LA RELIGION, roman de TIM WILLOCKS

*…De la tête, Lazaro désigna l’escalier qui menait
au cloître des hospitaliers. –On voit des choses
là-dedans, qui retourneraient l’estomac le plus
solide et briseraient le cœur le plus vaillant…*
(extrait de LA RELIGION, Tim Willocks, 2006,
version française 2012, Sonatine Éditions)

Cette histoire nous fait remonter le temps jusqu’en 1565 alors que Soliman le magnifique, Sultan des Ottomans déclare la guerre Sainte aux Chevaliers de l’Ordre de Malte. C’est l’occupation de Malte, un des conflits les plus sanglants et cruels opposant l’Islam et la Chrétienté. Au cœur de cette toile spectaculaire et oppressante, on retrouve Matthias  Tanhauser,  un colosse héroïque, fidèle à la Religion mais déchiré entre deux désirs extrêmement puissants : la soif de combat et de gloire et l’amour d’une femme piégée à Malte : Carla qui garde  l’espoir de retrouver son fils qui lui a été arraché au début de sa vie par un homme d’église fourbe et cruel.

D’abord, quelques mots sur LA RELIGION :

La Religion dont il est question dans ce roman est essentiellement un ordre religieux dont le vrai nom est ORDRE DE SAINT-JEAN DE JÉRUSALEM aussi appelé LES HOSPITALIERS et plus couramment LA RELIGION. Cet ordre religieux a été créé à Jérusalem vers 1080 et est à l’origine de tous les autres ordres de Saint Jean. Au départ, l’ordre était exclusivement hospitalier, protégeant avant tout les pèlerins malades dans les hôpitaux de l’ordre.

Très vite, après la disparition des Templiers, l’ordre de Saint-Jean, tout en gardant un pied dans sa vocation d’hospitalier est devenu guerrier avec une féroce volonté de combattre les Sarrazins et de parer à la menace musulmane. Avec le temps, l’Ordre, farouchement indépendant, échappera à tout contrôle jusqu’à son éclatement au début du 19e siècle.

UN ROMAN *CHOC* :

C’est un roman très long (plus de 800 pages) qui évoque le grand siège de Malte, un des conflits les plus sanglants de l’histoire des guerres de religion et un des plus cruels de l’histoire militaire. En effet, en mai 1565 Soliman, sultan des Ottomans (des Turcs) à la tête de 38,000 hommes, est décidé à prendre l’île de Malte qui ne dispose que de 9 000 chevaliers hospitaliers et soldats Maltais.

Soliman voit dans cette guerre une étape pour réduire la chrétienté à néant, mais le courage et l’astuce de son opposant, la Valette, grand maître de la Religion, conduiront les Turcs à la déroute. Tim Willocks décrit avec un luxe de détails l’incroyable boucherie qui résultera de cette guerre.

Ce qui m’a frappé dans ce roman, c’est la puissance descriptive que l’auteur a déployée…description détaillée de tueries, d’exécutions, de mutilations, de corps démembrés, de têtes tranchées, de puanteur, description détaillée de cette capacité très *humaine* de tuer et de faire souffrir avec des raffinements de cruauté, sans oublier une description très explicite de plusieurs épisodes à caractère sexuel dont quelques-uns sont loin de verser dans l’eau de rose.

J’ai trouvé l’écriture magnifique, puissante mais parfois éprouvante, la violence étant détaillée avec une telle ferveur qu’elle m’a laissé cette impression agaçante que l’auteur a voulu trop en mettre. Toutefois l’esprit chevaleresque de l’époque est bien mis en perspective. Les amours du Héros Tanhauser viennent un peu alléger l’ensemble même s’il s’agit d’un impossible et complexe triangle amoureux.

Ce livre ne m’a pas fait ami-ami avec la Religion car ce n’est qu’un des très nombreux ouvrages (romanesques ou documentaires) qui évoquent une époque où l’inquisition voyait l’hérésie partout et où il suffisait de dire *C’est la volonté de Dieu* pour justifier la folie des hommes. Willocks ne se gêne pas pour souligner le travers des Cultes et les qualifier de fosses à serpents.

Il m’a semblé évident que l’auteur a pris son temps…le roman accusant des longueurs mais sa principale force est d’arracher le lecteur de son confort et de le placer dans le décor d’un environnement ravagé par la violence et la haine.

Grande Crois de l’Ordre de Saint-Jean-De-Jérusalem

C’est un roman puissant. La plume est audacieuse et est de nature à submerger le lecteur, surtout celui qui ne craint pas les longueurs et la crudité d’une grande quantité de passages. Le livre a peut-être une ou deux centaines de pages de trop mais il tient quand même captif et sa finale est magnifique.

Suggestion de lecture : TERRES DE SANG ET DE LUMIÈRE de Jocelyne Godard

BONNE LECTURE
JAILU
OCTOBRE  2013

(En Complément…)

LA COURSE AUX ÉTOILES, de JAMES MICHENER

Si on se rappelait les interminables délais lors des premiers
Vols, la déception et le découragement des hommes bouclés
Dans leur capsule au sommet d’une gigantesque fusée pendant
Des heures d’affilée et les ajournements de départ répétés, les
Chances de faire décoller cette fusée-là dans un intervalle de
Deux secondes, paraissaient bien minces.
(extrait de LA COURSE AUX ÉTOILES de
James Michener, Libre Expression, 1984)

C’est une longue et belle histoire qui commence vers la fin de la 2e grande guerre par l’enlèvement de plus d’une centaine de savants allemands (voués à une mort certaine) et leur installation clandestine aux États-Unis. Cet extraordinaire sauvetage tissera la toile du projet le plus complexe et le plus coûteux de l’histoire humaine : le programme spatial américain.

Cette fabuleuse histoire nous est racontée par James Michener à travers le destin de huit personnes : quatre hommes et quatre femmes qui, malgré les lourds débats politiques, scientifiques et financiers qui agiteront ce projet grandiose, entreront dans la légende en plaçant toute l’humanité témoin privilégié de la conquête de l’espace, des vols historiques de Gemini et Apollo jusqu’aux premiers pas de l’homme sur la lune.

LA COURSE AUX ÉTOILES est un roman historique qu’on doit aborder comme une chronique. L’auteur y passe en revue le quotidien de ses héros, réels et fictifs, sur une période de plus de 40 ans : leur vie sentimentale et professionnelle, leurs échecs, leurs victoires et leur participation à l’évolution politique et scientifique d’un pays appelé à devenir le plus puissant du monde.

Le lecteur est entraîné dans une suite d’évènements historiques de premier plan dont il devient le témoin : la deuxième guerre mondiale, la chasse aux *sorcières* communistes, la nécessité pour les américains de devancer les Russes dans la conquête de l’espace, l’avènement de la NASA.

Ajoutons le discours historique de Kennedy donnant un sens au programme spatial américain en lançant les USA dans la conquête de l’espace avec des objectifs précis et des moyens financiers colossaux, la création du programme GEMINI et l’avènement du programme spatial le plus coûteux de l’histoire : APOLLO. L’auteur a même imaginé ce qu’aurait pu être le destin d’Apollo 18.

LA COURSE AUX ÉTOILES est une petite brique de 750 pages qui se lit très bien. Les aspects scientifiques y sont assez bien vulgarisés (suffisamment pour ne pas décourager le lecteur), les aspects humains et politiques y sont bien développés et fidèles au contexte de l’époque avec entre autres un regard évolutif sur le rôle des femmes, l’émancipation des noirs et l’éternelle muraille qui sépare la science de la politique.

L’ouvrage est aussi un reflet assez fidèle d’une époque où on voyait des communistes partout.  C’est une grande saga sans prétention qui m’a accroché et qui a réveillé le petit garçon qui a toujours été en moi, celui qui, comme tant d’autres observaient les astres et rêvaient de les conquérir. C’est une belle page d’histoire que je recommande sans hésiter.

Suggestion de lecture :  CODE ZÉRO, de Ken Follet

BONNE LECTURE
Claude Lambert
OCTOBRE 2013

(En Complément…)

1958 à 2011 Durée du voyage : 2 minutes

C’était plus fort que moi, il fallait que je me jette corps et âme dans le dernier-né des univers de Stephen King.

Dans un article un peu plus long que de coutume, je vous invite à lire mon commentaire sur le dernier livre de King :  22/11/63 un roman qui transcende un fait historique qui a conservé jusqu’à aujourd’hui toute sa complexité : le meurtre de John Fitzgerald Kennedy.

Je serai très heureux de lire vos propres commentaires à ce sujet.

Aller lire l’article 22/11/63 DE STEPHEN KING

Bonne lecture
JAILU

22/11/63, un roman de STEPHEN KING

*…La figure d’Oswald est apparue juste
au-dessus  de l’épaule du grand bonhomme
et j’ai vu quelque chose de plus surprenant
encore : Lee Harvey Oswald souriait…*

***

*…Mrs Kennedy avait emporté une autre
tenue dans l’avion…il s’agissait d’un tailleur
en lainage rose agrémenté d’un col noir.
Le tailleur serait bien assorti avec les roses
qu’on allait lui offrir à Love Field, mais
certainement moins avec le sang qui
souillerait sa jupe, ses bas et ses souliers…*

(extraits de 22/11/63, Stephen King,
Éditions Albin Michel, 2013 t.f.)

2011, le restaurateur Al Templeton détient un secret extraordinaire. En effet, il y a, dans son arrière-boutique un passage temporel qui relie 2011 à 1958. Al conçoit un projet non moins extraordinaire : utiliser ce passage temporel, soit  jusqu’à 1958 et patienter par la suite jusqu’en 1963 et empêcher le meurtre du président John Kennedy. Mais Al en est empêché par un cancer très agressif et il confie cette mission à son ami Jake Epping, un enseignant de Lisbon, Maine. Jake accepte mais il lui faudra du temps pour comprendre qu’il transgresse les règles naturelles du temps et surtout pour comprendre les paradoxes du temps et le fameux effet Papillon. Ainsi Jake s’installe dans l’Amérique des années 50 à la recherche d’un mystérieux personnage errant, possiblement le plus médiatisé de l’histoire américaine : Lee Harvey Oswald. Deux questions : tricher avec le temps amènerait quelles conséquences? Et est-ce que le jeu en vaut la chandelle?

AVANT PROPOS :
L’EFFET PAPILLON

L’effet papillon ou théorie de la prédictibilité a été élaborée en 1972 par le météorologue Edward Lorenz lors d’une conférence à l’Association Américaine pour l’Avancement de la Science. La théorie se base sur une question beaucoup plus complexe qu’elle en a l’air : *le battement d’ailes d’un papillon au Brésil peut-il provoquer une tornade au Texas?*

La question devient plus fluide si on ajoute le battement d’ailes de milliards de papillons auxquels on ajoute le battement d’ailes de milliards d’oiseau etc. Lorenz précise bien que si le battement d’ailes d’un papillon au Brésil peut provoquer une tornade au Texas, il peut aussi l’empêcher. Ça nous rapproche considérablement de la théorie du chaos et du déterminisme.

En regard du roman de King, ce qu’il faut surtout retenir, c’est que si l’Effet Papillon s’applique aussi aux humains, cela voudrait dire que des changements de comportement semblant insignifiants au départ pourraient déclencher des bouleversements à grande échelle. Cette théorie à elle seule rendrait le voyage dans le temps extrêmement hasardeux.

Stephen King veut sauver JFK
(figaro.fr)

Je suis heureux qu’un de mes auteurs préférés soit resté aussi fort et alerte parce que 22/11/63 est un roman très fort, un coup de génie de Stephen King qui a décidé de mettre l’horreur de côté pour s’attaquer à une des énigmes les plus complexes du 20e siècle : le meurtre de John Fitzgerald Kennedy. D’ailleurs cette énigme déchire encore les historiens et les milieux politiques américains.

L’Amérique a opté pour l’Acte isolé mais la théorie du complot est encore tenace. Il y a encore de l’obscurité sur cette affaire et ce nouveau livre de King demeurera d’actualité longtemps.

Il faut préciser que King n’apporte aucune réponse à l’énigme du meurtre de Kennedy, mais l’auteur ne croit pas à la théorie du complot. Il m’a semblé évident qu’il est parti du principe de l’acte isolé et l’opinion qu’il se fait du meurtrier de Kennedy, Lee Harvey Oswald est frappante : un minable sans envergure. Le livre de King n’est pas une enquête. L’auteur a simplement imaginé une chronologie, une chaîne d’évènements en utilisant le voyage dans le temps.

Je crois avoir déjà expliqué sur ce site que développer le thème du voyage dans le temps pose un défi de taille : comment rester cohérent et composer avec les risques théoriques du voyage temporel : les paradoxes temporels et l’effet papillon. Voilà la première force du roman de King : La cohérence. Il s’est donné des principes clairs au départ et s’y est tenu. Voyons voir :

1) Chaque saut temporel dure deux minutes au temps de départ. Exemple, Jake a fait un saut de 2011 à 1958. Il est resté 5 ans dans l’ancien monde. Son absence en 2011 n’a duré que deux minutes.

2) Dès qu’un étranger fait intrusion dans le passé, il y a harmonisation par rapport aux effets de sa présence sur le futur. Autrement dit, le passé est tenace et refuse de changer.

3) La théorie de la prédictibilité est incontournable. Même une simple respiration dans le passé peut influencer le futur. C’est l’effet papillon.

4) Enfin, si Jake fait le saut en 1958 et qu’il revient en 2011, un retour éventuel en 1958 annulera tout ce qui a été fait dans le premier saut. C’est ce que King appelle une remise à zéro. Ça j’ai trouvé ça génial et vous découvrirez pourquoi en cours de lecture.

Pour le reste, Stephen King demeure égal à lui-même : son roman est très long (près de 1000 pages), il prend bien son temps pour introduire ses personnages et comme dans la plupart de ses livres, il accuse des longueurs en exposant la psychologie de ses personnages.  Fait intéressant, King brosse un portrait très riche des années 60 : la mode, les tendances, les mentalités, la politique, les relations internationales et bien sûr l’incontournable menace nucléaire.

C’est un roman intense, complexe et extrêmement captivant qui pousse le lecteur à se poser une question non moins complexe : Que serait notre monde d’aujourd’hui si Kennedy n’avait pas été tué en 1963?

Ce à quoi peut s’attendre le lecteur et la lectrice repose sur une magnifique petite phrase très explicite écrite quelque part dans le livre de King et je cite :

*quand on essaye de changer le passé, il mord* (citation de Georges Amberson, extraite de 22/11/63 de Stephen King)

Je crois que vous ne serez pas déçu.

Suggestion de lecture : LE TEMPS PARALYSÉ de Dean Koontz

Je ne ferai pas ici le bilan biographique de Stephen King. Comme vous vous en doutez, il est assez impressionnant. Je vous invite plutôt à visiter le site
www.stephenking999.com .
Ainsi vous saurez tout sur le grand maître de l’étrange. Je vous invite aussi à lire mon article intitulé LE MONDE À PART de Stephen King concernant la septologie LA TOUR SOMBRE, disponible ICI

BONNE LECTURE

Claude Lambert
JUILLET 2013 

MOI, CLAUDE – le livre de ROBERT GRAVES

Moi, Tibère-Claude-Drusus-Néron-Germanicus, etc
(Je ne vais pas vous infliger dès maintenant tous mes titres)
Connu encore tout récemment de mes amis…sous les noms de
-Claude l’Idiot-, Claude le Bègue-, Clau-Clau-Claude-, ou à
Tout le moins de –pauvre oncle Claude-, je m’apprête
Aujourd’hui à écrire l’étrange histoire de ma vie.
……
-Qui est ce vieux monsieur? Demanda un des soldats,
Nouveau venu au Palais. Il n’a pas l’air dangereux.
-Comment, tu ne sais pas? C’est le frère infirme de
Germanicus. Un brave vieux type. Pas méchant pour
Un sou.. Lève-toi Seigneur. On ne te fera pas de mal.

(extrait de MOI, CLAUDE de Robert Graves, Galimard 1987)

Mémoires et récit autobiographique de Tibère-Claude-Drusus-Néron-Germanicus, petit-neveu d’Auguste, neveu de Tibère, oncle de Caligula, beau-père de Néron, époux d’Agripine et de Messaline…devenu malgré lui empereur de Rome suite au meurtre de Caligula (lui-même héritier de Tibère)

Je précise ici que les mémoires de Claude sont imaginaires. En fait, MOI CLAUDE est un roman historique que Robert Graves a écrit sous forme d’autobiographie. Ça n’a rien à voir avec la série télévisée britannique MOI CLAUDE EMPEREUR qu’on dit une série culte et qui, sans l’apport de Derek Jacobi, aurait été un parfait navet.

L’ouvrage de Graves est supérieur par sa sensibilité, sa sobriété et la recherche constante de la réalité politique de l’époque, une politique qui était polluée par des croyances qu’aujourd’hui nous jugeons absurdes, conditionnés que nous sommes par le modernisme libéral du 21e siècle.

Graves donne donc la parole à Claude, considéré par ses contemporains comme un parfait débile intellectuel et qui fait le bilan de sa vie. J’ai apprécié le fait que l’auteur ait bien mis en perspective le fait que Claude n’a jamais voulu être empereur. Il l’est devenu parce qu’on le jugeait plus manipulable que dangereux…c’était sans doute une erreur.

Graves n’a pas fait l’erreur de sombrer dans le sensationnalisme. Mais que pouvait rapporter Claude de sa vie publique sinon les meurtres, les boucheries, les intrigues de cour, les mensonges, les trahisons, les complots, la vie débridée des Julio-Claudiens. Cependant, l’auteur a pris soin de comprendre l’homme.

Bien que l’empire Romain ait continué de s’étendre sous le règne de Claude, ce dernier était sans doute le moins *militaire* des Césars. Il s’intéressait davantage à la justice, aux affaires sociales et à l’architecture. C’était un bon administrateur et un bâtisseur. En plus, il était travaillant. Pas mal pour quelqu’un à qui on ne prêtait que la moitié d’une cervelle (aspect qui a été retenue dans de nombreux livres et au cinéma)

Bien sûr, MOI CLAUDE est un roman mais je crois que son regard critique sur la politique et la décadence des Césars est crédible…un aperçu de quelques éléments importants qui devaient tisser lentement la toile de la chute de l’empire romain.

Un livre intéressant…

Suggestion de lecture : LE SCANDALEUX HELIOGABALE d’Emma Locatelli

À gauche :
l’auteur Robert Graves

BONNE LECTURE

JAILU/Claude Lambert
MAI 2013

Dans la peau de nos ancêtres…GUY SOLENN

Je vous parle aujourd’hui d’un ouvrage que j’ai trouvé très intéressant et divertissant. Il s’agit de DANS LA PEAU DE NOS ANCÊTRES, de Guy Solenn. C’est un livre d’un peu plus de 200 pages divisé en courts paragraphes parlant du mode de vie de nos ancêtres, dans ses petits détails sur lesquels les livres d’histoire ne s’arrêtent généralement pas. La période visée est principalement du Moyen Âge à nos jours, tel que mentionné sur le quatrième de couverture. Un détail important qui n’y figure pas par contre, c’est que ce livre concerne surtout la France.

Bien que la plupart des informations sont sans doute applicables sur la majeure partie de l’occident, les nombreuses anecdotes, exemples, clins d’oeil concernent presqu’essentiellement l’histoire de la France. Ça reste très intéressant, mais ça aurait été la moindre des choses de le signaler d’une quelconque façon, dans le titre ou ailleurs.

Mais à part cette petite frustration, je suis très satisfait de ce livre. La division en petits paragraphes et l’écriture simple, concise en font un livre divertissant et agréable à lire. Les petites images qui ponctuent les articles, sans être extraordinaires, augmentent l’attrait général. Il y a beaucoup de sujets abordés: Les villes, la campagne, la relation avec le temps, le divertissement, la famille, les métiers, la cuisine, l’éducation, la hiérarchie et l’hygiène.

Ce sujet revient d’ailleurs assez souvent. Des exemples d’articles: La création de la poubelle, la popularisation de la patate, l’évolution du pantalon, la découverte du savon, l’apparition de l’éclairage public, etc etc etc…

Oui assurément le curieux y trouvera son compte. L’historien par contre sera soit inspiré pour aller approfondir ses connaissances ou juste frustré par un ouvrage trop simpliste et pratiquement sans références. Personnellement j’ai trouvé le livre efficace en ce sens qu’il m’est arrivé à plusieurs reprises pendant la lecture, de me retrouver dans ma cuisine, mon salon, mon auto, et de m’arrêter un instant malgré moi, et de contempler ce qui m’entoure en me disant « wow, que les choses étaient différentes… que je suis bien! ».

Suggestion de lecture : MAISONS ANCIENNES DU QUÉBEC, de Perry Mastrovito

Phenixgoglu
Mars 2013

(En Complément…)

ALBERT EINSTEIN – Comment je vois le monde

« La condition des hommes s’avérerait pitoyable s’ils devaient être domptés par la peur d’un châtiment ou par l’espoir d’une récompense après la mort. »

« Mais c’est la personne humaine, libre, créatrice et sensible qui façonne le beau et le sublime, alors que les masses restent entraînées dans une ronde infernale d’imbécillité et d’abrutissement. »

« Ceux qui aiment marcher en rangs sur une musique : ce ne peut être que par erreur qu’ils ont reçu un cerveau, une moelle épinière leur suffirait amplement.

« Je crois que l’exagération de l’attitude férocement intellectuelle, sévèrement orientée sur le concret et le réel, fruit de notre éducation, représente un danger pour les valeurs morales. Je ne pense pas aux risques inhérents aux progrès de la technologie humaine, mais à la prolifération des échanges intellectuels platement matérialiste, comme un gel paralysant les relations humaines. »

« Et pourtant je crois profondément en l’humanité. Je sais que ce cancer aurait dû depuis longtemps être guéri. Mais le bon sens des hommes est systématiquement corrompu. Et les coupables se nomment: école, presse, monde des affaires, monde politique. »

« C’est le rôle essentiel du professeur d’éveiller la joie de travailler et de connaître. »
(Voir le complément pour plus!)

« Si l’on sépare le judaïsme des prophètes, et le christianisme tel qu’il fut enseigné par Jésus-Christ de tous les ajouts ultérieurs, en particulier ceux des prêtres, il subsiste une doctrine capable de guérir l’humanité de toutes les maladies sociales. »

« Je m’imagine qu’une des motivations les plus puissantes qui incitent à une oeuvre artistique ou scientifique, consiste en une volonté d’évasion du quotidien dans sa rigueur cruelle et sa monotonie désespérante, en un besoin d’échapper aux chaînes des désirs propres éternellement instables. Cela pousse les êtres sensibles à se dégager de leur existence personnelle pour chercher l’univers de la contemplation et de la compréhension objectives. »

-Comment je vois  le monde, Albert Einstein

Ce sont ces citations et extraits qui m’ont poussé à chercher le livre Comment je vois le monde, de Albert Einstein. Il ne s’agit pas d’une biographie, ça semble plutôt être une réelle volonté d’Einstein d’en dire d’avantage sur sa vision des choses, ses idées, ses opinions. J’avoue qu’après une première lecture (et même la relecture de certains passages), eh bien je n’ai vraiment pas tout compris. Le texte est par moment dense et technique. Le livre est divisé en quatre grands thèmes (Le pacifisme, la lutte contre le nazisme, les problèmes juifs, et la science), eux même subdivisés en plusieurs articles. Ça aide un peu la lecture, mais ça ne rend pas vraiment le tout plus assimilable.

Ce que j’ai retenu surtout de Comment je vois le monde, c’est qu’Einstein parle de la paix, de la démilitarisation, de l’abolition du service militaire obligatoire, du désarmement. Il est aussi question de science évidement, et aussi de religion, surtout du judaïsme. Le tout à travers des textes personnels, des échanges de lettres et des discours  Certains passages sont parfaitement clairs et inspirants, alors que d’autres furent insaisissables pour un non-initié comme moi, quand il aborde la philosophie ou la physique par exemple.

Je ne regrette pas la lecture de ce livre, car malgré tout j’ai pu en apprendre beaucoup sur le personnage et son époque également (ce livre couvre de 1934 à 1955, l’année de la mort d’Einstein). Mais si quelqu’un veut vraiment se documenter, je conseillerais plutôt de partir en quête d’une bonne biographie. Je ne recommande ce livre qu’aux connaisseurs, aux collectionneurs, aux « Einsteinologues » en devenir. Suggestion

Suggestion de lecture : PHOBIE de Sarah Cohen-Scali

Phenixgoglu
Mars 2013
(En complément…)

CODE ZÉRO, le livre de KEN FOLLETT


*Écoutez, monsieur Carroll,
L’armée n’emploierait pas Un cinglé pour un projet
Ultrasecret. En temps normal,
Luke est aussi sain d’esprit que Vous et moi. De toute évidence, Quelque chose l’a déstabilisé…* (
Commentaire sur le livre CODE ZÉRO de Ken Follet, version française de CODE TO ZERO, paru en 2001)

1958, en pleine guerre froide, un scientifique, Claude Lucas, concepteur de la fusée américaine EXPLORER 1, perd la mémoire dans des circonstances mystérieuses et se retrouve vêtu en clochard dans un milieu malfamé. Cherchant à retrouver son identité,  Lucas, surnommé Luke comprend petit à petit qu’il a été drogué et qu’il est accusé d’espionnage par un agent de la CIA prêt à tout pour l’empêcher de reconstituer son passé. Avant que sa mémoire bascule, Luke avait découvert que le lancement d’EXPLORER allait être saboté.

Pour Luke, le défi  est de taille : convaincre le Pentagone d’annuler le décollage d’Explorer, identifier le saboteur, sauver sa vie, empêcher une catastrophe majeure et remettre les États-Unis en selle dans la course à la conquête de l’espace. Mais voilà…le compte à rebours  est très mince.

Voici un livre que j’ai beaucoup aimé. Il se lit bien et vite. Les chapitres sont en réalité des séquences temporelles (temps réel), intenses, sans longueur, à part peut-être quelques inclusions sentimentales qui sont du reste toujours en lien avec le drame. Cette façon d’écrire de Follet me rend automatiquement captif…c’est une force irrésistible qui caractérise l’auteur.

Fidèle à sa tradition, Follet s’est basé sur un évènement historique pour imaginer son histoire. En effet, il faut se rappeler que le 29 janvier 1985, le lancement d’Explorer avait été annulé et reporté, soi-disant pour des raisons météorologiques, alors que le temps était magnifique sur Cap-Canaveral.

J’aimerais préciser aussi que ce livre est bien documenté politiquement et scientifiquement. En effet, Follet met très bien en perspective le contexte de la guerre froide, l’intensification de l’espionnage et les moyens fantastiques déployés pour développer le contre-espionnage.

D’autre part, Follet met aussi en évidence le défi scientifique extraordinaire que représente la conquête de l’espace en donnant des caractéristiques de la fusée au début de chaque séquence temporelle du roman. Pour moi ça a un ptit coté génial parce que le déroulement de l’histoire est libre de détails scientifiques et techniques encombrants et compliqués.

C’est un livre non seulement divertissant, mais crédible…une lecture agréable que je n’hésite pas une seconde à vous recommander.

Suggestion de lecture : APOCALYPSE SUR COMMANDE de Ken Follet

Bonne Lecture

Claude Lambert
Février 2013

(En Complément…)

LE DERNIER DES MOHICANS, FENIMORE COOPER

En fait, il ne nous a jamais vraiment quitté, le grand JAMES FENIMORE COOPER qui vécut de 1789 à 1851 et qui nous a laissé entre autres un des plus beaux fleurons de la littérature américaine dont je veux vous parler aujourd’hui :

L E   D E R N I E R   D E S   M O H I C A N S

« Ce que c’est, ce que ce n’est pas, nul ici ne saurait le dire. Pourtant, Chingachgook et moi, depuis trente ans que nous parcourons la forêt, avons entendu toutes les sortes de cris de bêtes sauvages ou d’indiens. Mais là, je suis pris de court… » 

Œil de Faucon Longue Carabine
Extrait de *LE DERNIER DES MOHICANS
Par Fenimore Cooper (1826)
(Gallimard)

LE DERNIER DES MOHICANS est le tome 2 du cycle des histoires de BAS-DE-CUIR de Fenimore Cooper. Le cycle comprend 5 romans historiques parus entre 1823 et 1840 : Le tueur de daim, Le dernier des Mohicans, Le lac Ontario, Les Pionniers et La Prairie

L’œuvre raconte l’histoire du chasseur blanc Natthaniel Bumppo, surnommé Natty, dit Bas-de-cuir, dit Longue Carabine dit Œil-de-Faucon.

LE DERNIER DES MOHICANS met en scène, outre Œil-de-Faucon, deux personnages forts attachants : Chingachgook, le chef Sagamore, dernier des Mohicans et son fils Uncas.

Timbres évoquant les 5 romans de la pentalogie BAS DE CUIR : Le tueur de daim, Le Dernier des Mohicans, Le Lac Ontario, Les Pionniers et La Prairie. (Wikipédia.org)

Au XVIIIème siècle, la guerre fait rage pour la conquête du Nouveau Monde entre les anglais commandés par le Général Monro et les Français commandés par le Marquis de Montcalm. Dans cette guerre sans merci, les Français ont conclu une alliance avec les Hurons, des guerriers féroces inspirés par un chef cruel et cupide.

Cette alliance donne un avantage indéniable aux Français. C’est dans ce contexte qu’un jeune officier anglais, Duncan Heyward est chargé de conduire deux jeunes filles : Alice et Cora, chez leur père, le général Monro dans son fort assiégé.

Trahi par leur guide, un indien Huron nommé Magua, dit Renard Subtil, laissés à eux-mêmes en pleine forêt, ils ne doivent leur vie qu’à un chasseur nommé Longue-Carabine par ses ennemis et Œil-De-Faucon par ses alliés, un vieux chef indien Sagamore, Chigachgook, et son fils, Uncas, le dernier des Mohicans.

Comment peuvent-ils échapper à la lutte sans merci que se livrent les Européens dans la conquête de la jeune Amérique ainsi qu’au rôle cruel que jouent les Hurons dans ce drame.

La prise de Québec, huile sur toile par Hervey Smyth, 1797

Dans LE DERNIER DES MOHICANS, Fenimore Cooper a placé ses héros dans un contexte de vécu. En effet la prise de Fort William-Henry (bastion britannique dirigé par le général Munro) en 1757 par les Français du Marquis de Montcalm est une réalité historique.

Le fait qu’un grand nombre d’anglais furent massacrés après leur  capitulation par des indiens alliés des français (Montcalm aurait fermé les yeux là-dessus ce qui a gâché un peu sa victoire et entaché son honneur de soldat) est aussi une réalité historique.

Et, faut-il le rappeler, deux ans après ces évènements dramatiques, Louis de Saint-Véran, dit Marquis de Montcalm trouvera une mort héroïque lors de la bataille des Plaines d’Abraham qui marquera le début de la conquête britannique et la fin du régime Français en Nouvelle France.

J’ai lu l’ensemble de la quintalogie BAS-DE-CUIR mais j’ai été subjugué par le tome 2 : LE DERNIER DES MOHICANS. 

Plusieurs éléments m’ont fasciné dans ce roman. Outre le fait que Cooper décrit un évènement qui participe activement au tissage d’une toile qui deviendra énorme (la naissance des États-Unis d’Amérique en 1783), l’écrivain donne à ses personnages une force de caractère remarquable.

Bien sûr, je ne peux pas vous le cacher, Œil-De-Faucon est énervant par moment. Il est vantard, il est bavard mais il est d’une loyauté indéfectible, doté d’un sens de l’amitié poussé, voire altruiste. Il peut être mufle, mais il est d’une bravoure sans faille. Il sait même se montrer sensible. La façon dont il décrit son pays de lacs, de rivières de forêts riches en gibiers et en essences pousse parfois à la poésie.

Chingachgook, le grand Sagamore et son fils Uncas, le personnage le plus attachant du roman de Cooper sont les derniers Mohicans, amis d’œil de Faucon, vénérant tous les fruits du créateur sauf les Hurons et les Français. Ce sont des êtres intérieurs d’une très grande sagesse, forts, habiles et  fidèles en amitié. Ils parlent peu mais leurs actes témoignent de l’amour de leur terre et de leur peuple et d’un sens développé de la justice et de la loyauté.

Comment ne pas être subjugué par la qualité de ces personnages. Bien qu’elle frôle parfois l’invraisemblance et la naïveté, l’écriture est simple mais détaillée et elle a surtout le don extraordinaire de plonger le lecteur au cœur du décor, et de lui faire adopter une contrée merveilleuse que les belligérants anglais et français s’arrachent avec peine et qui est appelé à devenir le pays le plus puissant du monde. L’auteur nous amène aussi à mieux saisir la mentalité et l’état d’Esprit des grands perdants de cette histoire : les Amérindiens.

Je vous recommande avec chaleur la lecture de LE DERNIER DES MOHICANS, une histoire aux nombreux rebondissements mais gardant fidèlement du début à la fin un caractère romanesque.

Dépaysement garanti.

Suggestion de lecture : TERRES DE SANG ET DE LUMIÈRE de Jocelyne Godard

JAILU
Janvier 2013
(En Complément…)

LE RETOUR DE FENIMORE

Bonjour à tous et à toutes,

Aujourd’hui, j’aimerais partager avec vous, mon engouement pour un des
écrivains les plus cotés du XIXe siècle : Fenimore Cooper.

Admiré de ses pairs dont Balzac et Victor Hugo, Cooper a créé un des
personnages les plus populaires de la littérature américaine : Bas-de-cuir.

Je vous invite à lire mon article et plonger avec moi dans un cadre aussi dur
qu’enchanteur : le monde d’œil-de-Faucon et du Dernier des Mohicans…

Aller lire LE RETOUR DE FENIMORE

JAILU
JANVIER 2013