CHRONIQUE D’UN MEURTRE ANNONCÉ, de DAVID GRANN

*Un complot, a écrit Don DeLillo, est tout ce que la vie quotidienne n’est pas. C’est un jeu pour initiés auquel on joue froidement…Nous sommes des innocents, à l’intelligence défectueuse qui nous efforçons de trouver un sens approximatif au chaos quotidien.* (Extrait : CHRONIQUE D’UN MEURTRE ANNONCÉ, David Grann,
t.f. Éditions Allia, Paris, 2013, édition numérique.)

Lorsqu’en 2008, le juge Castresansa s’empare de l’affaire du meurtre de Rodrigo Rosenberg, avocat guatémaltèque estimé, il ne sait pas qu’il va ouvrir une boîte de Pandore. Dans un pays où le complot est de règle et la corruption une éthique, la suspicion règne. Car cette enquête retrace aussi l’histoire d’un pays. Par une minutieuse reconstitution des faits, Grann montre que le crime s’accommode autant de vrais mensonges que de fausses vérités.

Le moteur du récit : de multiples retournements de situation. D’autant que David Grann parle par la voix de la victime. Voix d’autant plus gênante que l’homme est mort. La vidéo devient alors l’outil de la confession, en l’occurrence publique puisqu’elle est diffusée sur YouTube et fera évidemment le tour du monde. Ce livre est aussi la chronique d’une véritable crise politique.

LES RÈGLES DE L’IMPUNITÉ
*Le gang s’était forgé son propre langage codé :
les «verts» désignaient l’argent, «soulever
quelqu’un», c’était le kidnapper; et «canarder
une voiture» voulait dire assassiner quelqu’un.
Plus elle écoutait, plus l’agente comprenait que
«faire tomber un gros morceau», c’était tuer
quelqu’un de haut placé.*
(Extrait : chronique d’un meurtre annoncé)

J’ai été attiré par le titre, je n’ai pas été déçu par le livre même si j’ai trouvé l’édition numérique moins qu’ordinaire : pas de ventilation, pas de paragraphe, un texte en paquet de la page 1 à la page 100. L’éditeur aurait pu rendre le texte beaucoup plus présentable car le livre en vaut la peine.

Sa trame est complexe toutefois car l’auteur évoque l’affaire Rosenberg de 2009 qui avait secoué les milieux politiques guatémaltèques et par ricochet l’ensemble de la Société du Guatemala, un des pays les plus corrompus au monde.

Rodrigo Rosenberg, avocat célèbre enquêtait sur la mort violente de Khalil Musa, ami et homme d’affaire connu et de Marjorie, sa fille qu’il fréquentait secrètement. Un mois plus tard, le 10 mai 2009, Rosenberg est assassiné près de son domicile.

Il faut être très attentif à ce récit car il y a deux questions que le lecteur devra se poser jusqu’à la fin : À qui profite le crime ? Et quelles étaient les motivations profondes de Rosenberg. La réponse à cette deuxième question m’a donné une véritable gifle. Je ne peux rien dévoiler, mais le raisonnement fataliste de Rosenberg a de quoi surprendre.

Peu importe la façon dont Rosenberg est mort, on peut supposer qu’il en savait trop. Pour enquêter sur ce crime à saveur très politique, il fallait un incorruptible, denrée très rare au Guatemala. C’est un espagnol qui est désigné : Castresana, personnage froid, tranchant et agressif.

Castrasena ira au fond des choses et finira par comprendre comment est mort Rosenberg. Mais qu’est-ce que ça donnera dans un pays dont la corruption est devenue d’une navrante banalité ? : *Les contrefaçons de la réalité les plus efficaces sont celles qui représentent ce que seuls les comploteurs semblent capables de créer : une trame parfaitement cohérente. * (Extrait)

La trame qui met en évidence l’arrière-boutique de la politique, est très complexe. L’auteur évoque même dans son récit la possibilité d’un complot à l’intérieur du complot.

Ce n’est pas simple mais l’auteur David Grann qui est journaliste apporte un magnifique éclairage sur les intrigues complexes des coulisses du pouvoir et des arrière-cours de la politique où se précise et s’entretient tout le drame du peuple guatémaltèque. Avec sa plume froide et directe et en un peu plus d’une centaine de pages, en résumant l’affaire Rosenberg, Grann plante tout le décor d’une politique tentaculaire et corrompue.

Ce petit livre est plus que le résultat d’une enquête. En effet, en résumant l’affaire Rosemberg, David Grann a créé un véritable suspense qui place le lecteur dans l’attente de ce qui va se passer créant ainsi une certaine addiction. Je ne sais pas si c’était dans ses intentions mais c’est raconté avec intelligence et fougue et ça met en perspective les cadres d’une cruelle réalité :

*Le gouvernement guatémaltèque aurait dissimulé sa propre corruption. La prolifération des fausses réalités a souligné combien il était difficile de s’assurer de la vérité dans un pays où cette dernière a si peu d’arbitre* (Extrait)

Cet extrait n’est pas sans me rappeler le film *Z* coécrit et réalisé par Costa Gavras en 1969 et qui raconte que dans un pays du bassin méditerranéen, un député progressiste fut assassiné. Pendant son enquête, le juge d’instruction met en évidence le rôle du gouvernement, de l’armée et de la police dans cet assassinat. Voyez le film si vous le pouvez, le petit juge sort énormément de saletés.

C’est un récit un peu trop bref à mon goût, mais je dois l’admettre, il est très bien construit et donne à penser que les historiques petites coutumes douteuses des coulisses politiques guatémaltèques mettent dans l’ombre les résultats de l’enquête.

C’est un grand défi de résumer en si peu de pages une enquête aussi complexe que celle sur l’affaire Rosenberg. Grann a brillamment réussi. Retenez donc bien ce titre qui colle avec la réalité du récit et c’est en lisant que vous allez comprendre : CHRONIQUE D’UN MEURTRE ANNONCÉ, un pas intéressant dans la lutte contre l’impunité.

Note : ce récit de David Grann est issu d’un article publié dans le New-Yorker du 4 avril 2011. Il a été publié en français dans le magazine Feuilleton de janvier 2012. Enfin le journaliste a accepté l’offre des Éditions Allia de l’éditer en février 2013 dans un format à mi-chemin entre le documentaire et le polar.

David Grann est un écrivain et journaliste américain né à New-York en 1967. Ancien rédacteur en chef pour les journaux The New republic et The Hill, il a collaboré avec plusieurs prestigieux journaux dont le Washington post, le Wall street journal, le Times de New-York. Grann a aussi écrit LA CITÉ PERDUE DE Z et deux courts polars.

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 3 février 2019

LA LIGNÉE, de GUILLERMO DEL TORO et CHUCK HOGAN

*Ou bien une créature qui avait été Czardu. La peau
ratatinée, assombrie, assortie aux plis multiples de
son ample robe. Une ressemblance frappante avec
une tache d’encre mouvante. Cet être se déplaçait
sans effort apparent tel un spectre immatériel…Les
ongles de ses orteils, pareils à des serres d’oiseaux
de proie, grattaient légèrement le plancher.*
(Extrait : LA LIGNÉE, Guillermo Del Toro, Chuck Hogan,
Presses de la Cité 2009, édition de papier, 450 pages.)

Un avion en perdition finit par atterrir à New-York. Ce que les secouristes découvrent dépasse leur entendement. Des épidémiologistes découvrent avec horreur que tous les passagers sont morts…en apparence, sauf quatre d’entre eux. Le même soir, parallèlement à cette stupéfiante découverte, 200 cadavres disparaissent des morgues de New-York. Les spécialistes comprennent rapidement qu’une menace sans précédent plane sur New-York et ses 20 millions d’habitants et ça risque de s’étendre à toute la planète. Attentat au gaz? Bactérie foudroyante? Ce que personne ne sait encore c’est que les vampires sont là. 

LA MYTHOLOGIE VAMPIRIQUE REDÉFINIE
*«Je pensais que les vampires ne buvaient que le sang
des vierges…Qu’ils hypnotisaient leur proie, qu’ils se
transformaient en chauve-souris.»…«On a beaucoup
brodé autour de leur existence. La vérité est plus…
comment dire… ?*
(Extrait : LA LIGNÉE)

Ce livre est un coup de cœur pour moi. Le thème des vampires est au cœur de l’histoire. Si LA LIGNÉE est une variation d’un thème surdéveloppé, il faut savoir que la variation est importante. En fait, LA LIGNÉE c’est Bram Stoker* revisité, modernisé, dépoussiéré mais dans le respect de l’idée de base :

*Bram Stoker a popularisé la croyance selon laquelle le vampire pouvait se transformer en créature nocturne tels le loup ou a chauve-souris. C’est une idée fausse qui repose quand même sur un fond de vérité.* (Extrait)

Ici, les auteurs vont au-delà du Dracula classique et aussi au-delà du vampirisme moderne que nous sert la télévision. Ce qui fait que j’ai trouvé le livre original. Je vous laisse découvrir les différences que proposent Del Toro et Hogan. Je crois que vous ne serez pas déçu.

Cela dit, l’histoire est imprégnée de mystère dès le début : un avion atterrit avec 200 passagers morts, plus tard, 200 cadavres disparaissent de différentes morgues. Un expert médico-légal a le temps de faire une autopsie et fait une découverte à la fois extraordinaire et terrifiante :

*Il se passait quelque chose d’extraordinaire. On aurait dit que les lois immuables de la mort et de la décomposition devenaient obsolètes sous ses yeux, là, dans cette salle d’autopsie* (Extrait)

Rien ne laisse supposer qu’il s’agit de vampires à ce stade. Les auteurs prennent bien leur temps pour confirmer cette notion jusqu’à ce qu’on constate qu’ils se multiplient de façon exponentielle : *Ces vampires -car c’est bien de cela qu’il s’agit-, sont des virus incarnés et ils vont se répandre dans toute la ville jusqu’à ce qu’ils nous aient tous exterminés.* (extrait)

Dès le départ, les auteurs m’ont entraîné dans une atmosphère d’intrigue, de mystère, de questionnement, le tout, s’en allant grandissant au fil des pages. Je n’ai compris que vers le milieu du livre que les auteurs m’entrainaient dans une logique de transformation du mythe des vampires.

Rien à voir avec les vampires qui mordent le cou de leur victime, rien à voir avec Twilight. Je vous laisse découvrir les différences et comment Ephraïm pourrait éviter l’anéantissement de l’humanité étant donnée la vitesse avec laquelle se propage ce *virus incarné*.

J’ai trouvé ça novateur, audacieux, original avec quelques éléments qui m’ont atteint particulièrement comme le rôle que joue le site du World Trade Center dans cette histoire. La destruction des tours donne un lien intéressant et respectueux aussi avec la destruction possible de l’humanité dans cette histoire.

L’histoire est très bien construite et amène très graduellement le lecteur dans l’horreur, le chaos, la désolation. Il y a beaucoup d’action. C’est un thriller haletant. Je ne vous cacherai pas toutefois que j’ai trouvé la finale un peu bâclée. Les points forts du livre compensent largement cette faiblesse.

Je vous recommande donc ce livre : LA LIGNÉE, premier tome de la trilogie du même nom…une série dite *vampirique*.

Guillermo del Toro est un réalisateur, scénariste, romancier et producteur de cinéma mexicain né le 9 octobre 1964 à Guadalajara, dans l’État de Jalisco. C’est aussi un spécialiste des effets spéciaux. Pendant plus de 10 ans, il a œuvré, dans son entreprise : Necropia à la création de nombreux effets spéciaux pour des productions mexicaines.

Son imagination débordante s’est étendu au domaine littéraire avec quatre romans, trois coécrits avec Chuck Hogan et le quatrième avec Daniel Kraus. Il cumul de nombreux prix, mais essentiellement dans le monde du cinéma.

Chuck Hogan est un écrivain et scénariste américain né en 1969 à Canton dans le Massachusetts. Il est spécialisé dans la littérature policière, d’horreur et de science-fiction.  Son fameux roman LE PRINCE DES BRAQUEURS publié en 2004 lui a valu le PRIX HAMMETT.

Sa notoriété s’accroit d’un cran alors qu’il s’associe au réalisateur-scénariste mexicain Guillermo Del Toro pour l’écriture d’une trilogie sur la violence amorcée avec LA LIGNÉE en 2009.  LA CHUTE et LA NUIT ÉTERNELLE complètent la série. Je note enfin que LE PRINCE DES BRAQUEURS a été adapté au cinéma par Ben Affleck en 2010 sous le titre THE TOWN.

La suite…

Abraham Stoker (1847-1912) est un écrivain britannique d’origine irlandaise, auteur de nombreux romans et créateur de DRACULA publié en 1897 et qui lui a valu la célébrité. Toute son œuvre est imprégnée du style néogothique qui n’est pas sans rappeler certaines œuvres devenues classiques comme par exemple FRANKESTEIN de Mary Shelly.  DRACULA, les vampires ne tarderont pas à envahir la littérature et le cinéma.

Christopher Lee.
Le plus célèbre DRACULA
du septième art

BONNE LECTURE
Claude Lambert
Le dimanche 27 janvier 2019

L’EMPIRE DU SCORPION, de SYLVAIN MEUNIER

*Une fois qu’elles furent bien installées, Dorothy lui
demanda d’être assez aimable de la laisser parler
sans l’interrompre et de ne pas lui poser de questions.
Le récit qu’elle s’apprêtait à faire était en elle depuis
longtemps. <Je suis consciente que la chose sera
impossible, Emma, mais l’idéal serait que vous oubliiez
ce que je m’apprête à vous raconter.>*
(Extrait : L’EMPIRE DU SCORPION, Sylvain Meunier, Guy
Saint-Jean Éditeur, 2014, édition de papier, 485 pages)

Percival Imbert accompagne sa femme au Centre commercial de son quartier. Sur place il la laisse aller et s’installe sur un banc. Après un certain temps il commence à s’inquiéter. Qu’est-ce qu’elle fait? Paniqué, il fait lancer un appel. Pas de réponse. Marie Doucet a disparu. Enlèvement? Meurtre? Aucune possibilité n’est écartée, y compris la participation d’un être obscur, ignoble, régnant dans les hautes sphères de la politique canadienne, à l’abri de sa fortune colossale qui magouille, fait chanter en toute impunité et signe des crimes sordides. L’enquête  amènera l’inspectrice Jacinthe Lemay  plus loin qu’elle pensait.

INTRODUCTION À LA POLITIQUE-FICTION
*«Pauvre vieille ordure…Si puissant, si brillant et
tellement aveugle…Vous n’avez rien compris,
Père, rien vu. J’aurais pu passer outre l’horreur
du viol. C’était la première fois que vous vous
intéressiez à moi, après tout…ce qui a rendu
toute forme de pardon impossible, c’est qu’après,
je n’ai pas pu vous garder pour moi, pour moi
toute seule.
(Extrait : L’EMPIRE DU SCORPION)

On aurait pu intituler ce livre LA MYSTÉRIEUSE FEMME DU MYSTÉRIEUX PERCIVAL IMBERT. Je m’explique. Lors d’un magasinage de Noël dans un centre commercial, Percival Imbert perd de vue sa femme Marie Doucet. Il ne la reverra plus. L’enquête est confiée à Jacinthe Lemay qui se lancera dans une investigation extrêmement complexe. Jacinthe apprendra beaucoup de choses très troublantes.

Jacinthe en viendra à se demander si Marie Doucet existe réellement. En fait, elle ne trouve aucune trace de son existence. Elle doit fouiller encore plus loin, cette fois au risque de sa vie car elle commence à en savoir un peu trop, entre autres que le nom de Marie Doucet est associé à d’obscures manœuvres politiques à l’époque où le Parti québécois annonce la tenue d’un référendum.

Il semble que Marie Doucet travaille pour un obscur organisme gouvernemental qui ne reconnait pas son existence.  Il semble aussi que Percival Imbert doit combattre un monstre qui est en lui.

Les questions vont se bousculer dans l’esprit du lecteur : qui est Percival Imbert, ce personnage introverti qui parle toujours de lui à la troisième personne du singulier ? Le monstre qui l’habite serait-il en fait le syndrome de la double personnalité?

A-t-il inventé Marie Doucet? (Même dans sa propre maison, tout ce qui aurait un rapport avec Marie Doucet a été complètement occulté) Sinon que lui est-il arrivé? Meurtre, enlèvement ?

Je ne veux pas aller trop loin, mais je peux vous dire que Jacinthe Lemay fera des découvertes pour le moins surprenantes. Ce qui était au départ une simple disparition devient une saga d’espionnage, une obscure et surprenante histoire de famille, une guerre de pouvoir, le tout dans un contexte politique explosif, celui du Québec des années 80.

J’ai beaucoup aimé ce livre, en particulier à cause de cette capacité de l’auteur de maintenir une aura de mystère autour des trois principaux personnages et ce jusqu’à la fin de l’histoire. De page en page, le lecteur se questionne, s’interroge, s’accroche. Ce que j’ai trouvé banal au départ est devenu captivant puis addictif.

C’est un récit très spécial par la qualité de son développement, le magnétisme de ses personnages et la plume de Sylvain Meunier que j’ai trouvé très forte en intrigue, en précision et en subtilité.

Je mentionne aussi que le récit est très fluide et sa finale est surprenante. Et l’ensemble n’est pas dénué d’humour : *« … à l’impossible, nul n’est tenu, et au possible non plus, si le nul en question travaille au gouvernement ! »*
(Extrait)

Si je peux me permettre de rapporter une petite faiblesse, dans le récit, il n’y a pas vraiment de temps morts, mais il y a beaucoup de personnages secondaires dont plusieurs font des apparitions plutôt aléatoires.

Ça devient mêlant un peu, j’ai dû revenir en arrière dans ma lecture pour replacer certains personnages dans leur contexte. Mais ça n’a rien de rebutant. Il suffit de se concentrer, dans un endroit calme et de se fier au fil conducteur de l’histoire qui ne souffre d’aucune déviation.

Un bon livre…d’autant que ça se passe au Québec et que je me suis reconnu dans son environnement géographique et politique. En terminant, je vous laisse sur un autre petit mystère : Le titre. Pourquoi L’EMPIRE DU SCORPION comme titre : le mot empire pourrait évoquer le pouvoir, le mot scorpion pourrait évoquer le venin.

Venin et pouvoir vont bien ensemble je pense. C’est à vous cher ami lecteur de résoudre le mystère. Un petit indice peut-être ? Le mot scorpion est intimement lié au mystérieux Percival Imbert.

On ne s’en sort pas…il faut se rendre au bout…et c’est un plaisir.

Sylvain Meunier est né en 1949, à Lachine (Québec). Retraité de l’enseignement depuis 2006, il a été professeur dans plusieurs écoles de Montréal, en français et en anglais, puis en adaptation scolaire. Il a surtout écrit pour les jeunes, à LA COURTE ÉCHELLE des contes pour les tout-petits, la série GERMAIN pour les  jeunes lecteurs. En 2001, Sylvain  Meunier publie pour les adolescents L’ARCHE DU MILLÉNAIRE. Il récidivera en 2007 avec PIERCINGS SANGLANTS. Sylvain Meunier remportera le prix Création en littérature du premier Gala de la Culture de la ville de Longueuil pour la série RAMICOT BOURCICO.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
Le dimanche 20 janvier 2019

TÉMOIN HOSTILE, de REBECCA FOSTER

*Des traces d’ADN correspondant à celui d’Hannah avaient été trouvées…Un cheveu d’Hannah dans la chambre à coucher. Une goutte de son sang dans la salle de bain. Pire, on avait découvert une trace infime du sang d’Hannah sur la mâchoire de Fritz,
à l’endroit où il avait reçu un coup avant de mourir.*
(Extrait : TÉMOIN HOSTILE, Rebecca Forster, MA éditions 2013, édition de papier, 420 pages.)

Hannah Sheraton est une jeune fille de 16 ans, donc mineure selon la loi. Elle a été formellement accusée du meurtre de son grand-père par alliance, Fritz Rayburn, juge à la cour Suprême de Californie. Bien qu’elle soit mineure, et parce que la victime était un personnage très haut placé, Hannah sera arrêtée, emprisonnée et jugée. Si elle est reconnue coupable, elle risque la peine de mort. Désespérée, la mère d’Hannah fait appel à une vieille amie, Josie Bates, avocate. Josie hésite, mais vus l’âge de l’accusée et les aspects étranges de cette affaire, elle finit par accepter. Tout au long du procès, le doute s’installe dans l’esprit de Josie. La vérité risque de faire mal.

JUSTICE MAJEURE POUR MINEURE
*Lynda Rayburn se tenait sur le seuil et contemplait
la scène. Hannah, les jambes remontées contre sa
poitrine et coincées entre ses bras, tremblant comme
si elle était gelée jusqu’aux os. Kip était appuyé contre
le mur…avec sur le visage une expression où se
mêlaient la colère, le chagrin et, par-dessus tout
la haine…*
(Extrait : TÉMOIN HOSTILE)

Témoin hostile est un thriller juridique bien ficelé. Je l’ai lu toutefois avec une impression de déjà vu et les personnages principaux sont développés avec un tel souci du détail qu’il m’a été relativement facile de deviner qui est la personne coupable du meurtre de Fritz Rayburn. Le sujet développé est plutôt classique. Il y a quelques longueurs. Malgré ces faiblesses, je n’ai pas regretté la lecture de ce livre.

J’ai toujours été intéressé par le déroulement d’un procès depuis la diffusion de la série Perry Mason. J’étais fasciné par la fougue et l’agressivité des procureurs. Les chapitres consacrés au déroulement du procès dans la cour du juge Noris sont particulièrement forts et on y voit des personnages que de fortes émotions rendent extravertis…

je pense à un personnage en particulier, qui sera désigné témoin hostile. Je ne peux pas vraiment en dire plus car ça équivaudrait à tout dévoiler.

Le personnage d’Hannah est particulièrement intéressant. C’est une jeune fille timide, réservée et surtout, elle souffre de troubles compulsifs du comportement. Si elle fait une accusée facile, les personnes qui ont intérêt à la voir condamnée vont se heurter à Josie, une avocate particulièrement coriace et dont j’ai suivi l’évolution avec beaucoup d’intérêt.

Ce sont des facteurs qui m’ont fait oublier les petites faiblesses du récit. Même si j’ai deviné la finale assez vite, j’ai pu savourer de nombreux moments d’émotions et de tension avec des personnages attachants et j’ai aussi réagi à l’évolution d’un personnage particulièrement fourbe et égoïste : le témoin hostile.

Avoir une bonne idée de la fin d’un récit passe toujours si l’auteur peut y imprégner suffisamment de densité et de rebondissements. C’est le cas avec TÉMOIN HOSTILE. À partir de la deuxième moitié du récit, tout va très vite. L’histoire tient en haleine et a un petit côté touchant à cause entre autres de la vulnérabilité d’Hannah. Je n’ai pas été déçu quant aux messages véhiculés par le récit.

Entre autres que la loi n’est pas toujours une question de justice et que ce n’est pas parce qu’un personnage est haut-placé, populaire, apprécié de tous voire adulé qu’il est un enfant de chœur…ce qui rappelle l’énoncé classique : il ne faut jamais se fier aux apparences.

Malgré son petit côté prévisible, le livre est agréable à lire, il pourrait en surprendre plusieurs par ses retournements de situation et surtout par la fougue de celle qui se débat comme un diable dans l’eau bénite, celle que j’ai envie de qualifier sans méchanceté de sympathique tête de mule : Josie l’avocate.

Ce n’est pas ce que j’ai lu de mieux dans le genre, mais ça m’a tout de même gardé en haleine.

Rebecca Foster est une auteure américaine. Au moment d’écrire ces lignes, elle a plus de 25 romans à son actif. Son succès est tel que l’éditeur a entrepris la traduction de ses livres. TÉMOIN HOSTILE est le premier roman de Rebecca Foster à être traduit en français.

Conférencière recherchée, elle enseigne dans la célèbre Formation pour Auteurs de l’Université de Californie à Los-Angeles. Elle s’implique aussi dans un programme pour jeunes écrivains de niveau collégial. Auteure à succès, elle est inscrite dans plusieurs listes de best-sellers. Elle est invitée régulièrement à la radio et à la télévision et fait aussi l’objet de nombreux articles dans la Presse américaine.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
le dimanche 9 décembre 2018

SURVIVANT, le livre de JAMES HERBERT

*Brusquement, un coup fut frappé sous la coque
de la barque. Le cœur battant, il baissa les yeux
vers ses pieds tout en se cramponnant à son
siège des deux mains, les articulations blanchies
par l’effort…alors, la barque commença à se
balancer. Tout doucement d’abord, puis de plus
en plus violemment.*
(Extrait : SURVIVANT, James Herbert, Milady, 1976,
présente traduction : Bragelonne 2008, édition
numérique, 472 pages.)

Un Boeing 747 s’écrase près d’Eton, une petite ville anglaise, La plus dramatique catastrophe de l’histoire de l’aviation fait 332 morts, un seul survivant, le pilote Dave Keller, devenu amnésique suite au choc. Keller a simplement jailli des flammes de la carcasse, comme poussé par une force invisible. Depuis, il cherche à comprendre pourquoi il a été le seul à en réchapper. Pour l’aider, il fait appel à un médium et l’enquête se parsème de mort. le médium se rapproche d’une vérité insupportable pour les habitants d’Eton…drame à forte intensité se croise avec des phénomènes paranormaux.

LA FRAPPE DES ESPRITS FRAPPEURS
*…la peur commençait à monter en lui. Il savait
que la nuit allait leur fournir la réponse à de
nombreuses questions. Il savait qu’après cette
nuit, plus rien ne serait jamais comme avant.*
(Extrait : SURVIVANT)

Je crois que ce livre va plaire aux amateurs de frissons même si le thème est un peu usé. Voyons voir… Un avion de 333 passagers, équipage inclus s’écrase : 332 meurent sur le champ. Un seul s’en tire sans mal. Les âmes sont arrachées des corps beaucoup trop vite pour qu’elles comprennent ce qui leur arrive.

Peu après une sorte de hantise accable la population de la petite ville d’Eton et les morts s’accumulent. Alors qu’est-ce qui se passe? Pourquoi Keller a-t-il survécu? À quoi est dû l’accident? On dirait que les morts crient vengeance. Est-ce possible?

Le récit, très visuel comme toutes les histoires de James Herbert, tourne autour de Keller et n’est pas sans me rappeler le livre de Peter Lerangis SIXIÈME SENS et bien sûr le film du même titre réalisé en 1999 par Night Shyamalan. Cette évocation devrait vous donner une bonne idée de l’histoire imaginée par James Herbert.

Les forces : l’écriture d’Herbert est très puissante, descriptive et entretient une atmosphère chargée, froide et mystérieuse. Les rebondissements s’enchaînent au même rythme que les catastrophes et les manifestations surnaturelles.

Le style est cru et direct. Certains passages pourraient même brasser un peu les cœurs sensibles. L’histoire se tient et le lecteur demeure en général captif. La façon dont Herbert entretient le mystère et parfois la morbidité dans son récit est efficace.

Les faiblesses : il est difficile d’être original dans le développement d’un sujet aussi élimé. Ici, Herbert n’a rien inventé. Le thème varie très peu. Faiblesse un peu compensée par l’intrigue qui évolue en crescendo et l’enquête policière qui est assez bien imaginée mais qui se confondra elle-même avec l’aspect paranormal du récit.

J’ai été surpris et déçu par la finale. On dirait qu’elle a été fignolée en vitesse et qu’on y a ajouté une petite philosophie de supermarché. Je trouve plutôt frustrant ce genre de finale expédiée. Je me suis demandé si l’auteur n’était pas pressé d’en finir.

Donc il y a du pour et du contre. Mais il y a une chose que je ne peux enlever à James Herbert, c’est cette magnifique capacité à donner du corps à ses récits, de faire de ses histoires une toile qui capture et garde alerte l’esprit du lecteur, grâce, dans ce cas-ci à un bon mélange de catastrophes, d’intrigues policières, de surnaturel, de paranormal et de chairs en putréfaction…

C’est pas le livre du siècle mais ça se laisse lire surtout si on aime les frissons et évidemment, ça vient nous questionner sur nos croyances quant à la vie après la mort…

James Herbert (1943-2013) est un auteur anglais spécialisé dans la littérature d’horreur. À l’âge de 16 ans, il étudie la photographie et le graphisme, devient typographe, directeur artistique, puis chef d’agence publicitaire. Ayant déjà depuis longtemps le goût de la lecture, il développe celui de l’écriture dans les années 60.

C’est ainsi qu’en 1974, à l’âge de 28 ans, James Herbert publie son premier roman : LES RATS. L’œuvre lance définitivement sa carrière d’écrivain explorant des thèmes à frissons : paranormal, surnaturel, réincarnation, fantômes, sans compter les romans-catastrophes. Ayant vendu plus de cinquante millions de livres publiés en 34 langues, James Herbert a été honoré de l’Ordre de l’Empire Britannique en 2010 pour l’ensemble de son œuvre.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
Le dimanche 2 décembre 2018

LE CERCLE DE DANTE, de MATTHEW PEARL

*Il remarqua des traces de sang sur le plancher
et autre chose aussi…d’étranges fragments
d’insectes qu’il ne reconnut pas- les ailes et les
troncs de ces mouches aux yeux de feu que
Nell Ranney avaient découpés en morceaux
au-dessus du corps du juge Healey*
(Extrait : LE CERCLE DE DANTE, Matthew Pearl,
t. f. Éditions Robert Laffont, 2004, édition papier)

Boston, 1865. Un tueur en série inflige à ses victimes des supplices inspirés par L’ENFER DE DANTE. Dès lors, quatre hommes comprennent qu’ils deviennent les premiers suspects…en effet, ils sont tous réunis dans LE CERCLE DE DANTE dont le but est de faire connaître LA DIVINE COMÉDIE, du même poète florentin. Les membres du CERCLE DE DANTE savent qu’ils seront suspectés si quelqu’un fait le rapprochement entre les meurtres et les supplices racontés dans L’ENFER. Pour se disculper et pour sauver leur ville, les érudits s’improvisent détectives et une étrange chasse à l’homme commence. 

Dans LE CERCLE DE DANTE, Matthew Pearl s’est largement inspiré de LA DIVINE COMÉDIE tout comme l’a fait Dan Brown pour son livre INFERNO . LA DIVINE COMÉDIE est ce célèbre poème, le plus célèbre de Dante, composé quelque part au XIVe siècle. Chef d’œuvre de la littérature, il est considéré comme le plus important témoignage de la civilisation médiévale. D’ailleurs, Dante Alighieri est un poète majeur du Moyen-âge. Il a joué aussi un rôle très actif dans la vie politique de sa ville natale : Florence.

LA MENACE DE LA DIVINE COMÉDIE
*Expulsé du royaume d’en haut, il tombe sur la
terre, au sens physique du terme, et, sous son
poids, un abîme se creuse : L’Enfer. C’est cet
abîme souterrain que Dante explorera. Donc,
la guerre a créé Satan, la guerre a créé L’Enfer*
(Extrait : LE CERCLE DE DANTE)

D’entrée de jeu, je vous dirai d’abord que le CERCLE DE DANTE (Dante club) est une réalité historique. En 1865, Henry Wadsworth Longfellow, premier poète américain de calibre international, fonda un cercle restreint consacré à la traduction intégrale de LA DIVINE COMÉDIE, poème célèbre et complexe de Dante Alighieri qui se voit admis à observer le supplice des damnés dans différents niveaux de l’enfer.

Outre Longfellow, le *club* réunit des personnages tout aussi authentiques : le poète James Russel Lowell, le docteur Oliver Wendell Holmes, l’éditeur James T. Fields et l’historien George Washington Greene. Il s’est aussi avéré que le Cercle a connu beaucoup d’opposition.

Dans son livre, Matthew Pearl met en scène les personnages historiques du Cercle et imagine une chaîne d’évènements se déroulant en 1865 autour de la célèbre université de Harvard.

Au lendemain de la guerre de Sécession, alors que les soldats connaissent de graves difficultés de réinsertion, un tueur en série exécute une série de meurtres particulièrement sordides en s’inspirant des supplices décris dans LA DIVINE COMÉDIE de Dante. Évidemment, ces meurtres n’ont aucune authenticité historique même si la recrudescence de la criminalité au lendemain de la guerre a été historiquement démontrée.

Donc dans ce livre, l’histoire côtoie la fiction. C’est un livre intéressant mais lourd et complexe à plusieurs égards : d’abord, il y a beaucoup de palabres sur Dante et la Divine Comédie qui est une œuvre difficile à aborder. Il y a des passages intéressants mais aussi beaucoup de longueurs et ces longueurs diluent l’intrigue.

Ensuite, comme les meurtres sont inspirés de Dante, les membres du Cercle décident de faire l’enquête eux-mêmes pour éviter les soupçons. Malheureusement le brouillard s’épaissit pour le lecteur. L’enquête est tentaculaire. Le lecteur est balloté de fausse piste en fausse piste…compliqué, d’autant que le rôle de la police est mal défini.

L’écriture est puissante mais elle ne contribue en fait qu’à préserver l’esprit de Dante. À mon avis, il y a trop de répétitions, de digressions, de longueurs et de passages superflus pour garder le lecteur dans le coup à l’exception peut-être d’un questionnement qui a entretenu ma curiosité et m’a permis *d’accompagner le Cercle* jusqu’au bout : Quel être à l’esprit aussi tordu a pu se servir de Dante pour supplicier de façon aussi horrible des êtres humains?

C’est un livre très dense qui pêche par une absence de fluidité. Les chapitres sont longs et l’ensemble est peu ventilé. Sa lecture nécessitera donc beaucoup de patience et d’attention. Je mentionne toutefois qu’il est richement documenté d’imposants travaux de recherches réalisés par Pearl sur le fameux poète florentin. Le livre a figuré quelques temps sur la liste des best-sellers, surtout en Italie, pays d’origine de Dante Alighieri.

La lecture a été ardue mais Pearl m’a donné le goût d’en savoir plus sur la Divine Comédie….peut-être un jour en entreprendrais-je la lecture.

Matthew Pearl est un écrivain américain né en Floride. Diplômé de Harvard en littérature anglaise et américaine et de Yale en droit, Pearl est reconnu comme un spécialiste de Dante. Ses travaux sur le célèbre poète florentin lui ont valu en 1998 le prix Dante décerné par la DANTE SOCIETY OF AMERICA.  Son second roman, L’OMBRE D’EDGAR POE a figuré sur la liste des best-sellers dès sa parution. Dans ce livre consacré aux derniers jours d’Edgar Allan Poe, Pearl développe une des plus grandes énigmes de l’histoire littéraire.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
Le dimanche 16 septembre 2018

LA FORTERESSE NOIRE, livre de F. PAUL WILSON

*Une forme se dessina dans le noir. Cuza reconnut immédiatement les yeux et le visage. Puis le corps tout entier devin visible. Devant lui se dressait le corps d’un géant : il devait mesurer un bon mètre quatre-vingt-quinze…puissance, décadence,
arrogance- tout y était…*
(Extrait, LA FORTERESSE NOIRE, F. Paul Wilson,  Presses
de la Cité, collection Terreur, 1981, t.f. 1982, éd. Num.)

1941 : le quartier général des armées du troisième Reich reçoit un mystérieux message, expédié depuis la Roumanie, et plus précisément d’une antique forteresse de Transylvanie : *QUELQUE CHOSE EXTERMINE MES HOMMES*. Le major SS Kaempffer est dépêché sur les lieux. Peut-être pour la première fois de sa vie, le major découvrira la peur en apercevant les cadavres déchiquetés. Chaque nuit, une nouvelle victime est découverte, gorge sectionnée.  On soupçonne l’œuvre d’un vampire. Kaempffer appelle en renfort un archéologue et sa fille. C’est alors que s’amorce un combat aux dimensions démesurées.

QUELQUE CHOSE TUE MES HOMMES !
* Cuza ne put rien ajouter. Sa voix se brisa et il
s’agrippa aux bras du fauteuil. C’était
impossible! Cette créature des ténèbres
reculait devant la croix et devenait furieuse
à la seule mention du nom de Jésus-Christ.*
(Extrait : LA FORTERESSE NOIRE)

Encore une histoire de vampire allez-vous me dire? Oui et non. En fait je vous laisse le plaisir de partir à la découverte d’une hypothèse originale relative à l’origine des vampires. Ceci dit, LA FORTERESSE NOIRE est incontestablement une histoire de surnaturel.

Bien que j’aie décelé assez rapidement quelques irritants, le récit a un certain cachet original. En effet, il est assez rare en littérature qu’une histoire à caractère surnaturel ait comme toile de fond la deuxième guerre mondiale et spécialement quand les victimes sont essentiellement des soldats allemands.

Eh oui, dans un mystérieux donjon au passé indéfini servant de base d’observation aux allemands, quelque chose tue les hommes, un par un, en moyenne un par nuit. Un SS enquête, aidé d’un éminent professeur et de sa fille et je suis finalement passé d’un rebondissement à l’autre.

Dans ce roman très sombre, le décor est planté rapidement. Le développement est rapide, le lecteur est emporté et l’horreur est omniprésente. Il peut être moralement satisfaisant pour certains lecteurs de sentir la souffrance et la mort de soldats SS et nazis victimes du mal à l’état pur dont ils ont été eux-mêmes de parfaits symboles, mais l’auteur a fait preuve d’une retenue salutaire.

Il évite en effet les artifices et la caricature qui auraient nuit à la crédibilité de l’ensemble. Comme je l’ai dit, il y a beaucoup de rebondissements, de revirements inattendus et j’ai eu la surprise de quelques coups de théâtre.

J’ai trouvé toutefois presque comique l’insertion d’une histoire d’amour entre Glenn qui, comme vous le verrez, surgit de nulle part et Magda, la fille du professeur. L’atmosphère du roman est tellement oppressante qu’une amourette s’y insère assez mal. À ce niveau, j’ai trouvé la plume timide…le genre de liaison qui donne l’apparence d’un intermède…enfin, c’est l’impression que j’ai eue.

J’ai été un peu plus déçu par la finale. Elle m’a semblé rapide, bâclée, expédiée. La conclusion est tellement tirée par les cheveux que j’ai eu l’impression que l’auteur avait hâte d’en finir. Je veux préciser toutefois que ces irritants sont très surmontables car le récit m’a tenu en haleine.

Ce livre conviendra parfaitement aux amateurs de frissons, de gore et de scènes effrayantes génératrices de cauchemars. Cette histoire est d’autant intéressante qu’elle pousse à la réflexion principalement sur la notion du mal absolu et ses manifestations et accessoirement sur la folie.

Une histoire assez bien réussie à l’atmosphère lugubre…parfait pour les amateurs de drames fantastiques ou ceux qui veulent en faire l’essai…

Francis Paul Wilson est un écrivain américain né en 1946 dans le New-Jersey. Son livre LA TOMBE publié en 1984 avec l’apparition de son personnage fétiche confirme sa parfaite maîtrise littéraire de l’horreur et du fantastique. Il a écrit aussi plusieurs thrillers dont MORT CLINIQUE. Il s’est aussi signalé avec LE TESTAMENT MAUDIT publié en 2004. Francis Paul Wilson a reçu en 2015 un prix PROMETHEUS spécial pour l’ensemble de son œuvre. Le prix récompense la meilleure œuvre de science-fiction qui prône la liberté individuelle comme un droit naturel.

LA FORTERESSE NOIRE a été adapté au cinéma en 1983 par la Paramount Pictures. Le film a été réalisé et scénarisé par Michael Mann. Il est sorti en France en 1984 sous le titre LE DONJON. Malgré une excellente distribution (Scott Glenn, Ian McKellen, Gabriel Byrne) et la musique de Tangerine Dream, le film a rencontré un accueil négatif et fut considéré comme un échec commercial.  Le but du réalisateur était d’exploiter la nature philosophique du livre de Wilson pour pousser à la réflexion sur le mal absolu.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
Le dimanche 26 août 2018

 

VIOLENCE À L’ORIGINE, de MARTIN MICHAUD

*Valeri poussa une plainte horrible. Un cri
bestial, à glacer le sang. Le cri d’un animal
blessé qui sait d’instinct que la mort gagne
du terrain et que, cette fois, il n’y aura pas
de dérobade.*
(Extrait : VIOLENCE À L’ORIGINE, Martin Michaud,
Les Éditions Coup d’œil, 2016, papier, 475 pages.)

La tête d’un haut-gradé de la Police de Montréal est retrouvée dans un conteneur à déchet. L’assassin laisse un message clair : d’autres têtes pourraient rouler. L’enquête est confiée au détective Victor Lessard, tourmenté par son passé, personnage récurrent de l’œuvre de Michaud, (voir LA CHORALE DU DIABLE) Victor forme une équipe dans laquelle on retrouve entre autres, la redoutable Jacinthe Taillon. Victor devra résoudre le mystère d’une horrible toile qui semble inextricable et qui pourrait bien capturer son corps et son âme…

Un tueur hors-norme
*On dit que l’humain est la seule créature
du règne animal qui prend plaisir à tuer
ses congénères. On voudrait nous faire croire
le contraire, mais il s’agit précisément là de la
nature humaine*
(Extrait : VIOLENCE À L’ORIGINE)

C’est la troisième fois que je parle de Martin Michaud. Certains se rappelleront peut-être le commentaire assez favorable que j’ai publié le 30 aout 2015 sur son livre LA CHORALE DU DIABLE, et un autre commentaire que j’ai publié le 24 janvier 2016 sur le recueil de nouvelles CRIMES À LA LIBRAIRIE, dans lequel Michaud publie un texte très intéressant : UNE LONGUE VIE TRANQUILLE.

Il semble que Martin Michaud soit devenu un incontournable, ce que confirme les milieux littéraires québécois et même la francophonie canadienne.

De Martin Michaud, j’ai lu cette fois VIOLENCE À L’ORIGINE, un thriller puissant dans lequel j’ai pu retrouver deux personnages familiers que j’appelle les gentils mufles : Victor Lessard qui semble près de faire la paix avec son passé et Jacinthe Taillon, une caractérielle mal embouchée mais très efficace. Encore une fois, Martin Michaud nous offre quelque chose de solide, original, intriguant et haletant. Voyons voir…

La tête de Maurice Tanguay, un haut gradé du Service de Police de la Ville de Montréal est retrouvée dans un conteneur à déchet. Dans sa bouche, on retrouve un petit sachet avec un message à l’intérieur : «Le commandant Maurice Tanguay a été jugé et exécuté le 13 juillet à 3h25. Tanguay était le premier…le dernier sera le Père Noël». (Extrait)

Sur un mur à proximité, on retrouve un graffiti qui explique comment sera commis le prochain meurtre. Voilà donc le modus operandi du meurtrier qui annonce ainsi une série d’exécutions et de gros maux de tête pour les enquêteurs du SPVM, de la GRC et de la SQ qui iront de surprise en surprise.

Voilà, il m’est difficile d’en dire plus sans atteindre le cœur de l’histoire. Je peux toutefois vous dire que Maurice Tanguay était loin d’être un enfant de Chœur : «Fallait-il attribuer un sens au fait que la tête de la victime avait été retrouvée dans un conteneur à déchets?» (Extrait)

Les policiers seront carrément propulsés dans une histoire d’horreur qui évoque un fait malheureusement très réel et dont j’ai déjà parlé dans mon commentaire sur l’autobiographie d’Arielle Desabysses 14 ANS ET PORTÉE DISPARUE. Il s’agit du trafic humain ou esclavage sexuel, une plaie que la Société a tendance à occulter et qui est répandue partout, y compris au Québec, à Montréal en particulier.

Le récit est complexe car trois affaires s’imbriquent parfois dans la même enquête, ce qui éclaire beaucoup certains éléments laissés obscurs dans les livres précédents, mais grâce à une extraordinaire maîtrise de l’écriture et de l’intrigue et à un fil conducteur solide, VIOLENCE À L’ORIGINE est un régal à lire.

C’est un polar très sombre, voire noir mais riche et malgré tout teinté d’humour avec entre autres Jacinthe Taillon qui n’a pas peur des mots et un langage très québécois avec jurons appropriés. Le tout vient alléger une atmosphère parfois inévitablement lourde.

Michaud a développé sans excès la psychologie de ses personnages. Son roman est original parce qu’il a créé un tueur en série plutôt hors-normes avec des motivations complexes dont celle de faire justice soi-même, un problème de société vieux comme le monde.

Un petit fait à noter : dans le récit, Victor Lessard se rend régulièrement chez sa psychologue pour des problèmes évoqués dans les livres précédents. Je voyais ça comme le vieux cliché, répandu en littérature policière, du policier qui tente de combattre et vaincre ses démons du passé. Je trouvais ça un peu agaçant. Mais à la fin de l’histoire, j’ai compris pourquoi ce choix de l’auteur et j’ai trouvé ça brillant.

C’est toute la structure du récit qui est impeccable, ainsi que le développement du schéma de pensée. Les rebondissements s’enchaînent dans des chapitres courts. Ça se lit vite, le temps passe vite et lever le nez du livre est aussi difficile que de trouver le coupable car l’issue est imprévisible.

En terminant, ceux et celles qui lisent régulièrement mes textes savent que je suis sensible aux messages, petites morales et matières à réflexion issus des livres. Dans VIOLENCE À L’ORIGINE, les thèmes à réflexion ne manquent pas : la loi du Talion ou le principe du œil-pour-œil-dent-pour-dent et la tentation de se faire justice soi-même.

C’est inconcevable dans toutes sociétés civilisées mais ce problème encore fréquent de nos jours a toujours suscité réflexion et questionnements.

Il y a aussi matière à réflexion sur la violence faite aux femmes ainsi que sur les incroyables bassesses et perversités issues du trafic humain. N’ayons pas peur des mots, il s’agit de commerce sexuel et plus souvent qu’autrement avec des mineures. Ce trafic existe, même au Québec. Il n’y a rien de plus certain.

Enfin, une réflexion sur la manipulation et la violence, autant psychologique que physique, phénomène que l’auteur semble définir comme atavique, donc très tenace. Cette réflexion est distinctement exprimée dans le récit :

*On porte tous en nous la capacité de détruire et de tuer. On a tous un potentiel de violence à l’origine…ce qu’on appelle le mal est en chacun de nous. Et le seul rempart entre le chaos et la paix sociale, c’est la société qui, avec ses lois et ses règles nous permet de vivre dans une relative harmonie. Mais, parfois, des individus déviants se glissent dans les mailles du filet* (Extrait) on comprend mieux le titre maintenant.

Excellent bouquin. Beaucoup d’action et de rebondissements, une intrigue solide, le développement est impressionnant et la finale est superbe, bien imaginée, peu prévisible et elle laisse croire à une suite possible même si le livre dans son ensemble donne l’impression de la fin d’un cycle. Enfin, bien que plutôt noir, le roman ne manque pas de sensibilité. Du grand Michaud je dois dire.

Né à Québec en 1970, Martin Michaud est un véritable homme-orchestre : avocat, scénariste, écrivain, il est aussi musicien. Sur le plan littéraire, il s’est spécialisé dans le thriller à forte intensité.

Ses trois premiers ouvrages (IL NE FAUT PAS PARLER DANS L’ASCENSEUR et LA CHORALE DU DIABLE en 2011, JE ME SOUVIENS en 2012) obtiennent un succès spontané et fulgurant avec la création d’un personnage tourmenté mais d’une impeccable moralité : Victor Lessard qui récidive dans VIOLENCE À L’ORIGINE. Son œuvre lui vaut de prestigieux prix littéraires.

Pour en savoir davantage sur cet auteur déjà qualifié de maître du thriller québécois, consultez le site internet michaudmartin.com Je vous invite également à lire mon commentaire sur LA CHORALE DU DIABLE, de Martin Michaud, publié sur ce site en août 2015.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
Le dimanche 12 août 2018

FAIMS, le livre de PATRICK SÉNÉCAL

*Vous avez une vie en apparence comblée, vous
êtes l’image de l’homme honorable, mais une
étrange faim s’est installée en vous… À
tel point que parfois, vous êtes littéralement
affamé. Parce que cette faim ne se contente plus
de repas discrets et équilibrés.*
(Extrait : FAIMS, Patrick Sénécal, Éditions Alire, 2015,
édition numérique, 545 pages)

Ville de Kadpidi, 20,000 habitants. Par une journée magnifique, une étrange caravane entre en ville et s’y installe. C’est le cirque ambulant HUMANUS CIRCUS. Alors la bucolique tranquillité de Kadpidi se dégrade vite: les attitudes et les comportements changent, des meurtres se succèdent. Plusieurs citoyens habituellement tranquilles se laissent aller à satisfaire leurs pulsions : une faim ressentie au quotidien mais refoulée avec le temps, malsaine. Après le premier spectacle, d’une singulière étrangeté, Joël sera entraîné dans une enquête troublante…

LE COMMENCEMENT DE LA FAIM
*-Pis y parait qu’la femme a pas juste pété les
meubles dans toute sa maison, mais aussi
son char! Pis est allée au bureau où a
travaille, pis a tout cassé là aussi! À coup
de masse! Criss de folle, hein?
(Extrait : FAIMS)

Encore du grand Sénécal mais dans un style un peu différent. Il nous sort complètement de l’univers de Malphas qui a un registre très à part dans l’œuvre de Sénécal mais FAIMS diffère aussi de ses autres livres même si en cours de lecture, j’ai fait souvent le rapprochement avec LE VIDE.

Finalement, j’ai compris que l’auteur avait à peu près le même modus operandi. Dans FAIMS je n’ai pas vraiment ressenti l’horreur, mais plutôt une pression psychologique très forte qui caractérise beaucoup de thrillers. Ça ne change rien, ce livre m’a secoué. Il m’a accroché dès les premières pages…par curiosité d’abord et puis rapidement, je fus pris d’une *faim* de tout comprendre, de tout savoir.

Imaginez qu’un petit cirque ambulant qui s’installe dans un petit patelin chamboule complètement le quotidien des gens, modifie attitudes et comportements, provoque bagarres et querelles, alimente des idées de haine, de violence, de meurtres. Le ton est donné dès le départ.

Le cirque est bizarre, ses membres sont étranges, marginaux. Leur spectacle est pour adulte seulement. Il est d’une singulière intensité, extrêmement violent en plus d’être sexuellement explicite et hautement suggestif pour des esprits qui ont…*faim*.

Alors qu’un premier meurtre suit de près l’arrivée du cirque, le médecin du patelin, Stéphane, dont la faim est appelée à se réveiller y va de sa petite appréciation du spectacle : *C’est innovateur, c’est baveux, ça brasse la cage et ça fait du bien.* (extrait)

voilà qui annonce un changement dans l’esprit du médecin qui finira par dire tout haut ce que tout le monde pense sous l’influence du HUMANUS CIRCUS : *Personne va bien! Tout le monde est tanné, tout le monde est déprimé, tout le monde est frustré! Mais moi, je suis juste écœuré de faire semblant, de me mettre un gros sourire dans face pis de faire ah-ah-ah, pis de raconter n’importe quoi. * (Extrait)

Vous avez compris que cette faim n’a rien à voir avec la nourriture mais symbolise plutôt des pulsions latentes de violence et d’agressivité qui caractérisent l’être humain. La façon dont le thème est développé nous amène à voir la Société sous un jour très différent.

Je considère ce récit comme un thriller, extrêmement noir, puissant et dont il se dégage une atmosphère pesante. La violence y est décrite sans retenue et certains passages sont d’une crudité à faire frémir. L’intrigue est très bien ficelée et j’ai trouvé la finale géniale…totalement imprévisible en ce qui me concerne.

Je signale au passage que Sénécal a inclus dans sa distribution un de ses personnages fétiches : Michelle Beaulieu (5150 RUE DES ORMES, REINE ROUGE, ALISS). Je vous laisse aussi découvrir quel personnage de FAIMS a été pourvoyeur dans HELL.COM du même auteur…ce sont des petits entrecroisements à la Stephen King qui me plaisent beaucoup.

Les chapitres sont entrecoupés par un profil complet de chacun des personnages du Humanus Circus : Markitos, Laurus, Sarratou, Régina, Wulf et Wefa…les saltimbanques étranges à l’histoire tordue qui m’ont fait passé par une gamme d’émotions plutôt fortes.

Au cœur de l’histoire, il y a aussi la famille Leblanc, Joël, policier de la SQ qui mène l’enquête sur les meurtres et qui n’est pas au bout de ses surprises, sa femme Martine, vétérinaire et leurs ados Nicholas et Émilie dont les rôles pourraient vous surprendre.

Encore un Sénécal dont il est très difficile d’interrompre la lecture… Un nouveau voyage dans les recoins les plus obscurs de l’esprit… Écriture fluide, ventilée, un rythme d’enfer….une écriture qui n’a pas peur des mots…

VOIR AUSSI MES COMMENTAIRES SUR LE VIDE ET CONTRE DIEU DU MÊME AUTEUR.

Patrick Sénécal né en 1967, est un écrivain québécois spécialisé dans le roman *noir*. Il est aussi scénariste et réalisateur. Il publie son premier roman en 1994 : 5150 rue des Ormes, adapté au cinéma en 2009. Il est détenteur  de plusieurs prix littéraires importants dont le prix Boréal du meilleur roman en 2001 (Aliss) et le prix Masterton en 2006 en plus des distinctions dans les salons  du livre.  

BONNE LECTURE
Claude Lambert
le dimanche 29 avril 2018

ENLÈVEMENT, le livre de TARA TAYLOR-QUINN

*Après tant de mois passés sur la route à la
recherche de son fils, elle n’avait vraiment
pas besoin qu’on lui dise que la police se
chargerait de le trouver…elle n’avait pas
besoin non plus de compassion, de pitié, de
sympathie, de conseils et de Dieu sait quoi
encore. Elle avait besoin de son fils, point
final.*
(Extrait : ENLÈVEMENT, Tara Taylor Quinn, 2007,
Harlequin, S.A., numérique, 530 pages)

Une jeune et riche femme d’affaires voit sa vie basculer quand son fils de cinq ans est enlevé au beau milieu d’une fête foraine. Pas de demande de rançon, un silence à glacer le sang. Désespérée, elle commence une longue quête, prête à tout pour récupérer son enfant. Aidée d’un détective privé, la jeune femme explore la moindre piste, exploite le moindre indice. Alors qu’elle s’approche lentement de la fin de sa quête, elle n’a aucune idée de la découverte terrifiante qui l’attend, pire que tout ce qu’elle aurait pu imaginer. Il n’y a qu’une seule chose de sûre, Amélia fera n’importe quoi pour retrouver son fils, y compris l’inimaginable.

Prête à tout…
*Ses yeux cherchaient désespérément le moindre
bout de tissu vert dans la foule. Elle vivait le pire
des cauchemars. Ce qu’elle craignait le plus au
monde était en train de se produire. Et elle ne
savait pas quoi faire…*
(Extrait : ENLÈVEMENT)

Le livre développe un sujet assez répandu en littérature, au cinéma et à la télévision : l’enlèvement d’un enfant : Charles est enlevé. On soupçonne tout de suite Kathie, la nounou qui vouait à l’enfant un amour démesuré. Kathie est congédiée. L’enfant disparait peu après, puis Kathie devient introuvable.

La plume de Tara Taylor Quin n’apporte rien de vraiment nouveau même si son récit est assez bien ficelé et pousse le lecteur à se mettre à la place de la pauvre Amélia qui recherche désespérément son petit Charles. Ce qui m’amène à vous parler du rapport de force et de faiblesses du récit.

La principale faiblesse du livre tient dans l’errance interminable de la mère pour retrouver son fils. Pendant neuf mois, Amélia va de ville en ville, accumule les mensonges afin de gagner la confiance des citoyens. Elle voit son fils partout, même dans sa soupe si ça se trouve. À chaque semblant de piste, son intuition prend le dessus sur l’avis de son détective privé. Dans chaque ville, c’est le même *patern*.

C’est seulement dans le dernier quart du livre que j’ai senti que l’étau se resserrait autour du kidnappeur, jusqu’à la grande finale qui, quoique d’une densité assez captivante, ne m’a pas vraiment surpris.

Vous voyez où je veux en venir? Le récit m’a paru redondant et son ton un peu misérabiliste. Aussi, l’accent est surtout mis sur la quête laborieuse d’Amélia. Pendant ces 9 mois d’errance, on a peu de nouvelles de l’enfant. Je ne souhaitais pas nécessairement deux récits parallèles, mais un peu plus de détails sur ce que vivait Charles aurait certainement ajouté un plus à l’histoire et ravivé mon intérêt.

Quant à la force du récit, elle réside à mon avis dans la psychologie d’Amélia. Tout au cours de sa quête, cette femme riche et indépendante, développe une seconde personnalité avec laquelle elle croit avoir plus de chances de retrouver son fils. On assiste graduellement à une transformation de ses valeurs, et étrangement, ces changements évoluent plus vite que sa quête.

Cette femme incroyablement riche, à la tête d’une multinationale prospère, qui consacrait peu de temps à sa famille modifie et précise graduellement sa vision de la vie grâce à ce qu’elle découvre dans ses nombreux déplacements : l’amitié, l’empathie, l’entraide, la valeur des sentiments et le courage. Je dois le dire, cet aspect du récit est venu me chercher et a *sauvé les meubles* pour utiliser l’expression consacrée.

Pour moi, ce livre est intéressant, mais ça s’arrête là. Il se lit quand même vite, la plume est fluide et le fil conducteur est bien ancré. À vous de voir…

Tara Taylor Quinn est une auteure américaine. Elle a écrit plus de 70 romans. Plusieurs ont été traduits en une vingtaine de langues. Elle s’est spécialisée dans la littérature romanesque et sentimentale mais elle a aussi écrit plusieurs suspenses dont le succès a été plutôt flatteur. La touche émotionnelle et profondément psychologique qu’elle imprègne à ses récits a séduit des millions de lecteurs.

Pour parcourir la bibliographie de Tara Taylor Quinn, cliquez ici.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
Le dimanche 15 avril 2018