SAC D’OS, Stephen King

*Ce qui se met en place, lorsque disparaît la lumière du jour, est une sorte de certitude : qu’en dessous de la surface gît un secret, un mystère à la fois noir et éclatant. On ressent ce mystère dans chaque respiration, on le devine dans chaque ombre, on s’attend à y plonger à chaque pas. Il est là. *

Extrait : SAC D’OS, Stephen King, Le livre de poche éditeur. 2001, 726 pages, papier. VERSION AUDIO : Audible studio éditeur, 2019. Durée d’écoute : 24 heures 50 minutes, narrateur : François Montagut.

Depuis qu’elle n’est plus là, Mike n’écrit plus. Son souvenir l’obsède, ses nuits sont des cauchemars. Entre deux mondes, Mike la cherche. Mais elle n’est plus qu’une ombre parmi celles qui hantent le domaine de Sara Laughs, prêtes à faire payer des crimes que l’on croit oubliés. Et lorsque Mike tombe sous le charme d’une fillette de trois ans et de sa mère, une jeune veuve, il ne sait pas qu’ il va devoir affronter le déchaînement de forces surnaturelles et vengeresses.

PROFONDEUR EN LONGUEUR

Voici l’histoire de Mike Nunan, un écrivain à succès qui a perdu sa femme, Johanna quatre ans plus tôt suite à une rupture d’anévrisme. Depuis, le romancier fait des cauchemars qui concernent sa résidence secondaire, Sara Laughs dans laquelle il finit par s’installer. Nunan y découvre des éléments intrigants du passé de sa femme et réalise que Johanna hante Sara laughs.

Entre temps, Nunan s’attache à une jeune veuve, Mattie, et sa fille de trois ans Kira. L’écrivain aura à combattre sur plusieurs fronts : les mystères fantomatiques de Sara Laughs, la leucosélidophobie, un trouble psychique appelé aussi <le blocage de l’écrivain> et le beau-père de Mattie, Max Devory, un vieil homme mauvais et extrêmement agressif.

Je sors de la lecture de ce livre mitigé même si, pourtant, il est bardé de prix dont le prestigieux prix Locus du meilleur roman d’horreur. Je crois que c’est un peu exagéré de parler ici d’horreur. Le livre conserve un caractère fantastique même si, à mon avis, il est limité. De plus, je ne partage pas l’avis des critiques qui déclarent SAC D’OS comme le livre le plus abouti de King. Ça reste un bon roman mais son caractère surnaturel est plutôt timide.  Ce n’est pas le KING que j’ai adulé.

Le livre est inutilement long. Beaucoup de palabres, de passages creux et certains épisodes démesurément décrits comme par exemple un viol collectif particulièrement sordide expliqué avec un luxe de détails. J’ai trouvé l’ensemble un peu ennuyant. Le récit est assorti d’une romance entre Mattie et Mike, touchante, assez bien élaborée si on tient compte du caractère violent du beau-père. C’est un aspect de l’histoire qui ne m’a pas déplu mais qui est peu habituel dans la bibliographie de Stephen King.

L’aspect le plus intéressant du livre est la psychologie du personnage central, Mike Nunan. C’est la principale force de SAC D’OS et là, je reconnais King. Il a imprégné son héros d’authenticité, de sincérité et d’équilibre. De plus, après le décès de Johanna, chaque fois qu’il tente d’écrire, l’auteur est pris de désagréables malaises. L’inspiration ne vient plus. King m’a aidé en fait à mieux comprendre le processus de création de l’auteur qui, dans SAC D’OS, se trouve à être le narrateur et à mieux saisir aussi ce que ressent un écrivain aux prises avec le syndrome de la page blanche.

Grâce à un personnage principal humain, bien imaginé et travaillé, cherchant à s’outiller pour comprendre et combattre, j’ai pu sortir de cette lecture avec un certain degré de satisfaction.

Suggestion de lecture : POPULATION : 48, d’Adam Sternbergh

SAC D’OS A ÉTÉ ADAPTÉ À L’ÉCRAN en 2011. Cliquez ici.

Plusieurs livres de Stephen King ont été commentés sur ce site. Voici quelques liens :
ÇA,
FIN DE RONDE
UN VISAGE DANS LA FOULE
-LA PETITE FILLE QUI AIMAIT TOM GORDON
22/11/63
LA TOUR SOMBRE

Pour visiter le site de Stephen King, cliquez ici.

bibliographie

BONNE ÉCOUTE
BONNE LECTURE
CLAUDE LAMBERT
le vendredi 9 août 2024

PARADIS PERDUS

Livre 1 de
LA TRAVERSÉE DES TEMPS

D’Éric-Emmanuel Schmidt

*- Un signe du destin, non ? Je souris. – Tu fais parler le destin, Barak. – Inutile, il est très bavard. En revanche, les hommes sont sourds. * Extrait : PARDIS PERDUS, LA TRAVERSÉE DES TEMPS tome 1. Par Éric-Emmanuel Schmidt, Albin Michel éditeur, 2021, 576 pages. Version audio, lu par l’auteur, chez Audiolib éditeur, durée d’écoute : 11 heures 6 minutes.

Noam, jeune homme doué d’immortalité, entreprend le récit de son destin à travers les siècles, à la recherche de l’essence de la vie, des civilisations et de l’aventure spirituelle de l’humanité. Le récit commence il y a 10.000 ans, quand un cataclysme modifie le cours de l’Histoire avec l’épisode du déluge. Les tomes suivants conduiront Noam jusqu’aux temps modernes.


Un imposant chantier littéraire

PARADIS PERDUS est le premier d’une suite de huit livres formant la série LA TRAVERSÉE des temps un colossal chantier littéraire qui veut raconter l’histoire de l’humanité sous forme de roman à travers un jeune personnage NOAM qui est immortel. Il a vu le jour dans un endroit qui rappelle le paradis terrestre biblique dans lequel il évolue dans ses premiers balbutiements avec Panoam, son père, Barak le sauvage et Trigor le guérisseur, sans oublier la belle et capricieuse Noura.

Cette belle histoire est en fait le balbutiement de l’histoire. L’âge de pierre…c’est là que débute l’histoire de Noâm dans un pays de ruisseau et de rivière. La première partie du récit est très axée sur la famille. Puis, la deuxième partie est marquée par le déluge et rappelle dans les grandes lignes l’épisode biblique de Noé.

Puis Noam comprend que ceux et celles qu’il aime vieillissent mais pas lui. Il fait ce qu’il croit être nécessaire pour se vieillir, mais ça ne dupe personne et encore moins, celle qu’on ne peut jamais trompée : la mort. Ainsi, notre jeune héros entreprend une longue traversée du temps de 8000 ans.

Je commencerai par les faiblesses du récit parce qu’elles sont très surmontables. L’histoire commence par une touche de fantastique. Noam est immortel. Pourquoi et comment ? J’aurais aimé mieux connaître ses extraordinaires origines. Les dialogues prennent parfois les allures de longs palabres teintés de clichés et qui ont parfois tendance à comparer les époques en émettant des jugements discutables. C’est très long avant d’entrer dans l’histoire.

Plusieurs passages sont lourds et il y a un peu de redondance. L’histoire est prévisible mais laisse tout de même place à des revirements et certains moments nous rendent captifs.

Le livre a beaucoup de forces. D’abord, son personnage central est très attachant. Noam craint son immortalité et doit composer avec elle, même si l’humanité court à sa perte, des signes se manifestant à cet effet un peu partout dans le récit. Ce pilier du temps est sensible, courageux et à ses heures, émouvant.

J’ai été aussi très touché par l’aspect historique de l’ouvrage et puisque celui-ci débute dans la nuit des temps, j’ai pu apprécier les différents éléments qui nous amènent à mieux nous connaître nous-même. J’ai aussi été subjugué par la profondeur et la beauté de l’écriture, par sa douceur bucolique.

Je terminerai par une originale petite curiosité : Schmidt ponctue son récit d’intermèdes qu’il appelle *note* et qui constituent à elles seules un magnifique apprentissage de l’histoire. Une de ces notes par exemple explique ce qui a amené la création de l’Aspirine, une autre parle d’un personnage proche de Noam qui répondait, quand on lui demandait quelque chose : *Je préfère ne pas*… j’ai vite fait le lien avec BARTLEBY LE SCRIBE, célèbre personnage énigmatique créé par Hermann Melville.

Ce que je ressens, après avoir écouté la douce narration de Éric-Emmanuel SCHMIDT, c’est que la série qui s’amorce promet énormément. Je reviendrai sûrement sur cet ambitieux chantier littéraire.

Suggestion de lecture : LE GARÇON ET L’UNIVERS, de Trent Dalton


À visiter : le site officiel de l’auteur Éric-Emmanuel Schmidt

 
Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert
le dimanche 4 août 2024

GARE AUX FANTÔMES

AGATHA RAISIN
Enquête 14

Commentaire sur le livre de
M.C.BEATON

*– Aggie, il y a un mort là-dessous. Nous ne pouvons pas nous en aller comme ça.
– Comment sais-tu qu’il est mort ?
– Quand un homme gît sur le dos, le cou tordu, le regard fixe et vitreux, il y a dix chances contre une pour que ce soit le cas. *
Extrait, AGATHA RAISIN, enquête 14, GARE AUX FANTÔMES QUI VIVRA VERRA ! M.C Beaton, Albin Michel éditeur 2018, 326 pages. Version audio : Audible studio éditeur, 2018, durée d’écoute : 6 heures 25. Narratrice : Françoise Carrière.

Le nouveau voisin d’Agatha Raisin, Paul Chatterton, propose à Agatha Raisin d’enquêter sur la maison dite hantée de Madame Witherspoon, une vieille dame détestée de tous. Il se passe des choses inquiétantes dans cette maison et quand la vieille femme meurt dans d’étranges circonstances, Agatha met un point d’honneur à trouver le meurtrier.

 Très à l’anglaise

Voyons d’abord le contenu : Une vieille femme rêche et acariâtre se plaint que sa maison est hantée. Agatha Raisin saute sur l’occasion de pratiquer son activité préférée : l’investigation. En compagnie de son voisin, Paul Chatterton, elle offre à madame Witherspoon de capturer le fantôme. Hallucination ? Supercherie. Un jour, la vieille dame meurt dans des circonstances nébuleuses et madame Raisin décide de pousser son enquête beaucoup plus loin, au risque de piler au passage sur les pieds des policiers.

Peu de choses à dire sur ce quatorzième opus de la série AGATHA RAISIN. C’est rafraîchissant, léger agréable à lire, la version sonore est un peu déclamée et rappelle parfois la lecture d’un conte. Irritant par moment. L’idée de base est intéressante, le développement est passable. En fait, il n’y a rien de vraiment neuf dans ce livre. La série s’essouffle.

GARE AU FANTÔMES, comme les autres livres est très centré sur l’héroïnes, ses amourettes ambiguës, ses manières anglaises et elle a comme toujours, des problèmes avec les mauvaises langues. Chatterton, son copain pas sûr, type vieux garçon amène un petit quelque chose d’original à l’ensemble.

L’intrigue est faible, l’enquête policière n’a rien d’enlevant mais Agatha Raisin est parfois drôle à suivre. Ç’est un roman très léger. Ça se laisse lire mais par rapport à la série, c’est redondant, répétitif et prévisible. Il serait peut-être temps que l’auteure passe à autre chose.

Suggestion de lecture, de la même autrice : LA QUICHE FATALE


 L’auteure M.C. Beaton


UNE PETITE PARTIE DE LA COLLECTION

Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert
le samedi 3 août 2024

LES SEPT MORTS D’EVELYN HARDCASTLE

Le tout premier roman de Stuart Turton

PROMETTEUR…

*Rien de tel qu’un masque pour révéler la vraie nature d’une personne. * (Version audio par Lizzie éditeur, 2019. Durée d’écoute : 17 heures 15 minutes. Narrateur : Laurent Natrella. Édition de papier : Sonatine éditeur, 2017, 539 pages, format numérique : Sonatine éditeur, 2019, 467 pages 2383 KB)

Ce soir à 11 heures, Evelyn Hardcastle va être assassinée. Qui, dans cette luxueuse demeure anglaise, a intérêt à la tuer ? Aiden Bishop a quelques heures pour trouver l’identité de l’assassin et empêcher le meurtre. Tant qu’il n’est pas parvenu à ses fins, il est condamné à revivre sans cesse la même journée. Celle de la mort d’Evelyn Hardcastle.

*À quel point faut-il être perdu pour
laisser le diable vous indiquer votre chemin ? *
(Extrait)

C’est un roman complexe qui dénature l’espace-temps au profit d’un système qui ne sera dévoilé qu’à la fin, rien de moins qu’imprévisible, une finale fort intéressante mais qui manque un peu de saveur, ce qui n’est pas le cas du récit dans son ensemble alors que dès que vous croyez mettre la main sur un meurtrier potentiel, une chaîne d’évènements vous ramène à vos devoirs pour la simple raison que tout n’est qu’apparence comme dans SHUTTER ISLAND le livre célèbre de Dennis Lehane qui a entretenu dans son oeuvre une confusion savamment étudiée.

LES SEPT MORTS D’EVELYN HARDCASTLE n’est qu’une longue mystification. Reste pour vous à découvrir sur quoi elle repose. Drogue ? Surnaturel ? Machiavélisme ? Un amalgame peut-être. L’intrigue est profonde et complexe. L’histoire débute d’ailleurs presque sur des chapeaux de roues.

Un soir, à 11 heures très précises, Evelyn Hardcastle sera tuée. C’est Aiden Bishop qui est désignée pour découvrir le meurtrier et il n’a que quelques heures pour le faire. S’il ne réussit pas, il devra revivre la mort d’Evelyn chaque jour, sans arrêt, vivre chaque journée, qui sera toujours la même. Il n’y a qu’une solution pour sortir de ce cauchemar : fournir un nom à celui qu’on pourrait appeler le maître du jeu. Quand ce fut fait, je compris alors les motivations des mystificateurs et c’est là que j’ai consacré finalement l’originalité du roman : plus qu’un jeu, un défi pour l’esprit.

Turton entretient savamment le mystère et l’intrigue grâce à ses personnages bien modelés, travaillés en profondeur. Que ce soit le mystérieux docteur de Peste qui semble un intermédiaire dans cette histoire, ou l’énigmatique Hélene Hardcastle qui fût ma première suspecte officielle mais qui fut supplantée par la suite, ou le docteur Diggy qui semble en savoir très long ou monsieur Bell qui confirme un lien de la drogue avec cette histoire.

Dites-vous bien que, vous explorez un pavé bourré de phrases masquées, de non-dits, de liens obscurs et d’énigmes qui gagnent en épaisseur au fil du récit. Je me demande comment ce serait débrouillé Hercule Poirot, le célèbre détective créé par Agatha Christie dans un casse-tête *mille pièces* comme celui-ci. J’ai beaucoup aimé relever ce défi. Ça m’a bousculé, brassé même. Mais j’y ai pris goût.

Malgré tout, je déplore des longueurs, une grande quantité de personnages qu’il faut se remettre à l’esprit rapidement et une finale un peu molle mais le développement est impeccable. Pour son premier roman, je crois que Stuart Turnton s’est investi à fond. C’est prometteur.  Quant à la version audio, Beau travail du narrateur Laurent Natrella.



Pour en savoir plus sur Stuart Turton (ci-haut), cliquez ici.
Du même genre, commentaire sur BIBLIOCLO : le livre d’Agatha Christie À l’hôtel Bertram

Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert
le dimanche 28 juillet 2024

 

L’ÉNIGME DE LA CHAMBRE 622

Commentaire sur le livre de
JOËL DICKER

*- Vous êtes le diable ! s’écria Macaire.
– Je suis pire que le diable, car moi j’existe. *
Extrait : L’énigme de la chambre 622, de Joël
Dicker, version audio par Audiolib éditeur, 2020
durée d’écoute : 17 heures 20 minutes.
Narrateur : Steve Driesen. Édition de papier:
B. de Fallois éditeur, 2020, 572 pages

Une nuit de décembre, un meurtre a lieu au Palace de Verbier, dans les Alpes suisses. L’enquête de police n’aboutira jamais.

Des années plus tard, au début de l’été 2018, lorsqu’un écrivain se rend dans ce même hôtel pour y passer des vacances, il est loin d’imaginer qu’il va se retrouver plongé dans cette affaire.

Que s’est-il passé dans la chambre 622 du Palace de Verbier ?

 

Retour aux sources helvètes

J’aime autant vous dire d’entrée de jeu que pour lire ce livre, il faut s’armer de patience. Voyons d’abord la trame. De passage dans un hôtel appelé Palace de Verbier, dans les Alpes suisses, un écrivain est intrigué par le fait qu’il n’y a pas de chambre 622. Il découvre dans l’ordre, les chambres 621, 621-bis et 623.

L’écrivain est intrigué au point d’entreprendre des recherches qui lui apprendront finalement qu’il y a eu un meurtre dans la chambre 622. Une sombre affaire qui n’a jamais eu sa conclusion et qui a poussé la direction de l’hôtel à éliminer le chiffre 622. Mais que s’est-il passé exactement dans la chambre 622 ? toute l’histoire repose sur cet évènement. On dirait bien que notre écrivain tient le sujet de son prochain livre.

Le sujet est intéressant, mais l’auteur l’a complexifié inutilement, y a incorporé de petites romances insignifiantes et s’est lui-même mis en scène, ce que j’ai trouvé très ordinaire d’autant que son rôle est très accessoire. Le fait que l’auteur, Joël Dicker se soit attribué le rôle de l’écrivain n’est pas la moindre de mes déceptions. Dans ce livre, il y a tellement de revirements, de dialogues platoniques, de longueurs et de personnages mal définis qu’au bout du compte, les pinceaux s’emmêlent, sans compter les sauts temporels qui ne sont pas de nature à simplifier ce récit qui s’en trouve passablement alourdi.

Les idées géniales, parce qu’il y en a, sont occultées par le caractère fantaisiste de L’ensemble. On dirait une caricature se manifestant suite à une idée de départ mal développée. J’ai été tout de même captivé par un personnage énigmatique : Ternagol, fasciné aussi par une machination qui a échappé à tout le monde pendant quinze ans et qui connait un dénouement surprenant dans le troisième quart du récit.

Je ne peux pas en dire plus sinon que l’idée était excellente, mais gâchée, peut-être par l’idée de trop bien faire…manifestation d’un vieux principe qui dit que trop, c’est comme pas assez. Certains personnages sont carrément ridicules, c’est le cas notamment de Scarlet, une connaissance de l’écrivain, insignifiante à tout point de vue. L’auteur a d’ailleurs établi un lien avec Scarlet Ohara, la miss Scarlet du film Autant en emporte le vent de Victor Flemming. Ça frôle le remplissage.

Pour un lecteur patient, la finale est intéressante et ne manque pas d’imagination mais malheureusement l’ensemble est décevant par la faiblesse de son style, ses tendances à l’errance et ses dialogues vides. Enfin, j’ai trouvé la version audio empreinte d’un dynamisme et d’une qualité qui ont l’avantage de…disons sauver les meubles.

Suggestion de lecture : LE MYSTÈRE DE LA CHAMBRE JAUNE, de Gaston Leroux


L’auteur Joël Dicker

Bonne lecture
Bonne écoute

Claude Lambert

le samedi 27 juillet 2024

BELLE SAUVAGE

La trilogie de la poussière
livre 1

De PHILIP PULLMAN

<En outre, Lord Nugent se surprit à se demander si ce déluge était entièrement naturel. Ses compagnons gitans et lui avaient le sentiment que l’inondation relevait d’une cause plus étrange que les caprices du ciel car elle avait commencé à provoquer de curieuses illusions et à se comporter de manière inattendue. A un moment donné, ils perdirent totalement de vue la côte ; ils auraient pu tout aussi bien se trouver en pleine mer.>

Extrait LA BELLE SAUVAGE, livre 1 de la TRILOGIE DE LA POUSSIÈRE, Philip Pullman, Gallimard jeunesse 2020 pour la version audio, 544 pages pour l’édition de papier. Audio : durée d’écoute : 12 heures 50 minutes, narrateur : François-Éric Gendron.

Retour au cœur de Lyra, avant les royaumes du Nord… À l’auberge de la Truite, Malcolm, 11 ans, et Alice, 16 ans, aiment écouter les aventures des visiteurs. Certains sont étrangement intéressés par un bébé nommé Lyra et par son daemon Pantalaimon, gardés par les nonnes du prieuré tout proche. Alors que de nombreux dangers menacent l’enfant, les deux adolescents s’enfuient avec lui à bord de la Belle Sauvage, le bien le plus précieux de Malcolm.

Une préquelle de la
CROISÉE DES MONDES

LA BELLE SAUVAGE est le premier roman de la TRILOGIE DE LA POUSSIÈRE de Philip Pullman et aussi la préquelle de À LA CROISÉE DES MONDES dans laquelle l’auteur décrit et explique une enlevante chaîne d’évènements qui conduira la petite Lyra Bellacqua, qui n’a alors que six mois et son daemon, Pantalaimon, à leur installation au Jordan College.

Dans ce récit au rythme élevé et parfois hautement dramatique, nous suivons deux adolescents : Malcom Polstead, onze ans, et son daemon Asta et Alice Parslow, 16 ans, son daemon Ben. Suite à une inondation meurtrière, Malcom et Alice se donnent comme mission de protéger un bébé, activement recherché par le Magisterium car ce bébé, une petite fille nommée Lyra est l’objet d’une prophétie qui mettrait en danger la domination religieuse et sociale imposée par le puissant organisme.

Cette recherche, qui devient une poursuite effrénée, entraînera des morts, des blessés et de lourdes privations pour nos deux jeunes héros. Mais Malcolm et Alice trouveront quelques précieux alliés et bénéficieront de l’aide inespérée d’un érudit : Lord Azriel, le père de Lyra.

J’ai adoré cette histoire qui m’a permis de mieux comprendre les éléments-clés de LA CROISÉE DES MONDES : Les daemons, la poussière, appelée dans le récit le champ de Russakov ouvrant une porte sur un monde parallèle, l’introduction dans l’histoire de madame Coulter dont le rôle sera défini beaucoup plus tard, le magisterium, créature malfaisante, un gouvernement socio-religieux assis sur un pouvoir colossal et bien sûr, l’origine de Lyra et le destin tracé pour elle.

J’ai été subjugué par ce récit en particulier à cause de ses principaux personnages, attachants et ombrageux : Malcolm et Alice. Le roman n’aurait pas eu toute cette force qui le caractérise sans LA BELLE SAUVAGE, un esquif héroïque symbolisant la promesse d’un salut renforcée par la touche personnelle de Lord Azriel. Pour moi, cet élément est sans doute le plus original du récit.

L’écriture est riche, la langue colorée, la version audio est aussi excellente, la narration fort expressive de François-Éric Gendron forçant l’attention. Toutefois, le rythme du récit est parfois tellement effréné qu’on perd de vue les objectifs de la quête des jeunes. Beaucoup de passages sont expédiés, occultant quelque peu l’émerveillement du lecteur et de la lectrice. Cette observation inclut la froideur de Lord Azriel, trop avare à mon goût d’explications. C’est la principale faiblesse du roman. J’ai trouvé aussi que l’auteur a fait grandir le personnage d’Alice dans l’ombre de Malcolm. J’ai trouvé ça très dommage.

Bon. Pour résumer, LA BELLE SAUVAGE est un roman fort qui met en place une suite prometteuse. L’histoire est fouillée. On y trouve beaucoup de trouvailles originales et surtout, la plume de Pullman m’a fait développer une empathie naturelle pour les deux héros de l’histoire. Vivement la suite…

Suggestion de lecture : À LA CROISÉE DES MONDES, livre 2, LA TOUR DES ANGES, de Philip Pullman

La suite de LA BELLE SAUVAGE

Le cycle 
de la Croisée des Mondes


L’auteur Philip Pullman

Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert

LE CRÉPUSCULE DES DIEUX

Commentaire sur 

Le livre IV de la tétralogie des origines

— Vous savez ce qui se passe, mon cher Albrecht, quand les proches conseillers du roi finissent par diriger l’État à sa place à force de courtisanerie.
— Rappelez-le-moi.
— Dans une dictature, cela provoque un bordel qui vous fait perdre une guerre mondiale. Dans une démocratie, la gouvernance du peuple par le peuple devient un merveilleux trompe-l’œil dissimulant un carcan administratif, une nuée de conseillers, de lobbyistes qui dirigent le système à leur guise. 

 Extrait :  La tétralogie des origines, livre IV, LE CRÉPUSCULE DES DIEUX, Stéphane Przybylki, version audio, Sonobook éditeur, 2016, durée d’écoute : 14 heures 18 minutes. Narrateur : Victor Vestia.

Mai 1942. Reinhard Heydrich se meurt dans un hôpital de Prague. À moins que… Le monde est à feu et à sang, l’humanité se consume dans les affres d’une guerre comme elle n’en a jamais connu. Dans le chaos du conflit qui déchire le monde d’hier s’esquisse déjà celui de demain, mais les véritables enjeux de cette boucherie planétaire se dévoilent enfin – bien plus cruciaux que tout ce qu’il était possible d’imaginer.

Un futur que l’ancien SS Friedrich Saxhäuser refuse, qu’il ne permettra pas. Désormais coule dans ses veines l’impensable puissance révélée au cœur du Kurdistan irakien. Un pouvoir tel qu’il pourrait bien provoquer ce que, dans les secrets méandres du complot, tous redoutent : le crépuscule des dieux…

ET SI LES DIEUX S’EN MÊLAIENT

Voici donc la conclusion de la fameuse tétralogie uchronique des origines. Une série qui aura satisfait finalement l’amateur que je suis de complots, d’intrigues, d’espionnage : mélange explosif dans lequel l’auteur a habilement imbriqué la science-fiction et bien que Przybylski ait retravaillé l’histoire, le récit a assurément un lien avec l’actualité.

Ceux et celles qui ont lu les quatre livres se rappelleront que tout a commencé avec la découverte, par des SS, de preuves irréfutables de la présence extra-terrestre parmi nous. C’est un des liens avec l’actualité. Comme on le sait, ce sujet est devenu une conviction de société.

Par la suite, les extra-terrestres se sont manifestés et c’est ainsi qu’a commencé un jeu sordide de manipulation, de pouvoir, de contrôle allant jusqu’à l’expérimentation sur des sujets humains finissant suppliciés et que de monstrueuses créatures du nazisme et des SS sont devenus des instruments, marionnettes des étrangers tel le démon blond : Reinhard Heydrich. Le quatrième livre est très axé sur les horreurs innommables des SS pendant la deuxième guerre mondiale. Certains passages pourraient heurter les âmes sensibles.

Le lien avec la science-fiction m’a particulièrement captivé. Les motivations des extra-terrestres m’ont rappelé celles des aliens de INDEPENDANCE DAY, film de Rolland Emmerich. Le lien avec l’actualité aussi comme la destruction d’un ovni qui s’est écrasé près de Roswell. Dois-je rappeler que cette affaire est restée jusqu’à nos jours fort énigmatique.

J’ai aimé la progression de cette histoire. Un peu moins sa finale, la progression m’ayant préparé à mieux. L’auteur part de faits avérés sur le plan historique et bâtit une uchronie avec beaucoup d’imagination. La plume est fluide, claire et rien ne permet à l’auditeur et à l’auditrice de perdre le fil conducteur de l’histoire. Donc, c’est facile à suivre.

Avec sa connaissance pointue de l’histoire, l’auteur nous offre avant tout un récit historique, crédible, convaincant et photographique, me donnant l’impression d’être dans l’action, témoin de l’apparition d’un ovni, venu de nulle part. L’auditeur ou le lecteur ne voit plus le temps passer. La faiblesse, si on peut dire est que la tétralogie n’apporte rien de nouveau au genre et emprunte un peu trop au style X FILES mais j’ai consommé, si je puis dire, un sympathique moment d’écoute. Le narrateur a fait un assez bon boulot.

Suggestion de lecture : LA PART DE L’AUTRE, d’Éric-Emmanuel Schmidt. Ce livre développe également une uchronie.

Les trois premiers tomes

Ci-haut, l’auteur de la tétralogie des origines, Stéphane Przybylki , auteur français, malgré son nom imprononçable.

Quant au narrateur, Victor Vestia, je n’ai rien trouvé à part une page Facebook vide. Pas de photo, pas de parcours…peut-être gagne-t-il à être inconnu.  Et pourtant sa performance était bonne.

Pour ce qui est du titre du livre IV de la tétralogie des origines, il faut faire attention car plusieurs livres d’auteurs différents portent le titre LE CRÉPUSCULE DES DIEUX :

-Le crépuscule des dieux de la série Amos d’Aragon par Bryan Perro
-Le crépuscules des dieux par Nicolas Jarry
-Le crépuscule des dieux en bandes dessinées
-Le crépuscule des dieux de Charlotte Key, qui est aussi une série.
-Le crépuscule des dieux est aussi le titre d’un célèbre opéra de Richard Wagner.

Bonne écoute
Claude Lambert
le samedi 20 juillet 2024

 

NUIT NOIRE, ÉTOILES MORTES

Commentaire sur le livre de STEPHEN KING

1922 : un fermier du Nebraska confesse qu’il a assassiné son épouse, avec l’aide de son fils de 14 ans. Grand chauffeur : une femme écrivain, violée et laissée pour morte au bord d’une route, décide de se venger elle-même. Extension claire : un cancéreux en phase terminale passe un pacte avec un vendeur diabolique, afin d’obtenir un supplément de vie. Bon ménage : une femme découvre qu’elle vit depuis vingt ans avec un serial killer.

Quatre nouvelles puissantes et dérangeantes, quatre personnages confrontés à des situations extrêmes qui vont les faire basculer du côté obscur, plus une nouvelle inédite vraiment inquiétante…

*Toutes ces années, elle avait vécu avec un fou, mais comment aurait-elle pu le savoir ? *
(Extrait : NUIT NOIRE, ÉTOILES MORTES, Stephen King, version audio éditée par les studios Audible, 2017, durée d’écoute : 16 heures 31, narrateurs : Mathieu Buscato et Anne-Sophie Nallino) publié à l’origine en 2010, puis vint la version française en 2012, éditée par Albin Michel. 450 pages.

NOIR ET DÉRANGEANT

Ce livre, dans sa version audio, comporte quatre nouvelles et bien que je n’aie pas ressenti mon emballement habituel pour Stephen King, j’ai passé un bon moment d’écoute avec ces quatre nouvelles livrées à ma grande satisfaction par les talentueux narrateurs Mathieu Buscatto et Anne-Sophie Nallino. On dirait que King a changé.

Les nouvelles de ce recueil sont noires, glauques et leur fond est violent mais je n’ai pas ressenti les émotions de frayeur, de stress et d’angoisse que projette habituellement King dans ses récits. J’ai senti comme de la retenue et une psychologie des personnages moins détaillées.

Les nouvelles sont des romans courts et pourtant j’ai senti quelques longueurs, un peu de redondance. Mais là s’arrêtent les petites faiblesses de ce recueil car les nouvelles qui le composent sont, d’après moi d’une grande profondeur. Pas de monstres difformes, pas de spectre, pas de surnaturel. King a utilisé, avec son intelligence et son habileté habituelles, les tares de l’esprit humain: manipulation psychologique, jalousie, vengeance, envie, abus, violence. S’il y a un domaine où King continue d’exceller, c’est bien l’exploitation de la part sombre des êtres humains.

J’ai trouvé la première et la quatrième nouvelle particulièrement originales : 1922, un homme qui manipule psychologiquement son fils adolescent pour qu’il participe au meurtre de sa mère. Ce sujet, développé froidement a heurté ma sensibilité. C’est, à mon avis, la nouvelle la mieux aboutie du recueil. La quatrième nouvelle, BON MÉNAGE, a suscité en moi un questionnement induit par cette capacité de King de nous amener aux portes du cauchemar. Comment une femme peut-elle vivre sans le savoir, depuis 20 ans avec un meurtrier en série. Belle trouvaille.

Les deux autres nouvelles sont très bien écrites mais développent des sujets déjà vus en littérature : l’histoire de l’agresseur agressé et une espèce de pacte avec le diable pour s’assurer un supplément de vie. Impression de déjà-vu oui, mais à la sauce King, grinçant, acide, avec parfois de l’humour noir.

C’est un livre sans trop de surprises, sûrement pas le meilleur de King, du moins, dans le style auquel il nous a habitué. Les narrateurs m’ont fait oublier ce que je n’ai pas trouvé en lui. Ça ne passera pas à l’histoire mais j’ai tout de même apprécié.

Suggestion de lecture : NOUVELLES NOIRES de Renaud Benoit


L’auteur Stephen King

Aussi, à lire ou à écouter…très intéressant

D’autres livres de Stephen King sur ce site :

Pour lire mon commentaire sur 22/11/63, cliquez ici.
Pour mon commentaire sur la TOUR SOMBRE
J’ai commenté aussi FIN DE RONDE, UN VISAGE DANS LA FOULE,  LA PETITE FILLE QUI AIMAIT TOM GORDON, et L’INSTITUT 

Je vous invite aussi à explorer la biographie de Stephen King.

Enfin, une petite visite du site consacré au club de Stephen King pourrait vous intéresser.

BONNE ÉCOUTE
BONNE LECTURE
Claude Lambert
le vendredi 19 juillet 2024

 

BIENVENUE À GOMORRHE

COMMENTAIRE SUR LE LIVRE DE TOM SHATFIELD

<Sur Internet, personne ne sait que vous êtes un chien, mais les biscuits en forme d’os que vous avez semés jusqu’à votre porte permettent de tirer des conclusions logiques. > BIENVENUE À GOMORRHE, Tom Shatfield, format numérique, Hugo thriller éditeur, 2020, 430 pages, 1 531 kb.

 » Gomorrhe. Un nom murmuré dans les recoins les plus sombres des forums les plus tordus. Un endroit que la lie du Darknet rêve de visiter. Tout le monde sait comment on se divertissait à Sodome, mais de quelle nature étaient les moeurs de Gomorrhe pour mériter, elle aussi, d’être détruite par « une pluie de souffre et de feu » ?  Infiltrer des néo-nazis occupés à faire de notre planète un endroit infréquentable suffisait largement à remplir la vie d’Azi Bello, et à lui permettre de faire la démonstration de ses talents d’hacker.

Mais lorsque la mystérieuse Anna s’invite dans l’abri de jardin qui lui sert de bureau, la vie d’Azi prend une toute autre tournure. Car Anna et l’organisation secrète pour laquelle elle travaille en savent suffisamment sur Azi pour qu’il n’ait pas d’autre choix que de leur obéir. Et ceux qu’on lui ordonne de mettre hors d’état de nuire sont considérablement plus dangereux que la meute de suprémacistes qu’il combattait derrière ses écrans.

Azi va découvrir que le monde réel est infiniment plus dangereux que le virtuel. Et que d’un monde à l’autre, Gomorrhe se nourrit avec la même avidité de l’argent des uns et de l’idéologie des autres pour étendre son règne de terreur.

LA FOSSE D’INTERNET


C’est un livre au contenu technique plutôt lourd mais je l’ai tout de même trouvé très intrigant. C’est un thriller fort qui développe un thème qui a quelque chose de dérangeant puisqu’il développe le sujet du Darknet : le sous-sol d’internet, le <côté obscur> de la technologie dans lequel on trouve des services et des produits qui échappent au contrôle des lois et de la morale.

Et dans son livre, Tom Shatfield va encore plus loin en imaginant GOMORRHE, la basse fosse du darknet, sécurisé au-delà de tout entendement et qui facilite les trafics de toutes sortes, meurtres, complots, armements et par-dessus tout, facilite le terrorisme et va jusqu’à encourager le néonazisme. Gomorrhe masque l’identité de l’utilisateur et ceux avec qui il partage <toute cette désinformation pornographico-islamo-complotisto-nazie> (Extrait)


Afin de mettre hors d’état de nuire le site maudit, on fait appel à Azzi Belo, peut-être le hackeur le plus brillant au monde, <un fantôme dans la machine> (Extrait)

Quoique difficile à suivre tellement son esprit est bouillonnant, Azzi n’a pas fini de vous remuer. Ce thriller m’a captivé et m’a laissé jusqu’à la fin sur mon questionnement : comment venir à bout d’une poudrière aussi intouchable.

Le dernier quart du récit m’a laissé sur un revirement de situation que je n’ai jamais pu prévoir. Gomorrhe cache autre chose…une inimaginable machination, et c’est pas joli.

C’est une histoire solide, haletante, bien écrite et son personnage central est bien travaillé. L’auteur l’a rendu attachant ce qui fait du bien dans un techno-thriller. Azzi est humain, connait des défaites, des déceptions, frôle la mort devant la plus colossale et meurtrière machine issue du darknet.

Il faut prendre ce livre pour ce qu’il est aux dires de l’auteur : <Une œuvre de fiction qui joue délibérément avec la réalité – mélange de plausible et de fantastique, de faits historiques > Extrait. Pour moi, c’est une œuvre d’une grande crédibilité qui n’est pas sans faire réfléchir sur l’incroyable pouvoir que peut procurer internet à des êtres malveillants et sur la nécessité d’en contrôler l’éthique. Un livre dense, rythmé, addictif, un auteur à surveiller.

Suggestion de lecture : PANDEMIA, de Frank Thilliez

l’auteur Tom Shatfield. Son livre a remporté le prix
Douglas Kennedy 2020 du meilleur thriller étranger.

 

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 23 juin 2024

LA FILLE DU TRAIN

Commentaire sur le livre de
PAULA HAWKINS

*Nous sommes tous des voyeurs. Les gens qui prennent le train tous les jours pour se rendre au travail sont les mêmes partout dans le monde : chaque matin et chaque soir, nous sommes installés sur notre siège, à lire le journal ou écouter de la musique ; nous observons d’un œil absent les mêmes rues, les mêmes maisons et, de temps à autre, nous apercevons un éclair de la vie d’un inconnu. Alors, on se tord le cou pour mieux voir. *

(Extrait : LA FILLE DU TRAIN, de Paula Hawkins, Pocket, Sonatine éditeur, 2015, papier, 455 pages)

Entre la banlieue où elle habite et Londres, Rachel prend le train deux fois par jour : le 8 h 04 le matin, le 17 h 56 le soir. Chaque jour elle est assise à la même place et observe, lors d’un arrêt, une jolie maison en contrebas de la voie ferrée. Cette maison, elle la connaît par coeur, elle a même donné un nom à ses occupants, qu’elle voit derrière la vitre. Pour elle, ils sont Jason et Jess. Un couple qu’elle imagine heureux, comme Rachel et son mari ont pu l’être par le passé, avant qu’il la trompe, avant qu’il la quitte. Rien d’exceptionnel, non, juste un couple qui s’aime. Jusqu’à ce matin où Rachel voit Jess dans son jardin avec un autre homme que Jason.

Que se passe-t-il ? Jess tromperait-elle son mari ? Rachel, bouleversée de voir ainsi son couple modèle risquer de se désintégrer comme le sien, décide d’en savoir plus sur Jess et Jason. Quelques jours plus tard, c’est avec stupeur qu’elle découvre la photo de Jess à la une des journaux. La jeune femme, de son vrai nom Megan Hipwell, a mystérieusement disparu…

Un long fleuve agité
*temps normal, je simulerais la politesse, mais ce
matin, je me sens authentique, je me sens moi-
même, je suis exaltée, comme si j’étais défoncée,
et, même, si j’en avais envie, je serais incapable de
feindre la gentillesse. *
(Extrait)

C’est un polar psychologique glauque, triste et obsessif. La fille du train, c’est Rachel, une femme déchirée, alcoolique et dépressive. Elle prend le train quotidiennement. Pratique pour faire croire à sa colocataire qu’elle travaille et qu’elle paiera le loyer. Elle prend aussi le train pour faire déraper ses pensées et suivre un couple qu’elle s’est inventé, Jess et Jason, qu’elle croit voir par les fenêtres du train.

Elle imagine bientôt le couple s’enliser dans un cercle d’infidélité jusqu’à ce que Jess disparaisse de la circulation. Le mystère s’intensifie avec la disparition, réelle celle-là d’une jeune femme nommée Mégan.

Les trois femmes au cœur de cette histoire plutôt noire prennent la parole à tour de rôle. Une triple narration qui permet d’explorer en alternance le point de vue de chacune et la façon dont elles sont entraînées dans un cercle de violence et de mal-être. Il y a aussi des hommes dans cette histoire. Deux principalement : Scott et Tom, ce dernier est dépeint d’une façon peu engageante : <La vie entière de Tom était bâtie sur des mensonges, des malhonnêtetés et des semi-vérités censées le faire passer pour quelqu’un de supérieur, de plus fort et de plus intéressant qu’il ne l’était…>

Ce dernier extrait vient préciser l’atmosphère du récit, le non-dit caché entre les lignes qui prend le lecteur au cœur. C’est un récit très riche, un peu lourd, pas toujours facile à suivre mais qui se dévoile sur des chapeaux de roues dans le dernier quart du livre. Il faut être attentif pour bien saisir la vraie nature des personnages et l’enchaînement des rebondissements, exacerbé par la triple narration.

C’est un bon thriller, mais il est complexe et accuse des longueurs. C’est un récit noir dans lequel la seule réalité des personnages est la folie qui les guette. La plume est bien maîtrisée malgré une certaine dérive. On sait que Paula Hawkins veut nous entraîner quelque part, mais impossible d’imaginer la finale.

La nature convergente de la triple narration en alternance m’a plu et je me suis laissé entraîné par l’intensité du récit. Attendez-vous à explorer l’attitude de personnages complexes face à leurs démons. On est loin du genre <C’est beau la vie> . C’est une lecture qui laisse des marques.

Suggestion de lecture : DANS LA TOILE, de Vincent Hauuy

Paula Hawkins a vécu au Zimbabwe, en France et en Belgique et réside maintenant à Londres. Elle a été journaliste pendant quinze ans avant de se consacrer à la fiction. LA FILLE DU TRAIN, son premier roman a été vendu à 18 millions d’exemplaires dans le monde. Dreamworks en a acquis les droits d’adaptation cinématographique, et le film est sorti en 2016. Son deuxième roman, AU FOND DE L’EAU a paru en 2017 chez Sonatine.

De la même auteure

Bonne lecture
Claude Lambert