*Alors que nous pensions leur numéro fini, un petit garçon blond est sorti du rang. Il devait avoir cinq ou six ans. Il avança une jambe devant lui et cala ses mains sur ses hanches, les pouces bien dans le dos. Puis il tendit légèrement le cou, leva les coudes et commença. Les soldats se redressèrent sur leurs lits. Le garçon… entama ce que l’on appelle une danse russe. Debout, nous le regardâmes sans un mot. Lui s’amusait, riait. *
Extrait : DANSEUR, de Colum McCann. Format numérique : Belfond éditeur, 2012, 369 pages, 691 Kb. Pour la présente, édition de papier, Belfond éditeur pour la traduction française, 2003, 371 pages.

En 1944, dans un hôpital soviétique, Rudik, six ans, danse pour son premier public : aucun des soldats mutilés n’oubliera cet instant éblouissant…dès lors, ce fils de paysan sait. Il sait qu’il ne reculera devant rien : mentir à sa mère, braver la colère du père, endurer brimades et humiliations. Pour danser comme il se doit, il ira jusqu’à s’exiler.
Travailleur acharné, obsédé de beauté et de perfection, Rudik fascinera tous ceux qui croiseront sa route, leur offrant le sentiment d’avoir côtoyé un ange ou un démon, un vrai génie, un monstre de sexe et d’excès.
Rudolph Noureïev (1938-1993)
Une icône du XXe siècle

Ce livre, dans lequel se chevauchent le roman et la biographie, raconte l’histoire d’un russe, Rudolph Noureïev, un des plus grands danseurs classiques et chorégraphes de son temps. Le livre aborde abondamment le contexte familial de celui qu’on appellera familièrement Rudi, les évènements qui ont conduits à son exil de l’Union Soviétique et ses nombreuses frasques comportementales en Amérique.
Ce n’est pas du tout ce à quoi je m’attendais car l’aspect professionnel de la vie de Noureïev est superbement sous-développé. Pas facile de séparer le vrai du faux. J’ai dû faire une recherche sur le développement artistique de Noureïev pour apprécier son talent, qui était génial, et son parcours tout à fait extraordinaire.
L’auteur s’attarde beaucoup sur la personnalité souvent caustique du danseur : *Je suis un cul-terreux, moi, dit-il… Il avait un genre de discours saccadé peu ordinaire, un cocktail détonnant d’arrogance campagnarde et de doute raffiné. * Extrait
La fatuité du personnage est rapportée un peu partout dans l’histoire… : *L’arrogance arrachée à l’air et plongée sans ciller dans la soupe au succès. * Extrait.
C’est un fait avéré et rapporté un peu partout dans le livre de McCann que Noureïev était un caractériel qui pouvait être imprévisiblement un parfait mufle, grossier, mal embouché et acide: *Il brillait tout de même derrière le vitriol. * Extrait.
Malheureusement, j’ai trouvé peu de choses mettant en valeur la démarche artistique de Noureïev et l’empreinte indélébile qu’il a laissé dans le monde des arts. Si l’auteur avait mis à ce titre autant d’énergie qu’il en a investi dans les descriptions des orgies sexuelles de Rudi, sa consommation de drogues et sa dépravation, l’ouvrage aurait fortement gagné en crédibilité et en équilibre.
J’ai été surpris et peu emballé par l’âpreté du récit et sa technique narrative. Beaucoup de phrases très longues, énumératives ou sans verbe. L’auteur a choisi un style tamponneur pour définir l’homme. Je crois qu’il a réussi à mettre à jour sa complexité mais je ne peux pas en dire autant sur la puissance de son expression artistique.
Ça reste une bonne histoire, intimiste, celle d’un être singulier et désespérément seul. J’aurais vraiment préféré toutefois que l’auteur mette la danse à l’avant-plan, ou tout au moins la montée professionnelle de l’artiste.
Danseur est donc un bon roman mais faible sur le plan biographique, assez fort sur les plans intimiste, contextuel et émotif.
Suggestion de lecture : S’AIMER MALGRÉ TOUT, de Nicole Bordeleau

L’auteur Colum McCann
Du même auteur

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 14 septembre 2025
LE MUR est un ouvrage réédité plusieurs fois depuis sa sortie en 1939. (Voir les 4e de couverture en lisant l’article). Il s’agit d’un recueil de nouvelles réunissant cinq récits. C’est aussi le titre de la première nouvelle. Chaque histoire évoque une dérive humaine tragique ou drôle. Toutes les nouvelles ont un point en commun : des fuites ou tentatives de fuites, arrêtées par un mur.

Pour moi, Sartre a toujours été un penseur en contradiction. Chez Sartre, j’ai toujours eu un peu plus de facilité à saisir l’esprit du dramaturge que celui du philosophe. Et pourtant, il est philosophe bien avant d’être dramaturge. C’est LE MUR qui a valu à Sartre le prix Nobel de la littérature en 1964. Il l’a refusé car selon lui, personne ne devrait être consacré de son vivant.



















Une vague de drogués se jetant du haut d’immeubles, croyant pouvoir voler. Des disparitions. Une île perdue dans la forêt boréale, habitée par une communauté déjantée et leur leader sans âge. Une baronne du crime nymphomane et amoureuse des bijoux en forme de clochettes. Un enquêteur médisant dépourvu de sa main droite, dévorée par un cannibale qui hante encore ses nuits. La réécriture la plus sombre du conte classique » Peter Pan »




Louis-Pier Sicard est un écrivain québécois né en 1991. Il obtint un baccalauréat en éducation physique en 2014. Il est inscrit à la maîtrise en études littéraires tout en travaillant, depuis 2012, comme enseignant suppléant en éducation primaire. Gagnant du premier prix mondial de poésie francophone des 15-25 ans en 2014, il a publié un premier recueil en 2013, Les Amants de l’abîme, et a entrepris la publication d’une série fantastique, Félix Vortan, dont le premier tome obtient le Grand prix jeunesse des univers parallèles.




À gauche, l’auteur 

