MÉMOIRES D’OUTRE-MORT, de CHRISTOPHER BUEHLMAN

*Si vous cherchez une histoire de gens sympas qui font
des trucs sympas, passez votre chemin. Vous allez
être plombé par un narrateur peu fiable qui va vous
décevoir et vous répugner au détour de chaque page.*
(Extrait : MÉMOIRES D’OUTRE TOMBE, Christopher Buelham,
Hugo roman éditeur, 2019, 429 pages. Version audio : Audible
éditeur, 2019. Durée d’écoute : 11 heures 52, narrateur : Pierre
Rochefort)

1978: Si New York est une ville sale et dangereuse pour les vivants, Joey Peacock, vampire aux traits éternellement jeunes, y voit toujours un magnifique terrain de chasse. La nuit tombée, du fameux Studio 54 aux appartements du Village en passant par le CBGB cher aux punks, il écume Manhattan en quête d’une artère compatissante. Première des règles : charmer la proie, ne jamais la tuer.

Quand vient l’aube, Joey rejoint dans une station de métro désaffectée ses frères et soeurs de sang, parmi lesquels Cvetko le Slovène philosophe, Billy Bang le fou de free jazz et, bien sûr, la patronne, Margaret, qui administre son territoire d’une main de fer. Jusqu’au jour où de nouveaux arrivants menacent la survie de la petite communauté : des enfants aux yeux brillants et aux longues canines, redoutables tueurs dont les besoins semblent sans limite…

On ne nait pas vampire, on le devient
*Je vais vous raconter comment on fait souffrir
 des gens, et si vous aimez ce genre d’histoire,
 c’est que vous êtes mauvais.*
(Extrait)

MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE aurait pu s’intituler <journal d’un vampire>. En effet, dans ce récit, un vampire, transformé dans son adolescence se raconte…son visage est d’ailleurs marqué par une éternelle jeunesse. Son nom est Joey Peacok. C’est le narrateur et il nous entraîne dans les basses fosses de New-York, c’est-à-dire les égouts qui constituent sa résidence, qui le protègent de la lumière et qui lui permettent de remonter à la surface ponctuellement afin de se nourrir.

Il raconte comment il arrive à charmer les humains avant de s’en nourrir en tuant le moins possible car, faut-il le préciser, Joey a des états d’âme. On trouve dans le récit beaucoup des clichés courants sur les vampires, mais Joey profite du <micro> pour en démonter quelques-uns comme le fameux crucifix par exemple. En effet, celui-ci fonctionne si le vampire y croit, sinon il devient aussi utile qu’un fusil à l’eau. Joey nous raconte et nous explique les mœurs des vampires, leur langage, leurs manies.

Un jour, de nouveaux arrivants menacent la petite communauté vampirique des sous-sols new-yorkais: des enfants, de véritables monstres, petits tueurs impitoyables aux appétits illimités. Le récit devient alors glauque, macabre, terrorisant et pourrait bien générer chez certains auditeurs sensibles de sérieux frissons.

Première observation, malgré un ton monocorde, j’ai senti que le narrateur s’adressait à moi. Il me raconte son monde. Je sens parfois la conviction mais en général le ton est détaché et froid ce qui est peut-être normal quand on pense qu’ici, c’est un vampire qui s’exprime. Malheureusement, l’histoire n’est pas facile à suivre. Le fil conducteur est instable et prend toutes sortes de directions. J’en ai perdu des bouts je l’admets.

Dans ce récit, il y a peu d’action. L’histoire génère un peu d’émotion quand on y explique avec des détails parfois croustillants la cruauté des enfants. Mais je m’attendais à plus d’action, un caractère plus soutenu dans le développement du récit, un rythme plus élevé ou tout au moins un peu plus nerveux.

Au début, c’est prometteur mais au final, le sujet m’a semblé sous-développé. Et puisque je parle de finale, je dois vous dire que je l’ai trouvé bizarre, peu claire. Je n’ai pas vraiment compris où l’auteur voulait en venir. J’aurais souhaité quelque chose de plus précis sur le sort des enfants et les effets sur la communauté de vampires.

Sur le plan littéraire, si vous ne gagnez pas l’auditeur ou le lecteur dans les cinquante premières pages, il devient très difficile de le gagner pour l’ensemble de l’œuvre. La première moitié du récit justifie le titre : des mémoires imbriqués sans suite. Dans la deuxième partie, l’écriture est plus limpide mais nous dirige vers une finale étrange. La première idée qui m’en est venue se résume à ces mots: C’est n’importe quoi.

Je veux quand même terminer sur certains points positifs : entendons-nous, il n’est pas question ici de <gentils vampires> mais la sincérité de Joey m’a semblé évidente. Il y a dans l’histoire de bonnes idées, entre autres sur les mœurs vampiriques. La plume est directe, le sang coule à flot, beaucoup vont apprécier sans doute. Plusieurs passages sont très durs. Amis auditeurs et auditrices, la balle est dans votre camp.

Suggestion de lecture : DRACULA, de Bram Stocker

Christopher Buehlman est né en 1969 à Tampa en Floride. Il est l’auteur de deux romans et a obtenu le prix Bridport 2007 en poésie. Il a également publié plusieurs pièces de théâtre et incarne, en tant que comédien, le personnage « Christophe the Insultor » devenu culte grâce à de nombreux festivals. Il est diplômé en histoire et en français, et vit à St. Petersburg, en Floride.

 

Bonne lecture
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Claude Lambert

le vendredi 5 avril 2024

SI JE SERAIS GRANDE, d’Angélina Delcroix

*Elle me caresse les cheveux et me dit qu’on va réussir.
Réussir quoi ? Je sais pas. Elle quitte ma chambre. Les
cris recommencent dans le jardin d’à côté et s’estompent. *
(Extrait : SI J’ÉTAIS GRANDE, Angélina Delcroix, or. Éditions
Nouvelles Plumes, 2019, version audio : Audible studio éditeur,
2019. Durée d’écoute : 11 heures 50 minutes. Narrateur :
Pascal Chemin)

  1. Deux petites filles disparaissent le même jour, sans laisser de traces. Elles sont voisines, mais n’étaient pas ensemble au moment de leur enlèvement. Eleanor, bientôt six ans, vit dans la crainte de déplaire à ses parents. Est-elle la menteuse que décrit sa mère ?
  2. Des cadavres d’enfants viennent d’être découverts. Mais il y a une survivante. l’adjudante Joy Morel se retrouve à la tête d’une enquête éprouvante qui va l’entraîner aux frontières de l’inimaginable…

LES ÉLITES DE LA HONTE
âmes sensibles s’abstenir
*…Et les pensées qu’elle avait eu en entendant la voix sur le
répondeur… Quelle horreur ! À quel moment s’était-elle
transformée en un monstre d’égoïsme ? Quel malheur nous
autorise à enfermer à double tour empathie, bienveillance et
générosité ? La conséquence en était aujourd’hui mortelle. *

Le récit est ébranlant. J’avais parfois besoin d’arrêter…de respirer et de réfléchir même sur la réalité que met en lumière ce roman noir. Jetons d’abord un bref coup d’œil sur le synopsis : en 2006, deux petites filles disparaissent séparément, même si elles sont voisines. Dix ans plus tard, un charnier est découvert…un charnier d’enfant…au milieu des cadavres, une survivante dont l’esprit est totalement chaviré :

*C’est plus fort que moi. Une force me pousse. Je ne me contrôle plus. Je laboure les bandages comme un chien creuserait pour trouver un os. Au passage, je me griffe la peau autour. Maman crie. Je l’entends, mais de loin. Je suis partie dans mon monde…celui de la souffrance. * (Extrait)

 À la tête de l’enquête, Joy Morel, enceinte de quatre mois et plutôt mal remise de son enquête précédente entraînera son équipe et en général les personnages sains de l’histoire et par la bande les lecteurs-lectrices, auditeurs-auditrices au-delà des frontières de l’imaginable. Mais voilà…qui est sain dans cette histoire et qui ne l’est pas? C’est loin d’être évident.

Même si vous n’êtes que légèrement sensible, attendez-vous à grincer des dents car dans ce roman noir, tout n’est que meurtres rituels et torture d’enfants, haine, cruauté, violence, satanisme, pédophilie, folie. Le récit dévoile une des pires distorsions de l’âme humaine et touche la corde sans doute la plus sensible en littérature et dans la Société en général : les enfants. C’est à la limite du supportable.

Même le titre qui évoque un certain caractère d’innocence camouffle une incroyable terreur. Je n’ai pas eu vraiment de plaisir à écouter cette histoire. L’efficacité de la plume de Delcroix a exacerbé ma curiosité jusqu’à la finale…une finale d’ailleurs qui m’a glacé le sang. C’est bien écrit…trop bien peut-être et c’est d’une crudité parfois refoulée heureusement mais en générale glaciale et dérangeante.

Le tout se rapproche considérablement de l’actualité, la maltraitance des enfants étant une malheureuse réalité. L’auteure vient aussi nous rappeler que souvent, les personnes que l’on croit bien connaître ou qui sont haut placées dans la Société ne sont pas celles qu’on pense. Il y a des penchants qui sont hautement inavouables.

C’est un roman *Coup de poing*, très fort, très noir, immersif et même gore. Son sujet dérange mais pousse à la réflexion et c’est ce que souhaite l’auteure dans une note publiée à la fin de l’ouvrage. Il faut toutefois faire attention…il y a beaucoup de personnages, on s’y perd un peu…

Encore plus dur de savoir qui est bon, qui est mauvais : *Soit, je suis vraiment un être à part, soit ils sont tous tordus. Vu qu’apparemment je suis toute seule à être différente, la réponse est toute trouvée. * (Extrait) Malgré tout, j’ai été éprouvé par le récit, ébranlé à l’idée qu’on applique à des enfants un étau psychologique qui leur donne un horrible choix : Mourir ou devenir eux-mêmes des monstres. Préparez-vous à du *pas facile*.

Suggestion de lecture : GORE STORY, de Gilles Bergal

Angélina Delcroix, psycho praticienne et auteure

À écouter aussi, de la même auteure
le premier volet de la série JOY MOREL

Bonne lecture
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Claude Lambert

le samedi 16 mars 2024

JE SUIS PILGRIM, de Terry Hayes

<Une chose m’apparaît clairement tout-à-coup,
c’est tout, sauf un banal homicide pour de l’argent,
de la drogue ou une quelconque pulsion sexuelle.
Avec ce meurtre, on est dans le registre de
l’extraordinaire.>
Extrait : JE SUIS PILGRIM, Terry
Hayes, or. JC Lattès éditeur, 2014, version audio : Audiolib
éditeur, 2019, durée d’écoute : 27 heures 53 minutes,
narrateur : Sylvain Hagaësse

Une jeune femme assassinée dans un hôtel sinistre de Manhattan. Un père décapité en public sous le soleil cuisant d’Arabie Saoudite. Un chercheur torturé devant un laboratoire syrien ultrasecret. Un complot visant à commettre un effroyable crime contre l’humanité. Et en fil rouge, reliant ces événements, un homme répondant au nom de Pilgrim, nom de code d’un individu qui n’existe pas officiellement. Il a autrefois dirigé une unité d’élite des services secrets américains. Il s’est retiré mais son passé d’agent secret va bientôt le rattraper…

Haute tension
<Outre que c’est à désespérer du genre humain,
 je dois dire que je suis encore plus impressionné
 par l’assassin. Il n’a pas dû être facile d’arracher
 trente-deux dents une par une sur un cadavre.>
Extrait

C’est le meilleur thriller que j’ai lu. L’idée du complot contre l’humanité n’est pas nouvelle en soi. Le sujet est même réchauffé en littérature et au cinéma. Toutefois, le développement du récit réserve à l’auditeur et l’auditrice des surprises, des frissons, des revirements, de nombreux rebondissements et possiblement quelques haut-le-cœur.

Le sujet est donc simple : une chaîne d’évènements meurtriers amène les services secrets américains à mettre au jour un complot contre l’humanité susceptible d’éradiquer les États-Unis et par la bande, plus de la moitié de l’humanité. L’affaire est extrêmement sérieuse, le temps restant très minime. Pour sauver la planète, on fait appel à un élite des services secrets. Nom de code : PILGRIM.

Le récit repose sur la recherche et l’enquête de Pilgrim qui est extrêmement pointue, complexe et potentiellement mortelle. Si le développement est simple, le déploiement de l’enquête qui va crescendo, associé au pouvoir descriptif de la plume donne un tout absolument génial. Ajoutons à cela l’intensité du personnage principal, PILGRIM, très bien travaillé avec un équilibre parfait de forces et de faiblesses et une psychologie parfaitement mise au point.

C’est un récit très violent qui a la faiblesse de faire passer les américains pour les gentils bougres sauveurs de la planète et détenteurs de la vérité. Pas étonnant que l’histoire ait, comme toile de fond, la destruction du World trade center et présente une image très sombre de l’Islam. Toutefois, le récit a la force de mettre en perspective des aspects méconnus du terrorisme et présente une image peu flatteuse des services secrets :

*Les évènements de ces douze dernières heures étaient, pour les services de renseignements, une faillite qu’on pouvait qualifier d’historique. La mission première du Renseignement américain dans son ensemble, dont le budget était faramineux, était de protéger la Mère Patrie, et jamais, depuis Pearl Harbor ces organisations toutes puissantes n’avaient foiré à ce point, au vu et au su de tous. * (Extrait)

Je veux signaler enfin que le début de l’histoire est lent. Il a été difficile de s’y accrocher. Mais soyez patient. Ça change vite. Stress garanti, voire addiction. Il y a aussi, après la finale, une forme d’épilogue inutilement longue à mon avis. Donc, JE SUIS PILGRIM est un roman très fort. L’auteur nous amène à nous inquiéter pour l’agent PILGRIM, à penser pour lui, à ressentir toutes ses émotions. L’histoire est bien développée, la finale est surprenante. Le récit bénéficie aussi d’un bel équilibre.

Si la distinction est évidente entre les bons et les méchants, l’auteur détaille autant la démarche de PILGRIM que celle du terroriste Islamiste, appelé le Sarrazin qui a, pour un temps, le pouvoir de mort sur l’humanité. Et puis c’est la première fois que je lis un roman d’espionnage qui me permet de comprendre un peu ce qui se passe dans la tête d’un terroriste et d’observer qu’un terroriste peut-être lui-aussi terrorisé. Très bonne lecture.

Suggestion de lecture : PROJET ANASTASIS, de Jacques Vandroux

Après plusieurs années en journalisme, Terry Hayes rencontre le réalisateur de cinéma australien George Miller avec qui il collabore à la novélisation du scénario de Mad Max. Miller embauche ensuite Hayes pour écrire avec lui le scénario de Mad Max 2 (1981). Hayes, qui devient ensuite scénariste et producteur pour le cinéma et la télévision, s’installe à Hollywood. Il signe, en 1989, les scénarios de Calme blanc (Dead Calm), adapté d’un roman éponyme de Charles Williams, et de From Hell , 2001. Hayes, qui remporte plus de vingt récompenses en carrière, publie en 2013 son premier roman, le thriller Je suis Pilgrim (I am Pilgrim), rapidement devenu un best-seller international. Source : Wikipédia

BONNE LECTURE
BONNE ÉCOUTE
Claude Lambert
le dimanche 10 mars 2024

INFECTÉS, le livre de Marc-André Pilon

*C’est à ce moment qu’elle hurle.
Qu’elle hurle aussi fort qu’elle le peut.
Qu’elle hurle.
Jusqu’à ce qu’elle ne puisse plus
hurler du tout. *
(Extrait : INFECTÉS, livre 1, Marc-André Pilon,
Hurtubise éditeur, 2019, papier, 270 pages)

Tout commence par un meurtre bestial à La Ronde et sa vidéo virale.
S’impose rapidement une terrible évidence: l’agresseur a succombé à une maladie infectieuse jamais vue, marquant le début d’une épidémie qui transforme les humains en monstres sanguinaires.

Un prof cannibale, des parents qui deviennent fous, un train qui explose, l’armée qui débarque… À l’école de la Cité-des-Jeunes, la fin du secondaire risque d’être très différente de ce que Zachary, Camille et Dilkaram avaient imaginé.

Une horreur contagieuse
*Le premier ministre s’apprêtait à prendre la parole.
-Québécois, québécoises…-Chaque génération se
trouve confrontée à une conjoncture historique. Un
tournant décisif. Nous vivons maintenant le nôtre. *
(Extrait)

C’est un roman d’horreur dont l’écriture rappelle beaucoup les scénarios de films de série *B* avec comme principal sujet les zombies. Je devrais dire même UNIQUE sujet car dans ce roman, il n’y a que ça des zombies et au milieu de ces monstres qui semblent se multiplier à l’infini se trouvent quelques ados héroïques qui massacrent tout ce qui bouge. Imaginez une soupe réchauffée des dizaines de fois. C’est la comparaison qui me vient à l’esprit quand je parle de ce roman.

Un virus foudroyant se répand à une vitesse folle transformant les infectés en zombie affamés de chair fraîche. Dans cette mare de démons, trois ados : Dilkaram, Zachary et Camille tentent de survivre.  Et pour survivre, il faut massacrer du zombie et des morts vivants, c’est pas facile à tuer. Ce thème ne m’a jamais attiré, ni en littérature ni au cinéma. Je comprends qu’ici je parle de littérature jeunesse et que les jeunes aiment l’horreur.

Ce livre plaira à ceux et celles qui aiment les histoires de sang qui gicle, d’organes gluants qui traînent à terre et de cervelles éclatées. Il n’y a que ça dans ce roman. Il n’y a pas d’histoire, pas de direction. Rien de neuf, encore moins d’original. Mais je le répète, pour les ados qui ont le cœur solide et qui aiment le mettre à l’épreuve, la formule est gagnante, pour les garçons en particulier :

*Une main venait d’agripper la cheville de Zac. Un corps à moitié déchiqueté, privé de jambes, les intestins traînant derrière lui sur plusieurs mètres…Les infectés furent canardés. Certains furent coupés en deux sous l’impact des balles. Les morceaux continuaient de bouger, pas complètement neutralisés. * (Extrait)

Les ados étant entourés de ces horreurs et tentant le tout pour le tout afin de survivre, on peut comprendre que c’est dans le suspense que réside la principale force du roman qui offre aussi une certaine qualité d’intrigue.

Personnellement, j’ai trouvé ce livre insipide, sans recherche, sans profondeur et d’une redondance qui mène à l’overdose. Certaines tournures de phrases sont intéressantes : *Pendant un instant, tout s’estompa. Les vivants qui meurent, les morts qui vivent. * (extrait) d’autres confinent à l’humour, noir bien sûr, voire à la fantaisie…*Le directeur aurait arraché la tête d’un élève et s’en servirait pour jouer au billard dans la salle G. * (Extrait)

Le niveau de langage n’est pas constant. Beaucoup d’ados aiment le genre, sans début, sans fin, sautant tout de suite dans le feu de l’action. Je préfère un récit fini avec des personnages à la psychologie définie. Enfin je respecte les goûts en souhaitant qu’ils évoluent. Parlant d’évolution, à la fin du récit, les jeunes sont dans une situation assez délicate. Tout est en place pour la suite dans laquelle parait-il, des jeunes qui se font appelés *les surhommes* auraient survécu aux morsures de zombies…

Suggestion d’écoute : DERNIÈRE TERRE, la série audio de Clément Rivière

Enseignant de français à Vaudreuil-Dorion, Marc-André Pilon est l’auteur de la populaire trilogie du MYOPE, dont le premier tome a été récompensé par le prix Cécile-Gagnon. Avec sa nouvelle série, il nous propose une histoire délicieusement horrifiante, menée de main de maître. Vous pouvez consulter la page Facebook de l’auteur en cliquant ici.

 

La suite

Bonne lecture
Claude Lambert
le samedi 9 mars 2024

 

LE MONARQUE, le livre de Jack Soren

*-Non, pas un voleur, mais LE voleur. Le seul qui avait
assez de culot pour truander les truands…il a commencé
à sévir il y a environ seize ans et les collectionneurs l’ont
surnommé LE MONARQUE. *
(Extrait : LE MONARQUE, Jack Soren, Mosaïc éditeur, 2016,
format numérique, 1 151 pages.

Quand Jonathan Hall abandonne sa carrière internationale de voleur d’art pour se consacrer à sa fille, il croit se ranger définitivement et se mettre à l’abri, de sa fausse identité de Monarque, de  l’illégalité et d’une mort prématurée. Une série de meurtres l’oblige à reconsidérer ses perspectives. Car quelqu’un s’est mis à utiliser la signature du Monarque, un papillon, pour mutiler ses victimes et orchestrer des mises en scènes morbides.

Pour Jonathan, il ne s’agit pas d’une simple imitation, mais d’un message : on cherche à le faire sortir du bois. Lui, mais aussi son ancien partenaire, Lew. Piégés dans un jeu mortel par un adversaire psychopathe et infiniment puissant, Jonathan et Lew n’ont pas d’autre choix que de disputer la partie. Et d’accepter une ultime mission signée Le Monarque.

Détournement d’art

Autrement dit, depuis des années, il y a un musée qui expose un faux sans le savoir! Des milliers de gens rognent sur le peu de vacances qu’ils ont pour aller voir ce chef d’oeuvre, cet hymne à la beauté, et tout ce qu’on leur donne à voir, c’est un faux. Ça me rend dingue. (Extrait)

J’ai d’abord été attiré par la couverture qui montre un des plus beaux chefs d’œuvres de la nature : Un papillon Monarque. Et puis le synopsis m’avait semblé promettre une histoire originale ce qui est le cas. Pourquoi un tel titre ? Je n’ai pas tardé à comprendre. L’histoire est celle de Jonathan Hall et son partenaire Lew, deux spécialistes de vols d’œuvres d’art sauf qu’ici Jonathan et Lew jouent les *Robin des bois* en volant les voleurs afin de restituer les œuvres d’art à leurs légitimes propriétaires.

Eh oui, le Monarque est un binôme. Un gentil papillon, deux ailes majestueuses : *Le seul qui avait assez de culot pour truander les truands. * (Extrait) Au moment de commencer l’histoire, notre duo décide de prendre sa retraite mais pas pour longtemps malheureusement car un mystérieux personnage décide de prendre la relève du duo, se faisant appeler le Monarque mais utilisant un modus operandi infiniment plus violent et mortel.

Jonathan et Lew n’ont pas le choix : reprendre du service afin d’affronter un psychopathe sans âme extrêmement puissant qui multiplie les cadavres. Je vous laisse découvrir ses motivations mais toute l’histoire est centrée sur la traque de ce tordu.

Cette histoire est beaucoup plus que la simple traque d’un tueur en série. C’est plein de trouvailles qui tiennent le lecteur et la lectrice en haleine. En fait, Jonathan et Lew ne garderont la vie que sur un fil et ne seront jamais au bout de leurs surprises : *-Qu’est-ce que c’est ? Interrogea Jonathan tandis que Lew prenait la boîte et la glissait sous son bras. -Le cortex préfrontal du plus grand génie de tous les temps. * (Extrait)

Je ne me suis pas ennuyé une seconde même si, habituellement j’éprouve un peu de difficulté avec le principe des flash-backs en littérature…ces retours en arrière ou ces bonds dans le temps qui sont autant d’outils nécessaires à la compréhension de l’histoire. Pour ce que j’en observe, une mauvaise exploitation de ce principe a gâché beaucoup d’histoires mais dans le cas du Monarque, ils m’ont permis de saisir la psychologie des héros du récits : deux gentils filous : Jonathan et Lew.

C’est une histoire cohérente mais qui présente deux défis en particulier : les flash-back dont j’ai parlé plus haut et la quantité de personnages moins bien définis dans laquelle j’avais tendance à me perdre. Ça demande un peu de concentration. Il y a aussi deux personnages que tout oppose qui portent un prénom ressemblant : Jonathan le héros et Nathan, l’anti-héros.

Il aurait été intéressant que l’éditeur publie, au début de ce récit, qui fait quand même 1 100 pages numériques, une liste des principaux personnages. J’ai tout de même réussi à faire les liens sans trop de difficultés. Nonobstant ces petits détails, j’ai trouvé le roman très agréable à lire. L’intrigue est prenante et le complot est extrêmement bien imaginé. En plus d’avoir créé deux personnages attachants et sympathiques, Jack Soren a déployé une extraordinaire imagination qui consacre merveilleusement ses talents d’écrivain.

Suggestion de lecture : HISTOIRES EFFRAYANTES À RACONTER DANS LE NOIR, recueil d’Alvin Schwartz



Jack Soren est le nom de plume de l’écrivain canadien Martin Richard Soderstrom, écrivain de romans d’action-aventure / thriller. Il est né en 1962 et a grandi à Toronto, au Canada. Sous le nom de Martin R. Soderstrom, il a publié des nouvelles d’horreur et de science-fiction, LE MYSTÈRE ASHITA entre autres.

Bonne lecture
Claude Lambert
Le dimanche 3 mars 2024

TORNADE SUR LA VILLE, de Steve Thayer

<On aurait pu entendre craquer les petits os de son cou. Son visage devint rouge violacé. La vie s’écoula par sa bouche. Mais son parfum émettait toujours de chaudes senteurs de chèvrefeuille. Un crime ne devrait pas sentir aussi bon. La créature qui ahanait sous son masque ressentit alors l’irrépressible envie de murmurer quelque chose, d’expliquer son geste. Trop tard. Elle était morte. Qui qu’elle fût.> Extrait : TORNADE SUR LA VILLE, Steve Thayer, Libre Expression éditeur, 1. Édition de papier, 445 pages.

Une femme est assassinée au cœur de la ville, en plein jour, sur la terrasse d’un parking. Les indices ? Des plus minces.  Quelques heures après le meurtre, une tornade d’une violence inouïe dévaste la ville, un cataclysme que l’Office national de la météorologie n’avait pas prévu mais que Dixon Bell, le Monsieur Météo de Canal 7, la chaîne de TV locale, avait annoncé parce qu’il l’avait vu dans sa tête.

Quelques jours après le premier crime, une jeune fille est étranglée, elle aussi sur un parking. Puis une troisième. La liste s’allonge, la police demeure impuissante même si elle a constaté un phénomène étrange : le tueur agit à chaque changement de saison, et à chaque événement climatique majeur…

La colère populaire gronde, le gouverneur de l’État est contraint de rétablir la peine de mort, et la police trouve enfin un suspect : Dixon Bell, le Monsieur Météo de Canal 7 !

Météo assassine

Je ne m’attarderai pas beaucoup sur ce livre, non parce qu’il a fait l’objet d’une certaine indifférence dans les milieux littéraires mais plutôt parce que le sujet est gonflé et que l’ensemble ne m’a pas apporté grand-chose.

L’aspect catastrophiste du livre est élimé et largement surexploité surtout au cinéma. Son originalité tient surtout dans le fait qu’un tueur opère au gré des évènements climatiques extrêmes. Ça suppose toutefois un côté prévisible.

Malgré tout, ça peut plaire à un certain lectorat. L’histoire a un rythme rapide, l’écriture est nerveuse malgré les longueurs et les répétitions. Tout n’est pas perdu car le modus operandi du tueur peut parfois surprendre.

Je ferai bref en disant que ce livre est une variation sur un thème connu et qui ne bousculera pas vraiment la littérature. À vous de voir. La publication du livre remonte à 1997 et il n’a pas été réédité. Il se pourrait donc qu’il soit difficile à trouver.

Je précise en terminant que ce livre, même si je l’ai trouvé plutôt ordinaire n’est pas nécessairement à l’image de la bibliographie de Steve Thayer car en général, ses livres ont été bien accueillis par la critique même s’ils sont loin des records de vente.

Suggestion de lecture : LIEUTENANT ÈVE DALLAS, de Nora Roberts

Steve Thayer est né à Saint Paul, Minnesota. Il a travaillé comme scénariste pendant plusieurs années. Il a déménagé à Edina, Minnesota dans les années 1980, où il a commencé à écrire des romans. Il a commencé à écrire des romans à suspense avec Saint Mudd en 1988, et a continué avec une série de six autres romans, pour la plupart bien accueillis par la critique. Les sujets de son travail comprennent les enquêtes criminelles, les complots, les meurtres et les enlèvements. L’écriture de Thayer a été décrite comme granuleuse et rapide.

 

Bonne lecture
Claude Lambert
le vendredi 1er mars 2024

ENFANT 44, de Tom Rob Smith

*D’après le rapport de la milice, un garçonnet âgé de quatre ans et dix mois avait été retrouvé mort sur la voie ferrée. La veille, alors qu’il jouait sur les rails à la nuit tombée, Il était passé sous un train de voyageurs ; son corps avait été déchiqueté. *
(Extrait : ENFANT 44, Tom Rob Smith, Belfond  éditeur, 2008, édition de papier, 400 pages.)

Moscou, hiver 1953. Le corps d’un petit garçon est retrouvé nu sur une voie ferrée. Leo, de la police d’État chargée du contre-espionnage, reste fidèle à la ligne du parti : le crime n’existe pas sous le parfait régime socialiste, il s’agit d’un accident. L’affaire est classée mais le doute s’installe … soupçonné de trahison, Leo est contraint à l’exil avec sa femme. Et, dans l’Oural, il va faire une troublante découverte : un autre garçonnet mort dans les mêmes conditions que celles de Moscou. Prenant tous les risques, le couple se lance dans une terrible traque, qui fera d’eux des ennemis du peuple …

La bêtise soviétique
*On ne revoyait presque jamais les femmes ou les hommes
dépourvus de carte qui passaient sous ces portes.
 Le système
les expédiait soit au goulag, soit dans un bâtiment situé juste
derrière la Loubianka […] équipé de plans inclinés, de murs
 couverts de rondins pour absorber les balles, et de tuyaux
d’arrosage pour nettoyer les rigoles de sang. *
(Extrait)

C’est un roman intrigant avec, au départ, un titre qui ne l’est pas moins. D’ailleurs, tout est dans le titre. Malheureusement je ne peux rien en dire sans vous enlever le plaisir de la découverte, car en effet, j’ai eu du plaisir à lire ce premier roman de Tom Rob Smith qui lui a valu une entrée fracassante dans la littérature internationale. Toutefois, c’est un roman assez sombre, voire noir car il a comme toile de fond l’implacable système soviétique sous Staline, esprit fêlé qui étouffait le peuple pour préserver la soi-disant perfection de sa politique.

Les innocents tombaient comme des mouches. Pourtant, les meurtres qui s’accumulent dans le récit, n’ont rien à voir avec le régime. Voyons voir. Dans la région de Moscou, on découvre le corps d’un petit garçon sur une voie ferrée. L’affaire est vite classée parce que dans un état socialiste parfait, le crime n’existe pas. Un agent de la police d’état, Léo Stepanovitch s’insurge. Pour lui c’est clair, il y a eu meurtre et il faut enquêter. Ce faisant, il tombe en disgrâce, lui et sa femme Raïssa.

Pour trouver le meurtrier, le couple sera en permanence à un fil de la mort tentant d’échapper à Vassili, un agent du MGB qui voue une haine féroce à Léo. Ce dernier ira de découverte en découverte mais la dernière sera particulièrement cruelle car elle implique les liens du sang.

Ce livre m’a surpris autant par l’intensité de l’enquête que par l’exactitude descriptive du régime soviétique qui n’accordait aucune réelle valeur à la vie humaine. La crasse stalinienne est donc omniprésente dans ce récit et j’avoue avoir parfois manqué d’air. *C’était la paranoïa ambiante entretenue par l’État qui faisait que toute allégation, même la plus farfelue pouvait coûter la vie à quelqu’un. * (Extrait)

J’ai ressenti aussi une batterie d’émotions due à la nature des meurtres au modus operandi du meurtrier et plus tard vers la fin du roman de la véritable raison de cette tuerie, ce qui m’a fait tomber de ma chaise. *La substance broyée dans la bouche des gosses…les torses mutilés…il y avait la ficelle nouée autour de la cheville, les cadavres toujours nus, les vêtements en tas un peu plus loin. Le lieu du crime se situait dans une forêt…souvent à proximité d’une gare…* (Extrait) quand je pense que ce récit est basé sur une histoire vraie, j’en ai froid dans le dos.

Le cadre politique du roman qui demeure quand même assez discret m’a tout de même poussé à la recherche, ne serait-ce que pour m’assurer de la crédibilité du récit. Il s’avère que ce régime était meurtrier et pourri. C’est cette réalité qui fait de *ENFANT 44* un roman noir mais fidèle à la triste réalité soviétique et au contexte.

La seule faiblesse que je trouve dans ce récit réside dans la finale que j’ai trouvée longue et tirée par les cheveux mais sinon l’auteur m’a gagné par un récit intense, intrigant, une plume incisive et très directe. C’est un roman qui m’a brassé et qui m’a fait admettre combien je suis chanceux de vivre en Amérique.

Non seulement l’auteur m’a gardé vigilent mais il m’a appris beaucoup de chose et m’a poussé à prendre d’autres directions pour en savoir davantage.  Pour Tom Rob Smith, c’est une mission accomplie et parfaitement réussie…remarquable, si je tiens compte qu’ ENFANT 44 est son premier roman.

Suggestion de lecture : HIVER ROUGE, de Dan Smith


Né en 1979 d’une mère suédoise et d’un père anglais, Tom Rob Smith vit à Londres. Diplômé de Cambridge, il a participé à un atelier d’écriture, avant de travailler comme scénariste. Après Enfant 44 (2009) – adapté à l’écran –, Kolyma (2010) et Agent 6 (2013), tous disponibles chez Pocket, La Ferme est son quatrième roman paru chez Belfond.

Enfant 44 (Child 44) est un thriller américano-britannico-tchèque de Daniel Espinosa, sorti en 2015.. C’est l’adaptation cinématographique du roman de Tom Rob Smith Enfant 44, publié en 2008. Un téléfilm, Citizen X, fut déjà consacré en 1995 au tueur en série Andreï Tchikatilo, surnommé l’« éventreur de Rostov » d’après le roman de Robert Cullen : L’Ogre de Rostov.

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 18 février 2024

LES INFORTUNES DE LA BELLE AU BOIS DORMANT

1- L’INITIATION

Commentaire sur le livre d’
ANNE RICE

*À son entrée dans la chambre, son désir avait été fort et presque douloureux. À présent, il l’aiguillonnait sans merci. -Je vous ai réveillée ma chérie, lui dit-il. Vous avez dormi cent ans…Écoutez. Écoutez ! Vous allez entendre ce château revenir à la vie comme personne avant vous ne l’a jamais entendu. *
(Extrait : LES INFORTUNES DE LA BELLE AU BOIS DORMANT, volet 1 : L’INITIATION. Anne Rice. Robert Laffont éditeur, 1999, format numérique pour la présente, 315 pages.)

Vous connaissez l’histoire de la Belle au bois dormant.

Mais imaginez un instant qu’une fée mutine et joliment perverse se soit subrepticement glissée dans la chambre de la petite princesse, après le départ de ses consœurs, modifiant le sortilège.

La belle enfant sera délivrée de son long sommeil par un Prince, qui l’initiera à l’amour et au plaisir dans la douleur, l’emmènera dans son royaume, où, avec des centaines d’autres jeunes esclaves, elle assouvira les désirs et les fantasmes d’une bien étrange Cour…

 

Détournement de conte
*Vous ne devez point résister, mais bien plutôt prendre possession
 de vos charmes, c’est-à-dire laisser votre esprit habiter votre
corps. Vous êtes nue, sans défense, tous vont jouir de vous
 et qu’y pouvez-vous ? Ainsi donc, il me faut vous avouer que
 vos contorsions ne font que vous rendre plus exquise. *
(Extrait)

C’est sans doute le livre le plus indigeste que j’ai lu jusqu’à maintenant et je suis surpris que cette nullité ait été écrite par l’auteure du best-seller mondial ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE ou encore L’HEURE DE L’ANGE, un livre que j’ai déjà commenté sur ce site et que j’avais trouvé intéressant. Dans L’INITIATION, j’ai commencé a trouvé le temps long à la page 5.

Le titre de la série (parce que c’est une trilogie) est un bel euphémisme si je me fie au premier tome où il n’est question que d’avilissement, de masochisme, d’esclavagisme sexuel et d’un jeu sordide de soumission/domination : *Mais le prince n’était pas totalement satisfait de la manière dont il instruisait la belle. Il lui dit qu’à leur arrivée dans la prochaine ville…il lui arracherait encore un peu de sa dignité, afin de lui rendre les choses plus faciles. * (Extrait) C’est n’importe quoi.

Je suis surpris que les critiques qualifient ce récit d’érotique. L’érotisme implique l’amour sensuel, les plaisirs sexuels consentis et partagés. Dans ce livre, il n’est question que de viols, de torture, de masochisme, d’asservissement, de brutalité, de bestialité. Le tout traité avec une légèreté dérangeante : *…la douleur vous adoucit, vous rend les choses plus aisées. Vous êtes infiniment plus malléable, depuis la fessée que je vous ai donnée à l’auberge…* (Extrait)

Ici, nous avons 230 pages de fesses…des fesses torturées, zébrées, rougies sans compter le sort réservé aux organes génitaux. Au moins, cette violence, qui est physique et aussi fortement psychologique, est exempte de sang. Dans cette histoire, il n’y a pas de bains de sang, même pas une petite coupure ni brulure. Tous les acteurs sont de beaux garçons jeunes et vigoureux et de belles jeunes filles au corps magnifique…évidemment. Je dois l’admettre…c’est bien écrit, très descriptif.

J’ai essayé de donner un sens à cette histoire. Il n’y en a pas. Le prince charmant éveille la Belle au bois dormant, littéralement et sexuellement. Conquis par ses charmes, il fait d’elle une servante d’amour qui va découvrir la tendresse et la cruauté, le plaisir et la douleur. Ça s’arrête là. Ici le prince est tout sauf charmant. Aucune explication sur les origines du prince, ni sur les horribles traditions de la Cour de la reine.

D’où viennent tous ces princes et princesses littéralement humiliés et écrasés par les caprices des grands Seigneurs. C’est quoi ce pays de tarés ? Rien qui donne du sens. Qu’est-ce qui motive tous ces dégénérés, et comment vivent-ils ? Encore si j’en avais une idée. Mes sentiments me rappellent vaguement ceux que j’avais à la lecture de certains livres du Marquis de Sade. Et dire que ce livre est le premier d’une série.

J’ai compris à la finale du premier que les insoumis sont envoyés dans un endroit appelé le village qui évoque pour moi un des cercles de l’enfer. C’est donc là que devrait débuter le deuxième volet de la trilogie. Pour moi, cette expérience de lecture s’arrête là.

Suggestion de lecture : CRASH, de J.G. Ballard

Née en 1941 à La Nouvelle-Orléans, Anne Rice commence à écrire au milieu des années 1970 ce qu’elle pense être « une courte nouvelle sur le thème du vampirisme ». Entretien avec un vampire deviendra un livre culte, le premier volume des « Chroniques des vampires ». Reine du fantastique moderne qu’elle a révolutionné en lui apportant sensualité et démesure, elle passe au roman historique avec La Voix des anges, superbe histoire de castrats à Venise, et à l’érotisme avec Les infortunes de la Belle au bois dormant. Anne Rice a également publié quatre romans érotiques sous le pseudonyme de A. N. Roquelaure et deux romans sous celui de Anne Rampling. 

LA SUITE

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 17 décembre 2023

 

UN DIEU PARMI LES HOMMES, Sylvain Johnson

*-Il n’y a aucune place pour un être comme toi dans
la maison de Dieu. Sois maudit ! … -Il n’y a de place
nulle part pour moi sur cette foutue planète. *
(Extrait : UN DIEU PARMI LES HOMMES, de Sylvain
Johnson, Éditions Corbeau 2020, papier, 380 pages.)

Un objet non identifié s’écrase dans la campagne mauricienne. Un couple dysfonctionnel récupère un nouveau-né dans l’épave extraterrestre, Un enfant doté de pouvoirs surhumains. D’aussi grands pouvoirs impliquent de grandes responsabilités.

Sauver le monde? Faire le bien? Ou n’être que le produit de son environnement?

Certaines légendes naissent pour contrer la noirceur, d’autres pour la répandre…

 

Accrochez-vous
*Le couple était incapable de bouger, paralysé
par la crainte et fasciné par ce qu’ils voyaient.
Leurs esprits troublés tentaient de donner un
sens à cette apparition. *
(Extrait)

C’est un livre intéressant. Original même. Il développe la nature d’un violent combat entre le bien et le mal. Ce n’est pas nouveau sauf qu’ici, il s’agit d’un combat intérieur. Voyons d’abord ce qui se passe. Un vaisseau spatial s’écrase sur la terre. Il y a deux témoins : Michel, homme violent, alcoolique, colérique, sans scrupule, bat sa femme, un monstre. Et il y a sa femme, Diane qui n’est que l’ombre d’elle-même et qui se dissout lentement aux côtés d’un homme sans conscience.

Michel explore les restes du vaisseau et y découvre un enfant. Décidant que cet enfant ne lui rapporterait rien, il décide de le tuer mais un évènement extraordinaire l’en empêche. Michel s’aperçoit que l’enfant possède des dons extraordinaires et décide de l’adopter pour, éventuellement, qu’il l’assiste dans ses activités criminelles. Il lui donne comme nom CARL. En grandissant, la puissance destructrice de Carl devient phénoménale et une chaîne d’évènements l’amène à tuer et même à massacrer.

C’est un roman noir, très violent et dont les personnages sont froids et déplaisants y compris Carl, torturé entre la possibilité de faire le mal et celle de faire le bien. Pour ce qui est de s’attacher aux personnages, on peut oublier ça. J’ai senti, dans cet ouvrage au rythme haletant, que l’auteur nous exprimait sa pensée critique sur la Société en particulier.

L’ouvrage m’a gardé captif. On eut dit que Johnson me posait toujours la même question : ici qu’est-ce que tu ferais à la place de Carl, et là qu’est-ce que tu ferais? Il y a de quoi s’interroger en effet : qu’est-ce que je ferais si j’avais la puissance d’un Dieu avec pouvoir de vie ou de mort ? Je guérirais l’humanité ou je ferais le grand ménage.

Le livre soulève aussi plusieurs autres questions : comment peut-on violer et battre des femmes à répétition sans aucune espèce de scrupule ? Comment peut-on détourner un enfant, entre autres vers la criminalité ? Le père biologique de Carl et son père adoptif sont des monstres : pas de conscience, pas de morale, sans humanité. La mère adoptive est battue, torturée et humiliée. Comment un garçon peut s’épanouir dans ces circonstances ?

Le livre se lit bien, la plume est forte et fluide. Il rend captif, il est même addictif car on se demande continuellement quel plateau de la balance Carl fera pencher. L’auteur frappe fort dès le début avec un surprenant prologue postapocalyptique. J’ai aussi accroché à l’histoire parce qu’elle se déroule au Québec dans ma belle Mauricie natale : Sainte-Thècle surtout, Shawinigan, Trois-Rivières.

Je le rappelle c’est très violent et j’ai trouvé la finale très sortie des sentiers battus…atypique. Il y a comme une espèce de post-face qui laisse supposer une suite, non annoncée, qui donne à penser que Carl pourrait trouver chaussure à son pied. Je recommande ce livre. Je crois que vous pouvez faire confiance à Sylvain Johnson, qui a quelques titres dans la série des contes interdits, pour une lecture qui vous fera vibrer.

Suggestion de lecture : LES ENFANTS DE MINUIT, de Salman Rushdie



Sylvain Johnson est né à Montréal en 1973. Après des études en arts et lettres au Cégep de Shawinigan, il s’est installé à Laval et travaille maintenant pour un organisme à but non lucratif. Il passe son temps entre Laval et le Maine, où il a collaboré avec deux nouvelles littéraires dans la première anthologie franco-américaine « Voix de chez nous ».

Son premier roman « Le Tueur des rails » a été publié en août 2010 par la maison d’édition « Pop fiction » de Montréal. Puis Sylvain s’investit dans LES CONTES INTERDITS : LE JOUEUR DE FLÛTE DE HAMELIN et LA PETITE SIRÈNE jusqu’au moment de publier mon article où il publie UN DIEU PARMI LERS HOMMES. Aujourd’hui, Sylvain Johnson vit en Caroline du Nord avec sa femme et son fils.

Du même auteur

Bonne lecture
Claude Lambert
le samedi 16 décembre 2023

DÉLIVREZ-NOUS DU MAL, de Romain Sardou

 

*Tu vas bientôt assister à la plus étonnante surprise
de l’ère chrétienne depuis… depuis que des soldats
romains sont revenus un matin pour trouver vide le
tombeau du Christ ! *
 
(Extrait, DÉLIVREZ-NOUS DU MAL, prologue, Romain
Sardou, XO éditions, 2008, format numérique, 335
pages)

Quercy, XIIIe siècle.

Dans un village perdu, une troupe d’hommes en noir enlève un enfant. Le prêtre du village décide de se lancer à la poursuite de ses ravisseurs. Les indices qu’il glane à mesure de sa quête lui font craindre d’être mêlé à une terrible affaire de sorcellerie… Mais il n’est pas le seul à s’intéresser à l’enfant. Pendant ce temps, à Rome, Bénédict Gui se voit confier une mission spéciale : retrouver le frère de la belle Zapetta, qui travaille pour la mystérieuse Sacrée Congrégation.
Dans un Moyen Age hanté par les querelles religieuses, où le pouvoir de l’Église est plus fort que jamais, se noue une intrigue dont les fils remontent jusqu’au Vatican

Les petites victimes
des jeux de pouvoir
*Cette vision d’horreur pétrifia Aba et les enfants.
– Si tu fais encore un geste, le curé, j’en épingle
d’autres comme cela sur tous tes murs, mugit
l’assassin en direction du prêtre.
(Extrait)

Au cœur du Moyen-âge en Europe, des enfants disparaissent, enlevés par de mystérieux hommes en noir, des cardinaux sont assassinés ou portés disparus. Le Père Aba recherche activement le jeune Perot et parallèlement, un enquêteur de Rome recherche un jeune homme disparu, Rainerio qui était au service d’un puissant Cardinal de la Sacré Congrégation appelée dérisoirement la machine à faire des Saints. C’est elle qui décide qui sera canonisé en analysant les miracles faits par les candidats.

Il appert d’une part, que les miracles, les saints et les candidatures à la canonisation font l’objet d’un trafic très lucratif et pour protéger l’organisation, on n’hésite pas à tuer, à éliminer les gêneurs ou ceux qui en savent trop. Et d’autre part, les enfants disparus ont un point en commun. Ils ont chacun un don surnaturel. Toutes ces capacités miraculeuses réunies pourraient décupler la puissance des cardinaux. Pas étonnant que le meurtre et la cruauté soient florissants.

Voici un thriller médiéval très addictif ayant comme toile de fond la crasse qui a incrusté l’Église pendant des siècles, sa puissance et sa cruauté. C’est un récit violent. Évidemment, l’auteur ne réinvente pas la roue avec un récit ayant comme thème l’Église sauf qu’ici, il est question d’un trafic très particulier : le trafic des saints et des miracles dans le but de renforcer la dévotion et augmenter considérablement les dons des fidèles.

La motivation de cardinaux corrompus jusqu’à la moelle est renforcée par l’exploitation de quelques enfants ayant des pouvoirs extraordinaires. L’auteur maîtrise fort bien son sujet et propose au passage une analyse de certains miracles et précise même qu’une agence catholique s’est donné comme but d’expliquer chaque miracle des saintes écritures pendant que d’autres organisent des simulacres de miracles.

Cette histoire m’a tenu en haleine. Le rythme est rapide et les personnages sont travaillés. Le jeune Perot, l’enfant sûrement le plus prodigieux du groupe a été pour moi un important générateur d’émotions. L’auteur met aussi talentueusement en perspective une époque très vaste où il n’y a rien de plus fort que l’Église, un big brother aussi puissant que corrompu.

La plume de Sardou est forte mais pas toujours facile à suivre. Il faut porter attention mais ça vaut la peine ne serait-ce que pour savoir où il veut en venir avec la petite touche de fantastique qu’il a imprégné à son roman. Malgré une très sensible impression de déjà vu, équilibrée finalement par la qualité de l’intrigue et la sensibilité du sujet, la manipulation des enfants étant une corde sensible et très délicate, j’ai passé un beau moment de lecture.

Suggestion de lecture : LE NOM DE LA ROSE, d’Umberto Eco

Issu d’une longue lignée d’artistes, Romain Sardou, né en 1974, se passionne très jeune pour l’opéra, le théâtre et la littérature. Après quelques années à Los Angeles, où il écrit des scénarios pour enfants, c’est en France qu’il publie chez XO son premier roman, un thriller médiéval, Pardonnez nos offenses (2002), qui connaît aussitôt un immense succès, ainsi que les suivants L’Éclat de Dieu (2004) et Délivrez-nous du mal (2008).

Exploitant d’autres rivages romanesques, Romain Sardou a également publié trois contes d’inspiration dickensienne, ainsi qu’un thriller contemporain, et un roman philosophique, Quitte Rome ou meurs (2009). Il explore maintenant l’histoire de la naissance de l’Amérique dans le premier volume de sa nouvelle trilogie, America, La treizième colonie (2010).

 

Du même auteur…
le livre précédant DÉLIVREZ-NOUS DU MAL

Romain Sardou est le fils du célèbre chanteur Michel Sardou

 

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 10 décembre 2023