L’ANGE, le livre de MICHEL RIETSCH

*Les quelques dents qui pendaient encore aux
gencives furent éjectées par un ultime hoquet
de douleur…il était mort en catastrophe, trop
vite en tout cas pour que ses terreurs puissent
être convenablement créditées.*
(Extrait : L’ANGE, Michel Riestsch, Éditions Black-ebook,
octobre 2013, version num. 220 pages)

Dans les Vosges (France région Lorraine) un dangereux psychopathe, tueur en série, monstre sans pitié s’évade d’un hôpital où il était suivi par le docteur Sonnenfeld, un psychiatre au professionnalisme douteux. En liberté, Wilfried devient comme un fauve et s’adonne avec délectation à son activité préférée : tuer, massacrer. Parallèlement aux forces policières, Sonnenfeld décide de traquer sans relâche le tueur. Cette quête amènera le psychiatre aux sommets de l’horreur, aux limites de l’imaginable. C’est une traque contre la montre et le temps fait défaut.

Terrifiant. Rien de moins
*…la barre effectua un arc de cercle de golfeur
et arriva à toute vitesse en plein sur la
bouche qui éclata en une gerbe de sang.
Sous le choc, la tête heurta violemment le
mur arrière et l’homme perdit
connaissance.
Déjà dans les pommes? Petite nature va!
(Extrait : L’ANGE)

C’est un livre étrange, un récit noir, glauque, développé dans une écriture typique de Rietsch qui agrippe le lecteur sans lui laisser de répit ou très peu. Il est très difficile de résumer un tel livre, car dévoiler ne serait-ce qu’une bribe amènerait rapidement le lecteur à la conclusion.

Il faut le lire et se laisser aller dans ce récit aux développements imprévisibles, récit qui est aussi un voyage dans les méandres visqueux d’un esprit torturé qui ne tire jouissance que dans le meurtre et la torture autant physique que psychologique. Bref, l’esprit d’un monstre.

On ne peut pas vraiment résumer une telle descente dans l’horreur mais je peux mettre le lecteur sur le sentier en dévoilant, très partiellement, comment l’auteur dévoile la nature de Wilfried : *…car ses méfaits étaient soutenus et organisés par une intelligence structurée su service d’une perversité démoniaque.*

Ou plus habile encore : *Mais avant d’avoir été véritablement en contact avec la vie, … la beauté de la mort l’habitait déjà. Qu’y pouvait-il? C’est une des raisons qui l’avait décidé à opter pour une distraction un peu différente de l’idée qu’on s’en faisait habituellement : tuer. Un loisir qui en vaut un autre.* (Extraits)

Je pourrais aussi mettre le lecteur sur le sentier d’une compréhension partielle en disant que le titre du livre est justifié : *Les anges n’ont pas de sexe mais ils ont de l’imagination.* (Extrait) …il y a là une petite saveur de surnaturel, de fantastique et aussi de recherche sur le plan psychologique.

C’est un thriller efficace, une course contre la montre qui entraîne malgré lui le lecteur qui ne peut absolument pas imaginer la suite des évènements. L’intensité de l’écriture et le rythme parfois effréné bousculent le lecteur mais le *laisse difficilement s’échapper*.

Quant aux versions du livre : censurée et non censurée, préférant ne pas trop penser qu’on puisse me prendre pour une poire, je vous dirai que ça ne change pas grand-chose, car si vous avez l’âme sensible, je vous déconseille tout simplement la lecture de ce livre que ce soit en version censurée ou pas. Vous éviterez ainsi de tomber dans le petit piège d’une banale opération de marketing.

En conclusion, je suis bien conscient que je n’ai pas dévoilé grand-chose de l’intrigue, mais si vous êtes d’attaque et pas trop sensible, je vous recommande la lecture de ce livre qui n’est pas très long. Laissez-vous simplement guider par l’auteur dans une atmosphère opaque, bizarre, teintée d’un humour pour lequel je serais tenté d’utiliser les mêmes qualificatifs.

…un livre fort avec, au programme humour noir et mort blanche…

Suggestion de lecture : L’HEURE DE L’ANGE, d’Anne Rice

Michel Rietsch est un auteur français né à Strasbourg en Alsace (est de la France) en 1956. Dès son adolescence, il s’intéresse aux livres et aux auteurs susceptibles d’exacerber ses rêves de voyage et de liberté. C’est pendant cette période qu’il apprendra son métier de cuisinier. Par la suite il réalisera ses rêves de voyage qui l’amèneront d’aventure en aventure avant qu’il se réinstalle en Alsace, 17 ans plus tard, pour y exercer son métier de cuisinier et…pour écrire… dans différentes maisons d’édition.

Il a publié entre autres LA NOTATION, bien sûr L’ANGE en deux versions, censurée et non-censurée, parues chez Black-Ebook en 2013, je cite aussi DU SEL ET DES HOMMES qui relate la grande aventure qui a marqué l’histoire et l’économie de l’Alsace. Rietsch réside dans les Vosges en Lorraine.

BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
AOÛT 2015

LE 5e RÈGNE, le roman de MAXIME CHATTAM

*Soudain l’air fut chargé d’électricité,
et un bourdonnement languissant s’éleva.
Glenn Ferguson vit l’air devant lui s’altérer
et se brouiller comme l’onde de chaleur
au-dessus des routes de bitume quand il
fait très chaud. L’air semblait danser sous
ses yeux, et l’émanation commença à
prendre une forme. Une forme presque
humaine…*
(extrait de LE 5e RÈGNE,  Maxime Chattam,
Éditions du Masque, 2006, 386 pages éd. Num.)

Cette histoire se déroule dans la ville américaine d’Edgecomb où un tueur en série sévit, assassinant des adolescents de manière cruelle. Un soir, Sean Anderson et ses copains, tous adolescents, découvrent dans le grenier du grand-père de Sean un  livre très étrange : un vieux grimoire.

À partir du moment où Eveanna lira ce livre, une force maléfique enveloppera Edgecomb et le groupe d’adolescents : manifestation d’êtres maléfiques, disparitions et meurtres d’une singulière cruauté. Sean et ses amis pourraient bien avoir mis la main sur un livre contenant un terrible secret sur l’humanité et le pouvoir de l’esprit…

AVANT PROPOS :
au sujet des règnes…

Le célèbre naturaliste et nomenclateur suédois Carl Von Linné (1707-1778), qui a fondé les bases du système moderne de la nomenclature binominale a classifié en même temps la terre en règnes : VÉGÉTAL, MINÉRAL et ANIMAL.

Au début du livre, Maxime Chattam semble vouloir justifier le titre de son œuvre à partir d’une citation de Stein Harden :  *…Acceptons de séparer l’homme des bêtes, et nous avons quatre grands règnes terrestres. N’y aurait-il pas la place pour un cinquième qui les lierait tous ensemble, celui qui fixe l’univers et en dicte les rouages? Le 5e règne, tout comme l’homme a 5 sens et cherche désespérément son 6e…deviendra-t-il le diable en passant au chiffre 6?  Le 5e règne est, ce que dans le récit de Chattam, Georges O’Clem appelle *L’ORA*.

Confrontation avec le mal
*L’homme sourit encore plus et ses yeux
se mirent à briller si fort que Warren,
malgré son jeune âge et son inexpérience
de la vie, y vit clairement l’expression
de la démence la plus pure*
(ex. LE 5e règne, MAXIME Chattam)

Ce livre est un *chattam* pure laine : introduction rapide, style direct jusqu’à la dernière page, peu d’étalage sur la psychologie des personnages, sans longueur, atmosphère lourde et niveau d’intensité élevé.

L’auteur a créé des personnages tellement attachants, des jeunes adolescents, qu’on aimerait les avoirs comme amis, petits frères ou petites sœurs. Ils ont chacun leur sensibilité et une certaine fragilité, mais ils sont authentiques et courageux.

Je me suis rapidement enveloppé de l’émotion qui se dégage de cette histoire surréaliste. Qui n’a pas connu les peurs propres à l’enfance…l’obscurité inquiétante du placard, les bruits étranges de la nuit, les rêves bizarres à la limite du cauchemar comme si on y était…

On dirait que Chattam est parti de cette base, en a fait un solide fil conducteur et y a ajouté la magie, le fantastique tout en gardant une remarquable cohérence.

L’écriture est simple et claire et je ne veux pas trop insister, mais elle est très directe et la description des chaînes d’évènements est parfois très dure.

Je recommande LE 5e RÈGNE aux amateurs de fantastique. C’est une histoire fascinante sur fond de thriller où les jeunes héros, qui ne s’en sortiront pas tous vivants, doivent composer et jongler avec la sorcellerie, le spiritisme, la magie et la nécromancie.

Enfin, ce livre n’est pas sans nous faire réfléchir un peu sur un des éléments de base des sciences paranormales : le pouvoir de l’esprit et de la pensée et plus encore…Chattam dit dans sa postface…je cite : *N’oubliez pas, elle est bien là dans notre  vie de tous les jours, mais nous ne la voyons plus*… Chattam parle ici de…magie.

Suggestion de lecture, du même auteur : GENÈSE : AUTRE MONDE

Maxime Guy Sylvain Drouot est un romancier français né en février 1976. Il a écrit sous les pseudonymes Maxime Williams puis Maxime Chattam.  Après avoir joué dans plusieurs téléfilms, il  devient libraire, métier qu’il exerce toujours. Il écrit son premier thriller en 1999 : le 5e règne.

Pour donner un maximum de crédibilité à ses romans, Maxime Chattam, suit une formation de criminologie dans laquelle il s’initie à la psychiatrie criminelle, les techniques et sciences policières et même la médecine légale et consulte des spécialistes afin de documenter ses romans et leur donner un maximum de réalisme. Il a écrit entre autres LA TRILOGIE DU MAL et LA 5e CLÉ.

BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
OCTOBRE 2014

L’EXORCISTE, le livre-choc de WILLIAM PETER BLATTY

*N’approchez pas! La truie est à moi…*
(extrait de L’EXORCISTE de William Peter Blatty,
J’ai lu, 1971)
 

La vie d’une jeune adolescente, Reagan McNeil, bascule dans l’horreur le jour où des phénomènes étranges commencent à se manifester en elle et autour d’elle : le comportement et l’apparence de Reagan changent. Elle devient graduellement hideuse, agressive, violente, obscène, des objets disparaissent ou sont déplacés. Sa personnalité se dédouble pendant que des évènements terribles viennent s’ajouter à l’horreur de la situation : un meurtre, une église profanée…

Reagan est soumise à une batterie de tests et aux soins d’une armada de médecins, mais personne ne peut expliquer quoique ce soit. Confrontés à leur impuissance, les médecins proposent en dernier recours un traitement de choc que seul un homme d’église peut offrir….

extrait du film L’EXORCISTE de William Friedkin avec Linda Blair dans le rôle de Regan

Bien  que les thème du diable et de la possession soient récurrents depuis l’aube de la littérature, Blatty a probablement été le premier écrivain à traiter la question avec autant de…modernité…mettant en perspective et en opposition la médecine, la psychiatrie et la prêtrise qui connaît beaucoup de difficultés liées à la fois. Blatty a donné au diable un nouveau visage dans un récit terrifiant constituant une véritable descente aux enfers.

Ce livre montre l’évidente évolution de notre société. Quand il a été publié en 1971, notre société n’était pas tout à fait prête à recevoir ce genre de récit d’horreur glacial, d’autant terrifiant qu’il est basé sur un fait vécu.

Aujourd’hui, le récit paraît plus anodin parce que la société s’est endurcie à l’horreur crachée quotidiennement par la télévision, internet, le cinéma et la presse écrite. Sans trop le savoir, William Peter Blatty a ouvert un bal car le cinéma et la littérature n’ont  pas tardé à s’emparer de cette nouvelle tendance en multipliant les productions, surtout au cinéma.

L’EXORCISTE demeure un phénomène littéraire…comme une curiosité culturelle qu’on n’a pas encore fini d’explorer. Ce n’est toutefois pas un livre qui brille par la puissance de son écriture, sur ce plan, Blatty ne m’a jamais vraiment surpris. Ce qui accroche le lecteur c’est le contexte de l’histoire et l’incroyable densité de son atmosphère…LE NON-DIT qui donne à l’ensemble un réalisme oppressant…voir étouffant.

Même si le livre développe la question de l’éternelle dualité entre le bien et le mal, il fait encore vibrer et démontre encore que la psychiatrie moderne n’a pas réponse à tout. Il a encore cette capacité de glacer le sang et de forcer le lecteur à faire des pauses pour respirer un peu.

Je dirais que ce livre constitue une puissante mise à jour de tout ce qui a pu être imaginé sur la possession démoniaque. À mon avis, il n’y a pas eu d’autres mises à jour dignes du titre, donc le livre conserve toute son actualité.

C’est la deuxième lecture que je fais de ce livre, la première remontant à 1973. Quarante ans plus tard, l’effet est le même : La chair de poule. L’EXORCISTE est un livre à éviter si vous êtes une âme sensible et à lire à petite dose. Malgré des efforts considérables pour y parvenir, ce livre n’a jamais été égalé…

Suggestion d’écoute : LA MER DES DÉSOLATIONS de DIRK MAGGS et JAMES A. MOORE

l’auteur William P Blatty

William Peter Blatty est né à New-York en janvier 1928. Il s’est consacré à la littérature (L’EXORCISTE est son œuvre majeur) et au cinéma où il a œuvré comme scénariste et réalisateur. Il a réalisé en 1990 L’EXORCISTE, LA SUITE (3e épisode de la saga).

Aussi en 1980, il a signé le scénario et la réalisation du film LA NEUVIÈME CONFIGURATION pour lequel il a obtenu deux prix prestigieux. Il s’est bâti une solide réputation dans le cinéma fantastique et d’horreur. L’EXORCISTE est un livre basé sur un fait réel : un cas d’exorcisme sur un garçon de 14 ans en 1949 dans le Maryland.

BONNE LECTURE
JAILU/Claude Lambert
JUIN 2014

VOIR LE COMPLÉMENT CINÉMA

MICHAEL GUINZBURG, L’IRREMPLAÇABLE EXPÉRIENCE…

DE L’EXPLOSION DANS LA TÊTE

Sept paires de bras qui se lèvent,
Sept nez qui saignent,
Sept paires d’oreilles qui crachent du sang,
Sept yeux qui gonflent,
Sept yeux qui giclent, volent, roulent
Et…mort,
Il n’y a pas de quoi être fier,
Il faut que j’aille à la fête ce soir!
(extrait de *L’IRREMPLAÇABLE EXPÉRIENCE DE
L’EXPLOSION DANS LA TÊTE* , Michael Guinzburg,
Gallimard, 1997)

Le théâtre des évènements est Cashampton, petite ville balnéaire américaine où a vécu Jackson Pollock, artiste-peintre excentrique, ivrogne en particulier, dépravé et cinglé en général.

La ville est aux prises avec un mal étrange qui atteint de plus en plus de gens et qui commence par de violentes crises de hoquets, puis du sang qui gicle des oreilles jusqu’aux yeux arrachés de leur orbite…des morts violentes et horribles dignes des plus sombres histoires d’horreur.

Quarante ans après la mort de l’artiste *fêlé* Pollock, un journaliste, Roger Lymon se prépare à écrire une biographie du célèbre personnage. Il enquête donc à Cashampton auprès de personnages pour la plupart excentriques du monde de l’art et qui ont tous eu un certain lien avec Jackson Pollock. Ses découvertes auront de quoi surprendre…entre autres, les raisons pour lesquelles des têtes explosent…

Né à New-York le 10 septembre 1958, Michael Guinzburg est le parfait homme à tout faire. Il a été plongeur, cuisinier, coursier, garde du corps de strip-teaseuse, chauffeur de poids-lourds, télégraphistes, détective, fleuriste et j’en passe. Il a écrit entre autres deux romans chez Gallimard, collection La Noire : L’IRREMPLAÇABLE EXPÉRIENCE DE L’EXPLOSION DANS LA TÊTE et ENVOIE-MOI AU CIEL SCOTTY.

 

Sans être un chef d’œuvre de style, c’est un livre intéressant que j’ai apprécié, mais j’ai dû surmonter quelques irritants, par exemple la quantité impressionnante de personnages qui interviennent dans l’histoire, avec des noms composés compliqués. Il faut vraiment se concentrer pour ne pas s’y perdre. Il y a aussi le fait que le langage du livre est d’une crudité parfois déconcertante.

Guinzburg y est allé très fort à ce chapitre et c’est sans compter un audacieux étalement d’obscénités sexuelles.  Mais les forces du livres sont indéniables : l’écriture est intense, riche en dialogues et l’humour qui teinte l’œuvre est très très noir. Même dans la description de ses scènes d’épouvante, l’auteur est parvenu à me faire sourire, sinon rire.

Autre élément intéressant et qui n’est pas pour me déplaire : l’auteur tourne en dérision le monde de l’art par des propos, des observations et des dialogues parfois très acides et il en fait autant d’ailleurs sur l’extravagance des riches. Voici un extrait qui illustre mon propos : 

…* Le fond de la piscine de Terry était tapissé de sculptures et de toiles sous enveloppes étanches, et des invités équipés d’un masque et d’un tuba plongeaient, afin d’examiner les œuvres de près, tandis que leurs chéquiers et leurs bijoux, réunis dans des sacs en plastique, se trouvaient sur des chaises longues.*

C’est tout le livre en fait qui est une réflexion sur le monde de l’art (ce qui amène une certaine dilution de l’intrigue) qu’il devient difficile de prendre au sérieux.

À lire si vous ne craignez pas le ridicule, l’humour noir et un contexte plutôt débridé. Avec ce livre de Guinzburg, j’ai fait diversion dans mes lectures. Aucun regret…

Suggestion de lecture : L’INSOMNIE de Tahar Ben Jelloun

BONNE LECTURE

Claude Lambert
SEPTEMBRE 2013

FUNÉRARIUM, le livre de BRIGITTE AUBERT

*…Elle s’est logée sur le côté de la deuxième
cervicale, le long du nerf pneumo-gastrique.
Elle vous a chatouillé le rachis, ajouta-t-il,
débonnaire, le genre de caresse qui peut vous
laisser aussi frais qu’un légume congelé pour
le restant de vos jours.*
(extrait de FUNÉRARIUM de Brigitte Aubert,
Éditions du Seuil, 2006)

Voici l’histoire de Léonard Moreno, appelé Chib, la quarantaine, un peu introverti, renfermé, et vivant confortablement de sa profession d’embaumeur. Un jour, Moreno est approché par une femme : Blanche Andrieu qui lui demande d’embaumer sa petite fille Élizabeth-Louise, appelée  Elilou, morte accidentellement et de l’installer dans un cercueil de verre. Attiré par cette femme, Chib accepte et fait la connaissance de sa famille, des nobles très riches. Au cours de l’embaumement, Chib s’aperçoit que la petite a été victime de mauvais traitements allant jusqu’à l’agression. Troublé, Chib enquête discrètement sur les sévices infligés à la jeune fille et s’apprête à pénétrer très graduellement dans un horrible secret de famille.

Avec FUNÉRARIUM, ne vous attendez pas à plonger dans l’eau de rose, Étant donnée la nature du sujet. En effet, Brigitte Aubert a exploité tout son talent et sa force d’écrivaine pour *installer* le lecteur dans une atmosphère oppressante et morbide qui n’est pas sans rappeler, à certains égards, L’EXORCISTE de William Peter Blatty.

En fait, Brigitte Aubert a relevé un défi intellectuel exigeant mais à la hauteur de son talent : elle a créé un personnage, Léonard Moreno,  sans talent particulier à part celui qu’il déploie dans l’exercice de sa profession, embaumeur.

Et c’est justement comme embaumeur qu’il s’aperçoit que la dépouille d’une jeune fille a été agressée et que sa mort est suspecte. *Tiraillé* par sa conscience professionnelle, Moreno entreprend une enquête et s’immisce dans la famille Andrieu qui est rien de moins qu’un nid de vipère.

Pendant son enquête, Moreno aura à jongler avec des indices de pédophilie, de zoophilie, de nécrophilie, de satanisme et autres bassesses, sans compter les morts qui s’empilent.

L’auteure  laisse peu de répit au lecteur et à peu près aucun élément lui permettant d’identifier la personne coupable de ces monstrueuses déviations. L’écriture est puissante et sa fluidité ne nuit en rien à l’intensité dramatique de l’histoire.

Malgré l’incroyable morbidité qui caractérise le roman et qui ne ménage pas le lecteur, j’ai été séduit par un certain sens de l’humour de l’auteure qui m’a arraché plusieurs sourires.

Malgré tout, je mentionne que la trame sinistre est non seulement entretenue tout au long du récit, mais est accentuée par de petits intermèdes intercalés entre les chapitre et que Brigitte Aubert appelle des *INTERMEZZOS*. Voici un petit extrait…

*Elle puait.
Elle puait son odeur.
Elle puait l’esclave.
Dans ses yeux, dans sa bouche.
L’odeur sale.
L’odeur des cris entre les draps.
L’odeur mouillée.
Qui fait mal.
Ses lèvres de salope sur les joues des enfants.
…*

Pas très joyeux… bien qu’il baigne dans la dépravation et la haine, ce livre est surprenant. Il ne fait pas dans la dentelle c’est vrai mais l’histoire est bien ficelée, intense, attire irrésistiblement le lecteur dans sa toile…un livre que vous n’oublierez pas.

Suggestion de lecture : AVIS DE DÉCÈS, de Daniel Naud

BONNE LECTURE

Claude Lambert
AOUT 2013

(En Complément…)

L’ÉTRANGE CAS DU Dr JEKYLL ET DE Mr HYDE

DE ROBERT LOUIS STEVENSON

Petit récit qu’il conviendrait de lire au moins une fois, L’Étrange cas du Dr. Jekyll et de Mr. Hyde est une nouvelle d’épouvante mille fois reprise, citée, adaptée à l’écran et à la scène. Bien que cette réalité prive quelque peu l’intrigue de son effet (lequel serait autrement extraordinaire), la lecture de ce classique en vaut grandement la peine.

Comme on peut s’y attendre, le style est très articulé et fait évoluer quelques gentlemans Anglais dans un décor Londonien qu’on imagine sombre et brumeux, en cette fin de XIXème siècle. Utterson, le notaire et ami du Dr. Jekyll, se fait raconter une sinistre histoire au sujet d’un certain Mr. Hyde.

Il découvre que ce personnage, présenté comme un affreux nabot, est une des fréquentations du Dr. Jekyll. Soucieux des intérêts de son client et du bien-être de son ami, il cherchera à connaître le lien obscur qui relie l’un et l’autre.

Comme l’élément clé de son intrigue, le récit affiche deux visages différents. L’angoisse croissante et le mystère, que l’on peut voir en l’aspect de Mr. Hyde, en font un parfait divertissement, et l’émotion est entretenue sans effusion démesurée d’hémoglobine et de violence gratuite.

Ensuite lors de la chute, le Dr. Jekyll pousse à la réflexion sur la dualité de l’homme, il explore l’idée de creuser un tel fossé entre le bien et le mal au sein d’un seul individu, que celui-ci se divise en deux entités distinctes. Là est l’originalité au coeur d’un thème éternel. Après avoir lu la dernière ligne, je n’ai pu m’empêcher de prendre quelques instants pour méditer la question, une fois de plus.

Suggestion de lecture : AFFAIRES ÉTRANGES de Joslan F. Keller

Phenixgoglu
Juillet 2013

CONTRE DIEU, le livre de PATRICK SÉNÉCAL

Éditions COUP DE TÊTE, 2010

Un homme perd sa femme et ses deux enfants dans un accident de la route. Dès lors, son esprit basculera complètement, ne cédant la place qu’au chaos et à une vertigineuse descente aux enfers. Au cours de cette errance infernale, l’homme se liera d’une amitié étrange et froide avec une jeune femme qui souffre elle aussi. Violence et noirceur pourraient atteindre leur paroxysme si l’homme apprend la véritable identité de la femme.  

C’est le livre le plus étrange qu’il m’a été donné de lire. Ce livre est une longue phrase d’une centaine de pages (pas de points, pas de majuscules mais une tonne de virgules) et essentiellement livrée à la deuxième personne du singulier de l’indicatif présent dans un texte peu ventilé…une conscience qui narre à son propriétaire ses actes insensés, ses pensées détraquées.

Je me suis senti comme le lecteur transformé en une minuscule molécule injectée dans un cerveau malade et à qui on demande de trouver le fameux grain de sable qui rend patraques tous les rouages de l’esprit.. un voyage fantastique mais d’une noirceur à donner des cauchemars dans un esprit troublé.

Ce n’est pas le meilleur de Patrick Sénécal, mais ça reste du Patrick Sénécal : un récit sombre au possible, peu de répit pour le lecteur, une écriture parfois complexe qui a ce don inné chez Sénécal de créer et d’entretenir la peur et l’horreur et qui pousse inévitablement le lecteur à se demander comment un être humain peut descendre aussi bas.

C’est un récit fascinant qui risque de terroriser les cœurs sensibles. Le point culminant du livre est totalement imprévisible et relève du coup de maître.

Je recommande ce livre à ceux et celles qui, comme moi, ne dédaignent pas à l’occasion, un petit exercice de torsion intellectuelle. Traduction : c’est tordu, mais c’est génial.

Bonne Lecture

Lecture suggérée, du même auteur : LE VIDE

JAILU
Janvier 2013

(En Complément…)

CRÉATURE, le 6e livre de JOHN SAUL

Gratifié d’une promotion au travail, Blake Tanner s’installe dans la petite ville de Silverdale avec sa femme Sharon et ses enfants Mark et Kelly…cadre paisible, ville propre voire impeccable et où il ne se passe à peu près jamais rien…une ville où le sport règne en roi et maître, particulièrement le football, l’équipe locale faisant la pluie et le beau temps. Tout est parfait dans cette ville…en fait trop parfait…

Sharon développe des doutes sur ce cadre enchanteur et commence à se poser des questions sur des hurlements de douleur et de rage qu’on entend dans la nuit et sur ce qu’on fait dans les laboratoires d’une entreprise qui a tellement à cœur le bien-être de ses employés que c’est trop beau pour être vrai. 

Dans les faits, la petite ville modèle cache un secret troublant. La vie heureuse d’une petite famille sympathique pourrait bien se transformer en cauchemar.

J’ai lu plusieurs critiques négatives sur ce livre entre autres parce qu’il comporte du déjà vu, ce qui n’est pas entièrement faux. Toutefois, je vais aller à contre-courant aujourd’hui parce que ce livre m’a plu. Il se lit vite et bien grâce à l’excellente traduction de Dominique Wattwiller mais aussi parce que l’écriture est simple et directe. En effet, dans son livre, Saul va droit au but…il entre rapidement dans le vif du sujet et maintient une tension constante.

Bien que l’ouvrage ait un petit côté prévisible, il laisse peu de répit et aboutit à une conclusion originale. De plus, l’auteur a créé des personnages attachants…

Je pense en particulier auzx les mères qui passent un sale quart d’heure dans cette histoire où tout est trop parfait au départ et où on fait du sport une étrange obsession et qui amène la famille Tanner à déchanter rapidement.

Évidemment, c’est vite lu, mais je pense que vous allez passer un bon moment.

Suggestion de lecture : CELUI QUI BAVE ET QUI GLOUGLOUTE de R.C. Wagner

JAILU
Décembre 2012

(En Complément…)