LES 120 JOURNÉES DE SODOME, MARQUIS DE SADE

*…il se relève, baise encore la petite fille,
lui expose un gros vilain cul sale qu’il lui
ordonne de secouer et de socratiser;…*
…………….
*…Moi qui vous parle, j’ai bandé à voler,
à assassiner, à incendier, et je suis
parfaitement sûr que ce n’est pas l’objet
du libertinage qui nous anime,  mais
l’idée du mal.*
(extraits de LES 120 JOURNÉES DE SODOME, 1785)

Vers la fin du règne de Louis XIV, quatre psychopathes de 45 à 60 ans se réunissent pour mettre à exécution une bacchanale d’une incroyable perversité. Le président DeCurval, le financier Durcet, le duc de Blangis et l’évêque son frère sont des aristocrates dont l’énorme fortune n’est que le produit du crime. Ces quatre êtres sans morale réunissent 38 objets de luxure pour les soumettre à leur pouvoir absolu : leur épouse, 8 jeunes garçons, 8 jeunes filles, tous kidnappés,  8 sodomistes choisis pour leur dimension monstrueuse, quatre femmes sexagénaires pour garder le harem, quatre proxénètes appelées historiennes et six cuisinières et servantes. Les 42 personnages s’enferment dans un château isolé pour 120 journées d’une orgie sans nom, dans un crescendo d’horreur. 

UNE INCURSIONS CHEZ LES DÉGÉNÉRÉS

J’ai longtemps hésité avant d’écrire un article sur le Marquis de Sade. Après tout, que peut nous apprendre le Marquis hormis cette incroyable capacité qu’ont beaucoup d’êtres humains (trop nombreux hélas) à dépasser les limites de la perversité et de la cruauté. Et puis je me suis longtemps demandé pourquoi certains pontes de la critique littéraire prétendent que le Marquis de Sade doit figurer dans toutes bonnes bibliothèques dignes du titre. Et je me suis aussi demandé quelle était l’urgence d’adapter ces livres au cinéma (ce qui n’a donné que de parfaits navets) Peut-être ai-je voulu jouer le jeu pour vider la question.

Alors j’ai lu deux livres du Marquis : LA PHILOSOPHIE DANS LE BOUDOIR, un torchon élimé et simpliste, et comme deuxième livre (il n’y en aura pas d’autres, y’a rien de plus sûr) LES 120 JOURNÉES DE SODOME.

C’est après la lecture seulement que j’ai réalisé que ces deux titres étaient des œuvres dites clandestines du Marquis de Sade. C’est-à-dire que le Marquis a nié les avoir écrites jusqu’à ce que la preuve ait été faite qu’il en était bien l’auteur.

Le Marquis de Sade a passé presque la moitié de sa vie en prison, pour crimes multiples dont plusieurs épisodes de débauche. D’ailleurs son livre LES 120 JOURNÉES DE SODOME a été écrit à la Bastille vers la fin de 1785.

Ce livre innommable a été écrit dans un français plus que douteux et très expédié par un esprit torturé. De plus, la version numérique sur laquelle je suis tombé était bâclée complètement. Je m’en suis toutefois contenté, presqu’hypnotisé au départ par une gentille note d’avertissement de l’éditeur : *Voici un livre nauséabond, à tel point qu’il semble voué à finir comme il fut écrit, sous forme de feuilles volantes clouées au mur d’un cabinet d’aisance…un livre criminel et pourtant empreint de la plus froide raison*

Un peu plus loin, le Marquis lui-même semble nous prévenir que si on n’a pas le cœur solide, mieux vaut ne pas entreprendre la lecture de ce livre cru et sans âme.

Le fil conducteur de ce livre (car il y en a un malgré tout) est l’expérimentation, en 120 journées, de 600 perversions les plus représentatives des théories du Marquis de Sade développées dans l’ensemble de son œuvre. C’est ici que l’avertissement du Marquis dont j’ai parlé plus haut prend tout son sens : *C’est maintenant, ami lecteur, qu’il faut disposer ton cœur et ton esprit au récit le plus impur qui ait jamais été fait depuis que le monde existe…*

Cette histoire est donc l’exécution de toutes les facettes de la perversion. Ce livre est insoutenable et réunit ce que le marquis considère sans doute comme les raffinements du libertinage mais que moi je considère plutôt comme la dérive totale d’un esprit tordu : sadomasochisme explicite jusqu’à l’ennui, coprophagie, scatologie, torture, bacchanale, sodomie, pornographie bas de gamme, meurtre pour le plaisir et j’en resterai là.

Je ne nie pas que le Marquis de Sade ait laissé sa marque dans la littérature. Elle est effectivement difficile à éviter. Mais à la lumière du propos de LES 120 JOURNÉES DE SODOME, je dirais qu’en matière de littérature ordurière, on ne peut faire ni mieux ni pire.

Quant aux raisons pour lesquelles le Marquis de Sade devrait obligatoirement figurer dans toutes bonnes bibliothèques qui se respectent, je suis maintenant fixé, il n’y en a pas. Je considère (et c’est très personnel) que le Marquis de Sade est la représentation ultime de l’absence de raison.

Je suis heureux de passer à autre chose.

Suggestion de lecture : LE MOINE, de Mathew Gregory-Lewis

JAILU
MARS 2014

(En Complément…)

Une toile machiavélique

Amies lectrices, amis lecteurs, mes meilleures salutations.

Aujourd’hui, je vous propose un article plus long qu’à l’accoutumée.

Ça pourrait être justifié par la longueur du livre, mais ça va beaucoup plus loin. Imaginez en effet que plane sur l’existence humaine un péril nouveau genre, ourdi par…le cinéma.

Je vous invite à lire mon article et à plonger avec moi, le temps d’une lecture, dans *le Côté obscur de la Force*.

Aller lire le commentaire sur La conspiration des ténèbres

JAILU

LA CONSPIRATION DES TÉNÈBRES, Théodore ROSZAK

alors même que leurs crimes son repoussants.
ils nous apparaissent comme les victimes d’un
sort cruel qui a détruit ce qu’ils avaient de
meilleur. Nous sentons leur combat et nous
savons qu’il est vain, car le mal contre lequel
ils se battent est trop grand. C’est un mal
phénoménal.
(extrait de La conspiration des ténèbres,
Theodore Roszak, le Cherche midi, 2004)

En fréquentant des cinémas de Los Angeles peu recommandables, Jonathan Gates, un universitaire, étudiant en cinéma, découvre l’œuvre cinématographique de Max Castle, un réalisateur prodige qui a tourné quelques films avant d’être oublié. Graduellement, Gates développe une fascination pour l’œuvre et la personnalité de Castle. Cette fascination tournera à l’obsession quand Gates découvrira des mystères entourant la vie et l’œuvre de Castle…mystères qu’il décide d’élucider par tous les moyens.

Cette quête plongera Jonathan Gates des hautes sphères de l’industrie cinématographique jusqu’au cœur des sociétés secrètes. Sa ténacité l’amènera à dévoiler un étonnant complot et surtout il apprendra qui était véritablement ce génial maître des illusions que fut Max Castle.

château cathare

AVANT-PROPOS : LE CATHARISME

Le catharisme est un mouvement chrétien médiéval. Les Cathares étaient en fait des Albigeois. Le terme Cathare a été développé par l’Église pour désigner de dangereux hérétiques condamnés et pourchassés par l’Inquisition pour de graves manquements aux doctrines de l’Église. Les Cathares envisageaient un salut passant par un strict zèle religieux poussant jusqu’à l’ascétisme avec interdiction formelle de procréer, chasteté complète.

Les Cathares devaient s’abstenir de toute méchanceté, de tout vice. Ils ne devaient pas tuer les animaux. Ils devaient s’abstenir de toute consommation issue de la reproduction animale : pas de viande, pas de lait, pas d’œufs, pas de produits dérivés. Ils étaient astreints à des carêmes éprouvants, voire mortifiants.

Le but des Cathares était de prêcher la plus stricte morale évangélique, sans temple ni aucun artifice *sacerdotal*.  Avec une telle radicalité,  il n’est pas étonnant que l’inquisition qualifie les Cathares de parfaits. Le paradoxe avec l’opulence de l’Église était pour le moins spectaculaire.

croix cathare

C’est un livre tout en longueur, (800 pages) avec une somme énorme de faits insolites, de détails sordides et d’anecdotes formulées parfois avec une crudité bouleversante. L’évolution de l’intrigue est d’une lenteur exaspérante. Mais j’invite le lecteur à persévérer car en plus d’apprendre beaucoup de choses sur l’âge d’or et les dessous d’Hollywood, l’auteur implique le  cinéma ainsi qu’une secte religieuse machiavélique dans un vaste complot, une machination diabolique qui vise à sceller définitivement le sort de l’humanité. Le sujet est original et bien que l’histoire est parfois prévisible, elle m’a tenu en haleine de par sa toile aussi captivante qu’effrayante.

C’est toutefois le livre le plus noir qu’il m’a été donné de lire. En effet dans cette histoire, le héros-narrateur Jonathan Gates étudie l’œuvre de deux êtres déviants et tordus : Max Castle et Simon Dunkle, réalisateurs et metteurs en scènes de bacchanales cinématographiques qui font plonger les cinéphiles dans un univers de stupre, de haine, de violence et de sang.

Ces réalisateurs à l’esprit torturé n’hésitent  pas à exploiter la technique de l’image subliminale et d’autres moyens sophistiqués dans le but de prôner le catharisme, un enseignement religieux qui, à mon avis est inapplicable parce qu’il exige l’ascétisme, l’abnégation totale, une chasteté complète, la mortification et un régime alimentaire absolument ridicule. Bref, une perfection tout à fait à l’opposé de la nature humaine, autrement dit, l’autodestruction de la chair.

Vous voyez un peu où je veux en venir. Il y a complot. Et ce complot nous est dévoilé par Roszak de façon très graduelle, avec une lenteur étouffante et des détails parfois dégoûtants jusqu’à soulever le cœur.

Outre le fait que le livre est très long, avec des personnages un peu fades et une conclusion qui n’en finit pas de finir et qui m’a déçu quelque peu, je classe LA CONSPIRATION DES TÉNEBRES comme un grand thriller historique d’une grande érudition, porteur d’une profonde réflexion sur l’énorme pouvoir du septième art, c’est-à-dire, sur cette capacité qu’a le cinéma de façonner les esprits, de créer des tendances, d’influencer les modes de pensées et d’apprentissages. Imaginez tout ce qu’on peut sortir sur le potentiel social du cinéma.

Il est facile d’imaginer aussi je pense le mal que peut faire le cinéma s’il tombait entre les mains d’esprits malveillants à cheval entre le génie et la folie. C’est un livre à la fois excitant et effrayant.

Suggestion de lecture : LE SYNDROME <E> de Frank Thilliez

BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert

Février 2014

(En Complément…)

L’HOMME QUI DEVINT DIEU, GÉRALD MESSADIÉ

*Les Juifs avaient failli aimer leur Dieu.
Mais comme les autres, qui ne survivaient
Qu’à l’aide d’exorcismes, de sacrifices et
D’imprécations, autant de cataplasmes de
Plantain sur des esprits saignant de trouille,
 Ils avaient fini par succomber à la peur.
Yahveh, ç’aurait pu être un père, ce n’était
Plus qu’un policier…
L’HOMME QUI DEVINT DIEU,
Éditions Robert Laffont, 1988

À partir de recherches très poussées et échelonnées sur plus d’une dizaine d’années, Gérald Messadié reconstitue ce qu’aurait pu être en réalité la vie de Jésus. À partir de nouvelles données, l’auteur tente d’éclaircir des points restés obscurs dans les évangiles : des passages éludés, une chronologie incomplète, des personnages et contextes peu ou mal définis. Messadié reprend donc en détail la vie de Jésus pour ce qu’il est d’abord : un homme. Il développe le parcours de cet homme, qui influencera toute l’histoire, dans un contexte politique, social, économique, humain et religieux bien sûr et définira de façon détaillée le rôle de ses proches.

C’est un livre surprenant et très audacieux.  En effet, suivant la logique de faits nouveaux découverts au cours de plusieurs années de recherches intensives, Gérald Messadié a réécrit, sous forme de roman, le parcours de Jésus et ça donne une version complètement différente de celle proposée par les évangiles canoniques. Pour beaucoup de personnes, ce livre est dérangeant à cause de la position de l’auteur face à Jésus et des révélations qui y sont faites.

Je pourrais citer par exemple l’hypothèse selon laquelle Jésus ne serait pas mort sur la Croix. Malgré nombre d’arguments solides qui étayent cette thèse, c’est énorme et plutôt spectaculaire comme *fait nouveau*. Après tout, la Foi catholique ne repose-t-elle pas sur la mort de Jésus crucifié puis ressuscité le troisième jour?

J’aimerais citer aussi le rôle de Marie-Madeleine qui aurait été beaucoup plus actif et intense que le laisse supposer les évangiles de Luc, Mathieu, Jean et Marc. Selon la version de Messadié, elle aurait, à toute fin pratique, présidé à la naissance de l’Église.

J’ai lu ce livre consciencieusement et avec un maximum d’ouverture d’esprit. Je n’ai décelé aucune intention malveillante de l’auteur. Il se garde bien de vouloir bousculer la foi, condamné l’Église ou dénoncer les écritures canoniques. Il le précise très bien dans sa postface.

Ce livre m’a touché parce que Messadié a d’abord considéré Jésus comme un homme. Il a laissé de côté l’essence divine. Il ne s’est pas encombré des dogmes. Il a voulu simplement mettre en évidence ce qui constitue pour lui le vrai parcours de Jésus en posant sur sa vie un regard quasi quotidien quant à son implication dans la communauté, le message qu’il véhiculait et son caractère profondément humain.

Ce livre m’a plus et il devrait vous intéresser dans la mesure où vous gardez l’esprit ouvert. Le point de vue de l’auteur peut être dérangeant, voire offusquant, mais ce n’est qu’un point de vue. Il faut prendre ce livre pour ce qu’il est : la proposition d’une nouvelle version de l’histoire. Pour moi, le livre est bien documenté et ses révélations sont crédibles. Le reste est une question d’interprétation et de Foi.

Suggestion de lecture : LA FORMULE DE DIEU de J.R. Dos Santos

Pour en savoir davantage sur la démarche de Gérald Messadié, je vous recommande de lire L’HOMME QUI DEVINT DIEU LES SOURCES. Vous y trouverez les sources et analyses qui ont permis à l’auteur de reconstituer le parcours de Jésus. Ce livre pourrait répondre à beaucoup de questions et son écriture est très accessible.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
FÉVRIER 2014

(En Complément…)

L’APOCALYPSE N’EST PAS POUR DEMAIN, Bruno Tertrais

*…Qu’il s’agisse du développement, de la santé
De l’environnement ou des relations internationales,
Le monde va mieux qu’on le pense, et le futur n’est
Pas aussi sombre qu’on le dit*
(extrait de L’APOCALYPSE N’EST PAS POUR DEMAIN, de
Bruno Tertrais, Éditions Denoel, 2011) 

L’APOCALYPSE N’EST PAS POUR DEMAIN est un livre-documentaire qui s’appuie sur l’analyse rigoureuse d’études scientifiques et des statistiques pour dédramatiser la menace nucléaire et mettre en veilleuse les multiples scénarios d’autodestruction du monde qui circulent à l’échelle de la planète sous forme de rumeurs ou de prophéties. L’auteur adopte une vision beaucoup plus sereine du monde et explique l’importance de bannir le catastrophisme.

Les prophéties d’autodestruction humaine, d’apocalypse, bref de fin du monde ne sont pas un phénomène nouveau. Elles fleurissent depuis le milieu du XIXe siècle et malheureusement les humains leur ont accordé une crédibilité qu’elles n’ont jamais eue dans les faits. Après tout, n’ont-elles pas toujours été fausses?

Mais les prophéties continuent de pleuvoir et elles reçoivent toujours autant d’attention. L’auteur veut démontrer dans son livre que le catastrophisme est contre-productif.

J’ai choisi et lu ce livre parce qu’au départ son titre et sa présentation vont complètement à contre-courant des idées reçues. Et je n’ai pas été déçu car j’ai pu constater rapidement la crédibilité de l’ensemble.

En effet, en s’appuyant sur les dernières statistiques, une analyse rigoureuse des études scientifiques les plus pointues et sur la logique des faits, Bruno Tertrais dévoile sa compréhension des grands problèmes contemporains et de l’avenir qui nous attend.

L’auteur passe en revue tout ce qui a pu inspirer les prophètes de malheur : terrorisme et menace nucléaire, la menace djihadiste, l’effondrement du capitalisme, la prolifération des armes de destruction massive, l’épuisement des ressources naturelles, les pandémies, une démographie hors de contrôle, la dégradation du climat, la surutilisation des produits chimiques, la pollution, les guerres et j’en passe.

L’auteur ne prétend pas que tout va bien. Au contraire il pointe du doigt des défis extrêmement sérieux mais il veut expliquer de façon très rigoureuse pourquoi les prophètes de malheur ont toujours eu tort et démystifier le catastrophisme.

Tertrais propose une vision plus sereine de notre avenir et ce qui m’a séduit dans son livre, c’est qu’il le fait avec un optimisme raisonné en s’appuyant sur des recherches rigoureuses comme en témoigne une très imposante bibliographie proposée à la fin du livre et le tout, sans faire aucune prédiction.

La meilleure façon de conclure ici est de mentionner l’avertissement du grand philosophe Karl Popper publié en 1957 et cité dans le livre de Bruno Tertrais :

 *…IL NE PEUT Y AVOIR DE PRÉDICTION DU COURS DE L’HISTOIRE HUMAINE À L’AIDE DE MÉTHODES RATIONNELLES DE TYPE SCIENTIFIQUE*.

Suggestion de lecture : A COMME APOCALYPSE de Preston & Child

BONNE LECTURE
JAILU
JANVIER 2014

(En complément…)

LES AUTRES, C’EST TOUJOURS RIEN QUE DES SALES TYPES

Comme son nom l’indique, le psychorigide
a l’âme calcifiée, ou, au choix, le mental
bronchiteux, la pneumonie ontologique,
bref : le pneu à plat. Il manque d’air. Ce
qui ne l’empêche pas d’être gonflant.

                                                                              **********************************

Des tas de gens meurent de la maladie,
mais beaucoup commencent par en vivre.
(extraits de LES AUTRES, C’EST RIEN QUE
DES SALES TYPES. De Jacques A. Bertrand
Éditions Julliard, 2009)

commentaire sur le livre
De Jacques A. Bertrand

Dans ce petit recueil, Jacques Bertrand décrit et critique très librement notre société actuelle à travers 20 grandes catégories d’êtres humains, présentés comme des *sales types* parce qu’ils dérangent, agacent, déplacent de l’air, irritent, exaspèrent, énervent. On retrouve entre autres l’enthousiaste, le végétarien,  le psychorigide, l’agélaste (celui qui ne rit jamais) , le touriste, le con et l’imbécile heureux.

C’est un livre intéressant qui va au-delà de l’humour. En effet, le ton est carrément satirique. Je mentionne tout de suite que dans ce livre, les humains sont analysés voire psychanalysés par un Français. Il ne faudra donc pas s’étonner de lire un chapitre consacré au parisien, considéré lui aussi comme un sale type par l’auteur. Autre fait intéressant, tous les chapitres débutent par une allusion aux chiens.

Dès le début de la lecture, j’ai senti que l’auteur s’amusait bien à décrire les humains, mais au-delà de l’amusement, Jacques Bertrand analyse la société en utilisant toute la richesse de la langue française pour mettre en perspective les travers de l’être humain.

Si certains propos sont parfois acides, l’ensemble est drôle et amusant pouvant même pousser les lecteurs (qui n’ont pas peur de se moquer d’eux-mêmes) à se trouver une place dans une ou plusieurs catégories. considérant sans doute que l’humain et le chien sont intimement  liés. Par-delà son humour parfois grinçant, l’auteur nous laisse le choix de classer l’animal comme sale type version canine, sale chien ou…comme le dindon de la farce.

C’est un livre drôle mais pas vraiment méchant. Du moins pas à outrance. C’est d’abord une merveille d’exploitation linguistique. Pour terminer, mes petites questions satiriques à moi seraient…est-ce que l’auteur lui-même pourrait se reconnaître dans une ou plusieurs catégories de sales types et puis en fin de compte, qui pourrait ne pas être considéré comme un sale type???

Je crois que ça va vous plaire…

Suggestion de lecture : LE VIEUX QUI NE VOULAIT PAS FÊTER SON ANNIVERSAIRE, de Jonas Jonasson

BONNE LECTURE
JAILU
DÉCEMBRE 2013

(En complément…)

UNE CHASSE DANGEREUSE, de CLIFFORD D. SIMAK

*…Dans bien des cas, il serait plus logique
du point de vue économique et même du
point de vue social que l’homme et la
machine ne fassent qu’un, qu’ils soient
jumelés  et deviennent, en fait, un seul
et même organisme.
-Je me demande s’il ne s’agit pas de cela
justement…*
(extrait de LA PLANÈTE AUX PIÈGES, du recueil
UNE CHASSE DANGEREUSE de Clifford D. Simak,
J’ai lu, 1958, réédition 1978)

Au début des années 1970, l’écrivain et agent littéraire français Jacques Sadoul compose un recueil anthologique intitulé UNE CHASSE DANGEREUSE réunissant sept magnifiques textes composés au cœur des années 50 par l’auteur américain de science-fiction Clifford Donald Simak. Il faudra attendre jusqu’à 1979 pour la traduction française avant la distribution par les éditions J’AI LU. On sait que la nature et le respect de l’environnement ainsi que la robotique anthropomorphique comptent parmi les thèmes privilégiés par Simak. Ces thèmes sont omniprésents dans UNE CHASSE DANGEREUSE qui demeure un incontournable de la littérature de science-fiction.

BREF APERÇU :

UNE CHASSE DANGEREUSE :
Dans une planète lointaine, pour sauver sa récolte, un colon traque un animal qui gagne en intelligence au fur et à mesure que la chasse progresse.
POUR SAUVER LA GUERRE :
Dans une époque du futur, alors que la paix règne sur la terre, les hommes peuvent évacuer leur violence en s’entretuant dans le confort d’un territoire de jeu prévu à cette fin.
PLUS BESOIN D’HOMMES :
Un tribunal doit rendre un jugement sur une question très délicate : est-ce qu’un robot peut enfanter, fonder une famille et être soumis aux mêmes lois que les hommes. Pour l’assister, un avocat s’entoure d’une armée de robots versés dans la jurisprudence.
LA PLANÈTE AUX PIÈGES :
Des explorateurs d’une planète lointaine découvrent ce qu’ils appellent des pièges à connaissance et doivent faire face à une grave menace de dé mémorisation.
JARDINAGE :
Dans une époque indéfinie, l’animal le plus évolué de la planète doit cohabiter avec la PLANTE la plus évoluée de la planète…pas facile…
OPÉRATION PUTOIS :
Un homme se lie d’amitié avec un putois. Il se rend vite compte que l’animal a des capacités extraordinaires qui intéressent vivement les militaires…
PROJET MASTODONTE :
Des explorateurs expérimentent le voyage dans le temps. Certaines négligences pourraient bien faire en sorte que tout ne se passe pas comme prévu…

Malgré des débuts modestes, voire difficiles, Clifford D. Simak (1904-1988) est devenu un auteur emblématique de la science-fiction. Instituteur, puis journaliste, il fera finalement son entrée dans le monde littéraire avec AMAZING STORIES en 1937. Il atteindra la consécration dans les années 50 avec DEMAIN LES CHIENS, son plus célèbre roman. En 1964, il obtiendra le prix HUGO pour AU CARREFOUR DES ÉTOILES, un chef d’œuvre de la SF. Je retiens de l’auteur un profond humanisme qui transparaît dans l’ensemble de son œuvre

À la lecture de ce recueil, j’ai été rapidement conquis par la beauté des textes. On sait que Simak était un passionné de sciences, qu’il a même été journaliste scientifique. La tentation était peut-être grande d’alourdir l’œuvre avec des détails scientifiques et techniques complexes.

Simak n’est pas tombé dans ce piège. Il a plutôt empreint son œuvre d’une splendide richesse descriptive mettant en perspective des thèmes compatibles avec son caractère humaniste et près de la nature : la tolérance, l’amitié, la paix et bien sûr la recherche de la connaissance.

Les textes ont un petit quelque chose de métaphorique. En effet les propos sont imagés mais demeurent toujours dans la simplicité, l’auteur tournant le dos à la *science sans fiction* lourde et énigmatique. Il n’y a pas de héros adulés, d’environnements menacés d’annihilation, pas de désirs de domination.

Les personnages sont simples et attachants…tous les personnages y compris Albert le robot et sa *famille* (PLUS BESOIN D’HOMMES), Putois le sconse (OPÉRATION PUTOIS) et Plante, issue de ce que je crois être le plus beau texte du recueil : JARDINAGE.

UNE CHASSE DANGEREUSE réunit sept textes d’une grande profondeur à mon avis plus philosophiques que scientifiques sur des thèmes chers à la science-fiction : les extra-terrestres, les voyages dans le temps, les robots. L’ensemble est original, rafraîchissant, une petite douceur pour le cœur et l’esprit. Du grand Simak…

Suggestion de lecture : CELUI QUI BAVE ET QUI GLOUGLOUTE de Roland C » Wagner

BONNE LECTURE
JAILU… DÉCEMBRE 2013

Les questions de la vie, les réponses de la science

Je vous parle aujourd’hui d’un ouvrage qui traite du cerveau et du corps humain et qui est présenté dans un format que j’affectionne particulièrement: le Questions/Réponses.

CERVEAU CORPS HUMAIN 200 QUESTIONS RÉPONSES

J’ai lu plusieurs livres de ce genre et celui-ci est de loin mon préféré. Les questions/réponses sont très riches et diversifiées. Divisées en 4 sections (QUAND? COMMENT? POURQUOI? EST-IL VRAI?), elles sont du genre technique(comment la cellule décode-t-elle l’ADN?), pratique(comment garder un coeur en bonne santé?), original(Quand on ne pense à rien, que se passe-t-il dans notre cerveau?), intrigant (Est-il vrai que l’on perd 21 grammes en passant de vie à trépas?) et même parfois un peu enfanti(Comment notre cerveau distingue-t-il le bien du mal?).

Les réponses sont complètes et font appel aux plus récentes études scientifiques de partout au monde. Ces réponses d’ailleurs vont souvent dans le détail et peuvent parfois être plutôt complexes, mais elles peuvent constituer la base de recherches plus poussées. Votre curiosité se sustentera assurément.

Et quelle bonne idée de terminer cette série de question/réponse par quelques tests psychologique pour mieux se connaître. On retrouve également à la fin un index thématique et alphabétique des questions puis la liste des nombreux collaborateurs ayant participé à l’élaboration de cet ouvrage.

Ce livre a aussi une très belle apparence extérieure et l’intérieur déborde de couleurs, d’images et de schémas. Franchement Science & vie a fait un excellent travail et je songe sérieusement à m’abonner à leur magazine!

Suggestion de lecture : FAIRE DES SCIENCES AVEC STAR WARS de Roland Lehoucq

PHENIXGOGLU
NOVEMBRE 2013

L’ARBRE DES POSSIBLES, BERNARD WERBER

ET AUTRES HISTOIRES

Oui, vous allez rencontrer des gens du passé.
Ne leur apprenez pas de techniques modernes.
Ne les informez pas sur l’avenir. N’oubliez jamais
Que vous êtes un touriste temporel. En cas de
Problème, rentrez immédiatement…
(extrait de L’ARBRE DES POSSIBLES ET AUTRES
HISTOIRES de
Bernard Werber, Albin Michel, 2002) 

L’ARBRE DES POSSIBLES ET AUTRES HISTOIRES est un recueil de nouvelles de Bernard Werber qui propose des futurs possibles de l’humanité en passant par différentes émotions : des futurs joyeux ou sombres, optimistes ou pessimistes, abondance ou pénurie, vide ou plénitude.

L’arbre des possibles est aussi un projet initié par Werber qui invite les internautes à imaginer des Futurs possible par le biais de son site Internet interactif. (voir lien à la fin de l’article.)

L’auteur nous livre donc une vingtaine de récits dans lesquels il livre, sous forme  d’histoires fantastiques, contes et légendes, sa vision des futurs possibles de l’humanité, imaginables ou inimaginables.

Avec L’ARBRE DES POSSIBLES, Werber m’a tout simplement subjugué. J’ai été Captif de ce livre que j’ai lu au complet pratiquement sans interruption. Vous l’avez compris, l’auteur explore des futurs possibles de l’humanité. Certains sont plausibles, plusieurs sont issus d’une imagination *chauffée au rouge*.

Ce qui m’a ravi en particulier, c’est que l’auteur est parti de situations ou d’idées très simples pour les pousser jusqu’à l’absurde et c’est là que le lecteur est entraîné non seulement dans une profonde réflexion mais dans un goût irrésistible d’imaginer lui-même ses propres *futurs possibles*.

Par exemple, Werber parle dans un de ses récits, d’une cuisine moderne, fonctionnelle et bien équipée. Imaginez maintenant un *futur possible* où votre cuisine sera entièrement informatisée, mécanisée et robotisée…allant jusqu’à vous permettre de dialoguer avec votre grille-pain ou jaser avec un couteau et une fourchette…autre exemple…un inspecteur de police qui fait témoigner un arbre qui aurait été témoin d’un meurtre.

…original, divertissant, imaginatif, et même, porteur d’avenir…à lire absolument. Les nouvelles sont brèves, le livre se lit vite…pas de longueurs ni de profondeur inutile.

En terminant, l’image ci-haut est une capture d’écran du site interactif L’ARBRE DES POSSIBLES avec une carte interactive des futurs, projet initié par Bernard Werber et par lequel vous pouvez enrichir une magnifique collection de scénarios proposés par des internautes du monde sur les futurs possibles. C’est un site génial magnifiquement conçu. Voici le lien :

http://www.arbredespossibles.com/

Suggestion de lecture : L’HISTOIRE DU QUÉBEC EN 30 SECONDES, de Sabrina Moisan et Jean-Pierre Charland.

Bonne lecture et Bonne recherche

JAILU/Claude Lambert
NOVEMBRE 2013

LA RELIGION, roman de TIM WILLOCKS

*…De la tête, Lazaro désigna l’escalier qui menait
au cloître des hospitaliers. –On voit des choses
là-dedans, qui retourneraient l’estomac le plus
solide et briseraient le cœur le plus vaillant…*
(extrait de LA RELIGION, Tim Willocks, 2006,
version française 2012, Sonatine Éditions)

Cette histoire nous fait remonter le temps jusqu’en 1565 alors que Soliman le magnifique, Sultan des Ottomans déclare la guerre Sainte aux Chevaliers de l’Ordre de Malte. C’est l’occupation de Malte, un des conflits les plus sanglants et cruels opposant l’Islam et la Chrétienté. Au cœur de cette toile spectaculaire et oppressante, on retrouve Matthias  Tanhauser,  un colosse héroïque, fidèle à la Religion mais déchiré entre deux désirs extrêmement puissants : la soif de combat et de gloire et l’amour d’une femme piégée à Malte : Carla qui garde  l’espoir de retrouver son fils qui lui a été arraché au début de sa vie par un homme d’église fourbe et cruel.

D’abord, quelques mots sur LA RELIGION :

La Religion dont il est question dans ce roman est essentiellement un ordre religieux dont le vrai nom est ORDRE DE SAINT-JEAN DE JÉRUSALEM aussi appelé LES HOSPITALIERS et plus couramment LA RELIGION. Cet ordre religieux a été créé à Jérusalem vers 1080 et est à l’origine de tous les autres ordres de Saint Jean. Au départ, l’ordre était exclusivement hospitalier, protégeant avant tout les pèlerins malades dans les hôpitaux de l’ordre.

Très vite, après la disparition des Templiers, l’ordre de Saint-Jean, tout en gardant un pied dans sa vocation d’hospitalier est devenu guerrier avec une féroce volonté de combattre les Sarrazins et de parer à la menace musulmane. Avec le temps, l’Ordre, farouchement indépendant, échappera à tout contrôle jusqu’à son éclatement au début du 19e siècle.

UN ROMAN *CHOC* :

C’est un roman très long (plus de 800 pages) qui évoque le grand siège de Malte, un des conflits les plus sanglants de l’histoire des guerres de religion et un des plus cruels de l’histoire militaire. En effet, en mai 1565 Soliman, sultan des Ottomans (des Turcs) à la tête de 38,000 hommes, est décidé à prendre l’île de Malte qui ne dispose que de 9 000 chevaliers hospitaliers et soldats Maltais.

Soliman voit dans cette guerre une étape pour réduire la chrétienté à néant, mais le courage et l’astuce de son opposant, la Valette, grand maître de la Religion, conduiront les Turcs à la déroute. Tim Willocks décrit avec un luxe de détails l’incroyable boucherie qui résultera de cette guerre.

Ce qui m’a frappé dans ce roman, c’est la puissance descriptive que l’auteur a déployée…description détaillée de tueries, d’exécutions, de mutilations, de corps démembrés, de têtes tranchées, de puanteur, description détaillée de cette capacité très *humaine* de tuer et de faire souffrir avec des raffinements de cruauté, sans oublier une description très explicite de plusieurs épisodes à caractère sexuel dont quelques-uns sont loin de verser dans l’eau de rose.

J’ai trouvé l’écriture magnifique, puissante mais parfois éprouvante, la violence étant détaillée avec une telle ferveur qu’elle m’a laissé cette impression agaçante que l’auteur a voulu trop en mettre. Toutefois l’esprit chevaleresque de l’époque est bien mis en perspective. Les amours du Héros Tanhauser viennent un peu alléger l’ensemble même s’il s’agit d’un impossible et complexe triangle amoureux.

Ce livre ne m’a pas fait ami-ami avec la Religion car ce n’est qu’un des très nombreux ouvrages (romanesques ou documentaires) qui évoquent une époque où l’inquisition voyait l’hérésie partout et où il suffisait de dire *C’est la volonté de Dieu* pour justifier la folie des hommes. Willocks ne se gêne pas pour souligner le travers des Cultes et les qualifier de fosses à serpents.

Il m’a semblé évident que l’auteur a pris son temps…le roman accusant des longueurs mais sa principale force est d’arracher le lecteur de son confort et de le placer dans le décor d’un environnement ravagé par la violence et la haine.

Grande Crois de l’Ordre de Saint-Jean-De-Jérusalem

C’est un roman puissant. La plume est audacieuse et est de nature à submerger le lecteur, surtout celui qui ne craint pas les longueurs et la crudité d’une grande quantité de passages. Le livre a peut-être une ou deux centaines de pages de trop mais il tient quand même captif et sa finale est magnifique.

Suggestion de lecture : TERRES DE SANG ET DE LUMIÈRE de Jocelyne Godard

BONNE LECTURE
JAILU
OCTOBRE  2013

(En Complément…)