LE PETIT PSYCHOLOGUE ILLUSTRÉ, S. Rusinek

Les psychologues font en sorte que l’étude du comportement soit scientifique. Ils tentent d’établir des lois pour expliquer le fonctionnement psychique humain en s’intéressant à de nombreux domaines comme la mémoire, la perception, l’apprentissage, la lecture, l’intelligence, le développement, la communication, etc…

Je vous parle aujourd’hui du livre de Stéphane Rusinek LE PETIT PSYCHOLOGUE ILLUSTRÉ : un ouvrage de vulgarisation proposant plus d’une cinquantaine de petites expériences scientifiques à réaliser chez soi pour mieux comprendre la psychologie. Ces expériences sont présentées avec pédagogie et illustrées.  (LE PETIT PSYCHOLOGUE ILLUSTRÉ, Stéphane Rusinek, Éditions Dunod, hors-collection, 2009, 184 pages)

Je crois que ce petit extrait-préambule suffira à confirmer si ce genre d’ouvrage vous intéresse ou non. Car il ne s’agit que de cela : une suite d’expériences permettant d’observer les divers mécanismes de l’esprit humain.

Ces expériences, aussi simples qu’enrichissantes, définissent de véritables phénomènes largement admis en psychologie, tels que le priming, les chunks de Miller, l’effet Von Restorff, l’effet Treisman, etc etc etc… (Il y en a presqu’une soixantaine!).

Trois façons de lire ce livre :

1- Une simple lecture, sans note ni mise en pratique, permet au moins une meilleure compréhension du travail des psychologues, de leur utilité et de leurs objectifs.

2- Une lecture plus réfléchie, avec notes et quelques expériences, rendra le lecteur plus attentif, plus observateur devant le comportement des gens autour (et du sien également).

3- Le futur psychologue, qui voue une véritable passion au domaine, sans en être tout-à-fait initié, gagnera à prendre le temps d’effectuer chacune des expériences avec la collaboration de son entourage, tout en notant et en comparant les résultats.

Ces trois approches sont parfaitement valables. Le petit psychologue illustré est un petit ouvrage de psychologie élémentaire accessible, facile à lire, et grand public. Les livres de psycho sont malheureusement de qualité très inégale, dû à leur aspect commercial et bon marché.

Ici l’auteur manifeste une réelle volonté de « faire découvrir », sans embrouiller le lecteur en poussant les explications à l’extrême, et sans l’ennuyer avec des théories personnelles. Ce n’est peut-être pas particulièrement original ou innovateur, mais c’est certainement du bonbon pour les curieux.

Suggestion de lecture : 150 PETITES EXPÉRIENCES DE PSYCHOLOGIE DES MÉDIAS

Quelques extraits de mes notes de lecture personnelles

p. 13 Les chunks de Miller : Regroupement d’informations en mémoire à court terme afin d’y stocker plus d’éléments (ex : se souvenir de 42 50 87 24 12 66 au lieu de 4 2 5 0 8 7 2 4 1 2 6 6)

p. 24 Effet Von Restorff : Lorsqu’une info n’est pas congruente avec les autres, elle prend une place particulière en mémoire, elle s’y inscrit plus profondément.

Section illusion d’optique : Nous sommes abusés par nos interprétations car il est plus efficace d’avoir une vision rapide de la réalité,  même tronquée, plutôt qu’une vision exacte après une longue analyse des subtilités physiques.

p.100 : En lecture, le sens lexical prévaut sur le sens grammatical.

p.130 : Décrit la tendance que nous avons de nous imposer des contraintes dans la résolution de problèmes. Le fait même de proposer un problème amène à croire que c’est compliqué. C’est l’anticipation de la difficulté qui crée la difficulté.

——–

Bref LE PETIT PSYCHOLOGUE ILLUSTRÉ est un ouvrage accessible, distrayant et instructif, *à mettre entre toutes les mains*…

PHÉNIXGOGLU
(collaboration spéciale : jailu)
MARS 2015

AU FIL DU RASOIR, le livre de KARIN SLAUGHTER

*La pureté, lui dit Tolliver, dis-moi
ce que ça signifie dans les relations
pédophiles…-J’ai eu ta dame au bout
du fil tout à l’heure, elle aussi elle
m’a parlé de pureté…c’est une affaire
de castration, exact?*
(extrait de AU FIL DU RASOIR, Karin Slaughter,
t.f. Éditions Grasset et Fasquelle, 2004, éd.
num. 344 pages)

AU FIL DU RASOIR est le récit d’un enchaînement dramatique : une adolescente nommée Jenny pointe une arme sur un garçon de son âge et menace de le tuer. Un policier abat la jeune fille. Entre temps, Sara, un médecin légiste, découvre dans les toilettes de l’établissement où se déroule le drame, le corps d’un fœtus d’à peine quelques semaines. Pour Sara et son ex-mari, le chef de la police Jeffrey débute une enquête complexe et éprouvante pour tenter de comprendre le comportement de Jenny et savoir de qui est le fœtus. Sara et Jeffrey croyaient avoir une idée de ce qu’est l’horreur. En fait, ils n’en avaient qu’un tout petit aperçu. Comprendront-ils comment on peut descendre aussi bas?

Dérangeant mais réaliste…
(âmes sensibles et fragiles s’abstenir)
*-Putain de pervers beugla-t-il, puis il
froissa le magazine entre ses mains
et le lança contre le mur. Qu’est-ce qui
se passe par ici,  bordel?  Cria-t-il. Elle
vit palpiter une veine de son cou. –Combien
de gosses sont impliqués dans cette histoire?
(extrait de AU FIL DU RASOIR)

AU FIL DU RASOIR est un récit très noir, d’autant qu’il touche des cordes extrêmement sensibles de la conscience collective : pédophilie, viol de mineurs, inceste, agressions, mutilation. L’ambiance y est sordide, opaque. Malgré tout, l’auteur a bâti son histoire en évitant de tomber dans le piège du sensationnalisme à outrance.

Au début du livre et jusqu’au milieu à peu près, j’étais irrité par de nombreux passages qui me semblaient vides, exagérément étirés. Dans la deuxième moitié du livre j’ai compris que ces passages permettaient au lecteur de respirer un peu et de se remettre un peu des horreurs auxquelles il est soumis. C’est un livre qui ébranle, qui prend à la gorge mais je crois qu’il a été écrit avec finesse et intelligence.

La plume puissante voire impitoyable met en perspective l’originalité du sujet développé. Karine Slaughter  a réussi à imprégner à son roman de la sensibilité, de l’humanisme et de l’empathie, ce qui apporte un bel équilibre par rapport au caractère terrifiant du sujet traité : la pédophilie, un thème complexe, d’autant que dans AU FIL DU RASOIR, les agresseurs sont des femmes. Cet angle de la pédophilie est peu connu et très rarement développé dans les romans. C’était sans doute pour l’auteure un gros défi à relever.

Je dois vous prévenir que la finale du livre risque de vous choquer, moi elle m’a carrément enragé.  Je ne peux évidemment pas vous dire en quoi elle consiste mais je préciserai tout de même que la conclusion apportée au récit est tout à fait plausible, réaliste.

Bien que je ne conseille pas ce livre aux lecteurs sensibles ou fragiles, je veux préciser que l’auteure a évité les descriptions juteuses et suggestives. Le livre est très bien écrit et n’est pas sans suggérer une profonde réflexion sur un travers humain particulièrement aberrant qui s’écarte complètement de toute logique et de toute cohérence morale : la pédophilie.

En conclusion, AU FIL DU RASOIR est un polar aussi excellent que terrifiant mettant en scène des personnages dont quelques-uns sont d’une authenticité désarmante. J’ai apprécié  la lecture de ce livre même si elle m’a un peu ébranlé.

Suggestion de livre : LE RASOIR D’OCKHAM de HENRY LOEVENBRUCK

Karin Slaughter, née le 6 janvier 1971 est une écrivaine américaine originaire de Géorgie  qui s’est spécialisée dans le roman policier. Au moment d’écrire ces lignes, elle vit à Atlanta Son premier roman MORT AVEUGLE publié en 2003 devient rapidement un best-seller traduit dans plusieurs pays. Elle y installe une intrigue puissante qu’elle développera par la suite dans AU FIL DU RASOIR, À FROID et INDÉLÉBILE avec ses personnages fétiches : Jeffrey Tolliver, le chef de la police et Sara Linton, médecin légiste. Ces deux héros évoluent dans une région imaginaire : Grant county. 

BONNE LECTURE
JAILU
MARS 2015

A.N.G.E 1, ANTICHRISTUS d’ANNE ROBILLARD

*Le jeune agent se mit à saigner du nez,
car les ondes générées par les couleurs
attaquaient maintenant son cerveau…
-En fait, je suis le seul à présent qui
puisse te sauver. Si tu ne viens pas vers
moi, tu mourras au bout de ton sang.*
(extrait de ANTICHRISTUS, a.n.g.e no 1,
Anne Robillard, Michel Lafont, 2007, é. Num.
285 pages)

Pendant une enquête de routine sur les enseignements d’un prétendu gourou, les agents de l’A.N.G.E découvrent que de graves évènements de nature apocalyptique pourraient se produire à court terme. Mais l’enquête est complexe car l’A.N.G.E se heurte à la mystérieuse puissance du faux prophète et d’autre part, l’Alliance, mystérieuse et redoutable organisation maléfique prépare la venue de l’antéchrist.  L’implication d’un mystérieux envoyé du Vatican rend la situation encore plus énigmatique. L’A.N.G.E aura fort à faire pour préserver l’humanité d’une fin qui semble très proche.

L’AGENCE NATIONALE DE GESTION DE L’ÉTRANGE

L’A.N.G.E. est une agence fictive créée par l’auteure québécoise Anne Robillard : une société secrète basée à Montréal et formée par des personnages choisis pour leurs qualités spéciales dans le but de protéger l’humanité contre les forces du mal.

Les principaux personnages sont  Cédric Orléans, directeur de la base de Montréal, Yannick Jeffrey, un des meilleurs agent de l’A.N.G.E, spécialiste de la mythologie, Océane Chevalier, agente, Vincent McCleod, agent et Cindy Bloom, spécialiste des faux prophètes. De nombreux autres personnages viennent soutenir l’Agence qui opère dans le monde entier. A.N.G.E. est une grande saga ésotérique en 10 tomes.

La mystérieuse puissance du faux prophète
*Hadès arriva de nulle part au milieu du salon,
un poignard à la main. Vincent recula vers la
fenêtre avec l’intention de s’y élancer. Le
démon l’agrippa par derrière et le plaqua
contre sa poitrine puante, ramenant la lame
de sa dague sur sa gorge.*
(extrait de A.N.G.E tome 1, ANTICHRISTUS)

C’est avec LES CHEVALIERS D’ÉMERAUDE que j’ai découvert la plume d’Anne Robillard. J’y reviendrai sur ce site. Par la suite, j’ai été attiré par la série A.N.G.E. Il s’agissait pour moi de lire le premier tome pour évaluer si ça valait la peine de continuer et effectivement, j’ai mis toute la saga dans mes projets de lecture.

Le thème de l’apocalypse a été développé dans une multitude de livres et à peu près dans tous les styles littéraires. Mais l’originalité de A.N.G.E réside dans une organisation secrète, implantée dans le monde entier, qui utilise des moyens et des technologies ultrasophistiqués.

L’agence fait intervenir sur le terrain des agents surentraînés dont certains sont même dotés de pouvoir surnaturels (les fameux témoins annoncés par la bible, à découvrir dans le tome 1) et aidés par d’autres mystérieux personnages. L’objectif de l’A.N.G.E : lutter contre l’Alliance, une contre-organisation qui prépare la venue de l’Antéchrist.

Malgré les clichés devenus sans doutes inévitables car il n’y a pas plus classique que la lutte du bien contre le mal, j’ai trouvé l’ensemble assez imaginatif.

En effet, développer une histoire dans laquelle la haute technologie s’oppose au surnaturel, c’est inventif et très captivant.

Ne vous attendez pas à un suspense qui atteint des sommets insoutenables. En fait je devrais dire pour être plus exact que le suspense est allégé par le côté prévisible de l’histoire. C’est un phénomène inévitable quand on connait ne serait-ce qu’un petit peu, les prophéties de l’apocalypse.

Mais dans cette histoire, la lutte du bon contre le méchant est originale, bien bâtie, relativement bien documentée (le sujet aurait pu être fouillé un peu plus et traité avec un peu plus de profondeur). Les chapitres sont courts, l’ensemble est captivant et aisé à lire. Je pense qu’Anne Robillard a atteint son objectif : bâtir une bonne histoire, autant pour les jeunes que pour les adultes et donner le goût de lire la suite.

Suggestion de lecture, de la même autrice : LES CHEVALIERS D’ÉMERAUDE

Anne Robillard est une écrivaine québécoise née le 9 février 1955. Tôt dans son adolescence, elle découvre Tolkien et développe un goût prononcé pour le surnaturel dont elle imprégnera l’ensemble de son œuvre. Auteure prolifique adorant le *fantasy*, Anne Robillard a écrit une grande saga en 12 tomes qui se déroule dans un monde magique que des Chevaliers doivent protéger contre les forces du mal : LES CHEVALIERS D’ÉMERAUDE. On lui doit la série A.N.G.E. et de nombreux livres dont QUI EST TERRA WILDER (2006), CAPITAINE WILDER et la série LES HÉRITIERS D’ENKIDIEV.

Pour en savoir plus sur l’œuvre d’Anne Robillard, consultez son site officiel : www.annerobillard.fr .

BONNE LECTURE
JAILU
MARS 2015

AMOS DARAGON, la série de BRYAN PERRO

-La grande croisade
-Le masque de l’Éther
-La fin des dieux

*Écoute, cette île est infestée de cyclopes.
Justement, je viens de faire connaissance
avec la mâchoire de l’un deux et je peux
te dire que je n’ai aucune envie de
m’éterniser ici…*
(extrait de AMOS DARAGON LA FIN DES DIEUX
Bryan Perro,  éd. Les Intouchables,  2006, 150
pages)

-La grande croisade :
Après avoir récupéré la toison d’or qui le rend invincible, Barthélémy est élu chef du Royaume des Quinze et part à la conquête du continent mais le Royaume de Bérion s’y oppose et décide de faire sécession. Furieux, Barthélémy décide d’attaquer Bérion. C’est toute la planète qui est en péril. Amos Daragon et ses amis décident d’intervenir. (AMOS DARAGON LA GRANDE CROISADE, Bryan Perro, éd. Les Intouchables, 2005, 185 pages, éd. Num.)

Le masque de l’Éther :
Amos chemine dans l’univers de son corps spirituel à la recherche du Masque de l’Éther. Cette quête est nécessaire pour sauvegarder l’équilibre du monde. Amos devra y mettre tout son cœur et son courage. (AMOS DARAGON LE MASQUE DE L’ÉTHER, Bryan Perro, éd. Les Intouchables, 2006, 150 pages, éd. Num.)

La fin des dieux :
Les dieux s’étant entre déchirés pour le pouvoir, ce qui a fait des millions de morts sur la terre, le porteur de masque Amos Daragon a pour mission de détruire les dieux et établir l’équilibre du bien et du mal pour permettre au monde d’enfin partager des temps de paix. (AMOS DARAGON LA FIN DES DIEUX, Bryan Perro, éd. Les Intouchables, 2006, 150 pages, éd. Num.)

L’univers d’Amos
*Barthélémy lança le pot par terre qui explosa
en mille morceaux. Il saisit ensuite avec sa
grosse main la toute petite fée étourdie par
le choc et lui brisa tous les os du corps en
refermant son poing sur elle. On entendit un
léger craquement, comme une branche sèche
qui se casse sous la caresse du vent.*
(extrait de AMOS DARAGON LA GRANDE CROISADE)

Récemment, je me trouvais dans une salle d’attente, avec mon livre évidemment. À côté de moi, un ado était plongé dans la lecture d’un volume d’AMOS DARAGON. C’est là que je me suis décidé de faire connaissance avec le jeune héros dont j’ai tant entendu parlé : AMOS DARAGON. J’avais aussi beaucoup entendu parlé de son auteur, Bryan Perro qui, comme moi, est natif de Shawinigan au Québec.

J’ai donc sauté sur l’occasion de varier mes lectures, renouer avec la littérature jeunesse et faire la connaissance d’un jeune héro à qui l’auteur a confié la périlleuse mission de rétablir l’équilibre du monde menacé par la guerre sans merci que se livrent les dieux du bien et du mal.

Pour ma quête, j’ai choisi de lire les trois derniers volumes de la série (si je ne tiens pas compte de la trilogie LE SANCTUAIRE DES BRAVES) LA DERNIÈRE CROISADE, LE MASQUE DE L’ÉTHER ET LA FIN DES DIEUX.

D’abord, qui est AMOS DARAGON?
Amos est un ado. Il a 12 ans au départ. Il atteindra 15 ans dans l’épisode LE MASQUE DE L’ÉTHER. Il est courageux et même téméraire. C’est un garçon très intelligent et sait faire preuve de bonté et d’empathie. Il a été désigné comme l’élu de la 2e génération des porteurs de masques.

Ces masques sont en fait des entités qui se fondent sur son visage et qui lui donne le pouvoir de dominer les éléments naturels : le feu, l’air, l’eau et la terre. À cela s’ajoute le masque ultime de l’éther. Les qualités exceptionnelles d’Amos Daragon le désignent pour une mission complexe et dangereuse : délivrer le monde de l’omniprésence des Dieux et rétablir l’équilibre.

Ayant réalisé depuis longtemps que, dans toutes les mythologies, les hommes ne sont que les jouets des dieux, j’ai trouvé ces trois livres fascinants. Bien sûr, l’élément central est classique de la FANTASY : des dieux capricieux avides de gloire et de pouvoir et indifférents à la souffrance des hommes, des héros qui se rebellent, aidés de créatures étranges et soutenus par la magie et des pouvoirs qu’il faut d’abord découvrir et mériter.

Toutefois, j’ai trouvé l’idée de Perro originale et susceptible de développer l’engouement chez les jeunes : confier à des ados la mission de débarrasser le monde de ces dieux cruels, encombrants et nuisibles à l’aide de masques et de dons magiques. Le plan de campagne s’étend et se complexifie d’un tome à l’autre. C’est une montée graduelle, un crescendo vers la rencontre ultime.

Ça se lit très bien, l’écriture est fluide. C’est plein de rebondissements. Le seul irritant que je veux souligner est qu’AMOS DARAGON est trop parfait. Outre une bonne dose d’orgueil et son petit côté individualiste, Amos est sans peur et sans reproche et il a réponse à peu près à tout. Pas mal pour un ado mais peu réaliste. Ça m’a un peu agacé parce que pour moi, en littérature, la perfection peut être une barrière à l’émotion.

Pour entourer Amos, l’auteur a créé des personnages courageux, aussi dotés de pouvoirs mais plus simples et surtout très attachants, qui apportent un très bel équilibre à l’ensemble : entre autres,  Béorf Bromanson le Béorite est le meilleur ami d’Amos. C’est un gros garçon qui a le pouvoir de se transformer en ours et d’en prendre toutes les caractéristiques.

Il y a aussi Lolya, une nécromancienne, amie puis compagne d’Amos. Puis il y a Médousa. C’est une gorgone et fait original, elle doit porter des *lurinettes* pour ne pas pétrifier ses amis. Je citerai enfin le puissant Maelström, un dragon gentil et attachant qui considère son entourage comme sa famille. J’arrête là car la liste est longue.

J’ai bien aimé ma lecture, d’autant que Perro a semé dans ses récits des éléments de réflexion très intéressants, sur l’efficacité extraordinaire d’un bon travail d’équipe par exemple, sur l’amitié et ses obstacles, la tolérance, la complexité des sentiments, etc. Le ton n’est pas du tout moralisateur.

C’est une excellente lecture pour les jeunes et les adultes devraient aussi apprécier. J’ai été un peu déçu par la finale de LA FIN DES DIEUX. Je m’attendais à autre chose. C’est une conclusion loin d’être déplaisante mais elle aurait mérité je crois un développement plus étoffé. Ça pourrait toutefois être perçu différemment d’un jeune lecteur à l’autre. AMOS DARAGON demeure une lecture de choix pour les jeunes assoiffés d’aventure.

Suggestion de lecture : LES 9 VIES D’EDWARD, de Chrystine Brouillet

Bryan Perro est né à Shawinigan au Québec  le 11 juin 1968. Il est surtout connu pour la série jeunesse AMOS DARAGON crée en 2003, 15 tomes traduits en une vingtaine de langues. En 2008, il initie la série WARIWULF . Bryan Perro a aussi écrit quelques romans pour adultes. Très actif, Perro a aussi scénarisé et animé la série télé CRÉATURES FANTASTIQUES à Radio-Canada. Il a encore plusieurs projets en réserve.  Enfin il a remporté plusieurs prix dont le PRIX JEUNESSE DE SCIENCE-FICTION ET DE FANTASTIQUE QUÉBECOIS  en 2006.

BONNE LECTURE
JAILU
FÉVRIER 2015

ALLONS Z’ENFANTS, le livre d’YVES GIBEAU

*Mais Simon ne revint pas s’assoir à la table.
Réfugié dans sa chambre, et déshabillé,
couché maintenant, il méditait sa rancœur,
accumulait les projets de fuite, de suicide
même, soudain prêt à toutes les tentatives.*
(extrait de ALLONS Z’ENFANTS de Yves Gibeau,
Calman-Lévy, 1952, 357 pages, éd. Num.)

ALLON Z’ENFANTS est l’histoire de Simon Chalumot, 12 ans, que son père, un vétéran de la première guerre mondiale  à l’esprit peu ouvert envoie dans une école militaire pour devenir soldat au service de la patrie. Simon découvrira très vite la discipline brutale des sergents de l’école et la rigidité militaire qui sont  incompatibles avec sa nature. Il deviendra vite rebelle et insoumis et connaîtra les tentatives d’évasion et même de suicide. Cette vie insoutenable durera 10 années pendant lesquelles la bêtise et l’étroitesse  tenteront de *casser* le caractère de l’enfant dont le seul rêve en est un d’espoir et de liberté.

La descente aux enfers de Simon Chalumot

*…et l’élève Chalumot ne mérite aucune clémence,
aucun passe-droit. C’est l’exemple même de la
désobéissance, de l’anarchie, de la rébellion. Je
regrette, cher monsieur, d’avoir à vous dire de
telles vérités…*
(extrait de ALLONS Z’ENFANTS)

ALLONS Z’ENFANTS est l’histoire d’un ado français : Simon Chalumot envoyé de force dans les écoles militaires par son père, ajutant à la retraite…un père raté, incapable, étroit d’esprit et qui ne jure que par la discipline militaire…l’histoire d’une bonne nature d’enfant bousculée, insultée, brutalisée, maladroitement manipulée et considérée valable pour les poubelles de l’armée.

Ce qui m’a le plus frappé dans ce livre, c’est son caractère antimilitariste. En effet, ce n’est pas un livre qui pousse le lecteur à faire copain-copain avec l’armée et les traditions militaires. Gibeau y dénonce la vanité, la domination, la recherche du pouvoir, l’abus de pouvoir et une mentalité complètement déconnectée de la psychologie humaine en général et de celle des enfants en particulier. Les exemples sont nombreux…j’en citerai deux :

*Les militaires de carrière, Chalumot, ce sont tous des feignants, des nuisibles. Tu te vantes de ta retraite, du pognon que t’encaisse  tous les trimestres. À qui il appartient ce pognon Chalumot?…je m’esquinte pour toi tous les jours…pour toi et tes semblables…et Dieu sait s’il y en a de ces propres à rien.

C’est moi encore qui entretiens ton fils, qui lui permets de faire le clown à l’école, avec des zigotos de ton espèce…ton fils, t’es en train de le tuer à petit feu…tu n’es pas son père Chalumot. Pour lui t’es un adjudant, rien qu’un adjudant…*

L’auteur n’est vraiment pas tendre pour les militaires comme le montre cet extrait d’un dialogue entre Simon et un ami de son parrain…

*…Beau métier d’feignant qu’on t’fait faire là. À quoi qu’vous êtes utiles vous autres? J’l’ai dit à ton sacré père, les militaires, c’est la dégoûtation de la France. T’entends?…*

C’est un livre dur, sans compromis…une charge extrêmement critique voire virulente contre l’hypocrisie militaire et la stupidité. Son écriture puissante et caractérielle a provoqué chez moi une forte émotion. Si Simon rencontre dans son histoire quelques rares personnes correctes auxquelles il peut s’identifier, je n’ai pas vraiment senti une recherche d’équilibre de la part de l’auteur.

C’est un jugement sans appel sur la mentalité d’une époque où les enfants et les ados étaient les derniers à être consultés sur leur avenir par leurs parents et plus particulièrement par nombre de pères bornés et bouchés dont l’unique désir reposait sur cette phrase impérative : *marche sur mes pas ou crève.

La finale du livre est particulièrement éprouvante et choquante. Comment ne pas aimer Simon et être troublé par sa souffrance qui résulte de la bêtise et de l’égocentrisme. C’est un bon livre qui garde captif mais il est dur et très direct. J’espère que les choses ont changé. Je sais que les enfants et les ados d’aujourd’hui sont plus entendus, mais sont-ils écoutés?

Suggestion de lecture : ADOPTE-MOI, de Sinead Moriarty

Yves Gibeau (1916-1994) est un écrivain français. Fils de militaire, Yves fût lui-même mobilisé en 1939, prisonnier de guerre en 1940, rapatrié d’Allemagne et démobilisé en 1941. Vivra par la suite de différents boulots : journaliste et même chansonnier. Ses écrits sont de nature hautement pacifiste et évoquent une haine irréversible du militarisme. ALLONS Z’ENFANTS est son livre le plus lu et sûrement le plus caustique sur les milieux militaires qu’il considère comme inutilement bêtes et brutaux.

En complément j’attire votre attention sur l’adaptation cinématographique de ALLONS Z’ENFANTS scénarisée par Yves Boisset et Jacques Kirsner et sorti en France en 1981. Yves Boisset en est le réalisateur.

Dans la distribution, on retrouve Lucas Belvaux dans le rôle de Simon Chalumot et Jean Carmet dans le rôle de l’adjudant Chalumot, le Père de Simon. Le film est surtout axé sur la carrière militaire obligatoire de Simon. Une fois démobilisé, il consacre sa vie à sa passion : la littérature et le cinéma mais il sera vite rattrapé par la deuxième guerre mondiale qui le retourne à l’armée sans qu’il ait le choix encore une fois.

BONNE LECTURE
JAILU
FÉVRIER 2015

INTERNET REND-IL BÊTE ? De NICHOLAS CARR

*Le contenu d’un média a moins d’importance que
le média lui-même pour son influence sur notre
façon de penser et d’agir.*
(Marshal McLuhan extrait de POUR COMPRENDRE LES
MÉDIAS : LES PROLONGEMENTS TECHNOLOGIQUES DE
L’HOMME, cité dans INTERNET REND-IL BÊTE de Nicholas
Carr,   éd. Robert Laffont, t.f. 2011, éd. Num. 280 pages)

INTERNET REND-IL BÊTE est un essai dans lequel Nicholas Carr, critique et spécialiste des nouvelles technologies dévoile les effets collatéraux d’internet sur le cerveau, la pensée, l’intelligence et la vigueur intellectuelle. Carr décrit en détail la fragmentation provoquée par l’avènement et la progression extrêmement rapide de l’ère numérique. Suite à ses constats sur l’emprise d’Internet et des réseaux sociaux , il pose une question cruciale : qu’est devenue notre façon de penser, de lire et d’écrire? Il y a un prix à payer pour l’engouement de la société à Internet et aux nouvelles technologies car l’incidence d’Internet sur l’intelligence humaine est évidente.

*…Il s’est avéré que quand les gens font des
recherches sur le Net, le schéma de leur
activité cérébrale est très différent de
celui qu’ils ont quand ils lisent du texte
semblable à ceux des livres…*
(extrait de INTERNET REND-IL BÊTE)

C’est un ouvrage costaud et rigoureux dans lequel Nicholas Carr développe un long argumentaire visant à démontrer les effets collatéraux d’internet sur notre intelligence et notre raisonnement. L’auteur se base sur des études et des expériences scientifiques sérieuses pour expliquer les répercussions neurologiques de la surutilisation d’Internet et ce, même si, comme Carr le dit lui-même : *L’évolution nous a donné un cerveau capable littéralement de changer d’esprit à tout bout de champ.*

Carr entre dans les moindres détails du fonctionnement des cellules cérébrales, de leur chimie et de leurs interactions pour démontrer la *plasticité du cerveau* et le fonctionnement de la programmation mémorielle. Le raisonnement qui s’ensuit tend à démontrer que les énormes possibilités du Net font de nous des penseurs plus superficiels.

L’auteur vise entre autres les hyperliens, ces fameux liens sur lesquels on clique et qui nous amène vers d’autres liens qui nous amènent encore vers d’autres liens et ça n’a plus de fins. Pour Carr, cette façon de lire (qui n’a aucune espèce de profondeur, contrairement à la lecture linéaire, soit celle d’un bon vieux livre) éparpille totalement notre attention et même notre discernement.

Ce n’est qu’un exemple pour amener le lecteur à comprendre les changements que provoque Internet dans notre façon de lire d’écrire et de penser. La fréquente utilisation d’Internet est d’autant affaiblissante que notre dépendance à cette ressource inépuisable qu’est le web est grandissante et frôle l’irréversibilité.

C’est un livre très crédible malgré certains irritants : le titre d’abord, pompeux et inapproprié par rapport au contenu. Je ne crois pas que je sois devenu bête et je suis toujours capable de m’adonner à une lecture linéaire, de dévorer un bon livre fait de papier et de le lire en profondeur.

Les chapitres sont très longs et la profondeur du sujet traité rend l’ensemble parfois difficile à suivre d’autant que le ton est un peu doctoral. Mais il demeure que ce livre est porteur d’une profonde réflexion concernant les effets d’Internet sur notre physiologie et notre esprit, notre humanité. À ce sujet, Carr cite le célèbre informaticien Joseph Weizeanbaum :

*Le grand danger qui nous menace quand nous devenons plus intimes avec notre ordinateur…c’est de commencer à perdre notre humanité, à sacrifier les qualités mêmes qui nous distinguent des machines. La seule façon de l’éviter, c’est d’avoir la lucidité et le courage de refuser de déléguer à l’ordinateur les plus humaines de nos activités mentales…*

Le raisonnement de Nicholas Carr va dans plusieurs directions, mais pour moi, il y a convergence vers l’inévitable conclusion que la surutilisation du WEB amène à la paresse intellectuelle et touche de façon importante notre psychologie cognitive.  Enfin, est-ce que le livre est alarmiste?  Je dirai simplement qu’il est empreint d’un alarmisme sain.

Suggestion de lecture : SANS UN MOT, de Harlan Coben

Nicholas Carr est un auteur américain,  journaliste,  chroniqueur, éditeur et critique très actif, parfois virulent des nouvelles technologies. Il s’est rendu  célèbre avec THE SHADOWS : INTERNET IS DOING TO OUR BRAINS, nominé pour le PULIZER américain. Il y décrit les effets neurologiques d’Internet sur le cerveau. On lui doit aussi BIG SWITCH : REWIRING THE WORLD, FROM EDISON TO GOOGLE traduit en 20 langues. Il a aussi créé un blog mais il est en anglais. On peut le consulter au www.roughtype.com

BONNE LECTURE
JAILU
FÉVRIER 2015

LE BERCEAU DU CHAT, livre de KURT VONNEGUT Jr

*Soit dit en passant, Bokonon nous apprend que
lorsqu’un des membres d’un duprass meurt,
l’autre le suit dans la semaine. Quand vint pour
les Minton le temps de mourir, ils le firent tous
deux à la même seconde.*
(extrait de LE BERCEAU DU CHAT de Kurt Vonnegut Jr,
Éditions J’ai lu, t.f. Éditions du Seuil, 1972, num. 160 pages)

Un journaliste appelé Jonas projette l’écriture d’un livre sur Hiroshima et un des inventeurs de la bombe qui a détruit la célèbre ville, le docteur Hoeniker qui a aussi inventé la *glace 9*, un redoutable produit qui solidifie tout ce qui est liquide. Ses recherches l’amènent à San Lorenzo,  une île des caraïbes dirigée par un dictateur aidé d’un prophète appelé Bokonon qui annonce une imminente apocalypse. Jonas découvre que la famille a conservé le secret de cette terrifiante invention qu’est la *GLACE 9*. Jonas se rend compte que sur une toute petite île, une invention de fin du monde et la présence d’une secte agressive, ne font pas ce qu’on appellerait  un ménage idéal…

En hommage à la stupidité humaine

*Faite par une femme, une telle musique
ne pouvait s’expliquer que par un cas de
schizophrénie ou de possession
démoniaque…
(extrait de LE BERCEAU DU CHAT)

LE BERCEAU DU CHAT est un récit à l’évolution lente et constante qui met en perspective la stupidité humaine et l’absurdité de la démarche de l’homme et de son caractère destructeur qui le pousse à l’intrigue, à l’indifférence et au cynisme.

Par bonheur, j’ai bien toléré les nombreuses longueurs du récit dans les trois premiers quarts du livre en essayant de comprendre la démarche de l’auteur, où il voulait en venir. Ma patience a été récompensée. Le dernier quart du récit plonge le lecteur, la lectrice dans une finale spectaculaire et dramatique dans laquelle l’auteur semble vouloir préciser toute sa pensée sur l’incroyable puissance de la bêtise humaine.

Dans LE BERCEAU DU CHAT, la bêtise humaine est décriée par Vonnegut par sa plume dense et incisive qui apparente son récit à un réquisitoire. Il pointe sévèrement du doigt la connerie humaine.

Il faut être patient je le rappelle, pour lire ce récit qui accuse un crescendo lent. Toutefois, il y a un élément dans le récit qui a gardé mon intérêt constant : l’omniprésence de la *glace9*, cette invention monstrueuse de fin du monde, heureusement fictive, enfin pour l’instant je suppose, et qui, dans la finale du récit montre tout ce qu’elle peut faire, ou, devrais-je dire, défaire. Pour faire un petit jeu de mot un peu ampoulé, je dirais que la glace 9 m’a gardé chaud.

Je précise aussi que Vonnegut n’a pas fait d’efforts particuliers pour rendre ses personnages attachants. Dans un contexte de mise en lumière de la stupidité, c’était probablement secondaire.

Je recommande la lecture de ce livre. Il est un peu picaresque et a un petit côté humoristique, mais surtout, il est porteur d’une réflexion profonde sur la stupidité humaine, au danger que représente l’homme pour lui-même, à son caractère ravageur, même si j’aime à penser que l’humanité a de belles qualités qu’elle devrait mettre davantage en valeur. Malheureusement, le récit ne développe qu’un seul côté de la médaille.

Suggestion de lecture : CARBONE MODIFIÉ, de Richard Morgan

Kurt Vonnegut (1922-2007) est un écrivain et journaliste américain. Sa vie est une suite de drames en commençant par le suicide de sa mère, et surtout le fait qu’il a été fait prisonnier par les allemands pendant la bataille des Ardennes, qu’il a goûté aux camps de travail et qu’il a échappé de justesse au plus grand carnage de la seconde guerre : le bombardement de Dresde.

Il s’en inspirera  pour écrire en 1969 ABATTOIR 5 qui deviendra le livre phare de son œuvre. Vonnegut trouvera sa voie en 1959 avec LES SIRÈNES DE TITAN, en adoptant un style incisif, acide, parodique et très engagé.

BONNE LECTURE
JAILU
FÉVRIER 2015

LE BILLETS GAGNANT, de Mary Higgins Clark

*Cynthia revit la nuit où elle était entrée
dans cette pièce pour trouver Stuart
étendu sur le tapis…elle sentit ses mains
devenir moites. Des gouttes de
transpiration perlaient sur son front.
Dehors, elle entendait le vent gémir en
forcissant…*
(extrait de MEURTRE À CAPE CODE, du recueil
LE BILLET GAGNANT de Mary Higgins Clark,
éd. Albin Michel, collection SPÉCIAL SUSPENSE
num. 1993, 250 pages)

Le recueil comprend trois nouvelles : LE BILLET GAGNANT : Ernie Gagne 2 millions de dollars à la loterie. Au lendemain d’une beuverie, il se rend compte que son billet a disparu…MEURTRE À CAPE COD : Willie et Alvira découvrent que leur voisine vient d’être libérée de prison après avoir purgé une peine pour le meurtre de son beau-père. Or la jeune femme a toujours clamé son innocence. Alvira décide de mener une enquête afin d’innocenter sa jeune voisine…LE CADAVRE DANS LE PLACARD : pendant leurs vacances à Londres, Willy et Alvira ont prêté leur appartement à Brian, un jeune écrivain.

À leur retour, Ils découvrent le cadavre de l’ex petite amie de Brian dans un placard. Brian est évidemment soupçonné de meurtre. Alvira n’en croit rien et décide d’aller au fond de cette affaire.

DES NOUVELLES DE MARY

*Anticipant le plaisir qu’il éprouverait bientôt
à faire des largesses, Ernie commanda son
quatrième whisky-soda. C’est alors que son
attention fût attirée par l’étrange manège
de Loretta…*
(extrait de LE BILLET GAGNANT)

Il y a longtemps que je voulais lire Mary Higgins Clark. Elle m’intriguait, elle qui semble sortir des livres à la chaîne. J’ai donc satisfait ma curiosité et j’ai choisi au hasard LE BILLET GAGNANT ET AUTRES NOUVELLES.

Dans ce recueil, Mary Higgins Clark fait revivre deux personnages qu’elle a créé dans  le roman NE PLEURE PAS MA BELLE : Alvirah et Willy Meehan, respectivement femme de ménage et plombier, les deux à la retraite après avoir gagné 40 millions de dollars à la loterie. Les évènements ont conduit Alvirah à faire du journalisme et à devenir détective amateur.

C’est le genre de personnage qui a à peu près toujours raison et qui se mêle d’un peu de tout. Notez que DANS NE PLEURE PAS MA BELLE, l’auteure avait fait mourir Alvirah. C’est la fille de Mary, Carol qui l’a persuadé de faire revivre ce personnage. Je me demande encore si c’était une bonne idée.

Il semble que je n’ai pas choisi le bon livre pour apprécier l’auteure. Alvirah est une femme très intelligente, extrêmement curieuse qui joue les détectives en faisant passer les inspecteurs professionnels pour des amateurs sans envergure…trop beau pour être vrai…mais les personnages qu’elle croise n’ont aucune dimension psychologique.

Il y a 3 nouvelles dans cet ouvrage et elles ont toutes un point en commun : le fil conducteur est fragile, les intrigues prennent toutes sortes de direction. Il n’y a pas de suspense et peu de rebondissements. On est très loin de Miss Marple là…

Plusieurs conclusions sont bâclées comme ça se produit souvent dans les nouvelles qui manquent de développement. Aucune de ces nouvelles n’a vraiment capté mon intérêt. Je dirais même que j’ai trouvé ces récits ennuyeux et très prévisibles, l’écriture sans profondeur et sans conviction.

Pour une première lecture de Mary Higgins Clark, j’ai été déçu. Je m’attendais à beaucoup mieux, connaissant la notoriété de l’auteure, son talent sans compter ses statistiques de vente…

Je veux croire que LE BILLET GAGNANT ET AUTRES NOUVELLES n’est pas le reflet fidèle de l’œuvre de Clark. Il faudra simplement que j’essaie autre chose.

Suggestion de lecture : AGATHA RAISIN, LA QUICHE FATALE, de M.C. Beaton

Mary Higgins Clark est une écrivaine  américaine, née à New-York le 24 décembre 1927. Elle a cinq enfants issus de son mariage avec Warren Clark décédé en 1964. Elle publie son premier livre en 1969, une biographie de George Washington : LE ROMAN DE GEORGE ET MARTHA. C’est un échec.

Elle changera alors de style et adoptera le suspense. Elle connaîtra alors  un succès sans faille avec de nombreux prix et distinctions. Mary Higgins Clark a écrit près de 60 romans et nouvelles. Plusieurs de ses histoires ont été adaptées à l’écran.

Pour connaître sa biographie complète de Mary Higgins-Clark, visitez son site officiel 

http://www.m-higgins-clark.com/

BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
JANVIER 2015

LE POURQUOI DU COMMENT, Daniel Lacotte

*…l’ambition de ce modeste ouvrage se résume
en une inextinguible foi dans les vertus du savoir
et de la raison. Les deux seules notions
élémentaires qui peuvent encore sauver
l’humanité.*
(extrait de LE POURQUOI DU COMMENT, Daniel
Lacotte, Albin Michel 2004, num. 228 et 235 pages)

LE POURQUOI DU COMMENT est un essai en 3 tomes. La série est présentée sous forme de questions/réponses et développe de façon originale et parfois humoristique différents aspects de la connaissance. La pertinence des questions varie selon les énoncés et le lectorat mais couvre les multiples facettes de la connaissance spécialement dans le domaine de la vie quotidienne, les sciences, l’espace et les animaux. Chaque tome est attractif : brève question qui attise la curiosité, réponse en quelques pages, chapitres courts, concis. Brève introduction et index thématique complet viennent compléter l’ensemble.

Juste pour savoir…

*Après le pain, l’éducation est le
premier besoin du peuple.*
(le 13 août 1793, Georges Danton (1759-1794)
réclame à la tribune de la convention une
instruction publique gratuite et obligatoire.
Cité dans LE POURQUOI DU COMMENT 1

Dans LE POURQUOI DU COMMENT, Daniel Lacotte répond à des questions qu’on s’est posées tôt ou tard sur plusieurs sujets qui peuvent sembler banals. Ces questions ont piqué notre curiosité à un moment quelconque de notre existence. Bien sûr l’absence de réponses ne nous a pas empêché de vivre. Mais j’ai trouvé extrêmement agréable d’avoir des réponses à une quantité de questions que je me suis posées dans ma vie…des questions qui peuvent paraître insignifiantes, mais pour l’auteur, il n’y a pas de questions insignifiantes ou naïves. Toutes questions méritent réponse.

Par exemple, je sais maintenant pourquoi l’Oncle Sam personnifie les États-Unis, d’où vient le signe du dollar,  pourquoi le ciel est bleu et pourquoi la mer est bleue? Pourquoi le bâillement est-il contagieux? D’où vient l’expression OK…je sais aussi maintenant pourquoi le sang est rouge, pourquoi on rêve, d’où vient le personnage de Dracula, pourquoi un chat noir apporte le malheur et j’en passe…

Voici donc un livre simple, bien ventilé, très bien documenté qui vient apporter un éclairage inusité sur de multiples facettes de la connaissance dans les domaines de la vie sociale, de l’univers, de la culture et des animaux. Ajoutez à cela une bonne touche d’humour qui vient alléger et rafraîchir l’ensemble de l’œuvre.

En fait, Daniel Lacotte vient nous dire qu’il n’y a pas de question *niaiseuses* ou naïves. En général, ceux qui utilisent ces qualificatifs n’ont aucune réponse à donner. LE POURQUOI DU COMMENT a été écrit pour le simple plaisir d’apprendre, apporter aux parents par exemple, mais aussi aux enseignants, un outil d’enrichissement des connaissances pour les enfants et les ados. Bref ces tomes ont été écrits pour le plaisir et j’ai eu plaisir à les lire. Je ne me suis pas ennuyé.

Suggestion de lecture : DARWIN ET L’ÉVOLUTION EXPLIQUÉS À NOS PETITS-ENFANTS de Pascal Pick

Daniel Lacotte est un écrivain français né à Cherbourg en 1951. Malgré sa formation d’ingénieur et de physicien, Lacotte est fortement attiré par le journalisme. En 1983, Il rejoint même le Centre de formation des journalistes de Paris dont il deviendra directeur pédagogique jusqu’en 1987. Par la suite, il sera rédacteur en chef dans différents journaux français, et s’adonnera à l’écriture.

Daniel Lacotte a écrit de nombreux poèmes. Plusieurs de ses recueils mettent en perspective la sensibilité de l’auteur et un évident sens de l’humour, entre autres, LES PLUS BEAUX POÈMES POUR ENFANTS (1982) et LES POÈTES ET LE RIRE (1998). Lacotte a publié une trentaine d’ouvrages dont des biographies et des romans historiques et bien sûr la série LE POURQUOI DU COMMENT qui a eu un succès plutôt flatteur…

BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
JANVIER 2015

LE PRISONNIER, livre de Thomas DISCH

*-Vous êtes prisonnier numéro 6, C’est aussi simple que cela. -Je doute que, même dans ce village, rien ne soit aussi simple que cela. Je ne suis pas numéro 6, je ne suis pas un prisonnier, je suis un homme libre. (extrait de LE PRISONNIER, Thomas Disch, 1969. Presses de la Renaissance 1979 pour la traduction française. Édition numérique, 295 pages.)

Après avoir démissionné avec fracas, un agent des services secrets britanniques est kidnappé et envoyé dans un joli petit hameau isolé et bien organisé qu’on appelle le Village. Les citoyens du Village ne sont identifiés que par un numéro. Le nouvel arrivant porte le numéro 6. Le village est dirigé par le numéro 2  Son objectif : arracher des renseignements au numéro 6 et comprendre pourquoi il a démissionné et quels sont les secrets d’état qu’il aurait pu vendre éventuellement à l’étranger. Tous les moyens sont bons : drogues, lavage de cerveau, contraintes psychologiques…bons moyens,  mais peu efficaces… son esprit semble impénétrable.

Bonjour chez vous…

*-Où suis-je?
-Au Village.
-Qu’est-ce que vous voulez?
-Des renseignements.

-Vous n’en aurez pas.
-De gré ou de force, vous parlerez.
-Qui êtes-vous?
-Je suis le nouveau numéro 2.
-Qui est le numéro 1?
-Vous êtes le numéro 6…*
-Je ne suis pas un numéro
Je suis un homme libre.
(extrait : Télésérie  LE PRISONNIER)

Le livre de Thomas Disch évoque une des séries les plus énigmatiques de l’histoire de la télévision : LE PRISONNIER, une série de 17 épisodes que j’ai vue et revue et qui m’en apprend encore. Je ne peux faire autrement que de lier les deux intimement aux fins de mon commentaire. Il y a tout de même des différences importantes.

Dans le livre, les villageois ne se saluent pas par un joyeux  BONJOUR CHEZ VOUS.  Cette expression est une trouvaille de Jacques Thébo, la voix française du numéro 6. Autre différence : dans le livre, le numéro 2 ne change pas et on ne le voit pratiquement pas. Le livre est  beaucoup moins enlevé que la série, Disch concentrant davantage l’intrigue sur la pression psychologique exercée sur le numéro 6.

Pour le reste, tout y est : le rôdeur, la sphère gardienne du village, on ne sait pas qui est le numéro 1, le numéro 6 s’échappe une fois et se retrouve à Londres avant d’être repris et ne communiquera jamais les renseignements demandés, etc.

Les lecteurs et lectrices qui ont vu la télésérie feront obligatoirement des liens. Sinon ils découvriront simplement une dystopie un peu étouffante qui n’est pas sans faire réfléchir sur les fondements et les limites de la liberté. Et c’est ici que je veux m’attarder un peu sur le livre de Thomas Disch.

C’est un livre étrange à caractère fortement onirique. En fait, il m’a forcé à jongler avec le rêve et la réalité et dans cette histoire la frontière est fragile. Une phrase captée en cours de lecture illustre bien ma pensée : *Moi je n’ai jamais su avec certitude à quel moment on m’avait sorti de ce foutu aquarium. Les rêves étaient absolument aussi réels que vous l’aviez annoncé. Beaucoup plus réels que tout ça…-Qui peut dire que c’est réel? Cela ne porte aucune des écorniflures de la réalité. Je suis sûre que tant que vous demeurerez au village, vous serez dans le doute…*

Donc c’est parfois difficile de s’y retrouver. Si Disch force le lecteur à se concentrer, il force aussi son admiration car il l’installe dans un labyrinthe psychologique sans entrée ni sortie et dans lequel interviennent des personnages profonds et énigmatiques…gardiens ou geôliers, réels ou oniriques, sympathiques ou belliqueux? C’est un défi pour le lecteur qui pourrait lire le livre 10 fois et en tirer autant d’interprétations.

Ce livre est truffé de double-sens et d’énigmes et met continuellement à l’avant-plan le sens de la réalité du lecteur : *Allez donc donner un coup de pied dans un rocher pour permettre au rocher de prouver à votre pied qu’ils sont aussi réels l’un que l’autre.*

Comme la plupart des dystopies, la trame de cette histoire est complexe et étouffante et ce, même si la cage est dorée. Le numéro 6 est un sujet d’expérience et c’est au lecteur d’en tirer les conclusions car dans le livre, le jeu n’aboutit pas vraiment… une intéressante réflexion sur notre place dans la société et sur la définition de la liberté.

J’ai apprécié la lecture de ce livre mais je sais que je devrai y retourner tôt ou tard. Il est étrange, mais l’idée est originale. Quant à savoir s’il a exercé sur moi la même fascination que la télésérie…alors là, pas du tout mais je pressens toutefois qu’il ferait une excellente base pour le scénario d’un film…

Suggestion de lecture : AU-DELÀ DU RÉEL, livre sur la série culte de Didier Liardet

Thomas M. Disch (1940-2008) est un écrivain américain de science-fiction. Ses premières nouvelles sont publiées en 1960. Il atteint la notoriété avec deux romans à saveur politique : GÉNOCIDE en 1965 et CAMP DE CONCENTRATION EN 1970. En 1969, il publie LE PRISONNIER qui préfigure la série télévisée du même nom. En 1983, pour récompenser l’excellence en littérature de science-fiction, il crée le prix PHILIP K. DICK en hommage au célèbre auteur. Après la mort de son compagnon en 2005 et souffrant de dépression, Thomas Disch se suicide le 5 juillet 2008.

Patrick McGoohan (1928-2009) était un acteur américain. Il connaîtra la consécration de vedette internationale grâce à l’espion britannique JOHN DRAKE qu’il incarne dans la série DESTINATION DANGER au début des années 60. Puis, comme s’il s’agissait d’une suite logique, il conçoit, produit, scénarise et réalise la série LE PRISONNIER. Il a joué dans plus d’une vingtaine de films sans compter les épisodes de Colombo aux cotés de Peter Falk. Il a également prêté sa voix dans un épisode des SIMPSON où il incarnait son propre personnage de la série LE PRISONNIER.

BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
JANVIER 2015