DEUX NUANCES DE BROCOLI, de Marie Laurent

*Oui, que peut-il me trouver, cet homme riche, jeune
et beau comme un acteur de séries pour ados ? Un
coup d’œil à la glace au-dessus du buffet me renvoie
à mon insignifiance : front, yeux, nez et bouche
moyens, cheveux réfractaires au brushing; voilà pour
le haut. Le bas n’est pas plus inspirant : des seins
banalement en pore, une taille grassouillette et un
derrière qui a une fâcheuse tendance à frôler le
gazon.*

(Extrait : DEUX NUANCES DE BROCOLI, Marie Laurent,
éditions NL, 2017, édition numériques,  140 pages num.)

Amalia Faust, brave fille complexée et un peu nunuche, caissière chez Brico, croise par hasard  Edouard Green, le séduisant patron d’une boîte de sex toys. Green propose bientôt à Amalia un étrange pacte. Elle découvre un univers insoupçonné où sexe, légumes et soumission sont étroitement associés. Mais à la longue, les positions inconciliables des deux héros risquent de rendre leur relation difficile. Il s’agit d’une parodie légumineuse de 50 NUANCES DE GREY. En plus d’être dominée par la couleur verte, la relation entre les deux protagonistes deviendra très singulière.

DEUX NUANCES DE BROCOLI est une parodie de CINQUANTE NUANCES DE GREY qui  est une romance érotique. L’histoire d’Anastasia Steel, étudiante en littérature qui accepte d’interviewer Christian Grey, un homme d’affaires de Seattle. Dès le premier regard, Anastasia est à la fois séduite et intimidée. Jugeant cette rencontre désastreuse, elle tente de l’oublier jusqu’à ce qu’il débarque dans le magasin où elle travaille pour lui proposer un rendez-vous. Lorsqu’ils entament une liaison passionnée, elle découvre son pouvoir érotique ainsi que le côté obscur qu’il tient à dissimuler.

Nouvelle tendance en littérature
LE SEXE LÉGUMIER
*Le cuni nature, je connaissais pour l’avoir expérimenté
une fois avec Gérard…le cuni avec Nutella, confiture
ou miel, je connaissais aussi, par ouïe dire. Par contre
je ne soupçonnais pas l’existence d’un cuni bio jusqu’à
ce moment.*
(Extrait : DEUX NUANCES DE BROCOLI)

Le seul intérêt de ce livre est qu’il est magnifiquement ajusté avec CINQUANTE NUANCES DE GREY qui est probablement le livre le plus insipide que j’ai lu…près de 550 pages de platitudes. Le livre n’a pour moi à peu près aucune valeur littéraire. Je suis très étonné que la trilogie se soit vendu à 125 millions d’exemplaire dans le monde.

Comme dans CINQUANTE NUANCES DE GREY, DEUX NUANCES DE BROCOLI raconte la petite aventure de deux personnages caricaturés : d’une part, un cruchon sexuellement tordu et végétarien jusque dans la couchette : Édouard Green, un nom très recherché puisque tout est vert dans sa vie d’autant qu’il a un faible pour…le brocoli.

D’autre part, une nounoune de première classe : *Le chemin d’Amalia Faust, brave fille complexée et un peu nunuche, caissière chez Brico, croise par hasard celui d’Edouard Green, le séduisant patron d’une boîte de sex toys. Green propose bientôt à Amélia un étrange pacte. Elle découvre un univers insoupçonné où sexe, légumes et soumission sont étroitement associés .* (Extrait)

Et voilà, nous assistons à l’entrée triomphale du sexe brocolien en littérature. Le poireau a même été invité…ça doit être la deuxième nuance : *Je crains que vous n’ayez pas très bien compris, Amalia. Pour moi, le sexe est inséparable des légumes. Sans leur intervention, je le trouve d’un ennui mortel .* (Extrait)

 Évidemment, vous vous doutez sans doute qu’Amalia finit par déchanter : *Pointilleux me paraît faible pour qualifier Green. Tyrannique serait plus adapté, ou chiant, pour un vocabulaire moins soutenu .* (Extrait)

Et bien sûr, l’humour s’en mêle…*Je jette un regard de biais à son zizi, si impérial tout à l’heure et à présent, réduit à un macaroni Barilla…À défaut de faire l’amour, Green fait la moue, tel un enfant boudeur. Il est irrésistible ainsi : tout nu avec son brocoli dans la main et sa zigounette taille XXS.* (Extrait)

En entreprenant la lecture de ce livre, j’ai pris un risque craignant de tomber sur un désastre comme CINQUANTE NUANCES DE GREY. Mais non, DEUX NUANCES DE BROCOLI m’a fait rire, comblant d’une certaine façon le vide qui caractérise (selon moi) le livre de EL James.

Les ressemblances avec l’œuvre parodiée sont poussées à la limite de la caricature. J’ai trouvé les scènes sexuelles très drôles d’autant qu’elles sont commentées d’une façon légèrement vitrioliques par Amalia qui tient le rôle de narratrice.

Côté faiblesse, le live accuse des rebondissements sous-exploités et une finale expédiée. Dans le dernier quart du livre, subitement, je me retrouve avec un récit d’Amélia qui vient de laisser *Brocoli man* sans avertissement. C’est l’histoire du cheveu dans la soupe qui laisse à penser que l’auteure commençait à manquer d’inspiration ou en avait marre.

Quant à la finale, comme ça se produit souvent dans les parodies, elle est rapide, sous forme de lettres ou de réflexion écrite et se termine par une narration. Cette façon de faire contraste avec la trame de l’histoire et surtout les répliques parfois hilarantes d’Amalia. Malgré tout, ce livre m’a déridé. Il m’a fait rire et j’ai apprécié sa fraîcheur et sa spontanéité. J’ai aussi trouvé Amalia particulièrement attachante et drôle avec ses remarques et ses observations vigoureuses et truculentes.

Ce livre n’aura peut-être pas 125 millions de lecteur, mais je lui en souhaite un maximum. Ce n’est pas l’idée du siècle mais elle est originale, son développement est sarcastique. Il a des petits côtés coquins mais pas à outrance. L’histoire a le mérite d’être moins ridicule que CINQUANTE NUANCES DE GREY. Et surtout, le livre est drôle. À essayer avec ou sans légumes.

Suggestion de lecture : LES PETITES CULOTTES de Géraldine Collet

Marie Laurent est une auteure française qui se spécialise dans les romans historiques comme L’AVENTURIÈRE EN DENTELLES, une romance napoléonienne. Sa période préférée est le 19e siècle. Mais il lui arrive aussi d’écrire des nouvelles et des poèmes.  DEUX NUANCES DE BROCOLI ne fait pas bande à part dans l’œuvre de l’auteure. J’ai découvert que sa production est d’une très grande variété. Pour en savoir plus, l’idéal est encore de consulter sa pages FACEBOOK. Cliquez ici.

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 6 octobre 21

CTRL + Q, le livre de KATHY DORL

*Clémentine a le feu aux fesses, mais, cette fois-ci,
en mode fusée Ariane ou navette spatiale américaine.
Le trouillomètre frôlant le zéro absolu. Elle commence
à avoir sérieusement peur pour sa vie. «On ne reste
pas une minute de plus chez ces apprentis sorciers.
Sont fêlés du bocal ! Bande de tarés !»*
(Extrait : CTRL + Q, Kathy Dorl, Éditions Hélène Jacob,
collection LITTÉRATURE SENTIMENTALE, 2015, numérique,
200 pages)

Entre son job de secrétaire dans un magasin de matelas et Roue de la Fortune, son hamster, Clémentine mène une vie solitaire et ennuyeuse. Maladroite, pas très futée, superficielle et égoïste, Clémentine est une paresseuse avec une seule ambition : devenir riche. Des petites initiatives aux grandes résolutions, la vie n’est qu’une succession de décisions à prendre. Clémentine, sans amis ni famille, sans conseils prudents et avisés, va faire les mauvais choix. Au rythme syncopé de ce monde où la science va parfois trop loin et prend de court notre morale, Clémentine devra faire face à l’exceptionnel et l’incroyable. Clémentine est l’héroïne de CTRL + Q.

UN REFLET HILARANT DE LA SOCIÉTÉ
*…la simulation sert deux bonnes causes. D’une, le mec
a l’impression d’être un demi-dieu au lit. De deux, mes
« Vas-y doudou, déchaîne ton corps » ayant tendance
à accélérer le processus, ça permet de reprendre au
plus vite le cours de mes activités, mater le replay des
anges de la téléréalité par exemple, le tout en évitant
l’irritation des muqueuses.*
(Extrait : CTRL + Q)

Voici le livre le plus anti morosité que j’ai lu depuis plusieurs années. Ce livre est comme un vent frais qui fait rire…un magnifique moment d’évasion. C’est l’histoire de Clémentine, une jeune femme paresseuse et égocentrique qui n’a qu’une ambition : devenir riche avec un minimum d’effort. Elle décide de devenir mère porteuse. Après quelques naissances, Clémentine accepte l’offre juteuse d’un mystérieux centre de recherche.

Elle devra porter un bébé dont les gènes et l’ADN ont été modifiés pour des raisons manifestement eugéniques. La vie de Clémentine bascule complètement quand elle apprend que son bébé-génie peut communiquer avec elle par télépathie. Lorsque son bébé lui explique que ce centre est illégal et que les responsables veulent se débarrasser d’elle après la naissance, Clémentine décide de s’enfuir.

Elle trouvera sur son chemin des alliés précieux mais qu’est ce qui arrivera au plus génial des bébés surdoués. Si Clémentine n’est pas au bout de ses tribulations, le lecteur non plus. Comme moi, vous serez obligé de tourner les pages.

L’humour est omniprésent dans ce livre. Humour dans le dialogue : *En parlant de relations sentimentale, l’histoire du pompier qui a fondé un foyer, après avoir déclaré sa flamme à une sirène, tu la connais ? –Tu fais chier, Clem !*. (Extrait)

L’humour est aussi omniprésent dans le récit, le genre d’humour spontané qui prend par surprise un peu comme le font nos humoristes lors de leurs stand-up : Par exemple, comment croyez-vous que Clémentine s’y prend pour virer un mec ?

*Connais-tu l’association de groupements d’ensembles de communautés d’union de rassemblements d’agglomérations de sociétés d’alliances d’attroupements des personnes qui aiment vivre seules ? Non ? Comme c’est dommage.* (Extrait)

L’humour est même présent dans le titrage. L’auteure, Kathy Dorl ne s’est pas contentée de numéroter les chapitres, elle leur a trouvé chacun un titre, la plupart du temps non-pertinent mais témoignant toujours d’un esprit vif décidé à dérider.

Par exemple : *Toi + moi – toi = perfection* (Extrait, chapitre 4) *Quand je conduis, même le GPS met sa ceinture.* (Extrait, chapitre 7) *Cette phrase est volontairement ennuyeuse, afin que la suivante paraisse vraiment drôle.* (Extrait, chapitre 10)

Quant à l’histoire comme telle, elle est déjantée, elle a un petit caractère rebelle qui me plait. La plume est à la fois légère et loufoque quand on pense que l’héroïne au départ est moins qu’ordinaire. L’auteure lui a même attribué un défaut langagier quand elle est fatiguée ou stressée avec le résultat qu’une fois sur deux, le lecteur pouffe de rire. L’humour est parfois un peu acide mais atteint rarement le mauvais goût.

Notez que la légèreté du récit ne m’a pas empêché de réfléchir un peu sur l’eugénisme qui a poussé des tarés comme les nazis au nettoyage ethnique. Dans la plupart des pays, l’eugénisme est illégal.

Certains pensent que cette philosophie est mourante. Moi je n’en suis pas si sûr. Est-ce que la manipulation peut amener un fétus à communiquer avec sa mère par télépathie ? J’en doute, mais on ne sait jamais…jusqu’où peut aller le génie humain, surtout pour mal faire.

Donc CTRL+Q est un roman énergique, rafraîchissant avec une héroïne tordante. L’ensemble est original. Ça se lit vite. C’est même un peu trop court à mon goût, mais j’admets qu’il faut savoir s’arrêter. Enfin, pourquoi CTRL+Q comme titre ? Je vous laisse le découvrir mais vous allez vite comprendre que, même dans le titre, l’auteure n’a pas manqué d’humour.

À lire absolument, spécialement pendant les jours gris et les humeurs sombres.

Suggestion de lecture : CURE FATALE, de Robin Cook

Kathy Dorl a publié son premier roman « Ce que femme veut… » en 2013 aux Éditions Hélène Jacob. Il a eu un vif succès. Entre légèreté et humour le ton est donné : sans prétention, les sujets sont d’actualité et les personnages attachants. Un roman pétillant et drôle.

L’écriture de Kathy Dorl se situe dans ce qu’on appelle aux Etats-Unis les « feel-good books », ou romance moderne en français. En janvier 2015, « Déconfitures et pas de pot » se positionne directement dans le top 20 en littérature humoristique ainsi que « Ctrl + Q » . Prix littéraires : Finaliste du prix Jean-Jacques Robert de la nouvelle 2014 (Salon du livre d’Ile-de-France) Second prix roman concours littéraire Maestro 2015 avec « Déconfitures et pas de pot », entre autres.

Bonne lecture
Claude Lambert
le samedi 5 octobre 2019

 

LES CHRONIQUES DE HALLOW, tome 1

LE BALLET DES OMBRES

Commentaire sur le livre de
MARIKA GALLMAN

*Je m’avançai jusqu’à la table du salon, les
genoux tremblants. Là, je m’arrêtai, retournai
l’enveloppe dans tous les sens, pris une
profonde respiration et l’ouvris. Mes pires
cauchemars devinrent réalité lorsque je sortis
une série de photos.*
(Extrait : LES CHRONIQUES DE HALLOW, tome 1, LE
BALLET DES OMBRES, Marika Gallman, Éditions
Bragelonne,  2015, édition de papier, 475 pages)

Cette première chronique d’Hallow nous raconte l’histoire d’Aby, une jeune fille qui a le don extraordinaire d’absorber l’énergie des gens qui l’entourent. Toutefois, c’est un don qu’elle connait assez mal. Elle ne s’en sert que pour dévaliser des œuvres d’art. Mais sa vie va basculer le jour où elle se rendra compte que son dernier cambriolage était un piège, que son maître-chanteur n’a rien d’humain et qu’en plus, le policier qui la traque est immunisé contre son don. Si Aby veut survivre à cet épisode infernal, elle doit savoir qui sont ces hommes.  Cette rencontre avec le policier va la propulser dans un monde étrange : Hallow, où même les ombres peuvent tuer.

L’HÉRITIÈRE DE L’OMBRE
*Une fraction des enfants D’Ordre et Chaos, énergie pure
habitant des créatures vivantes, a créé vos ancêtres, une
«anti-énergie»…avec lesquels ils se sont reproduits pour
mettre au point votre race, une espèce capable de

suspendre l’énergie, ainsi que de l’absorber. De la
maîtriser. Lorsque la paix s’est instaurée entre les deux
factions qu’étaient devenues les enfants d’Ordre et
Chaos, vos ancêtres ont pris le rôle de garde du corps

des êtres supérieurs afin d’éviter qu’un côté n’essaie
de prendre le dessus sur l’autre.*
(Extrait : LES CHRONIQUES DE HALLOW, tome 1, LE BALLET DES OMBRES)

C’est un bon livre et je crois qu’il ouvre la voie à une série prometteuse. L’histoire est celle d’Abby, jeune femme de trente ans, voleuse professionnelle, experte en particulier dans le vol des œuvres d’art. Abby a un autre don encore plus extraordinaire : elle peut absorber l’énergie des gens qui l’entourent. Il suffit qu’elle se concentre un peu et hop, tout le monde tombe dans les pommes quelques minutes.

Très pratique pour braquer une galerie d’art. Mais son dernier vol a les apparences d’un piège. En effet, en toute ignorance, Abby tente de voler le portefeuille d’un policier…immunisé contre le don d’Abby. À partir de ce moment, un lien particulier unit maintenant le policier Wally et Abby dont les pouvoirs se détraquent. Les deux empruntent maintenant un chemin qui les mènera du côté obscur de Hallow où ils seront en présence de deux forces obscures qui s’opposent.

J’ai beaucoup aimé cette histoire. L’héroïne, Abby est une jeune femme courageuse, sympathique, très humaine, en plus d’être dotée d’un beau sens de la famille. Et surtout, elle connait son pouvoir et le craint parce que d’une certaine façon elle a la capacité de commander à l’énergie, mystère universel dont elle a une notion bien précise :

*Nous absorbions l’énergie, parfois de manière drastique, mais comme on dit : «Rien ne se perd rien ne se crée, tout se transforme.» Le surplus ne reste pas dans nos corps. Il s’évacue lentement, s’échange entre humains, animaux, plantes et même avec certains objets…Quand quelqu’un meurt par exemple, son énergie ne disparaît pas. Elle se diffuse progressivement.

Elle imprègne parfois les murs de la pièce où la personne se trouvait, ou quelque chose qu’elle touchait. L’énergie a une inclination naturelle à retourner dans un hôte vivant, mais, en cas de décès violent, elle peut se retrouvée traumatisée…et se fixer dans un objet inanimé. C’est souvent pour ça que les gens parlent de maison hantée…* (Extrait)

Dans LE BALLET DES OMBRES, il y a de la place pour tout ce qui fait la beauté de la littérature de type *urban fantasy* : une héroïne attachante et empathique au point qu’on aimerait l’avoir comme amie, il y a aussi de l’humour, du mystère, de la magie. Dans le troisième tiers du livre, l’atmosphère, le non-dit, l’aura redoutable de deux sombres personnages : Smith et McCucheon.

Tout ça me rappelle un peu le fameux comic strip policier américain DICK TRACY créé par Chester Gould en 1931. Bien sûr dans le Ballet des ombres, les visages ne sont pas déformés. La comparaison touche surtout l’atmosphère qui est glauque, obscure, mystérieuse et surtout surnaturelle.

La série ne fait que débuter. Il sera intéressant de voir quelle voie empruntera le prochain tome…par exemple que deviennent Smith et McCucheon, jusqu’où ira cet amusant petit jeu de séduction entre Wally et Abby et qui me rappelle la tague de mon enfance, quel sera le destin d’Abby? Quelles forces obscures pourraient encore se trouver sur son chemin? Je pense que la série promet.

En terminant je veux mentionner que j’ai été séduit par la beauté de l’écriture. J’y ai vu beaucoup d’inspiration, d’imagination, une recherche sérieuse de vocabulaire dans des constructions de phrases soignées et qui ont parfois une connotation sensuelle :

*L’énergie est en constant développement. Elle ne reste pas à un endroit donné, elle coule. Comme un torrent de montagne qui rejoint une rivière, puis l’océan, et sera ensuite charrié sous forme de nuage pour pleuvoir sur de nouveaux horizons. *  (Extrait)

Je suis sûr que vous apprécierez ce roman au rythme élevé et aux personnages attachants. Avec LE BALLET DES OMBRES, je crois que l’auteure Marika Gallman s’est donné un très bel élan pour sa série LES CHRONIQUES DE HALLOW. À suivre…

Suggestion de lecture : CHRONIQUE D’UN MEURTRE ANNONCÉ, de David Grann

Marika Gallman est une auteure suisse née en 1983. Collectionneuse acharnée de post-it et de personnalités multiples, elle rate de peu une carrière de scénariste à Hollywood en écrivant, alors qu’elle n’avait que douze ans, le scénario d’un Indiana Jones 4 qui ne sera finalement pas retenu.

Elle se console devant ses séries préférées dont elle rejoue les scènes culte chaque nuit à voix haute dans son sommeil, quand elle ne se relève pas en douce pour regarder des films d’horreur. Attirée par les ambiances sombres et les hommes aux dents pointues, elle se lance dans l’écriture de son premier roman, RAGE DE DENTS en 2009, donnant naissance à série MAEVE REGAN.

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 14 avril 2019

LE FÉLIN/MYSTÈRE AU CONGRÈS D’ALCHIMIE

COMMENTAIRE SUR LE LIVRE
D’ARTHUR TÉNOR

Dans la série LE FÉLIN, AGENT SECRET MÉDIÉVAL
*Abel Phégor est le lieutenant de police du duc
de Pique. Sa réputation est aussi sombre que
son regard…On prétend qu’il possèderait un
sixième sens pour repérer menteurs et aigrefins.
Et pour les faire parler, sa cruauté est d’un
raffinement reconnu jusque dans les plus
lointains cachots d’Orient.*
(Extrait : LE FÉLIN AGENT SECRET MÉDIÉVAL, MYSTÈRE
AU CONGRÈS D’ALCHIMIE, Arthur Ténor, éditions LITO,
2005, édition de papier, 170 pages)

Ce récit raconte l’aventure d’Yvain de Bréac, agent secret à la cour du seigneur de Montbrisac. On l’appelle le félin à cause de sa grande souplesse et de sa ruse. Un jour, Yvain est chargé d’une mission:  escorter l’alchimiste de la cour Maître Pirus au congrès mondial d’alchimie. Arrivés sur les lieux, d’inquiétants phénomènes se produisent : des formules secrètes disparaissent, des savants sont agressés… Le lieutenant Abel Phégor, chargé de démasquer le coupable, soupçonne Maître Pirus. Le Félin mène l’enquête et découvre la plus incroyable des vérités…

QUI PIQUE CHEZ LE DUC DE PIQUE ?
Deux hommes approchent, s’arrêtent devant la porte…
Une clé pénètre dans la serrure. Panique!

(Extrait : MYSTÈRE AU CONGRÈS D’ALCHIMIE)

LE FÉLIN AGENT SECRET MÉDIÉVAL est sans doute l’œuvre la plus connue d’Arthur Ténor. Cette série devrait intéresser les jeunes ados et pré-ados en particulier parce que l’auteur situe l’action à l’époque médiévale. Les jeunes aiment beaucoup le contexte médiéval depuis DONJON ET DRAGON entre autres, et puis la cour du roi Arthur n’a jamais vraiment perdu de son influence dans la littérature de toutes les époques.

Donc dans un contexte très médiéval, Ténor ajoute un élément qui séduit beaucoup de jeunes lecteurs, c’est-à-dire qu’il introduit un personnage très spécial, le Chevalier Yvain De Bréa dit LE FÉLIN, un Chevalier espion, ou devrait-on dire un agent secret qui rappelle étrangement le fameux personnage créé par Ian Flemming, James Bond .

Il en a à peu près toutes les caractéristiques : jeune, beau garçon, séduisant et séducteur, ingénieux et courageux. De plus, le génial savant Maître Pirrus équipe notre chevalier de ses gadgets les plus ingénieux pour aider le Chevalier dans ses missions. Ça rappelle bien sûr le célèbre Q, le pourvoyeur en gadgets de James Bond.

Donc, environnement médiéval, mission secrète pour agent secret, espionnage, danger sans oublier une dose d’humour…tous ces éléments font de la collection LE FÉLIN AGENT SECRET MÉDIÉVAL une série très appréciée des jeunes lecteurs. Au hasard de la collection, j’ai choisi le livre MYSTÈRE AU CONGRÈS D’ALCHIMIE : une histoire bien ficelée qui m’a intrigué du début à la fin.

Des alchimistes venus de partout se rassemblent en congrès dans la forteresse du Duc De Pique pour déterminer entre autres qui sera élu au premier cercle extrêmement restreint des alchimistes les plus brillants.

Maître Pirrus est sur les rangs, le Félin est responsable de sa sécurité. Mais très vite, des phénomènes inquiétants se produisent : des formules secrètes qui disparaissent mystérieusement, des savants tabassés, des ingrédients subtilisés. Le Félin mène l’enquête.

C’est une histoire bien bâtie et jamais je n’aurais imaginé qui était le coupable. Ténor m’a tenu en haleine du début à la fin et la finale était drôlement bien orchestrée. L’intrigue est donc solide et bien bâtie.

La plume est fidèle au contexte médiéval, même dans le vocabulaire, et suffisamment descriptive pour plonger le lecteur dans l’atmosphère de la chevalerie et de ses petits mystères. Aussi, elle familiarise le jeune lecteur avec l’alchimie, appelée aussi le grand œuvre qui vise la réalisation de la pierre philosophale, capable de changer le métal en or, de guérir de toutes les maladies et de rendre immortel.

C’est donc un bon petit livre pour les jeunes. L’auteur a su maintenir un très bel équilibre entre l’humour et l’intensité dramatique. La plume est fluide, les chapitres sont courts et l’ensemble est actualisé par les très belles illustrations de Mathieu Blanchin qui ont le don de capter l’attention.

J’ai bien aimé ce petit livre et c’est maintenant toute la série que je vous invite à découvrir. Vous pouvez aussi prendre simplement les titres qui vous inspirent car chaque histoire se lit indépendamment des autres. Un beau moment d’aventure…un beau moment de lecture…

Arthur Ténor est écrivain pour la jeunesse depuis 1998. Il a publié des romans pour toutes les tranches d’âge et pratiquement dans tous les domaines. Il est cependant plus connu pour ses récits historiques, notamment sur les deux guerres mondiales, Versailles et Louis XIV ou encore le Moyen Age. Il réside en Bourbonnais, tout près de Vichy.

Dans une présentation personnelle, il se décrit comme un « explorateur de l’imaginaire » Sa passion de l’écriture est pour lui « semblable à celle d’un aventurier sans cesse en quête de contrées inconnues, de rencontres inoubliables, de péripéties palpitantes ». L’esprit qui anime ses récits est résolument positif « L’action et le suspense se mêlent toujours à l’étonnement et à la tendresse, à l’humour et à la fantaisie ». Son souhait est surtout d’exprimer son amour et son respect indéfectibles de la vie.

DANS LA MÊME SÉRIE

 BONNE LECTURE
Claude Lambert
le  7 avril 2019

 

DEUX AMIS DANS LA NUIT, de LOUISE LEBLANC

*Je le vois s’éloigner au bord du lac.
Je ferme la porte et je commence à
trembler. Je prends conscience du
danger auquel je viens d’échapper. *
(Extrait : DEUX AMIS DANS LA NUIT,
Louise Leblanc, Courte Échelle, 1996,
Littérature jeunesse québécoise,
édition de papier, 65 pages, illustré)

*OUI! OUI! J’ai invité un ami. Oui! Je
l’ai enfermé. Parce que c’est un vampire.
Si vous ouvrez la porte, il va mourir.
À cause de la lumière. Et vous serez
des assassins!*
(Extrait : DEUX AMIS DANS LA NUIT)

Léonard et Julio sont amis mais ils ne se voient pas très souvent. Rien d’étonnant, Julio est un vampire et il ne peut sortir que la nuit. Un soir, alors que les parents de Léonard ne sont pas à la maison, lui et son ami Julio peuvent enfin passer une soirée ensemble. Mais rien n’est jamais simple entre un humain et un vampire. Il est fort probable que cette soirée entre amis, disons, très différents, réserve son lot de surprises. Heureusement l’amitié est une force. Une chose est sûre, c’est qu’humour et émotions sont au rendez-vous…un superbe souvenir de la Courte Échelle pour les jeunes lecteurs.

Voici un bon petit livre pour les premiers lecteurs, c’est-à-dire les enfants de 6 et 7 ans. L’histoire est un peu fantaisiste puisqu’elle a comme sujet une improbable amitié entre un petit garçon, Léonard, et un petit garçon…vampire, Julio. Julio vit dans la peur d’être reconnu. Il demeure dans un cimetière, ne peut pas sortir le jour, donc il ne peut pas admirer les beautés de la nature éclairée par le soleil.

Léonard a compris son dilemme et réserve une belle surprise à son ami. Alors que les parents de Léonard et Julio s’absentent un soir, les deux garçons décident de passer leur première soirée entre amis. Mais voilà…rien ne se passe comme Léonard l’aurait souhaité…

Ce petit livre est porteur d’une double réflexion : d’abord sur l’importance qu’accordent les enfants à la liberté et ensuite, le récit donne tout en douceur une petite leçon sur la tolérance car Julio est un enfant différent des autres, très différent mais l’amitié naissante chez les enfants est quelque chose d’extraordinaire.

Dans une entrevue qu’elle accordait au mensuel culturel québécois VOIR en 1999 L’auteure Louise Leblanc précisait qu’elle voulait créer une situation avec un personnage étranger à la vie courante, une amitié entre un petit garçon ordinaire et quelqu’un d’extraordinaire.

Elle a réussi à un point tel que DEUX AMIS DANS LA NUIT recevait en 1999 le prix du Livre Jeunesse Québec/Wallonie-Bruxelles dont le thème portait cette année-là sur l’amitié et la différence. Le choix des personnages, l’originalité des situations et des péripéties avaient séduit le jury. Les enfants aussi ont été séduits puisque la série Léonard s’est allongé jusqu’à 6 épisodes.

Même à l’âge de 6 et 7 ans, les enfants aiment se faire raconter des histoires. Ça permet un beau contact entre ces derniers et les parents ou les grands-parents et je sais de quoi je parle, ce sont des moments extrêmement agréables pendant lesquels les adultes admirent souvent la capacité d’émerveillement des enfants. Je vous en parle parce que DEUX AMIS DANS LA NUIT est une histoire parfaite pour ce genre de moment privilégié.

Bien sûr, il faudra vous attendre à ce que l’enfant vous demande qu’est-ce que c’est qu’un vampire. Il faudra évidemment vous préparer une réponse gentille mais sachez que dans ce petit livre, il n’y a aucune connotation de violence qu’on attribue généralement aux vampires, bien au contraire. Julio est un petit bonhomme attachant qui souffre de tout ce qu’il manque à la clarté du jour et son ami Léonard est là pour l’aider. C’est une histoire développée avec doigté et délicatesse.

Sinon, l’enfant peut lire le livre seul. Ce petit livre n’a que 61 pages, se lit très bien, les lettres sont grosses et les chapitres sont courts et agrémentés par les très belles illustrations de Philippe Brochard, graphiste, illustrateur et spécialiste de la Bande Dessinée.

Enfin, je suis heureux de recommander DEUX AMIS DANS LA NUIT pour les enfants, d’autant que le livre est issu d’une maison d’édition qui a participé activement à l’éveil intellectuel de dizaines de milliers d’enfants pendant 35 ans : LA COURTE ÉCHELLE.

Née à Montréal, Louise Leblanc a donné des cours de français, elle a été mannequin, comédienne, mime, recherchiste, rédactrice publicitaire et puis elle est devenue auteure et le succès est venu rapidement. En 1983, elle gagne le prix Robert Cliche pour son roman 37½AA. En 1993, elle reçoit le prix des clubs de la livromagie pour SOPHIE LANCE ET COMPTE. Elle a écrit plusieurs nouvelles, des romans pour adultes, elle a également écrit pour la télévision. DEUX AMIS DANS LA NUIT est le huitième roman qu’elle publie à la Courte Échelle. C’est une véritable femme-orchestre qui donne libre cours à sa passion de l’écriture.
Photo: Pierre Charbonneau.

Né à Montréal, Philippe Brochard a fait ses débuts dans les journaux étudiants où il a publié caricatures, bandes dessinées et dessins éditoriaux. En 1979, il a été directeur artistique du magazine LE TEMPS FOU. Parallèlement, il a commencé à dessiner pour CROC et commencé à multiplier les collaborations avec divers magazines et éditeurs de matériel pédagogique. Philippe Brochard poursuit sa double vie d’illustrateur et de graphiste en illustrant LE COMPLOT à la Courte Échelle et DEUX AMIS DANS LA NUIT, le huitième roman auquel il travaille à la Courte Échelle

À LIRE AUSSI

       

BONNE LECTURE
Claude Lambert
Le samedi 16 février 2019

 

SEUL SUR MARS, le livre d’ANDY WEIR

*Mon champ est mort. En l’absence de pression
atmosphérique, la majeure partie de mon eau
s’est évaporée. Et puis, la température est
largement inférieure à zéro. Rien, pas même
les bactéries contenues dans mon sol ne peut
survivre à pareille catastrophe.*
(extrait : SEUL SUR MARS, Andy Weir, Bragelonne,
2014, édition numérique, 822 pages)

Une équipe en mission sur la planète Mars doit faire face à une effroyable tempête qui l’ oblige à quitter la planète rouge. La tempête isole Mark qui se retrouve seul, coupé de toute communication avec la terre. Laissé pour mort par son équipe, Mark affronte une à une les difficultés, même celles qui lui semble insurmontables. En principe Mark dispose d’une réserve de 400 jours. Bien sûr, à 400 millions de kilomètres de là,  les scientifiques de la terre finissent par s’apercevoir que Mark est vivant, mais auront-ils le temps de le récupérer avant l’épuisement de ses réserves? Entre temps, Mark devra faire face à tous les dangers dont les monstrueuses tempêtes de sable qui grugent la planète.

549 JOURS DANS LE SABLE ROUGE
*J’ai commencé la journée avec un «thé à rien».
Le thé à rien est très facile à préparer.
D’abord, prenez un peu d’eau chaude, puis…
et puis c’est prêt.*
(Extrait : SEUL SUR MARS)

Seul sur mars est ce qu’on pourrait appeler un thriller survivaliste : un homme, Mark Watney, laissé pour mort par ses camarades suite à une violente tempête sur la planète mars doit survivre 18 mois avant d’être récupéré dans une dramatique tentative de sauvetage.

Tout le récit repose sur l’intelligence, l’ingéniosité, l’astuce, la débrouillardise et le savoir-faire de Watney qui vient prouver ici la véracité du vieil adage : Aide-toi et le ciel t’aidera. Pour chaque problème, et ce ne sont pas les problèmes qui manquent, Mark finit toujours par trouver la solution appropriée. Le fil conducteur du récit se résume en un mot : SURVIVRE.

Bien-sûr, le roman est hautement scientifique, mais Weir a fait de très beaux efforts pour vulgariser le langage scientifique et le rendre accessible. Je ne me suis donc pas senti trop perdu.

Ce qui m’a le plus frappé dans ce récit, c’est l’humour du héros…un humour omniprésent. Étant dépourvue de champ magnétique, Mars ne dispose d’aucune protection contre les radiations solaires. *Si j’y étais exposé, j’aurais tellement le cancer que mon cancer lui-même aurait le cancer*. (Extrait)

Disons que la lecture de ce livre m’a arraché rires et sourires. Mais je suis porté à croire que cet humour a fait perdre beaucoup de force aux éléments susceptibles de soutenir la tension dramatique de l’histoire.

Weir a créé un héros sans peur donc je n’ai pas eu peur pour lui…à une ou deux exceptions près. Pour moi c’est une faiblesse, mais elle est compensée par l’action qui se déroule sur terre où les agences comme la NASA sont en mode panique. Ça rétablit un certain équilibre.

Plusieurs critiques littéraires ont comparé SEUL SUR MARS à APPOLO 13 jugeant l’ouvrage de WEIR supérieur. Je ne ferais pas une telle comparaison. Je dirai que SEUL SUR MARS est différent. Le sauvetage de Mark fait l’objet d’une certaine coopération internationale, tandis que dans APPOLO 13 nous avons en présence deux belligérants : les bons américains et les méchants russes.

La tension dramatique est plus palpable dans APPOLO 13 et dans SEUL SUR MARS un très grand potentiel imaginatif vient soutenir le contexte scientifique. Les deux récits sont haletants et emportent le lecteur.

Pour ce qui est de l’éternelle question : qu’est-ce que je fais en premier? Lire le livre ou voir le film. Dans ce cas-ci, je n’ai pas hésité une secondes. J’ai lu le livre d’abord et j’ai apprécié l’adaptation après.

Donc pour résumer, j’ai beaucoup aimé SEUL SUR MARS. C’est un récit haletant, très réaliste, crédible sur le plan scientifique, avec un fil conducteur solide. Le héros Mark Watney est comparable au héros de la télésérie des années 80 MACGYVER.

Cette série racontait les péripéties d’Angus MacGyver, un aventurier dont la capacité la plus brillante était de combiner l’utilisation des objets courants du quotidien de façon ingénieuse à l’application pratique des sciences naturelles et de l’ingénierie.

L’imagination de Mark combinée à son humour et à son moral toujours maintenu à un haut niveau fait de lui un personnage attachant. Pour un sujet qui est loin d’être nouveau, Andy Weir nous a vraiment pondu un thriller de grande classe.

SEUL SUR MARS AU CINÉMALe livre d’Andy Weir a été adapté au cinéma par le réalisateur Ridley Scott, d’après le scénario de Drew Goddard. Il est sorti en décembre 2015. La prestation de Matt Damon est remarquable.

Andy Weir est un romancier américain né à Davis en Californie le 16 juin 1972. SEUL SUR MARS a été son premier grand défi L’ouvrage a nécessité d’imposantes recherches scientifiques car Weir le voulait le plus exact et le plus crédible possible. Le roman a fait l’objet d’une critique plutôt élogieuse, le wall street journal le qualifiant de meilleur livre de pure science-fiction depuis des années.

BONNE LECTURE
Le dimanche 13 janvier 2019
Claude Lambert

Si tu ne lis pas prends garde à toi,

COMMENTAIRE SUR LE LIVRE DE
LAURENCE FANTUZ

*Depuis toujours, je m’étais persuadé
que lire n’apportait aucun plaisir, sans
avoir réellement essayé, je dois
l’admettre. Devais-je lui faire confiance
et tenter l’aventure?*
(Extrait : SI TU NE LIS PAS, PRENDS GARDE À TOI!)
Laurence Fantuz, 2e édition 2012, Éditions Adabam.
édition numérique, 255 pages.)

Un jour, un vieux livre surgit dans la vie de Max, 12 ans…un cadeau que sa mère lui a fait…plutôt incongru pour Max qui est peu attiré par la lecture. Notre jeune ami décide de ranger le livre aux oubliettes, mais le livre n’est pas d’accord. Il s’anime et entreprend une mission : amener graduellement Max à apprécier la lecture. Max n’a pas du tout l’intention de se laisser faire et tire des plans pour se débarrasser de ce vieux livre dérangeant. Cependant, une chaîne d’évènements  et  l’influence de sa sœur qui adore lire amèneront  Max à s’intéresser au livre et à vivre finalement une aventure fantastique.

LIRE C’EST DÉCOUVRIR
*Effacés grâce à lui tous mes préjugés insensés,
tellement obstiné pendant des années j’ai été,
Mots et idées jaillissent désormais de mes pensées…*
(Extrait : SI TU NE LIS PAS, PRENDS GARDE À TOI)

Ce petit roman jeunesse est classé *aventure fantastique* mais j’y ai vu surtout un fort potentiel didactique et pédagogique. Au départ, le titre est plutôt ronflant et porte à jugement. Je n’ai pas tout à fait compris ce choix. Aussi, il ne faut pas trop s’y fier. Je veux préciser aussi que si vous croyez ne pas pouvoir lire ce livre avec des yeux d’enfants, mieux vaut pour vous passer à autre chose car vous risquez de vous ennuyer.

L’histoire est simple. C’est celle de Max, 12 ans, qui déteste la lecture mais qui ne l’a pas vraiment essayée. Un  jour, sa mère lui donne un vieux livre issu du patrimoine familial. Max n’en a cure…il relègue le livre aux oubliettes, mais le livre voit les choses autrement, car il est magique.

Le livre s’anime et se donne pour mission d’amener Max à apprécier la lecture. Pour ce dernier, le cadeau est empoisonné et il tire des plans pour s’en débarrasser. Il faut voir comment l’auteur amène Max à s’attacher à ce vieux bouquin. J’ai simplement et agréablement assisté à la naissance d’une forme de sentiment pour la lecture qui va finir d’ailleurs par une passion.

Quoique classique et peu original, le sujet est intelligemment développé et dévoile sans moralisation les vertus de la lecture comme l’enrichissement du vocabulaire en passant par le perfectionnement de l’orthographe jusqu’à l’ouverture de l’esprit sur le monde, son histoire, ses cultures.

L’élément qui m’a irrité un peu dans cette histoire tient au fait que tout se passe trop vite et va trop loin. En effet, presque du jour au lendemain, Max devient un passionné de lecture, délaissant sa passion des jeux vidéos, compose des histoires et de la poésie à mon avis un peu trop avancées pour son âge et compte maintenant devenir un écrivain. C’est un peu surréaliste ou tout au moins vite en affaires.

Malgré tout, j’ai apprécié ce livre, magnifiquement illustré par Dub, un excellent dessinateur, parce qu’il est très actuel. Les jeunes prendront plaisir à s’attacher au sympathique Max et ses amis et se reconnaîtront sûrement dans leur quotidien.

À notre époque où les jeunes sont aspirés par Internet, les jeux vidéos et les téléphones intelligents, il est bon de savoir qu’on peut prendre un réel plaisir à lire. Tout en évitant de présenter la lecture comme le seul loisir valable et considérant d’un bon œil les jeux vidéos et les sports,  Fantuz vient nous rappeler que le livre a et aura toujours sa place. Question d’équilibre.

C’est un  bon petit livre dans lequel l’humour a sa place et qui propose à la fin, un petit documentaire, encore là magnifiquement illustré par Dub, qui raconte l’histoire et l’évolution de l’écriture et du langage, l’histoire du livre et la naissance des différents genres littéraires.

Le livre survole aussi l’histoire de la bande dessinée et propose des petits conseils pour ceux et celles qui veulent prendre la plume. C’est un petit documentaire vraiment bien fait, écrit dans un langage simple et fluide à la portée des enfants. C’est un livre sympa qui ne peut faire que du bien.

Internet laisse filtrer peu de détails sur la carrière de Laurence Fantuz. Mentionnons simplement que c’est une auteure française née en 1966, résidant à Paris et maman de deux garçons. C’est une passionnée de la tradition orale qui a choisi la plume, et avec bonheur semble-t-il. SI TU NE LIS PAS, PRENDS GARDE À TOI est son premier roman-jeunesse. Vous pouvez consulter le site internet de Laurence Fantuz pour plus de détails sur son œuvre.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
le samedi 8 décembre 2018

 

NOT DOG (1), livre-jeunesse de SYLVIE DESROSIERS

*Au passage de tous ces pieds, le sable glisse,
s’enfonce. Les semelles et les orteils laissent
leurs marques jusqu’à ce que le vent ou la
mer les effacent. Au milieu de ces nouvelles
traces, personne ne remarque celles qui se
font toutes seules.*

(Extrait : QUELQU’UN A-T-IL VU NOTDOG, NOTDOG
Tome 1, Sylvie Desrosiers, La Courte Échelle, rééd.
2009, édition de papier, 370 pages, comprend 4
romans.)

Laissons l’auteure nous présenter l’équipe : *Jocelyne, dont la curiosité est sans limites, heureuse propriétaire de NOTDOG. Agnès, une grande rousse, qui en a pour cinq ans à porter des broches aux dents. John, l’Anglais blond fortuné à lunettes rondes qui fait sans arrêt des fautes de français.* Tous les trois ont douze ans. Mais le véritable héros de l’histoire est un chien, aussi laid que brillant. Nos amis ont ouverts une petite agence de détectives, peu importe la nature de l’enquête, allant jusqu’aux histoires de fantômes, de magie et autres *mystérieux mystères*…

NOTDOG 01 réunit les quatre romans suivants:

      

Un chien aussi laid que génial!
*-Lui aussi dit qu’il n’a vu personne observe
Agnès. –L’homme invisible frappe encore,
on dirait, remarque Jocelyne. -Avant que je
croie à l’homme invisible, il va mouiller des
petites cuillères! C’est alors que, juste à la
hauteur de ses yeux, une petite cuillère
passe lentement, reste suspendue quelques
secondes et…*
(Extrait : NOTDOG 01, FAUT-IL CROIRE À LA MAGIE?)

Lorsque j’étais animateur scout sur la Côte-Nord, je basais les camps sur un livre. J’adorais raconter à mes pré-ados une histoire et créer des jeux d’aventures en liens  avec celle-ci. À ce titre, ma plus grande inspiratrice fût sans nul doute Sylvie Desrosiers.

Pour sa série NOTDOG, elle a créé trois jeunes sympathiques personnages de 12 ans et un chien qui retient l’attention autant parce qu’il est laid que parce qu’il est brillant : NOTDOG. Jocelyne, Agnès, John et Notdog  ont monté ensemble une petite entreprise de détectives. Ça c’est le point commun à toutes les histoires de la série. Une enquête par histoire.

À chaque enquête, Sylvie Desrosiers a incorporé avec brio tous les éléments que les pré-ados aiment dans une histoire : du mystère, des intrigues avec des tas d’indices…fantômes, disparitions inexpliquées, phénomènes étranges, mais aussi, de la fantaisie et beaucoup d’humour…des éléments qui plaisent beaucoup aux jeunes, en particulier l’humour.

Dans ces histoires, il n’y a pas de violence, pas de gros mots, pas d’horreur. Mais dans chaque histoire,  nos amis courent un danger potentiel et doivent compter les uns sur les autres pour s’en sortir et résoudre les énigmes. Voilà qui pourrait amener les jeunes lecteurs et lectrices à prendre parti sur les vertus de l’esprit d’équipe.

Sylvie Desrosiers a créé trois personnages qui sont toujours à l’image des jeunes d’aujourd’hui : dégourdis, curieux, aimant vivre des aventures dont ils vont s’enrichir, appréciant les amis et les aspects sociaux de leur vie.

Donc les jeunes lecteurs peuvent aisément s’identifier aux jeunes héros, d’autant que dans ces histoires, les parents sont légèrement en retrait. Ils peuvent s’intégrer dans les aventures et en demeurer captifs jusqu’à la fin.

Un des éléments qui m’a le plus emballé dans ces histoires est l’humour, particulièrement celui des passages descriptifs : *Ses mains sont tellement sales qu’il a l’air de porter des mitaines; ses jeans sont tellement crottés que même les vidangeurs n’en voudraient pas; et ses dents sont tellement douteuses qu’il a l’air d’avoir une barre de toffee accrochée aux gencives.* (Extrait : NOTDOG 1, FAUT-IL CROIRE À LA MAGIE?)

Je crois que les livres de la série ont tout pour plaire aux jeunes : beaucoup d’humour, mystère et intrigues, amitié, action, rebondissements…les histoires sont courtes et se lisent facilement. Il n’y a rien à l’épreuve des jeunes intrépides…de la bonne lecture…toujours actuelle.

Sylvie Desrosiers est une écrivaine et journaliste québécoise née à Montréal le 28 août 1954. Elle est l’auteure de plus d’une vingtaine de romans à la Courte Échelle dont la série complète NOTDOG. Son œuvre a été couronnée de plusieurs prix prestigieux dont le PRIX DU GOUVERNEUR GÉNÉRAL en littérature jeunesse de langue française en 2008 et la MÉDAILLE DE LA CULTURE FRANÇAISE en 1997.

Daniel Sylvestre est un illustrateur  québécois, natif de Montréal. Il exerce son art depuis plus de 30 ans. Ses livres sont connus un peu partout dans le monde. Les jeunes lecteurs québécois le connaissent surtout pour ses illustrations dans les séries PUCE, ZUNIK et CLÉMENTINE, ainsi que dans les aventures du chien « Notdog ». Daniel Sylvestre a étudié en arts décoratifs et en arts graphiques à Paris. Artiste graveur reconnu En 2007, il était finaliste au Prix du Gouverneur général du Canada pour les illustrations du roman « Ma vie de reptile » de Sylvie Massicote.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
le samedi 24 novembre 2018

UN TOUT PETIT MONDE, de DAVID LODGE

*Nous étions assis vers le fond de l’appareil, juste
derrière l’aile. Il était près du hublot et moi à côté
de lui. Dix minutes environ après avoir quitté
Gênes…le négociant s’est tourné vers moi. M’a
donné une tape sur le bras et m’a dit : «Excusez-
moi, mais vous ne voudriez pas jeter un petit coup
d’œil dehors. Je rêve ou quoi? Est-ce que ce moteur
est vraiment en feu?*

(Extrait : UN TOUT PETIT MONDE, David Lodge, Éditions
Rivages, Rivages poche, 1992, édition de papier, 500 pages)

Dans ce récit loufoque et hilarant, David Lodge s’immisce dans le monde huppé des Universitaires, plus précisément des spécialistes en critique littéraire, qui vont de congrès en congrès pour *crier en silence* leur besoin d’être entendus. Par le biais de deux  Universitaires. l’auteur nous entraîne dans le monde fascinant des congrès, colloques, conventions et rencontres internationales où les pontes de la critique se retrouvent et se perdent.

Lodge jette un regard sarcastique, aussi acide qu’hilarant sur les protocoles et rituels des congrès : rencontres intellectuelles hermétiques, dialogues sirupeux, tourisme, sexe, loisirs, bouffe et conférences ennuyeuses transforment les congrès en liturgie…

LES CONGRÈS : MODE D’EMPLOI
*…Que les filles enlèvent tous leurs vêtements avant de
commencer à danser devant leurs clients. Ce n’est pas du
strip-tease, c’est du vulgaire déshabillage, l’équivalent
terpsichoréen de l’illusion herméneutique d’un sens
récupérable, laquelle illusion prétend que si nous
dépouillons un texte littéraire de son enveloppe
rhétorique, nous découvrirons les faits simples et
élémentaires qu’il essaie de nous communiquer*
(Extrait : UN TOUT PETIT MONDE)

Ce livre fascinant m’a aspiré dès les premières pages dans l’univers cossu des colloques et des congrès des milieux littéraires universitaires de partout dans le monde…un milieu qui souffre d’un snobisme torturé et handicapant :

«Les journaux du dimanche et les hebdomadaires ne s’intéressent pas autant à la critique littéraire qu’autrefois, j’en ai bien peur«. «C’est parce qu’elle est souvent illisible, dit Philip Swallow. Moi je ne la comprends pas, alors comment veux tu que les gens du commun la comprennent? En fait c’est précisément ce que raconte mon livre. C’est pour ça que je l’ai écrit». (Extrait)

Avec un humour parfois noir et grinçant, mais pourtant irrésistible, David Lodge nous décrit les rituels entourant ces congrès, comprenant bien entendu une programmation de conférences et de communications qui n’aurait aucune raison d’être si elle n’avait pas un côté social bien développé :

*Allons boire un verre, allons dîner, allons déjeuner ensemble. C’est ce genre de contact informel, bien sûr, qui constitue la raison d’être d’un congrès et non pas le programme des communications et des conférences qui pourtant a servi d’alibi pour rassembler les participants et qui semble à la plupart d’entre eux affreusement ennuyeux.* (extrait) Il y a aussi, selon les congrès des programmations culturelles et touristiques.

Mais surtout, tout bon congrès est assorti d’une programmation un peu plus discrète celle-là, un peu plus cachée, à peine avouée mais qui ne surprend personne…les congrès sont l’occasion d’aventures sexuelles et là-dessus, Gibson entre allègrement dans les détails.

C’est comme si l’activité sexuelle entretenait avec la créativité intellectuelle de certains congressistes des liens vitaux, mystérieux et profonds. Cet aspect du rituel des congrès occasionnent dans le récit des tournants plus dramatiques quoi qu’extrêmement intéressants.

Il y a dans ce récit, deux fils conducteurs intimement liés : d’abord, un des principaux héros, Persse McGarrigle a soif de gloire, mais cette soif se transforme graduellement en soif d’amour et la recherche de cet amour incarné par Angelica Pabst va le faire errer de congrès en congrès. Va-t-il la rattraper? Dans une espèce d’attachement au personnage que j’ai développé, je me suis surpris à espérer pour lui.

Ensuite, secrètement ou ouvertement, les grands pontes de la critique littéraire espèrent décrocher la chaire de critique littéraire offerte par l’Unesco, dotée d’avantages plus que confortables, ce qui donne au récit un petit caractère intriguant, les héros de la plume versant dans de petites bassesses, des petites jalousies et un peu de léchage. Le fin mot de la course m’a un peu déçu mais pas vraiment surpris.

Donc nous avons ici un roman très bien bâti, facile à suivre malgré une grande quantité de personnages, un roman qui tranche par son originalité bien sûr mais aussi par la plume franche et directe de Gibson qui nous a réservé une fort belle finale..

Le récit a un petit côté noir, en fait disons gris, grinçant, mais moi, je l’ai trouvé terriblement humain car dans cet énorme chassé-croisé de profs d’universités à travers le monde, j’ai pu observer tout au long de ma lecture, l’évolution d’hommes et de femmes qui, sous leur surface hermétique et snobinarde, ont un extraordinaire besoin de reconnaissance et d’amour.

En terminant, l’auteur aborde la littérature et la critique littéraire faite par des professeurs aussi émérites que flagorneurs. Vous comprendrez d’une part pourquoi l’auteur a choisi comme titre UN TOUT PETIT MONDE et d’autre part pourquoi mes articles constituent des commentaires et non de la critique. Mon dernier commentaire est à l’effet que, d’après moi, vous aimerez ce livre.

David Lodge est un écrivain britannique né à Londres en 1935. Diplômé de l’Université de Londres, il enseigne l’anglais. Il a écrit son premier roman à l’âge de 18 ans : LE MONDE, LE DIABLE ET LA CHAIR, mais il ne sera jamais publié.

À partir des années 1970, les romans de Lodge dépeignent ironiquement et avec sarcasme les milieux universitaires, créant quelques personnages dont quelques-uns deviendront récurrents dont le professeur de lettre qui aspire à devenir l’enseignant le mieux payé du monde : Morris Zapp.

D’ailleurs, David Lodge atteindra la notoriété avec la publication de UN TOUT PETIT MONDE en 1992.Ce n’est que dans les années 80 qu’il variera le cadre de ses romans, développant différents thèmes dont le monde de la télévision et la maladie d’Alzheimer (LA VIE EN SOURDINE, 2008)

BONNE LECTURE
Claude Lambert
Le dimanche 11 novembre 2018

Les invraisemblables aventures de …

MONSIEUR TOUT LE MONDE

Commentaire sur le livre de
MAHRK GOTIÉ

*Honnêtement, baillai-je, je n’en ai strictement rien à cirer de ta vie, de ton pouvoir, ni de tout ce qui constitue ta particularité intrinsèque qui, j’en suis convaincu, n’a rien à envier à celle de n’importe quel autre abruti ordinaire. Mais puisque tu ne sembles pas comprendre que tu me dérange, crache ton venin!*

(Extrait : LES INVRAISEMBLABLES AVENTURES DE MONSIEUR TOUT LE MONDE, Mahrk Gotié, IS Éditions 2014, édition numérique, 160 pages)

Monsieur Tout le monde est comme tout le monde ou presque : il a un travail qu’il déteste, une femme moche, et deux adolescents dont le premier but dans la vie est de ne surtout pas devenir comme lui. Mais Monsieur Tout le monde veut changer tout ça. Il veut rêver, vibrer. Alors, un beau jour, il décide de s’affranchir de ses barrières mentales, et part à la découverte d’un monde beaucoup plus déjanté qu’il ne l’avait soupçonné… Il plaque femme et enfants, bien décidé à vivre. Il se lance ainsi dans des aventures invraisemblables qui seront tout sauf ordinaires, à la découverte d’un monde tordu et débridé. 

VIRAGE DANS LA VIE
D’UN CASSE-PIED FAINÉANT
*Je n’aime pas les gens et ils me le rendent à
l’identique. Je pisse sur tout le monde et ça
me fait jouir. Détestez-moi, je ne demande
que ça. Je souhaite votre haine et votre
mépris, ma mauvaise réputation me fait
bander comme un âne. Insultez-moi,
salissez mon image, n’hésitez pas…
(Extrait : LES INVRAISEMBLABLES AVENTURES
DE MONSIEUR TOUT LE MONDE)

J’ai choisi ce livre par curiosité. Le titre n’est pas banal et puis je croyais trouver un monsieur qui me ressemblait un peu. Tel ne fut pas le cas…loin de là. LES INVRAISEMBLABLES AVENTURES DE MONSIEUR TOUT LE MONDE est un livre déjanté et affublé d’une surdose de cynisme, de machisme et d’égocentrisme.

Le sujet était pourtant prometteur : Monsieur tout le monde n’aime pas sa vie, il déteste son travail, il croit que sa femme ne l’aime plus et trouve ses deux ados insignifiants. Il décide donc de tout plaquer, décidé à vivre avant de mourir.

C’est là que l’auteur aurait pu être original. Au contraire de l’originalité et d’un goût recherché, il nous a laissé un récit aux limites du trash : *La médiocrité, moi je vous la sublime, je la divinise, je l’incarne au plus haut point, parce que je suis monsieur-tout-le-monde, comme vous. Et vous savez très bien que nous ne triomphons pas.* (Extrait)

Il est certain que ce livre va plaire aux amateurs de trash qui recherche dans un livre la plume directe et provocante : le trash, l’indécence, la vulgarité et bien sûr la crudité qui ne manque pas dans le livre de Gothier :

*Sur cette annonce pour le moins alléchante, une grosse pute d’au moins soixante ans, vieille, immonde et snobe, un gros tas de graisse puant et dégoulinant, un déchet humain repoussant à l’excès avec des yeux enfoncés dans les fentes, un nez porcin, une bouche dégueulasse, s’assit en face de moi avec la prestance d’un tas de merde…* (Extrait)

Le titre du livre a un petit quelque chose qui évoque un peu l’arnaque. À partir du moment où notre monsieur tout-le-monde choisit de dissoudre sa vie, il n’est plus monsieur Tout-le-Monde, mais tombe dans une minorité indigente selon son propre choix.

Quel lecteur ou lectrice va se reconnaître là-dedans. Ce genre de monsieur tout-le-monde ne prend même pas le temps de lire un livre. Vous ne devez pas vous attendre à vous reconnaître dans ce genre de vie délabrée.

Ce livre est un peu comme son personnage principal. Il n’a pas de but. Ça raconte, un peu comme dans une chronique, mais avec plus d’errance, des pirouettes sexuelles qui relèvent de l’obsession et surtout avec une philosophie de supermarché facile mais bien tournée toutefois. Par exemple :

*Ouais, je rate toutes ces choses qui valent le coup et ça me plait, parce que c’est moi et personne d’autre qui décide de les rater. J’apprécie la beauté de l’inutile.*
*Au final, chaque homme se révèle minable. Faut juste attendre le moment où il ne dissimule plus sa véritable nature.*

*J’aime la décadence et la saleté, et tout ce qui ne tourne pas comme vous le voulez. Parce que je ne suis qu’un vieux con qui n’en a plus rien à foutre car il sait qu’il va bientôt crever.* (Extraits)

Ce sont des phrases bien tournées mais qui n’ajoutent pas grand-chose à l’intérêt du livre sauf peut-être à la psychologie du personnage principal. Je terminerai en disant qu’au moins le livre est bref, très ventilé, il se lit vite et bien et annonce peut-être une suite…je ne commenterai pas. Conclusion, ce livre ne deviendra sûrement pas un fleuron de la littérature.

Mahrk Gotié est un jeune auteur émergent, un peu philosophe mais surtout provocateur. Pendant un séjour de quelques années sur l’Île de la Réunion, il décide d’écrire nouvelles et poèmes qui apparaîtront ici et là dans quelques revues littéraires jusqu’à la publication de son premier roman : modeste mais se voulant comique et tout à fait cynique voire dérangeant : LES INVRAISEMBLABLES AVENTURES DE MONSIEUR TOUT LE MONDE.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
le dimanche 14 octobre 2018