L’archipel du Goulag, 2

Commentaire, 2e partie
sur le livre d’ALEXANDRE SOLJENITSYNE

Pour revenir sur la première partie, cliquez ici.

L’ARCHIPEL DU GOULAG est un très long pavé (2 000 pages et plus selon les éditions) chargé de noirceur, de mort et de désespoir, cri du cœur de la réalité historique décriée froidement par Soljenitsyne. Plusieurs passages m’ont fait frémir et même, glacer d’horreur :
*Il y a un ordre du GPU : <Ne gaspillez pas de munitions ! Pas un seul coup qui ne soit pour le prisonnier ! >* (extrait)

*Entrez dans le socialisme en renforçant les prisons au maximum ! Ce n’était pas une blague dans un magazine humoristique, cela a été déclaré par le procureur général de l’Union Soviétique ! * (extrait)

*À Serpentika, 30 à 50 personnes étaient abattues par jour à quelques pas de la cellule au secret; puis les cadavres ont été entassés sur des traîneaux, et un tracteur les a emmenés de là. * (extrait)

*La mort est la principale production de l’archipel, une production ininterrompue qui n’a pas besoin de règles ou de règlements. * (extrait)

Il est pratiquement impossible de critiquer un tel ouvrage car les témoignages sont les cris du cœur de personnes déportées qui ne savent pas trop ce qui leur arrive, encore moins que le goulag n’est qu’un soutien de l’économie soviétique. Plutôt que de chercher un sens à la vie, les témoignages donnent un sens à la mort.

Je crois avoir bien saisi l’esprit de l’auteur et ce qui réactualise le livre à mon avis est l’Ukraine. En effet, au moment d’écrire cet article, l’Ukraine et la Russie sont en guerre. La Russie veut récupérer l’Ukraine.

Il faut croire que la grande histoire a ses contradictions…* Lénine a signé cette paix avec Hetman Skoropadski, ce faisant, il a montré qu’il était pleinement satisfait de la séparation de l’Ukraine…* (extrait)

Je vous avertis d’aiguiser votre patience. L’ARCHIPEL DU GOULAG est un livre très long, très dur et quelque peu indigeste à cause de nombreux palabres pas toujours utiles, de nombreux termes russes, une phénoménale quantité de notes renvoyées à la fin de l’ouvrage et une traduction douteuse. La grande force du livre tient dans le fait que Soljenitsyne couvre absolument tous les aspects de la vie concentrationnaire.

C’est un témoignage rude et sans compromis sur un système despotique qui a fait des millions de morts. *… dans le monde de la concentration, l’homme est pour l’homme un rat et un cannibale…* (extrait)

Je crois que L’ARCHIPEL DU GOULAG demeure un incontournable, un puits de réflexion sur la capacité humaine à tuer et détruire, sur la folie de dirigeants instables et sur les inimaginables débordements du pire système concentrationnaire de l’histoire. Ce livre vient nous rappeler qu’il ne faut jamais oublier.

*Il faut haïr son propre pays, il faut lui être totalement étranger pour tirer sur la fierté de la nation, l’essence de son savoir, son énergie et son talent… * (extrait)


Joseph Staline (1878-1953)


L’auteur Alexandre Soljenitsyne (1918-2008)

 

LE GOULAG À L’ÉCRAN

L’ARCHIPEL DU GOULAG a fait l’objet de nombreuses adaptations. Je vous recommande le film documentaire de Jean Crépu réalisé en 2008.

Bonne lecture
Claude Lambert
le samedi 10 mai 2025

L’archipel du Goulag, 1

COMMENTAIRE partie 1
Sur le livre d’ALEXANDRE SOLJÉNITSYNE

*Au camp, ce n’est pas comme dans la vie ordinaire. Dans la vie ordinaire, chacun s’efforce imprudemment de s’exprimer et de se mettre en valeur extérieurement. On voit plus facilement à quoi prétend celui-ci ou celui-là. En détention, contraire, tous sont dépersonnalisés, mêmes cheveux tondus, mêmes visages non rasés, mêmes bonnets, mêmes cabans. L’expression spirituelle est défigurée par les vents, le hâle, la saleté, le dur travail. Pour arriver, sous l’apparence humiliée, dépersonnalisée, à discerner la lumière de l’âme, il faut un entraînement. *

Extrait : L’ARCHIPEL DU GOULAG, d’Alexandre Soljenisyne. Publication originale : 1973 chez Seuil éditeur. Réédité plusieurs fois dont 2014 chez Points éditeur, 912 pages, poche. Format Numérique chez David Lion éditeur.

Immense fresque de l’univers concentrationnaire soviétique, dont Soljenitsyne fut l’une des nombreuses victimes, L’Archipel du Goulag est un livre de témoignage et de combat. À texte exceptionnel, destin d’exception : rédigé entre 1958 et 1967 dans la clandestinité, il fut publié pour la première fois en France en 1974 et censuré en U.R.S.S. jusqu’en 1989. Puissance d’évocation, éloquence tumultueuse : l’ouvrage, qui a ébranlé les fondements du totalitarisme communiste, continue de brûler les mains.

Introduction

L’ARCHIPEL DU GOULAG n’est pas une oeuvre autobiographique. Elle ne développe pas non plus l’histoire du Goulag. Elle se contente de décrire le quotidien des victimes du régime totalitaire et cruel dans le système carcéral soviétique, appelé goulag, un réseau de camps de travail forcé. Ce réseau, composé de nombreuses unités est évoqué dans le titre sous le nom d’ARCHIPEL.

Ce livre, entamé dès la sortie (1) de son auteur du goulag et dans le plus grand secret, réunit plus de 225 témoignages de prisonniers politiques astreints aux travaux les plus bas d’une organisation concentrationnaire, génocidaire et exterminatrice, parfaitement intégrée à l’économie soviétique car elle fournissait une main d’œuvre gratuite, jetable et remplaçable, selon le bon plaisir de ce parfait paranoïaque qu’était Staline.

Wikipédia décrit L’ARCHIPEL DU GOULAG comme une œuvre en sept parties. La première partie décrit la construction et le développement de l’industrie pénitentiaire russe. La deuxième partie traite de la colonisation de ce qui est maintenant convenu d’appeler l’archipel créé par les flux de prisonniers.

La troisième partie traite du travail et de l’extermination des *travailleurs-prisonniers* par la malnutrition, l’épuisement, la maladie, des gardes sadiques, un irrespect total de la vie comprenant toutes sortes de privations des nécessités de base dont l’hygiène.

Dans les cinquième et sixième parties, l’auteur décrit la psychologie des habitants du goulag. Enfin, la septième partie jette un regard critique sur l’*après-Staline*

1- Une rare exception. En général, les prisonniers qui entraient au goulag y mouraient.


Le quotidien d’un goulag dans le froid sibérien

Le vampirisme stalinien


Alexandre Soljenitsyne…itinéraire
la rançon de l’expression

Si ce livre n’est pas une autobiographie, ce n’est pas un roman non plus. En fait, il est classé *essai d’investigation littéraire*. Moi je le décris comme une fresque, recueil de témoignages et d’histoires écris par Soljenitsyne qui a aussi goûté au Goulag alors qu’il croulait sous la correspondance des *goulagiens* qui attendaient de lui LE livre qui deviendrait devant l’histoire, témoin de la déchéance soviétique : *…sur la planète entière et dans toute l’histoire, il n’y avait pas eu de régime plus mauvais et plus sanglant…* (extrait)

Tous ces témoignages ont été colligés alors que l’union Soviétique était dirigée Par Staline, un tyran secondé par un petit cheptel de moutons. Staline était paranoïaque au point d’avoir divisé la société Soviétique en deux grandes familles distinctes : les traîtres et les trahis : 

*pendant les années qui ont précédé, et pendant l’emprisonnement, j’ai aussi longtemps été d’avis que Staline avait donné à l’état soviétique une orientation fatale… Le cachet que sa personnalité a imprimé sur les évènements était une brutalisation déconcertante, un despotisme rigide … * (extrait)

Staline fut une malédiction de plus pour la Russie : *Toute l’histoire de la Russie est une succession de tyrannies. * (extrait)

Le goulag a commencé à s’intensifier sur les îles Solovetski. Un camp à la fois, lentement mais sûrement. Soljenitsyne appelait ces camps *métastase* : *Ainsi les îles de l’archipel se sont pétrifiées, sans cesser de continuer à faire des métastases. * (Extrait) Ainsi, cette malédiction a grossi jusqu’à plus de 15 millions de prisonniers détenus simultanément. Et ce n’est pas le pire… :

 


*…tous sont emprisonnés pour des absurdités. Surtout, cela semble ridicule à l’accusé lui-même. * (extrait)

*…car seuls les médecins nous diront comment, quelques mois dans une telle prison, transforment un homme en infirme à vie. * (extrait)

Je poursuivrai ce dossier sur L’ARCHIPEL DU GOULAG lors de la prochaine publication sur biblio.com

Bonne lecture

Claude Lambert
le vendredi 9 mai 2025

 

FILM NOIR À ODESSA, livre de WILLIAM RYAN

*Pour finir, il posa son majeur au-dessus de son crâne.
Le dernier coup de marteau…l’ordre n’est peut-être
pas celui-ci, mais peu importe…lui a fait un trou de
cinq centimètres dans la tête. Il lui a fendu le crâne
entièrement…ton frère est bien mort.*
(Extrait : FILM NOIR À ODESSA, William Ryan., 2012,
Flammarion Québec pour l’édition canadienne. Édition
de papier, 335 pages)

URSS, 1937 – L’inspecteur Korolev, des affaires criminelles, est tiré du lit en pleine nuit, à l’heure où un citoyen peut craindre de partir pour ne plus jamais revenir. C’est à Odessa, en mission confidentielle, qu’on l’envoie pour enquêter sur le présumé suicide d’une jeune femme un peu trop liée à un haut dirigeant du Parti. Korolev débarque dans une Ukraine ravagée par les politiques de Staline, décor parfait pour La Prairie ensanglantée, le film scénarisé par son ami Babel. Malgré lui, il se retrouve mêlé aux embrouilles du « roi des Voleurs » de Moscou. Il lui faudra son sang-froid, et l’aide d’une jeune inspectrice pour démasquer les vrais ennemis de la Révolution.

Au cœur de la purge
*-…Vous êtes en état d’arrestation. Lomatkine
réussit à devenir encore plus blême. –Pourquoi ?
Pour avoir fait sortir Andreychuk de sa cellule…
Et avoir comploté avec je ne sais qui ensuite pour
lui coller une balle dans la nuque. *
(Extrait)

C’est un roman très sombre mais fort. Nous sommes en 1937. L’histoire se déroule à Odessa en Ukraine, un pays affamé par Staline, à la tête d’un pouvoir pervers, vicieux et meurtrier. Un inspecteur est envoyé en Ukraine dans une mission ultraconfidentielle pour enquêter sur le suicide d’une jeune femme apparemment liée à un haut dirigeant du parti. Pour Korolev, qui a un haut degré de moralité, la situation est délicate et dangereuse.

Dans ces heures sombres de l’Union Soviétique, la vie humaine ne valait pas cher. Seule la raison d’état était valorisée : *Demeurez discret, camarade, dit Korolev…ce qui se passe ici va bien au-delà de nos petites personnes* (Extrait) Korolev sera aidée par une jeune femme de la milice. Korolev met les deux pieds dans les coulisses d’une contre-révolution.

Pressé de toute part par les autorités du parti, qui ne communiquent pas toujours entre elles, tiraillé entre la traîtrise et les magouilles politiques, Korolev marche sur une corde raide et son souci majeur est de s’en sortir vivant.

Ce qui m’a le plus ébranlé dans ce roman, c’est le non-dit, l’atmosphère étouffante tout à fait conforme à l’oppression soviétique. La peur était partout. Aucun soviétique n’était à l’abri d’accusations gratuites, même des personnages haut placés tombaient en disgrâce pour des raisons souvent simplistes :

*Korolev s’aperçut que, dorénavant, une conversation entre citoyens soviétiques se construisait avec des non-dits, des sous-entendus et des euphémismes* (Extrait) l’hypocrisie régnait partout et les dénonciations étaient souvent récompensées d’un simple bout de pain.

Dans le verbal, ce qui a retenu mon attention, c’est l’intrigue qui est bien ficelée. L’efficacité de la narration m’a accroché dès le départ. Le roman est facile à lire avec des chapitres courts et un fil conducteur stable.

Il faut simplement faire attention à la grande quantité de personnages qui vont et viennent dans le récit, portant des noms russes qui souvent se ressemblent. Par moment, ça vient un peu mêlant. L’intensité dramatique et la profondeur de l’intrigue vont crescendo.

J’ai été aussi fasciné par l’écriture de Ryan. Elle est directe, parfois choquante, teintée d’un humour plus ou moins noir et pour plusieurs passages, elle ne manque pas d’élégance : *Il entendit dans son dos l’arme de Slivka qui débitait en rugissant une condamnation à mort de huit-cents mots par minute, et en se tournant, il vit le revolver de Mishka tressauter dans son poing comme la jambe d’une danseuse de cancan.* (extrait)

L’écriture est puissante et fortement imprégnée de la malfaisance stalinienne : terreur, faim, incertitude, complot, trahison qui s’’incrustent dans la motivation des personnages. Le roman a quelque chose d’étouffant. C’est voulu et travaillé. Le lecteur est intrigué et envahi par le doute. Il veut savoir…il tourne les pages…

J’ai beaucoup aimé ce roman. L’auteur restitue brillamment l’atmosphère suffocante du régime soviétique. L’intrigue est menée de main de maître dans un cadre précis, les personnages sont intéressants. Slivka, la jeune policière est attachante. Korolev aussi, très instinctif et toujours au bord de manquer de cigarettes. La finale m’a impressionné, le coupable étant celui que je croyais le plus improbable.

Je vous laisse découvrir ce que le régime soviétique réserve à Korolev et par la bande à Slivka. Allez-y sans crainte…ça vaut la peine.

Suggestion de lecture : HIVER ROUGE, d Dan Smith


William Ryan, né en Irlande, a fait ses études à Dublin, avant d’entrer au barreau de Londres où il a ensuite travaillé comme avocat à la City. Il a écrit pour la télévision et le cinéma, avant de se consacrer à la littérature. Après Le Royaume des voleurs, sélectionné par l’Association britannique des auteurs de romans policiers pour le prix John Creasey (New Blood) Dagger 2010, il signe Film noir à Odessa, la deuxième enquête menée par l’inspecteur Korolev.

 

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 27 juin 2021

HIVER ROUGE, par l’auteur du VILLAGE : DAN SMITH

*Serrant les dents, je baissai la tête. J’avais besoin de ma famille. Elle seule pourrait dissiper les ténèbres qui, chaque jour un peu plus, engloutissaient mon âme. Elle était forcément là, quelque part. Il fallait que je la trouve.* (Extrait : HIVER ROUGE, Dan Smith, t.f. : Éditions du Cherche-Midi,  collection thrillers, 2015, édition numérique et de papier, 470 pages)

1920, Russie centrale. La terreur s’est abattue sur le pays. À la mort de son frère, Nikolaï Levitski a déserté l’Armée rouge pour aller l’enterrer dans son village. Mais lorsqu’il arrive dans la petite communauté, perdue en pleine nature, c’est la stupéfaction. Les rues sont vides et silencieuses. Les hommes ont été massacrés dans la forêt alentour, les femmes et les enfants ont disparu. Nikolaï se met alors sur la piste des siens. C’est le début d’une quête aussi désespérée que périlleuse dans une nature hostile, au cœur d’un pays ravagé par la guerre civile.

 

La sombre réalité du totalitarisme
*on les tuera tous. Je nous imaginai, nous barricadant
dans cette isba minuscule au toit crevé pour attendre
Larrivée de Kroukov et de son unité de soldats bien
entraînés, mais ce scénario ne pouvait sachever que dans
Un bain de sang. Le nôtre.*
(Extrait : HIVER ROUGE)


Nikolaï Levitsky, soldat déserteur, ancien membre de la Tcheka s’est réveillé à peu près à temps pour se rendre compte que la Tcheka n’était qu’un vaste crime contre l’humanité allant au-delà de toutes les horreurs imaginables. La Tchéka n’est qu’une des idées tordues et idiotes de Lenine pour mettre le peuple russe au pas en utilisant la terreur et la violence.

Donc nous sommes en 1920, à la mort de son frère Alek, Nilolaï déserte l’armée pour regagner son village afin d’enterrer son frère. À son retour au village, stupéfaction et consternation.

Nikolaï constate avec horreur que tout le monde a été massacré ou enlevé. La vision d’horreur qui s’offrait à lui prouvait la visite des exécuteurs les plus cruels de la doctrine bolchévique : les tchékistes. Alors, le déserteur entreprend une quête qui sera très dure : retrouver sa famille disparue, sa femme Marianna et ses fils Pavel et Micha. 

Tout en avançant et en se faisant quelques rares alliés, Nikolaï développe la certitude que le redoutable Kochtchei, personnage horrible et cruel des contes russes se serait incarné pour faire souffrir davantage le peuple russe.

Cette histoire, très bien ficelée développe donc une quête très rude au cœur de l’immensité glaciale de la Russie et qui met en perspective les abus du totalitarisme qui n’a jamais eu de respect pour la vie humaine :

*Rien de ce que j’avais pu voir au cours de la guerre n’était plus perturbant que le tableau macabre qui s’offrait à mon regard. Après toutes ces années, je ne savais que trop bien de quelles horreurs les hommes étaient capables les uns envers les autres, mais je n’avais jamais vu une telle variété d’atrocités… * (Extrait) 

La plume est très directe, très dure. Je n’ai pas eu l’impression de *poudre aux yeux*. Une petite recherche rapide confirme les bassesses sans noms imposées par des dégénérés comme Lenine au nom de la révolution.

L’ouvrage est donc crédible et son caractère réaliste est de nature à secouer le lecteur : *Et merci à vous. –Pourquoi ? –Pour ne pas m’avoir tué. » Et ces mots confirmèrent pour moi quel terrible pays notre patrie était devenue, pour qu’un homme arrive à en remercier un autre de l’avoir laissé vivre. * (Extrait) 

Le livre aurait pu s’intituler HIVER ROUGE dans un enfer blanc, tellement l’auteur met en évidence la rudesse du climat de l’hiver russe : froid mordant, neige, glace, vents, bourrasques. Survivre dans ces conditions est un pari.

La justesse du ton et la sensibilité de la plume m’ont atteint. On y trouve des éléments de réflexion sur la valeur de la vie et les difficultés pour des sociétés de s’organiser dans le respect des droits et libertés face à la soif de pouvoir et d’ambition de bouchers despotes comme Lénine et Hitler qui ont répandu leur crasse sur l’histoire. 

Je n’ai pas réussi à m’attacher totalement au personnage principal entre autre à cause de son stoïcisme et parce qu’il avait beaucoup de choses à cacher jusqu’à la fin. Mais son enquête est très intrigante. Et cette intrigue, elle est bien bâtie. Elle mystifie le lecteur autant que le caractère enveloppant de la forêt russe.

C’est un roman de tension et de violence qui donne une place, petite mais douce, à l’amour et à l’amitié. C’est une lecture qui secoue et qui ne laisse pas indifférent…un coup de cœur.

Suggestion de lecture : GRAVÉ SUR CHROME, de William Gibson

Dan Smith a grandi en suivant ses parents de par le monde. Il a vécu en de nombreux endroits, notamment en Sierra Leone, à Sumatra, dans le nord et le centre du Brésil, en Espagne et en Union Soviétique.

Son premier roman, DRY SEASON, a fait partie des œuvres sélectionnées pour le BEST FIRST NOVEL AWARD de l’Authors’club et a été nominé pour le prix littéraire international IMPAC d Dublin. Juste avant la publication de HIVER ROUGE, son livre LE VILLAGE a connu un grand succès.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
le vendredi 18 juin 2021

LE MYSTÈRE MENGELE, de JORGE CAMASARA

*Dès son arrivée, Mengele fit preuve d’une grande
activité… Il reçut bientôt le titre de «monstre» et
d’«ange de la mort» chez les prisonniers…ils se
souvenaient de lui à cheval, au milieu des victimes
…toujours une cravache de cuir à la main…*
(Extrait : LE MYSTÈRE MENGELE, Jorge Camarassa,
Robert Laffont, 2008, édition de papier, 179 pages)

Fruit d’une longue et rigoureuse enquête, le livre raconte un obscur épisode de l’exil en Amérique latine de l’un des plus grands criminels de guerre. Jeune savant eugéniste, Josef Mengele fut chargé de faire exploser le taux de naissances aryennes, afin de fournir les futurs soldats du Reich. À Auschwitz, il sélectionnait à l’arrivée des trains des enfants, juifs et tziganes – souvent des jumeaux –, sur lesquels il pratiquait d’effroyables expériences.

En 1945, avec la complicité du Vatican, il échappe à la justice des Alliés et parvient à s’enfuir en Amérique latine où il officie comme médecin dans une ville frontalière du Brésil. Dès lors, les naissances de jumeaux se multiplient…tous blonds aux yeux bleus… les scientifiques n’ont pas d’explications à ce phénomène, mais pour l’historien Jorge Camarasa, on ne peut écarter l’hypothèse troublante de l’oeuvre du docteur Mengele.

SUR LES TRACES D’UN MONSTRE
*Josef Mengele a passé ses dernières années
au Paraguay, dans cet enchevêtrement de
confusions, de soupçons et de données
improbables sur sa vie ou sa mort.*
(extrait)

C’est un livre qui rassemble des hypothèses sur la vie et la mort de Joseph Mengele, un des plus grands criminels de guerre de l’histoire et probablement le plus insaisissable, après sa fuite d’Auschwitz en 1945. Mengele était obsédé par une mission eugénique, tordue et dépravée : produire des jumeaux 100% Aryens afin de fournir des soldats au Reich. : *Son obsession pour les jumeaux le marquera jusqu’à sa mort. *  (extrait)

À Auschwitz, surnommé « l’Ange blond de la mort », il sélectionnait à l’arrivée des trains des enfants juifs et tziganes sur lesquels il pratiquait d’effroyables expériences. En 1945, il échappe à la justice des Alliés et parvient à s’enfuir en Amérique latine.

Au début des années 1960, on le retrouve médecin itinérant à Candido Godoi, une ville frontalière du Brésil dans laquelle vit une communauté allemande. Depuis 1963, plus de cent paires de jumeaux sont nées dans la petite ville de sept mille habitants. Une proportion qui dépasse l’entendement.

Pour l’auteur-historien Jorge Camarasa, on ne peut écarter cette question troublante : serait-ce là l’oeuvre du sinistre docteur Mengele ? Ce livre est le fruit d’une enquête sur l’itinéraire de Mengele dans son exil en Amérique latine et tente d’expliquer pourquoi il n’a jamais été arrêté.

On sait que Mengele était un monstre sans conscience et dont les atrocités ont été largement détaillées dans beaucoup de livres et dans la presse. On sait qu’il envoyait des prisonniers à la mort en souriant ou en sifflant une chanson et qu’il se gardait les autres pour ses abominables expériences.

Le livre de Camarasa ne s’attarde pas aux bassesses de Mengele mais plutôt à son errance en exil d’une part et son obsession pour la gémellité d’autre part. *…son histoire, sa correspondance, ses antécédents laissaient clairement apparaître son seul leitmotiv dans l’existence : l’expérimentation génétique. * (Extrait)

Dans le livre, une phrase en particulier m’a intrigué car elle résume très bien le caractère insaisissable du personnage : *Joseph Mengele a passé ses dernières années au Paraguay dans cet enchevêtrement de confusions, de soupçons et de données improbables sur sa vie et sa mort. * (Extrait)

C’est un livre intéressant qui nous*rappelle de ne pas oublier* ces millions de personnes assassinées pour satisfaire une ambition eugénique et qui nous motive à exercer une tolérance zéro sur ces monstruosités. Toutefois, le quatrième de couverture mentionne que l’enquête de Camarasa est rigoureuse. Elle l’est sûrement.

C’est un livre sérieux mais je constate malheureusement que tous les éléments qu’on y retrouve ne font qu’alimenter la légende entourant Joseph Mengele. Il y a beaucoup d’hypothèses, beaucoup de questions, mais peu de réponses.

Une chose est sûre, c’est que certains régimes politiques latins ont protégé Mengele et agissaient comme des sympathisants à la cause Nazie même si la défaite a dissout le régime. Le livre met en perspective des collaborations, des complicités, des associations douteuses, de la protection.

Il semble que même pendant son exil, Mengele inspirait la crainte. Je suis donc resté un peu sur ma faim. Bien sûr, je peux poursuivre mes recherches avec des livres plus récents, mieux documentés. Pour ce qui est de LE MYSTÈRE MENGELE, la zone grise de la vie de Mengele demeure encore beaucoup trop vaste.

Suggestion de lecture :  TOUS À ZANZIBAR de John Brunner

Jorge Camasara (1953-2015) était un écrivain et journaliste argentin qui a vécu à Córdoba. Il a travaillé dans plusieurs journaux et a servi en tant que conseiller du Centre Simon Wiesenthal. Il a aussi participé à des colloques, et donné des conférences dans plusieurs pays d’Amérique latine et d’Europe. Sa bibliographie comprend près d’une quinzaine de livres dont quelques-uns sont devenus référentiels.

Bonne lecture
Claude Lambert
Vendredi 27 novembre 2020