l’écran par Ham Kümel. Je cite aussi LES CONTES NOIRS DU GOLF,  et LA GRANDE FROUSSE adapté à l’écran par Jean-Pierre Mocky. Ray a aussi écrit plusieurs livres en néerlandais sous le pseudonyme John Flanders.

BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
JUIN 2015

L’ARBRE DES POSSIBLES, BERNARD WERBER

ET AUTRES HISTOIRES

Oui, vous allez rencontrer des gens du passé.
Ne leur apprenez pas de techniques modernes.
Ne les informez pas sur l’avenir. N’oubliez jamais
Que vous êtes un touriste temporel. En cas de
Problème, rentrez immédiatement…
(extrait de L’ARBRE DES POSSIBLES ET AUTRES
HISTOIRES de
Bernard Werber, Albin Michel, 2002) 

L’ARBRE DES POSSIBLES ET AUTRES HISTOIRES est un recueil de nouvelles de Bernard Werber qui propose des futurs possibles de l’humanité en passant par différentes émotions : des futurs joyeux ou sombres, optimistes ou pessimistes, abondance ou pénurie, vide ou plénitude.

L’arbre des possibles est aussi un projet initié par Werber qui invite les internautes à imaginer des Futurs possible par le biais de son site Internet interactif. (voir lien à la fin de l’article.)

L’auteur nous livre donc une vingtaine de récits dans lesquels il livre, sous forme  d’histoires fantastiques, contes et légendes, sa vision des futurs possibles de l’humanité, imaginables ou inimaginables.

Avec L’ARBRE DES POSSIBLES, Werber m’a tout simplement subjugué. J’ai été Captif de ce livre que j’ai lu au complet pratiquement sans interruption. Vous l’avez compris, l’auteur explore des futurs possibles de l’humanité. Certains sont plausibles, plusieurs sont issus d’une imagination *chauffée au rouge*.

Ce qui m’a ravi en particulier, c’est que l’auteur est parti de situations ou d’idées très simples pour les pousser jusqu’à l’absurde et c’est là que le lecteur est entraîné non seulement dans une profonde réflexion mais dans un goût irrésistible d’imaginer lui-même ses propres *futurs possibles*.

Par exemple, Werber parle dans un de ses récits, d’une cuisine moderne, fonctionnelle et bien équipée. Imaginez maintenant un *futur possible* où votre cuisine sera entièrement informatisée, mécanisée et robotisée…allant jusqu’à vous permettre de dialoguer avec votre grille-pain ou jaser avec un couteau et une fourchette…autre exemple…un inspecteur de police qui fait témoigner un arbre qui aurait été témoin d’un meurtre.

…original, divertissant, imaginatif, et même, porteur d’avenir…à lire absolument. Les nouvelles sont brèves, le livre se lit vite…pas de longueurs ni de profondeur inutile.

En terminant, l’image ci-haut est une capture d’écran du site interactif L’ARBRE DES POSSIBLES avec une carte interactive des futurs, projet initié par Bernard Werber et par lequel vous pouvez enrichir une magnifique collection de scénarios proposés par des internautes du monde sur les futurs possibles. C’est un site génial magnifiquement conçu. Voici le lien :

http://www.arbredespossibles.com/

Suggestion de lecture : L’HISTOIRE DU QUÉBEC EN 30 SECONDES, de Sabrina Moisan et Jean-Pierre Charland.

Bonne lecture et Bonne recherche

JAILU/Claude Lambert
NOVEMBRE 2013

FÂCHÉ NOIR, le livre de STÉPHANE DOMPIERRE

Le monde est infiniment plus intéressant
que n’importe laquelle de mes opinions à son sujet.
– Nicholas Nixon
(épigraphe incroyablement bien choisi)

Je ne m’étendrai pas trop longtemps sur ce livre. Je me sentirais un peu ridicule de commenter éternellement FÂCHÉ NOIR de Stéphane Dompierre, vu que ce livre est en soit une longue série de commentaires négatifs au possible.

Disons simplement que ce livre est un recueil de chroniques que Stéphane Dompierre à écrites pour Yahoo! Québec. Dans ses chroniques, qui ne dépassent jamais deux pages,  il s’emporte à sa manière et décrit sa vision de certaines choses de son oeil soupe-au-lait. À travers des anecdotes et des faits divers nous pouvons lire son opinion sur des sujets assez inspirants et marrants tels « Tes photos de vacances », « Le snobisme alimentaire », « La croissance personnelle », « L’épicerie » et tant d’autres.

Le chialage à lui seul pourrait faire le sujet d’une thèse. Il y a des chialeux amateurs, des chialeux qui en ont fait un art. Il y a des chialeux invivables, d’autres sont plus amusants. Et surtout il y a ceux qui aiment écouter les bons chialeux s’exécuter et d’autres que ça insupporte. Dans FÂCHÉ NOIR, Stéphane Dompierre à un discours ni constructif ni édifiant, mais certainement divertissant pour peu qu’on le prenne au second degré. On peut suivre ses chroniques également ici, personnellement je suis fan (pas de flux RSS malheureusement).

C’est à prendre avec humour, mais j’éviterais tout de même de le lire avant d’aller faire l’épicerie à l’heure de pointe!

Suggestion de lecture : LE JOUR OÙ LES LIONS MANGERONT DE LA SALADE VERTE, de Raphaëlle Giordano

PHENIXGOGLU
MAI 2013

ARSÈNE LUPIN, l’oeuvre de MAURICE LEBLANC

Sur mon Sony digital book reader prs-t2 (super appareil en passant) se trouvent quelques livres exemples gratuits, une poignée de vieux romans sans doute délesté de droit d’auteur depuis un moment.  Je vous parle aujourd’hui de l’un d’entre eux. Il s’agit d’un classique, j’ai nommé Arsène Lupin – Gentleman-Cambrioleur, de Maurice Leblanc (1907). C’est un recueil de petites histoires de traques et de cambriolages.

Maurice Leblanc

Je ne connaissais pas grand chose des aventures d’Arsène Lupin, sinon de vagues souvenirs de dessins animés inspirés des aventures du maître cambrioleur. Une chose est certaine, j’adore les personnages paradoxaux. On en a vu d’incroyables à l’écran, tel le lieutenant Columbo (une perspicacité légendaire derrière un air naïf et simplet) ou plus récemment le Dr. House (un médecin phénoménal derrière une misanthropie chronique), mais ce genre de figure est plus rare dans les romans. Alors l’idée d’un gentleman-cambrioleur était plutôt séduisante, et je n’ai pas été déçu.

On suit les aventures d’Arsène Lupin avec la même fascination que pour un détective particulier, qui élève sa profession au rang d’Art. Là où on se demande comment Sherlock trouvera l’auteur d’un crime parfait, on se demande comment Arsène dévalisera une forteresse apparemment imprenable. Ce changement d’angle est par moment un peu déroutant, mais ça reste génial.

C’est un excellent personnage qu’a créé Maurice Leblanc. Parfait maître dans son domaine et doté d’un passé obscur permettant toutes les suppositions, nous lui pardonnons sa modestie parfois douteuse car on sait que son côté gentleman est quant à lui parfaitement authentique. Il est décrit comme un composé bizarre d’intelligence et de perversion, d’immoralité et de générosité.

Et que dire de l’écriture de Maurice Leblanc. Il utilise un style élégant et articulé qui sied à merveille à son personnage. J’ai été impressionné par toutes les acrobaties narratives auxquelles il se livre pour surprendre le lecteur. Sous sa plume, Arsène Lupin se glisse dans la foule, s’y confond, devient un personnage qu’on voit sans regarder; tantôt le figurant qui boit son café en arrière plan, tantôt rien de moins que le narrateur en personne! Soyez attentif et surveillez votre montre à gousset!

Suggestion de lecture : LE DOSSIER 113, d’Émile Gaboriau

PHENIXGOGLU
MAI 2013

ALBERT EINSTEIN – Comment je vois le monde

« La condition des hommes s’avérerait pitoyable s’ils devaient être domptés par la peur d’un châtiment ou par l’espoir d’une récompense après la mort. »

« Mais c’est la personne humaine, libre, créatrice et sensible qui façonne le beau et le sublime, alors que les masses restent entraînées dans une ronde infernale d’imbécillité et d’abrutissement. »

« Ceux qui aiment marcher en rangs sur une musique : ce ne peut être que par erreur qu’ils ont reçu un cerveau, une moelle épinière leur suffirait amplement.

« Je crois que l’exagération de l’attitude férocement intellectuelle, sévèrement orientée sur le concret et le réel, fruit de notre éducation, représente un danger pour les valeurs morales. Je ne pense pas aux risques inhérents aux progrès de la technologie humaine, mais à la prolifération des échanges intellectuels platement matérialiste, comme un gel paralysant les relations humaines. »

« Et pourtant je crois profondément en l’humanité. Je sais que ce cancer aurait dû depuis longtemps être guéri. Mais le bon sens des hommes est systématiquement corrompu. Et les coupables se nomment: école, presse, monde des affaires, monde politique. »

« C’est le rôle essentiel du professeur d’éveiller la joie de travailler et de connaître. »
(Voir le complément pour plus!)

« Si l’on sépare le judaïsme des prophètes, et le christianisme tel qu’il fut enseigné par Jésus-Christ de tous les ajouts ultérieurs, en particulier ceux des prêtres, il subsiste une doctrine capable de guérir l’humanité de toutes les maladies sociales. »

« Je m’imagine qu’une des motivations les plus puissantes qui incitent à une oeuvre artistique ou scientifique, consiste en une volonté d’évasion du quotidien dans sa rigueur cruelle et sa monotonie désespérante, en un besoin d’échapper aux chaînes des désirs propres éternellement instables. Cela pousse les êtres sensibles à se dégager de leur existence personnelle pour chercher l’univers de la contemplation et de la compréhension objectives. »

-Comment je vois  le monde, Albert Einstein

Ce sont ces citations et extraits qui m’ont poussé à chercher le livre Comment je vois le monde, de Albert Einstein. Il ne s’agit pas d’une biographie, ça semble plutôt être une réelle volonté d’Einstein d’en dire d’avantage sur sa vision des choses, ses idées, ses opinions. J’avoue qu’après une première lecture (et même la relecture de certains passages), eh bien je n’ai vraiment pas tout compris. Le texte est par moment dense et technique. Le livre est divisé en quatre grands thèmes (Le pacifisme, la lutte contre le nazisme, les problèmes juifs, et la science), eux même subdivisés en plusieurs articles. Ça aide un peu la lecture, mais ça ne rend pas vraiment le tout plus assimilable.

Ce que j’ai retenu surtout de Comment je vois le monde, c’est qu’Einstein parle de la paix, de la démilitarisation, de l’abolition du service militaire obligatoire, du désarmement. Il est aussi question de science évidement, et aussi de religion, surtout du judaïsme. Le tout à travers des textes personnels, des échanges de lettres et des discours  Certains passages sont parfaitement clairs et inspirants, alors que d’autres furent insaisissables pour un non-initié comme moi, quand il aborde la philosophie ou la physique par exemple.

Je ne regrette pas la lecture de ce livre, car malgré tout j’ai pu en apprendre beaucoup sur le personnage et son époque également (ce livre couvre de 1934 à 1955, l’année de la mort d’Einstein). Mais si quelqu’un veut vraiment se documenter, je conseillerais plutôt de partir en quête d’une bonne biographie. Je ne recommande ce livre qu’aux connaisseurs, aux collectionneurs, aux « Einsteinologues » en devenir. Suggestion

Suggestion de lecture : PHOBIE de Sarah Cohen-Scali

Phenixgoglu
Mars 2013
(En complément…)

RUMEURS et légendes urbaines, d’ALBERT JACK

Le livre dont je vous parle aujourd’hui n’est pas un chef d’oeuvre, et je ne le qualifierais même pas d’ouvrage. Il s’agit de RUMEURS ET LÉGENDES URBAINES de Albert Jack, un petit recueil de légendes urbaines pour lesquelles l’auteur donne tantôt le maigre résultat de ses recherches, tantôt son commentaire personnel.

Je vous partage cette lecture car je l’ai tout de même trouvé divertissante. Les légendes urbaines sont un peu comme des blagues: des histoires courtes qui retiennent l’attention et dont la chute est inattendue (ou presque). Plusieurs types de légendes sont abordés: des histoires d’épouvantes aux  anecdotes embarrassantes en passant par les histoires obscures de personnalités célèbres.

Comme je disais, il ne s’agit que d’un recueil. Il y a très peu de mythes démystifiés ou dont l’origine est détaillée. Et soyons franc, une recherche google suffit à trouver une source encore plus riche de légendes urbaines. Je pense à un vieux site qui date du début du siècle et qui est encore en ligne: http://pages.infinit.net/ginov/legende.htm (allez y jeter un coup d’oeil, c’est difficile de décrocher!)

Ce que j’aimerais maintenant, c’est un livre qui explique, décortique, définit, détaille le phénomène des légendes urbaines, en donnant des exemples. Bref j’aimerais un véritable ouvrage sur ce sujet qui m’intéresse beaucoup.

Pour finir, je peux vous recommander l’achat de RUMEURS ET LÉGENDES URBAINES, car même si ça ne sera pas le joyau de votre bibliothèque, il pourrait bien avoir une place de choix dans votre salle de bain!

Suggestion de lecture : PEURS SUR LA VILLE, recueil de nouvelles

Phenixgoglu
Décembre 2012

(En Complément…)