CELUI QUI BAVE ET QUI GLOUGLOUTE, R.C. WAGNER

*Sa voix s’étrangla dans sa gorge à la vue du trait de
lumière écarlate qui venait de frapper le rocher non
loin de lui, creusant un petit cratère fumant dans la
pierre grise. Il leva les yeux, en quête de l’origine de
l’éclair mortel…*
(Extrait : CELUI QUI BAVE ET QUI GLOUGLOUTE, Roland
C. Wagner, Actusf, 2006, rééd. LES TROIS SOUHAITS,
nouvelle, format numérique, 90 pages)

1890, dans l’Ouest américain. Les derniers rapports des Tuniques bleues relatent d’étranges événements. Les Indiens, soutenus par des alliés invincibles, mènent des combats d’une force insoupçonnée et refoulent, pour la première fois, l’armée vers l’est. La rumeur tend à justifier ce revirement : leurs alliés seraient-ils des esprits démoniaques ? Des monstres venus d’une autre planète ? Kit Carson ― chasseur de prime ―, le professeur Lévêque et le séduisant détective Nat Pinkerton forment l’équipe intrépide qui dénouera la vérité dans une quête périlleuse à travers le mythique Far West et ses légendes : Calamity Jane, Jesse James, les Dalton.

La marque de Lovecraft
*Scott O’Bannon se demandait sérieusement s’il n’avait
Pas commis une erreur en laissant ce charmant vieux
savant consulter le Necronomicon. Pour tout dire, il
craignait d’avoir été victime de quelque mystérieuse
manipulation mentale.*
(Extrait)

CELUI QUI BAVE ET QUI GLOUGLOUTE est une nouvelle hors-norme. Un bijou d’originalité de style steampunk : un courant littéraire uchronique lié au XIXe siècle qui a été marqué par l’envahissement des voies maritimes de bateaux à vapeur.

C’est un texte au rythme élevé qui, première originalité, réunit les personnages les plus célèbres du far-west, dont des criminels, réactualisés par la littérature, incluant la BD comme l’incontournable série LUCKY LUKE crée par le dessinateur belge Morris : Kit Carson, Buffalo Bill, les Dalton, Jessy James, Billy the kid, Nat Pinkerton et j’en passe.

*C’est la nation indienne toute entière qui s’est soulevée, Sioux, Arapahos, Crows, Cheyennes, Pawnees, Pieds-bleus ou Apaches, toutes les tribus ont entrepris de refouler les pionniers vers l’est, infligeant défaite sur défaite à la cavalerie des États-Unis* (Extrait) 

Pourquoi une telle impuissance des soldats américains appelées *tuniques bleues* ? Eh bien il semble, et c’est là une deuxième originalité, que les Indiens se sont fait un précieux allié. Allié qui sera identifié plus tard comme étant des martiens : d’impossibles créatures vertes à quatre bras.

Très rapidement, on sent l’influence de Lovecraft dans le récit. Car plus tard, les vénusiens se mettront de la partie, non pas pour aider qui que ce soit, mais pour combattre…les martiens. Puis, un mystérieux personnage s’ajoutera au milieu du récit : un être surnaturel énorme qui mange des humains avec un appétit démesuré.

Cette entité, gardienne des portes dimensionnelles a été annoncée par le Nécronomicon, un ouvrage fictif du mythe de Cthulhu, inventé par l’écrivain-phare Howard Phillip Lovecraft et évoqué dans treize de ses œuvres.

Le Nécronomicon inspirera aussi des dizaines d’auteurs dont Rolland C Wagner pour la présente dans laquelle l’horrible livre est convoité quitte à rendre son lecteur fou ou abruti. Quant à cette créature de cauchemar sortie de nulle part et qui bouffe des humains à la douzaine seulement pour sa collation, on lui donnera le nom de CELUI QUI BAVE ET QUI GLOUGLOUTE…pour des raisons évidentes.

J’ai eu beaucoup de plaisir à lire cette nouvelle. Là je peux dire que l’auteur m’a surpris avec un mélange de genres qui a quelque chose d’hilarant. Comme je suis un inconditionnel de Lovecraft, la nouvelle m’a accroché et a eu sur moi l’effet d’une toile d’araignée.

Attiré au départ par ce titre étrange et un quatrième de couverture improbable qui m’apprend que le gouvernement américain engage le célèbre chasseur de primes Kit Carson pour régler le problème. Le résultat est un mélange détonnant : du Far West américain pure laine avec de la science-fiction introduisant des créatures pas spécialement appétissantes.

Une petite initiative qui pourrait vous faire goûter davantage CELUI QUI BAVE ET QUI GLOUGLOUTTE serait de faire connaissance avec LOVECRAFT. Wikipedia vous offre un dossier complet sur lui. Toute son œuvre repose sur l’horreur cosmique et la méconnaissance de l’homme sur tout ce qui concerne l’univers. Les détails de sa vie et de son œuvre, incluant le Necronomicon pourrait vous surprendre à bien des égards.

Le seul reproche que je pourrais faire à cette nouvelle, est la sous-exploitation du thème. J’ai souvent cette impression avec des nouvelles originales ou particulières. CELUI QUI BAVE ET QUI GLOUGLOUTE aurait eu suffisamment de matière pour en faire un roman complet.

Ça nous aurait sans doute donné des personnages mieux travaillés, plus aboutis, plus fouillés sur le plan psychologique. L’auteur aurait pu enrichir l’aspect anecdotique et décrire davantage la vie sociale, politique et économique du Far West du XIXe siècle. Enfin l’auteur aurait pu en profiter pour vulgariser le Necronomicon, le rendre un peu plus compréhensible.

Ceci dit, j’ai passé une petite heure tout à fait passionnante avec CELUI QUI BAVE ET QUI GLOUGLOUTE.

Suggestion de lecture : LE PROJET BRADBURY, de Neil Jomunsi

Né à Bab-el-oued en pleine Guerre d’Algérie, ayant grandi en banlieue parisienne entre rock et livres (du Fleuve Noir à Victor Hugo !), Roland Wagner a participé à sa première convention de SF à un peu moins de 14 ans, et fait paraître sa première nouvelle dans un fanzine l’année suivante.

Depuis 1987, Wagner a publié plusieurs dizaines de romans, au Fleuve Noir dans un premier temps, chez l’Atalante pour ce qui est du millénaire en cours. Ceci sans négliger d’autres éditeurs (Le Livre de Poche, J’ai Lu, Le Bélial, Le Rocher etc.).

Il est revenu sur le devant de la scène en 2011, avec RÊVES DE GLOIRE, une incroyable uchronie polyphonique sur la Guerre d’Algérie. Couverte de récompenses, dont le Prix Utopiales des Pays de Loire 2011 et le Grand prix de l’Imaginaire 2012, un monument littéraire, liant le souffle de l’imaginaire à la passion pour l’histoire contemporaine.

Né en 1890, Howard Phillips Lovecraft est un enfant chétif, qui sort peu et devra être scolarisé à la maison. En 1915, il fonde son propre journal. Deux ans plus tard, il compose ses premières fictions. En 1928, il publie « L’appel de Cthulhu », ouvrant la voie à un nouveau style dans le genre de l’horreur. La période qui suit est prolifique.

L’univers imaginaire qu’il met en scène a un énorme retentissement. Certaines de ses créatures surnaturelles sont reprises par d’autres écrivains de science-fiction. Nombre de ses personnages souffrent de désordres mentaux. L’ambiance de ses récits est pessimiste. Un cancer l’emporte en 1937, à 47 ans. Il est aujourd’hui cité comme source d’inspiration par des écrivains aussi célèbres que Stephen King, Peter Straub ou Neil Gaiman.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
Le samedi 13 novembre 2021

LA SÉRIE DE CONTES DE VALÉRIE BONENFANT

*D’accord, d’accord, je vais raconter
l’histoire de loin…De toute façon,
cela ne sert à rien que je m’approche,
l’action va venir du ciel…*
(Extrait : LE CHIEN ET L’EXTRA-TERRESTRE
19e conte de Valérie Bonenfant, éditrice : Valérie
Bonenfant/BoD-Books, 2016, Illustrateur :
François Nasica, couleur, 32 pages)

Un chien est en train de garder son jardin quand soudain débarque du ciel un drôle d’engin, plat avec plein de lumières clignotantes… À l’intérieur un drôle d’occupant. Drôle? C’est un des mots clés de ce conte où avoir peur n’a jamais créé autant de secousses… de rires! Un conte mis en images par l’artiste François Nasica, qui puise son inspiration dans l’art urbain et la figuration narrative. Des images colorées, pétillantes et joyeuses, qui vont régaler les yeux des jeunes lecteurs de six ans et plus curieux de voir ce que donnerait une rencontre  improbable entre un chien et un extraterrestre

LA  DOUCEUR DU RÊVE ET DE L’ÉMOTION
*Baroud n’était pas un accordéon comme les autres. Quand il jouait, il ne produisait pas des notes de musique, mais des fleurs… Celles-ci sortaient de son soufflet, dès qu’il s’ouvrait …Il jouait un morceau, et aussitôt, le parterre se couvrait de fleurs. *
(Extrait : BAROUD L’ACCORDÉON, numéro 20 de la collection de Valérie Bonenfant,
illustrations : Fanny Roques, éd. Valérie Bonenfant, 2017)

Depuis 2015, Valérie Bonenfant réalise un vieux rêve : créer des contes ajustés à des circonstances précises de la vie de l’enfant ou à ses traits de caractère ou tout simplement à son imaginaire. Le petit ouvrage que j’ai lu est un conte inachevé. Mais j’ai réalisé qu’il pouvait appartenir à l’enfant de trouver lui-même une finale qui l’amuse ou qui lui convient évidemment.

Ce conte inachevé m’a amené inévitablement sur le site internet de Valérie Bonenfant et honnêtement, j’ai pu mesurer toute l’étendue de son talent, réalisant que s’adresser à un enfant, aiguiser sa curiosité, stimuler sa capacité d’émerveillement et faciliter son apprentissage est un art qui n’est pas donné à tout le monde. Allez voir son parcours en bas. Il y a de l’amour là-dedans.

Le souhait de Valérie Bonenfant est *de proposer de beaux ouvrages, réalisés à la manière de livres d’artistes, mais aussi de petits formats à emmener partout pour rêver, imaginer, sourire, s’étonner, s’amuser, avoir envie de créer…* (Valérie Bonenfant)

Chaque livre de la collection « Les contes de Valérie Bonenfant » est particulier, porteur d’une esthétique qui lui est propre, empreint des idées et de la personnalité de l’illustrateur.

Les enfants, en symbiose avec le rêve et la réalité ont la possibilité de fusionner leur imaginaire avec celui de l’auteur grâce à des ouvrages brefs, bien ventilés, vraiment bien écrits. Enfin les textes sont magnifiquement mis en valeur par des illustrateurs de talents. Je crois que les petits apprécieront ces petits contes couvrant tous les aspects de la vie.

Suggestion de lecture : LES CONTES DES 1001 NUITS

Je suis née le jour de Noël 1965 et j’habite dans le sud de la France. Mariée et mère de trois enfants, j’écris des histoires depuis l’âge de 6 ans. Enfant, je rêvais de devenir écrivain, mais mes études m’ont finalement poussée vers les sciences. En 1988, j’ai obtenu un diplôme d’ingénieur spécialisé dans l’énergie et l’environnement. Dans la vie professionnelle, je suis responsable de projets liés à l’innovation urbaine.

Passionnée d’art, je fréquente les galeries d’expositions et je peins la vie à travers la réalisation de portraits de personnes. Je suis aussi très proche de la nature auprès de laquelle je vais me ressourcer très souvent. En 2003, j’ai décidé de renouer avec mon enfance, et de retrouver mon univers de rêves, de poésie et de tendresse. Écrire des contes, c’est pour moi quelque chose de spontané.

Des feuilles blanches, un stylo et j’écris ce qui se présente, librement, sans jugement ni contrainte. Le résultat est souvent étonnant pour moi, mais c’est une expérience toujours très agréable, une vraie impression de liberté, une parenthèse volée dans un quotidien par ailleurs bien rempli. (Site internet de l’auteure) à visiter absolument)

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 7 novembre 2021

LA DISPARUE DE LA CABINE No 10, Ruth Ware

*<T’as bonne mine Blacklock> a fait Ben en se
tournant vers moi. Il m’a jeté un coup d’œil qui
m’a donné envie de lui flanquer un coup de
genou dans les couilles mais cette saleté de
robe était trop étroite. *
(Extrait : LA DISPARUE DE LA CABINE N0 10, Ruth
Ware, édition originale : 12-21, 2018. 407 pages
 Version audio : Lizzie éditeur, 2018, narratrice :
Alice Taurand. Durée d’écoute : 10 heures 42 min.)

Une semaine à bord d’un yacht luxueux, à sillonner les eaux de Grand Nord avec seulement une poignée de passagers. Pour Laura Blacklock, journaliste pour un magazine de voyage, difficile de rêver d’une meilleure occasion de s’éloigner au plus vite de la capitale anglaise. D’ailleurs, le départ tient toutes ses promesses : le ciel est clair, la mer est calme et les invités très sélects de l’Aurora rivalisent de jovialité.  Mais dès le premier soir, le vent tourne.

Laura, réveillée en pleine nuit, voit la passagère de la cabine adjacente être passée par-dessus bord. Le problème ? Aucun voyageur, aucun membre de l’équipage ne manque à l’appel. L’Aurora poursuit sa route comme si de rien n’était. Le drame ? Laura est témoin d’un meurtre dont l’auteur se trouve toujours à bord…

MORT PAR-DESSUS BORD
*Prenant mon courage à deux mains, j’ai ouvert brusquement
la porte. Le bruit de l’eau emplissait L’espace confiné. J’ai
cherché l’interrupteur à tâtons… la lumière a inondé la pièce.
Et c’est là que je l’ai vu. En travers du miroir couvert de buée.
En lettres d’une vingtaine de centimètres de haut, on avait
écrit les mots ARRÊTE DE FOUINER. *
(Extrait)


LA DISPARUE DE LA CABINE no 10 raconte l’histoire de Laura Blacklock, journaliste spécialisée dans le tourisme et les voyages. Une jeune femme est sensiblement perturbée par son passé, trouble d’anxiété et de panique, un peu portée vers l’alcool et consomme des antidépresseurs. Au début, comble de malchance, elle est cambriolée.

La peur l’étreint, elle se rend chez son ami Judah Lewis. Elle entre, il n’est pas là. Elle se prépare à se calmer quand quelqu’un entre. Accès de panique, elle l’agresse et le blesse : C’est Judah.

Après ces évènements, elle saute sur un évènement qui lui changera peut-être les idées : couvrir le voyage inaugural d’un luxueux paquebot : L’aurora Boréalis, un paquebot de croisière grand luxe dans les fjords norvégiens… j’avais eu la chance de récupérer l’une des rares invitations de presse pour son voyage inaugural…* (Extrait) Laura, appelée affectueusement Lau s’embarque donc mais verra basculer sa vie complètement.

Une nuit, même si Lau est imbibée d’alcool, elle se réveille brusquement, tente te comprendre ce qui l’a réveillé. Serait-ce un hurlement? *C’était la porte de la véranda de la cabine voisine qui s’ouvrait doucement. J’ai retenu mon souffle, tendu l’oreille et il y a eu un <plouf>…pas un petit <plouf> non ! Un énorme plouf. *

(Extrait) Si Lo en était resté là, elle aurait fait le voyage le plus agréable qui soit. Mais elle était journaliste quoi…irrésistiblement poussée par la curiosité d’autant que le <plouf> qu’elle a entendu est le genre de <plouf> d’un corps quand il tombe à l’eau…

Convaincue qu’il y a eu meurtre, Lau devient obnubilée par la cabine no 10. Son enquête commence plutôt mal quand on lui apprend le lendemain que personne ne manque à bord. Elle n’en croit rien surtout après la découverte d’un graffiti sur le miroir de sa salle de bain : *ARRÊTE DE FOUINER* . Ainsi commence pour Laura, une descente aux enfers.

J’ai été intéressé mais loin d’être passionné par ce huis-clos qui repose sur une idée qui m’a semblé sous exploitée.  D’abord dans un huis-clos, il n’y a jamais beaucoup d’acteurs.

L’auteur peut en profiter à loisir pour développer la psychologie des personnages, travailler leur rôle et créer l’interaction, un peu comme Agatha Christie l’a fait pour LES DIX PETITS NÈGRES. C’est une des faiblesses majeures de LA DISPARUE DE LA CABINE NO 10. Il y a très peu d’interaction et par extension, pas d’action.

J’avais l’impression qu’il ne se passait rien sur ce bateau à part les mondanités qui deviennent vite lassantes. J’aurais cru que les efforts désespérés pour aller au bout de la vérité m’auraient gardé en haleine, mais non, le rythme était trop lent. C’est un thriller assez bien ficelé basé sur la crédibilité questionnable du principal personnage. Il y a une certaine originalité. Mails il y a beaucoup d’irritants.

L’histoire commence par le cambriolage chez Lau. Pas grand-chose avec l’histoire qui est, je dois dire, longue à démarrer. L’intrigue est classique et un peu prévisible. L’auteure accuse un peu d’errance dans son récit la plume est redondante.

Les pauses dans l’histoire, pour permettre l’échange de e mails est une bonne idée je crois, qui humanise un peu le tout et insuffle un caractère dramatique qui manque au texte. J’ai trouvé la finale longue et alambiquée.

J’ai été satisfait de la performance narrative d’Alice Taurant pour le registre vocal précis attribué à Laura Bradlock et qui transmet avec habileté au lecteur tout le brassage d’émotions intérieures qui caractérise la jeune journaliste.

Pour conclure je dirai que ce n’est pas un roman qui soulève les montagnes mais c’est quand même une bonne lecture. En ce qui me concerne, j’ai trouvé la version audio assez immersive.

Suggestion de lecture : LE MYSTÈRE DE LA CHAMBRE JAUNE, de Gaston Leroux

Ruth Ware est née en 1977 à Sussex et vit aujourd’hui à Londres. Après des études d’anglais à l’université de Manchester, elle a enseigné cette matière à Paris. Elle a notamment travaillé en tant que libraire et attachée de presse d’un grand éditeur anglais, avant de passer à l’écriture. Après son premier thriller PROMENEZ-VOUS DANS LES BOIS PENDANT … QUE VOUS ÊTES ENCORE EN VIE (Fleuve Editions, 2016 ; Pocket, 2017) – traduit dans plus de quarante langues – elle revient en force avec LA DISPARUE DE LA CABINE No 10.

Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert

le dimanche 7 novembre 2021

 

LE VILLAGE, audio, la série de KARL OLSBERG

*Myrta et Magolus escortent Primo
dans l’église. Ce dernier jette un regard
à son ami qui rentre avec ses parents
dans la maison du bibliothécaire. Il lève
le bras en guise d’adieu.*
(Extrait : LE VILLAGE, saison 1, Karl Olsbergh,
production omnisonore par Audible Original,
2018. Durée d’écoute : 8 heures 26 minutes)

Dans un monde de cubes se trouve « Le Village ». Alors que les habitants mènent une vie simple et bien réglée, le jeune Primo est insatisfait. Il veut explorer le monde et vivre l’aventure. Lorsqu’un mystérieux étranger en armure scintillante apparaît, il décide de le suivre, entraînant son meilleur ami Kolle avec lui – mais « vivre l’aventure » n’est pas sans danger…  Cette création omnisonore Audible Original, pour les enfants de 8 ans et plus, est tirée des quatre premiers volumes de la série de livres du même nom de Karl Olsberg.

Narrateurs : Siphano, Frigiel, Sylvain Agaësse, Bénédicte Charton, Flora Breunier, Marie Chevalot

L’univers Minecraft
L’œuf que Primo a rapporté du désert est plus
dangereux qu’il ne le pense et pourrait bien
faire s’abattre le malheur sur le petit village au
bord de la gorge…mais ça…c’est une autre
histoire
(Extrait)

Quand j’écoute un livre audio destiné aux jeunes, je demande à l’auteur et aux comédiens de me ramener au groupe d’âge visé. Je leur formule toujours les mêmes souhaits : rajeunissez-moi, surprenez-moi, faites-moi frissonner, acceptez-moi dans votre monde. Je le dis haut et fort : MISSION ACCOMPLIE. J’ai été subjugué par la beauté des textes, la chaleur et la candeur des personnages et j’ai adoré la musique, parfaitement ajustée à chaque circonstance.

En plus de vivre des émotions, j’ai ri…j’ai beaucoup apprécié l’humour des personnages. Primo est particulièrement attachant : il est généreux, doux de nature, volontaire, épris de liberté et curieux. *Tu veux savoir d’où sortent les créatures nocturnes au crépuscule et où elles disparaissent au lever du soleil…tu te demandes pourquoi le monde est constitué de cubes ? J’ai raison ? Oui !* (Extrait)

Nous voici donc dans un monde de cube, un petit village tranquille protégé par Notch qui en fait le même dieu que celui des catholiques. Ça m’a arraché des sourires dans plusieurs passages, par exemple au moment où Primo récite par cœur le livre sacré gardé jalousement par le prêtre Lagolus qui se magnifie dans son ignorance.

La genèse est particulièrement intéressante : *Au commencement, Notch créa le cube, et Notch vit que le cube était bien. Il fit alors d’autres cubes et avec ses cubes il créa le ciel et la terre…mais les cubes sur terre était tous identiques et celle-ci était plate et morne…Alors Notch dit :-Il doit y avoir différents cubes…des cubes en pierre, en terre et en sable, ainsi que de feu et d’eau. La pierre, la terre et le sable doivent engendrer des vallées et des montagnes…Notch dit que ce qu’il avait fait était bien et se reposa…* (Extrait) sans oublier que Primo connait par cœur le *NOTRE NOTCH QUI ES AU CIEUX ».

Donc tout est cubique dans ce monde où personne ne sait ce que c’est qu’une sphère. La vie s’écoule paisible, mais Primeau aimerait de l’action, vivre des aventures. Il en aura l’occasion avec l’arrivée d’un étranger qu’il décide de suivre. Le village est en danger…d’horribles créatures rôdent. Primo et les aventuriers qu’il entraîne deviendront-ils des héros ? C’est ainsi que nos amis sèmeront des actions d’éclats mais vivront aussi des moments dramatiques au cours des huit épisodes du livre 1.

J’ai trouvé cette oeuvre extrêmement bien travaillée et imaginée rendue par une extraordinaire équipe de comédiens et de narrateurs qui livrent une excellente prestation mise en valeur par des effets sonores efficaces et la musique qui est parfois grandiose. Cette performance m’a procuré ce que je cherche dans un livre audio : de bienfaisantes petites palpitations, des frissons et surtout des élans d’empathie. Mission accomplie.

Chapeau à l’équipe pour ce petit bijou. J’ai envie de dire aux parents que vous ne trouverez pas mieux comme moyen d’intéresser et d’initier les jeunes lecteurs de 8 ans et plus à la lecture en leur proposant un tel livre audio.

Je recommande chaleureusement ce livre audio pour les jeunes car il en émerge un goût d’apprendre, de vivre quelque chose de différent mais dans un décor passablement connu des jeunes amateurs de jeux vidéo, je parle bien sûr de l’univers Minecraft. Il y a quelque chose d’initiatique et d’immersif dans cette œuvre.

Je ne note qu’une seule faiblesse : les épisodes sont trop longs. Il est en effet difficile de garder l’attention d’un pré-ado pendant une heure. Dans le cas d’un livre en tout cas. Mais c’est un problème qui se surmonte aisément avec les signets. Donc en général LE VILLAGE fut pour moi une très belle expérience d’écoute.

Je vous invite à faire l’écoute du livre 2, aussi passionnant. Un petit survol rapide : Primeau, encore une fois trouve la vie au village trop paisible. Il aspire à l’aventure et l’action et ça va venir car la jalousie entre les chefs des deux villages va provoquer une rivalité qui va engendrer une multitude de péripéties. Et, apparemment, une vengeance se prépare. À suivre…

Suggestion de lecture : YUL ET SA CLIQUE, une bd de Julien Mariole

Karl Olsberg est né en 1960. Après un doctorat sur les applications de l’intelligence artificielle, il a dirigé une chaîne de télévision puis une agence multimédia. Son premier thriller traduit en français, Das System (Jacqueline Chambon, 2009), a rencontré un franc succès auprès du public.

Minecraft est le célèbre jeu vidéo à construction complètement libre créé par le suédois Markus Persson. Le jeu plonge le joueur dans un monde créé dynamiquement, composé de blocs (des cubes) représentant différents matériaux et formant diverses structures,  animaux ou monstres.

Le joueur peut modifier ce monde à volonté en y ajoutant ou supprimant des blocs et en tentant de survivre le plus longtemps possible lui permettant ainsi de bâtir des constructions avec une grande liberté, rappelant ainsi les jeux de création Lego.

Julien Morana (à gauche) pseudo : Siphano, un des plus célèbres youtubeurs français Alexandre Israël pseudo : Frigiel est un vidéaste français connu pour ses vidéos publiés sur YouTube dont Minecraft et let’s play. Frigiel est l’un des joueurs les plus connus de la communauté française de Minecraft. Siphano et Frigiel sont les voix des deux héros du village Primo et Kolle.

Bonne écoute
Claude Lambert
Le samedi 30 octobre 2021

L’OUTSIDER, le livre de STEPHEN KING

*Il y avait un banc en pierre au milieu. Couvert de
sang, partout, même dessous. Le corps était
allongé à coté, dans l’herbe. Le pauvre garçon. Il
avait la tête tournée vers moi, les yeux ouverts.
Mais il n’avait plus de gorge…*
(Extrait : L’OUTSIDER, Stephen King, Albin Michel
éditeur, 2019, édition de papier, 570 pages)

Le corps martyrisé d’un garçon de onze ans est retrouvé dans le parc de Flint City. Témoins et empreintes digitales désignent aussitôt le coupable : Terry Maitland, l’un des habitants les plus respectés de la ville, entraîneur de l’équipe locale de baseball, professeur d’anglais, marié et père de deux fillettes.

Et les résultats des analyses ADN ne laissent aucune place au doute. Pourtant, malgré l’évidence, Terry Maitland affirme qu’il est innocent.

Et si c’était vrai ?

Pas trop de *Ça*
*<Terry>, dit Ralph. Il voyait la sueur de son front
goutter sur le visage du coach et se mêler au
sang qui coulait de sa plaie au crâne. <Vous
allez mourir Terry. Vous m’entendez ? Il ne vous
a pas loupé. Vous allez mourir.>*
(Extrait)

On dirait que le Maître de l’épouvante et du suspense n’a pas livré sa marchandise habituelle. L’Outsider est loin d’être le meilleur livre de King à mon avis. Il relève plus du roman policier que de l’histoire d’épouvante. Je ne partage pas l’avis de certaines critiques qui comparent l’Outsider à *ÇA* l’œuvre la plus aboutie de King dans laquelle on n’entend jamais parler des policiers. C’est le surnaturel qui nous enveloppe dans l’histoire.

Si l’outsider n’est pas le meilleur de King, il n’en demeure pas moins un thriller intéressant qui a capté mon attention. Je mentionne au passage qu’OUTSIDER est un terme anglais utilisé pour désigner <celui qui est en dehors.> Par extension, celui qui est en dehors de la normalité. Le terme peut désigner par exemple celui qui a perdu son humanité. Le titre de l’histoire est ce qui crée le lien entre l’enquête et son petit côté surnaturel inavoué par les policiers évidemment. Voyons voir l’histoire car King frappe fort dès le départ.

Terry Maidland, citoyen modèle, bon père de famille et entraîneur bénévole de l’équipe locale de baseball, est arrêté par la police de façon spectaculaire devant la foule réunie au stade. Terry est formellement accusé d’avoir violé, mutilé et assassiné le petit Frank Peterson, 11 ans. Pour des raisons qui déstabilisent sensiblement les policiers, Terry Maidland sera assassiné quelques minutes avant sa comparution devant le juge au Palais de justice.

En cours d’enquête, l’inspecteur Ralph Anderson s’aperçoit très vite que quelque chose cloche. En effet les empreintes ADN confirment que le tueur aurait été à deux places en même temps séparées par une distance trop importante pour se déplacer. L’ubiquité étant une chose impossible…il y a quelque chose de pas naturel et c’est là qu’intervient Holy Gibney une enquêteuse spéciale qui a l’esprit très ouvert et qui émet l’hypothèse de l’outsider, une entité mystérieuse capable de prendre le contrôle d’un corps et le transformer.

L’objectif et le fil conducteur de l’histoire tiennent sur l’enquête policière et la capacité des enquêteurs à composer avec un phénomène qu’ils ne comprennent pas d’une part et d’autre part la question qui est de savoir si on pourra réhabiliter la mémoire de Terry Maidland…

L’aspect surnaturel du récit est développé avec beaucoup de retenue. Malgré les passages où je reconnais moins le style de King, je dois admettre que l’enquête policière a quelque chose d’addictif, que l’intrigue est habilement menée. Le fait que les enquêteurs admettent avec une évidente difficulté, l’hypothèse du paranormal, une possibilité dérangeante, un mur sur lequel généralement, les enquêteurs se cassent le nez.

Mais qu’est-ce qu’on doit faire quand toutes les explications plausibles et les hypothèses raisonnables ont été épuisées. C’est une bonne histoire mais ce n’est pas ce à quoi m’a habitué King : je n’ai pas senti l’épouvante, les rebondissements s’enchaînent parfois mais l’auteur garde le cap sur l’enquête même si le dernier quart du récit sombre beaucoup plus dans l’obscur et l’étrange.

On avance dans le paranormal avec des armes à feu…ça fait bizarre et c’est inhabituel chez Stephen King. Malgré tout, je trouve sain que l’auteur essaie quelque chose de différent. Je n’ai pas pu m’accrocher à ses personnages sauf à Holly, audacieuse et perspicace.

On ne peut pas vraiment comparer l’OUTSIDER avec ÇA, sauf peut-être à la fin alors que Holy cherche un troglodyte, mais c’est sans commune mesure avec l’oppressante intensité de *ÇA*. Pour résumer, je m’attendais à un drame d’épouvante mais j’ai eu plutôt droit à un simple roman policier où l’irrationnel prend péniblement la relève du pragmatisme.

J’ai été juste un peu surpris du changement de style. C’est pas un chef d’œuvre mais ça se lit bien et j’ai aimé. Je note autour de 75%.

SUGGESTION DE LECTURE : pour ceux et celles qui veulent s’ajuster à la critique et fare la comparaison, je vous invite à lire mon commentaire sur ÇA, de Stephen King

Stephen King a écrit plus de 50 romans, autant de best-sellers, et plus de 200 nouvelles. Couronné de nombreux prix littéraires, il est devenu un mythe vivant de la littérature américaine (médaille de la National Book Foundation en 2003 pour sa contribution aux lettres américaines, Grand Master Award en 2007 pour l’ensemble de son oeuvre). En février 2018, il a reçu un PEN award d’honneur pour service rendu à la littérature et pour son engagement pour la liberté d’expression. Pour tout savoir sur Stephen King, cliquez ici.

BONNE LECTURE
Claude Lambert
Le dimanche 24 octobre 2021

 

UNE FORÊT OBSCURE, le livre de FABIO M. MITCHELLI

<Louise Beaulieu, tome 1>

*…le poids qui s’écrase sur le métal souple de la carrosserie… un froissement de tôle Emma fut projetée à quelques dizaines de mètres…son corps s’immobilisa…stoppée par le tronc d’un cèdre… La forêt de Tongas, immuable, venait une fois encore d’engloutir la vie d’un enfant de Juneau. * (Extrait : UNE FORËT OBSCURE, Fabio M. Mitchelli, à l’origine : Pocket éditeur 2017, 408 pages, version audio : Audible studios éditeur, 2017, durée d’écoute : 10 heures 34 minutes. Narratrice : Christine Bellier)

À Montréal, Luka diffuse sur le Web les images des animaux qu’il torture, puis celles de son amant qu’il assassine à coups de pic à glace. Pour enquêter sur une telle affaire, il faut un flic borderline comme Louise Beaulieu.

En Alaska, dans la petite ville de Juneau, deux jeunes filles sont découvertes en état de choc. Pour comprendre, il faut un flic comme Carrie Callan, qui va exhumer les vieux secrets et regarder le passé en face.

Le point commun à ces deux affaires : Daniel Singleton, un tueur en série. Du fond de sa cellule, il élabore le piège qui va pousser Louise à aller plus loin, toujours plus loin… Jusqu’à la forêt de Tongass, là où le mensonge corrode tout, là où les pistes que suivent les deux enquêtrices vont se rejoindre.

LA NOIRCEUR QUI TIENT EN HALEINE
*A présent il ne pouvait plus contenir le poison qui lui infectait le sang,
 ce venin qui incendiait et ravageait ses chairs, ses entrailles. Il lui fallait
s’ouvrir en deux et se dégorger de ce pus immonde qui coulait en lui,
vomir de trop-plein de rage et de honte qu’il aurait tant aimé cracher à la
gueule du monde avant de sombrer. *
 
  (Extrait)

Bien que cette histoire soit une fiction, elle est amplement et librement inspirée par l’actualité judiciaire. Ici, un petit rappel des faits s’impose. L’auteur débute d’ailleurs son livre par une petite synthèse des évènements.

Le roman s’appuie sur des faits divers qui se sont réellement déroulés à Montréal et à Anchorage en Alaska. Certaines scènes évoquent aussi des évènements liés à la catastrophe écologique causée par l’Exon Valdez en 1989.

L’ouvrage s’inspire également de l’escalade criminelle de Luka Rocco Magnotta et du meurtre prémédité qu’il a commis en 2012 sur la personne de Lin Jun, un jeune étudiant chinois installé au Canada ainsi que des crimes de Robert Christian Hansen qui a violé et assassiné entre 17 et 21 femmes dans les environs d’Anchorage entre 1971 et 1983.

Donc les auditeurs et auditrices devront jongler entre la réalité et la fiction. Peut-être même cette histoire leur imposera une certaine recherche pour faire la différence. Personnellement, j’ai trouvé le défi plutôt emballant.

C’est un roman très noir et très librement inspiré de l’œuvre de deux grands criminels. Tous les acteurs du récit un subi un ou plusieurs traumatismes dont quelques-uns liés au naufrage de l’EXXON VALDEZ, le célèbre pétrolier américain qui s’est échoué en 1989 sur la Côte de l’Alaska, provoquant une colossale marée noire.

Une chaîne d’évènements amènera deux enquêtrices : Carrie Callan, une américaine en poste à Juneau, Alaska et Louise Beaulieu du Service de Police de la Ville de Montréal (SPVM) à collaborer sur deux affaires qui n’ont rien d’évident en commun au début en tout cas : la découverte de deux jeunes filles en état de panique à Juneau et un homme assassiné à coup de pic à glace par son amant à Montréal.

Le reste est une affaire de police qui va de découverte en découverte à un rythme très élevé et qui paralyse en quelque sorte les auditeurs/auditrices : torture, meurtres, pédophilie, séquestration, prostitution. Il n’y a pas de limites pour les esprits tordus et comme l’auteur a puisé sans retenue dans les faits divers, il n’a pu éviter une certaine crudité dans le langage.

Les auditeurs/auditrices vont peut-être s’attacher, comme moi aux enquêtrices, en particulier Louise Beaulieu du SPVM, une caractérielle accro au poker et qui jure comme une charretière mais qui est dotée d’un remarquable instinct et qui traîne elle aussi de dures épreuves de la vie. Ici, j’en profite pour dire que j’ai beaucoup apprécié la narration de Christine Bellier.

J’ai trouvé remarquable sa façon de passer au français dit standard à l’accent québécois pure laine incluant une façon très crue de descendre les saints du ciel. Pour ce qui est de raconter, madame Bellier a un registre vocal qui force l’attention. Elle m’a donné l’impression de s’adresser à moi.

Pour écouter ou lire cette histoire, il faut être ajusté à l’actualité jusqu’à un certain point parce qu’on sait ce qui va arriver. Ce qui est beaucoup moins évident, ce sont les motivations des tueurs.

Le récit est empreint d’une analyse des mobiles qui nous tient prisonnier de la trame et ça pousse au questionnement : est-ce suffisant d’évoquer la maladie mentale ou les traumatismes subis dans l’enfance. Y a-t-il autre chose? Personne ne peut rester indifférent à un tel récit d’autant qu’il a été plus vécu que fantasmé.

Donc pour résumer, c’est un roman fort, très noir, très violent, certains passages sont difficiles. La finale est un peu obscure. Excellente narration. Beaucoup de québécois trouveront la couleur locale divertissante dans un contexte aussi sombre. Ensemble détaillé, rythme élevé…pas de temps morts et pas tellement conçu pour les âmes sensibles. Seule petite faiblesse, le lien de l’histoire avec l’Exon Valdez est un peu mince, sous-développé. Sinon, c’est un ouvrage fascinant.

Suggestion de lecture : INTIMIDATION, de Harlan Coben

Fabio M.Mitchelli, est un musicien et écrivain né à Vienne (Isère) en 1973, auteur de thrillers psychologiques inspirés de faits réels. Il a signé « La trilogie des verticales » parue aux éditions Ex-aequo entre 2010 et 2012, dont La verticale du fou, le premier opus de ce singulier triptyque, a été classé dans le top 3 des romans les plus téléchargés sur le territoire français en 2011 aux côtés de David Foenkinos. Mitchelli se consacre désormais à l’écriture de true crime et thrillers psychologiques. « La compassion du diable », paru aux éditions Fleur Sauvage en octobre 2014 a reçu le Prix du polar Dora-Suarez 2015.

Christine Bellier est une actrice canadienne. Notamment active dans le doublage, elle a été entre autres la voix québécoise de Drew Barrymore, Tara Reid, Reese Witherspoon, Charlize Theron, Piper Perabo, Shannon Elizabeth et Kate Winslet lors de son activité au Québec. Elle aime aussi à l’occasion, jouer le rôle de narratrice.

Aussi à écouter :
le 2e tome de la série Louise Beaulieu

Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert
Le samedi 23 octobre 2021

TERRES DE SANG ET DE LUMIÈRE, JOCELYNE GODARD

TOME 1 
L’APPEL AU DÉPART

*Pour apaiser les conflits, Urbain II se mit à prêcher une croisade en Terre Sainte…En 1095, il organisa un concile… appelant les foules venues d’Italie, d’Espagne, d’Angleterre et de France. Au cœur de l’été 1096, une fièvre délirante secoua le peuple et ce fût le départ de la première croisade.*

(Extrait : TERRES DE SANG ET DE LUMIÈRE, tome 1 L’APPEL AU DÉPART, Jocelyne Godard, format numérique, Éditions du 38, 2019. 1675 Kb, 190 pages pour l’édition imprimée)

En l’an 1096, la jeune franque Mahaut de Saint-Victor se prépare à quitter le château familial en Picardie pour accompagner ses oncles et son frère qui vont délivrer Jérusalem, à la demande du pape Urbain II, ainsi qu’il le prêche aux futurs croisés lors de l’immense rassemblement qu’il a convoqué devant l’abbaye de Clermont en Auvergne. <illustration ci-haut, appel à la croisade d’Urbain II, détails ici>

Cette première croisade, celle « Des Chevaliers », sera le plus exécrable des voyages jamais vécus à cette époque, d’autant plus que leurs familles, femmes et enfants participeront à l’expédition. Il faut préparer les convois, chariots, chevaux et bœufs, puis la nourriture, les bâches, les couvertures, les armes, les casques et les cottes de maille.

Tous ceux qui reviendront de Jérusalem délivrée de la main des impies seront pardonnés de tous leurs péchés. C’est ce que prêche le pape. L’ Église est ferme : il faut se libérer de la menace turque qui pèse en Palestine et tuer les hérétiques.

Dotée de sa foi chrétienne, Mahaut part avec sa famille pour rejoindre le gigantesque rassemblement à Clermont d’où partira la croisade, menée par Godefroy de Bouillon, en direction de l’Orient.

Une grande saga médiévale en 8 tomes, qui se poursuit avec le tome 2, Violent Danube.

Du sang pour Jérusalem
*Les émotions étaient communicatives, les sensibilités
à fleur de peau, les craintes amplifiées, les esprits
échauffés et la haine envers les Infidèles augurait un
dénouement aussi barbare qu’inattendu. Urbain II
cherchait le moyen de répondre à ces angoisses qui
ne présageaient rien de bon.
*
(Extrait)

Dans une série de 8 tomes, Jocelyne Godard nous entraîne dans des temps agités, début du deuxième millénaire, dans la première croisade d’abord prêchée par le pape Urbain II dans les campagnes de France afin de lever une gigantesque armée pour délivrer Jérusalem des Infidèles, des Musulmans, et d’y assurer une domination chrétienne.

Jocelyne Godard s’appuie sur une réalité historique en commençant par l’appel à la Croisade d’Urbain II garantissant la rémission des péchés des futurs morts.

Je dis ça en passant mais c’est une comédie crasse jouée par l’église pendant des siècles. Il suffisait de dire *c’est la volonté de Dieu * pour faire des milliers de morts. C’est très personnel mais je crois que dans l’histoire du monde et des religions, rien n’a été plus mal interprété que la volonté de Dieu. Mais bon…passons.

Disons que ce livre m’a fait réagir car il a exacerbé certaines émotions. Son ton est juste et son portrait de la mentalité de l’époque et des réalités religieuses est documenté et crédible. Voyons comment Jocelyne Godard imbrique la fiction dans la réalité.

Le récit est peuplé de personnages authentiques mais le personnage principal est fictif. Il s’agit de Mahaut de Saint-Victor, une jeune franque qui s’apprête à quitter le château familial en Picardie pour se rendre à l’immense rassemblement convoqué par Urbain II devant l’abbaye de Clermont en Auvergne. La première croisade est décidée avec une mission précise : libérer Jérusalem et tuer les hérétiques.

C’était, pour ceux qui y tenaient, la volonté de Dieu. Cette croisade allait être dirigée par le prestigieux Godefroy de Bouillon, personnage authentique, héritier du Royaume de France et descendant de Charlemagne.

Cette quête qui est aussi le fil conducteur, est de décrire avec précision tous les préparatifs de ce voyage rapporté par l’histoire comme étant infernal : le recrutement, l’approvisionnement, le financement, le transport, la logistique, les préparatifs militaires, l’armement et la création de la chaîne de commandement.

À travers tous ses préparatifs expliqués en détail, l’auteure s’attarde sur la vie sentimentale de Mahaut à qui on a promit la main de Jean de Villedieu, un chevalier qu’elle ne connait pas, qu’elle n’a jamais vu. Bref on lui a dit que c’est un bon garçon. Ils vont se marier ça s’arrête là. C’était la mentalité de l’époque. Mais Mahaut qui a 16 ans, a un caractère bien trempé. Il y a, disons un froid en vue, peut-être même de la glace.

Enfin, dans cet appel au départ, l’auteure exploite de façon exhaustive non seulement les préparatifs de la 1ère croisade mais aussi les émotions, les craintes et les peurs qu’elle suscite et elles sont de taille car les turcs et les sarrasins sont des guerriers féroces et impitoyables.

Ils avaient raison d’avoir peur car la croisade a fait plus de 120,000 morts sur le champ de bataille. Et dire que sept autres croisades vont suivre. Je sais pas mais il me semble qu’il y a quelqu’un quelque part qui n’a rien compris mais tous connaissait la puissance de ces trois mots : DIEU LE VEUT.

J’ai été séduit par la plume de Jocelyne Godard. C’est une belle écriture toute en nuance. Elle a développé un sujet qui n’est pas facile sans artifice ou exagération. Ses personnages ont été travaillés, en particulier Mahaut qui sera spécialement appréciée par le lectorat féminin. Elle est attachante et authentique.

Je me suis rapidement identifié à elle à cause entre autres, de son questionnement sur la logique de l’Église : *Décidément, Mahaut ne saisissait plus les mots du Pontife. Pourquoi poussait-il autant les pèlerins à donner leur vie… en échange de leur rédemption ? Tout à l’heure, il se désespérait devant les chrétiens massacrés par les turcs, à présent, il s’enthousiasmait devant ceux qui périrait pour le Christ…*  (Extrait)

Naïveté ou plus sûrement un questionnement sur l’utilité d’autant de morts. Jamais en 2000 ans le problème de Jérusalem, centre de toutes les fois du monde, n’a été réglé.

La fluidité de la plume fait en sorte que le temps passe vite. La lecture est facile et agréable et le souci du détail historique est intéressant. Internet regorge de sites qui parlent des croisades. Mais il sera particulièrement intéressant de suivre la saga TERRES DE SANG ET DE LUMIÈRES ne serait-ce que pour voir comment évoluera Mahaut. Très belle lecture en vue.

Suggestion de lecture : LA RELIGION, de Tim Willocks



Née dans la Sarthe, Jocelyne Godard a longtemps vécu à Paris. Les sagas et biographies romancées qu’elle a publiées au fil du temps ont toujours donné la priorité à l’Histoire et aux femmes célèbres des siècles passés.  L’Égypte ancienne et le Japon médiéval l’ont fortement influencée. Puis elle s’est tournée vers l’époque carolingienne, le Moyen-Âge et la Renaissance.

Plus récemment, elle a mis en scène, avec l’éclairage qui leur revient, une longue saga sur l’investissement des femmes durant la Grande Guerre. 

Puis elle s’est tournée vers le journalisme d’entreprise auquel elle a consacré sa carrière tout en écrivant ses romans. Depuis son jeune âge, l’écriture a toujours tenu une grande place dans son quotidien. Un choix qui se poursuit.

La suite

BONNE LECTURE
CLAUDE LAMBERT
le dimanche 17 octobre 2021

A COMME APOCALYPSE de PRESTON et CHILD

VERSION AUDIO

*L’explosion qui avait suivi avait coupé le tanker
en deux et provoqué son naufrage. Les raisons
même de l’explosion n’avaient jamais pu être
établies clairement. Les ingénieurs d’EES
pensaient toutefois que la déflagration était le
résultat d’une réaction entre la météorite et l’eau
de mer.*

(Extrait : A COMME APOCALYPSE, Preston & Child,
version audio : Audible studio éditeur, 2018, durée
d’écoute : 10 heures 37 minutes. Narrateur : Alexandre
Donders.)

Il y a cinq ans, Eli Glinn avait participé à une expédition pour convoyer une météorite géante tombée sur un îlot du Cap Horn. Mais le navire qui la transportait avait sombré en mer, et la météorite avec. Seulement, Glinn avait eu le temps de découvrir que la météorite d’origine extraterrestre était en fait une sorte de graine, qui depuis a germé pour donner naissance à un arbre gigantesque. Et sa croissance est loin d’être terminée : elle constitue une vraie menace pour la planète. Aussi Glinn confie à Gideon Crew la mission de détruire coute que coute ce baobab géant. 

Une mission de Gideon Crew
*Vous avez raison de parler de mutinerie. Nous n’avons
pas le choix. Il ne s’agit pas de nous mutiner pour sauver
nos peaux mais de sauver la peau de tous ceux qui
n’ont pas encore été infectés. *
(Extrait)

Cinq ans avant les évènements décrits dans A COMME APOCALYPSE, une expédition tente de convoyer une météorite géante de 25 000 tonnes, tombée dans la périphérie du Cap Horn. L’entreprise colossale est vouée à l’échec. Le navire sombre et la météorite avec. On devait en rester là mais Preston et Child ont reçu un fort volumineux courrier pour leur demander de conclure cette histoire qui manquait effectivement d’aboutissement.

C’est ainsi qu’est né A COMME APOCALYPSE et dans ce volet final, la tension sera forte par moment car on a découvert que la météorite couvait une graine qui a fini par produire dans les profondeurs de la mer un arbre qui rappelle le baobab à cause de l’épaisseur de son tronc et l’aspect tentaculaire de ses branches.

Les politiques et les scientifiques décident que cette créature qui est intelligente et vorace est un danger pour l’humanité et qu’il faut la détruire. Pour se faire, on fait appel à Gideon Crew, personnage récurrent dans l’œuvre de Preston et Child, toujours aussi attachant et brillant d’autant qu’on ne lui demandera rien de moins qu’un miracle.

C’est bien écrit et c’est plein de bonnes idées qui nous font un peu oublier que le sujet en général est réchauffé : des extraterrestres qui s’emparent de l’esprit des humains dans un but de domination ou d’anéantissement c’est monnaie courante en littérature, amplifié au cinéma par des films comme INDEPENDANCE DAY. La procédure est toutefois différente dans A COMME APOCALYPSE. Il y a des trouvailles intéressantes.

La pression fait plonger l’auditeur et l’auditrice avec les sauveteurs de l’humanit. Les auteurs frappent fort dès le départ et le suspense monte rapidement jusqu’à une descente aux enfers alors qu’on s’aperçoit qu’aucun contrôle n’est possible sur cette créature.

Des vers se sont échappés de quelques branches du baobab et ont été ramenés à bord pour analyse. Je ne parlerai pas des ravages engendrés par ces créatures diaboliques. Toutefois, on sent ici le *déjà vu*. Ceux qui ont vu le film PROJET CLOVERFIELD savent ce que je veux dire.

En résumé, le sujet est élimé mais bien travaillé. La trempe des personnages fait la différence. Le livre n’échappe pas à une tendance agaçante : des longueurs générées par de nombreuses explications scientifiques, heureusement pas trop longues dans ce cas-ci mais qui nuisent parfois à l’intrigue.

À partir de l’épisode de la mutinerie, le récit accuse de l’errance et quelques incohérences. Tout est expliqué dans l’épilogue mais c’est rapide et pas très fouillé. J’ai été un peu déçu par la finale. Mais en général, le suspense est bien entretenu, les personnages sont bien travaillés et remplissent bien leur espace. Les habitués de Preston et Child ne seront pas déçus de la performance de Gideon Crew.

L’écriture est habile quoiqu’elle rappelle davantage un scénario de film. Enfin, hommage au narrateur de la version audio qui, malgré les petites faiblesses de l’histoire m’a fait sentir acteur du drame. A COMME APOCALYPSE est finalement un très bon divertissement.

Comme vous l’avez vu, cette œuvre peut s’écouter indépendamment, mais pour le plaisir de participer à l’œuvre entière et de cheminer avec Gideon Crew et d’autres personnages comme Eli Glinn, toujours aussi suffisant, je vous recommande d’écouter ou de lire d’abord ICE LIMITE de Preston et Child <voir critique> et de voir comment tout a commencé.

Suggestion de lecture : L’APOCALYPSE N’EST PAS POUR DEMAIN, de Bruno Tertrais

Douglas Preston (À gauche) est né en 1957, Il est l’auteur de plusieurs romans dans les genres de l’horreur et du techno-thriller. Il a travaillé plusieurs années au « Museum d’Histoire Naturelle » américain avant de se consacrer à l’écriture en équipe avec son meilleur ami, Lincoln Child, déjà auteur de plusieurs anthologies d’horreur.

Lincoln Child est né le13 octobre 1957 à Westport, dans le Connecticut. En 1987, il devient analyste chez MetLife. C’est là qu’il fera une rencontre décisive avec Douglas Preston, commence peu après une fructueuse collaboration dans l’écriture de techno-thrillers. Ensemble, ils créeront les séries Pendergast et Gideon Crew.

À lire ou écouter aussi

BONNE LECTURE
BONNE ÉCOUTE
Claude Lambert
Le samedi 16 octobre 2021

ALICE AU PAYS DES TROP VIEILLES, Cristina Alonzo

*Oui, évidemment, que j’écris un livre…Un livre sur mon enfance, passage difficile. ou sur mon adolescence, étape difficile. Ou sur ma dépression, moment difficile. Ou sur mes dix années de psychanalyse, tunnel difficile.* (Extrait : ALICE AU PAYS DES TROP VIEILLES, Cristina Alonzo, Éditions Albin Michel, 2010 224 pages. Format numérique, 220 pages)

Alice est journaliste. Elle a un mari, des amies de « bons » conseils, deux enfants adolescents, elle ment sur son âge (même son passeport est faux), se fait mettre au placard parce que son boss la trouve « trop vieille », s’interroge sur le botox et la chirurgie et cherche la bagarre…Alice grandit, vieillit, enrage et s’apaise. Un livre à l’usage des femmes qui ne sont pas vieilles et ont quelques réserves sur l’idée de le devenir.

 

Journal de ma quarantaine fracassante
C’est pas un peu gênant de prendre le petit
déjeuner avec le mec de sa fille ? –J’ai résolu
le problème, je leur apporte au lit, comme ça
pas besoin de boire mon café en face de deux
autistes.
(Extrait)

C’est l’analogie avec le pays des Merveilles qui m’a attiré vers ce livre. C’est tout de même très différent pour ne pas dire paradoxal car le livre de Cristina Alonzo développe le thème du vieillissement chez la femme. Notez que le phénomène est traité avec un peu de philosophie et beaucoup d’humour.

L’auteure traite des conséquences et des corollaires du vieillissement, un mot qui a été largement galvaudé et qui pourrait être interprété par l’expression *prolongement de la jeunesse*, un euphémisme gentil qui dévoile  les petits bobos liés disons au deuxième âge chez les femmes, les mères en particulier. : Apparition de rides, papillotes, apparition de cheveux blancs, prise de poids, petits problèmes de dos…

*Alors que vos parents devenaient grands-parents entre 45 et 55 ans, vous êtes de « vieux » parents d’ados grognons qui ne sont pas près de quitter la maison, devenue sans que vous vous en rendiez compte un Bed and Breakfast. La situation vous convient. (Aucune envie de prendre un coup de vieux supplémentaire en les voyant partir.)

Mais parfois, elle vous horripile. Ces ados sont des carpes, et lorsqu’ils vous adressent la parole, c’est pour demander à boire, manger, sortir, ou acheter. Il n’y a pas trente-six solutions : Acceptez le fait que vous êtes une vieille maman et agissez en conséquence en cessant d’être leur pote. * (Extrait)

Le livre est développé un peu comme un journal. Pour chaque chapitre, il y a une petite pensée au début, une liste de choses à faire avec au moins une bizarrerie dans chacune, le développement lié toujours à *l’avancement en âge*, des techniques pour s’en sortir honorablement et un récapitulatif du sujet traité. Ce n’est pas un livre qui va révolutionner le genre mais il est divertissant.

C’est une lecture légère qui évoque la tolérance et l’acceptation et met en perspective la différence qui existe entre *vieillir* et être vieux…*Entre l’âge que j’ai, celui que je fais, celui qu’on me donne et celui que j’ai l’impression d’avoir, il y a comme un bug…* (Extrait) Morale de l’histoire, il vaut beaucoup mieux accepter l’âge qu’on a et s’en moquer. C’est sans doute là qu’on commence à rayonner. Personne ne prétend que c’est facile.

Donc c’est un livre amusant écrit par une femme pour les femmes. Les gars eux, vont peut-être se reconnaître un brin. Le lectorat masculin pourrait en rigoler et qui sait, peut-être y réfléchir…peut-être… J’ai l’impression que l’auteure s’est fait plaisir et ne s’est pas prise trop au sérieux et l’idée d’orienter son livre vers le journal intime est une bonne idée je crois.

Les filles pourront sans doute se reconnaître à quelques égards ou en tout. L’idée est d’en rigoler, surtout si vous avez dépassé la quarantaine. Si vous approchez de la quarantaine, vous pourriez frémir un peu mais le mot d’ordre est toujours le même : mieux vaut en rire.

La plume est légère, fluide, empreinte d’une philosophie de supermarché qui est basée quand même sur une idée de départ qui nous place devant une certaine réalité : Alice est virée de son poste parce qu’au final, elle est trop vieille. L’âge est-il si important eu égard aux performances. Des questions intéressantes sont posées et Alice est parfois touchante. Un bon petit livre léger, amusant et rapide à lire.

Suggestion de lecture : L’ÉLÉGANCE DU HÉRISSON, de Muriel Barbery

Cristina Alonso est une journaliste et romancière française
C’est au « Journal du dimanche » qu’elle s’affirme, puis, en créant le magazine « Elle à Paris« .
Elle écrit son premier roman, « Alice au pays des trop vieilles », paru aux Éditions Albin Michel en 2010, un roman bien accueilli par la presse et le public.
Après le succès de son premier livre, elle publie « Alice et le prince barbant » (2011), sa chronique décapante de la vie d’une quadra au bord de la crise de rire !.

Lecture suggérée

 

BONNE LECTURE
CLAUDE LAMBERT
le vendredi 15 octobre 2021

17 nouvelles enquêtes de Sherlock Holmes…

ET DU DOCTEUR WATSON
version audio

Commentaire sur les récits d’
ARTHUR CONAN DOYLE

*Et voici pourquoi un grand scandale menaçait le royaume
de Bohême et comment les plans de Sherlock Holmes furent
déjoués par une femme. Il avait l’habitude d’ironiser sur la
rouerie féminine. Depuis ce jour, il évite de le faire.*
(Extrait : 17 NOUVELLES ENQUÊTES d’après Arthur Conan
Doyle, éditeur : Compagnie du savoir, 2018, durée d’écoute :
17 heures 12 minutes.  Narrateur : Nicolas Planchais)

Les  titres :
Un scandale en Bohême,
La disparition de Lady Frances Carfax,
La ligue des rouquins,
Le rituel des Musgrave,
Le pouce de l’ingénieur,
Flamme d’argent,
Le gentilhomme célibataire,
Le diadème de béryls,
La bande mouchetée,
Une affaire d’identité,
Les Hêtres d’or,
L’escarboucle bleue
L’aventure du pied du diable,

L’aventure du cercle rouge,
Les cinq pépins orange,
Le mystère de la vallée de Boscombes,
L’homme à la lèvre tordue.

UNE PETITE PARTIE DU CANON
*J’ai en effet quelques raisons de croire que
toutes sortes de bruits ont couru un peu
partout concernant la mort du docteur
Grimesby Roylotte tendant à rendre cette
affaire un peu plus terrible que la vérité.*

Sherlock Holmes est une des plus grandes figures de la culture populaire et son seul nom est synonyme de mystère policier, de brouillard londonien et d’énigmes. Devenu très rapidement un véritable mythe, avant même la sortie de sa soixantième et dernière aventure, Sherlock Holmes demeure un héros de fiction créé par Arthur Conan Doyle.

Mais pour le plus grand nombre, c’est un homme « qui a vraiment existé », dont les enquêtes sont rapportées par son ami, le docteur Watson. Les exploits de Sherlock Holmes ont été traduits dans le monde entier, ils ont été adaptés de multiples fois au théâtre, à la télévision, en BD et au cinéma.

Ce fut un plaisir pour moi de renouer avec le grand Sherlock Holmes impliqué cette fois dans 17 nouvelle enquêtes colligées et racontées par le biographe de Holmes, le célèbre docteur Watson. Je reviens souvent sur ces grands classiques de l’investigation comme je le fais par exemple avec Agatha Christie.

ENTENDRE 17 récits d’enquête du célèbre détective fut pour moi une très belle expérience pour plusieurs raisons : d’abord l’aura très particulière qui se dégage de Holmes, son caractère, sa personnalité.

Dans l’ensemble de l’œuvre de Conan-Doyle, Holmes est constant : doté d’une mémoire extraordinaire, d’un calme olympien, majestueux, guindé, très british, sûr de lui. Plusieurs de ces attributs ont contribué à mettre quelque peu dans l’ombre de célèbres limiers de la littérature comme le chevalier Auguste Dupin d’Edgar Allan Poe par exemple.

L’influence de Sherlock Holmes sur la littérature policière moderne est évidente même si le personnage représente, pour moi en tout cas, l’antithèse du détective moderne. Je note par exemple, que dans les enquêtes de Holmes, il n’y a à peu près aucune mention des états d’âmes du détective alors que les auteurs modernes ne se privent pas pour les étaler.

Une autre raison qui m’a fait apprécier 17 NOUVELLES ENQUÊTES est l’excellente performance du narrateur Nicolas Planchais. Il accorde à chaque personnage un registre vocal très précis, en plus de s’ajuster aux autres personnages en leur donnant une signature suffisamment distincte pour être efficace.

Il a aussi magnifiquement relevé le défi avec les personnages féminins. De plus, Nicolas Planchais a poussé son harmonique vocale jusqu’à faire ressortir les personnalités de Holmes et Watson et certains attributs peu signalés dans les critiques en général comme le snobisme par exemple et dans le cas de Holmes, une estime de soi un peu hors-norme.

Étrangement, cette qualité du narrateur a fait ressortir, ce qui serait pour moi une des rares faiblesses de l’œuvre: par la vitesse et la qualité de ses déductions, Holmes fait parfois paraître Watson sensiblement insignifiant. Ce n’est qu’une apparence mais il en résulte que j’ai peu d’empathie pour Holmes et beaucoup pour le bon docteur.

J’ai donc beaucoup aimé mon expérience audio. Nous avons ici 17 récits variés, un mélange hétéroclite de genres. Chaque récit débute par un soupçon de philosophie *Holmsienne* avant d’introduire le cas d’enquête.

Ce recueil est à l’image de l’œuvre de Conan-Doyle. Son héros planche d’abord sur la résolution d’énigmes avant la résolution d’un crime, ce qui donne des raisonnements souvent complexes et profonds. Près de 135 ans après sa création, Sherlock Holmes demeure une légende, un monstre sacré de la littérature à l’échèle planétaire. Cette œuvre audio est un enchantement.

Suggestion de lecture, du même auteur : LE CHIEN DES BASKERVILLE

Arthur Ignatius Conan Doyle (22 mai 1859-7 juillet 1930) est un écrivain écossais, célèbre pour ses romans mettant en scène le détective Sherlock Holmes. Cet écrivain prolifique a également travaillé dans le domaine de la science-fiction, des romans historiques, des pièces de théâtre et de la poésie. C’est en 1887 qu’apparaissent sur la scène littéraire britannique le détective londonien et son ami et assistant le docteur Watson.

L’engagement politique de Conan Doyle, notamment en faveur de la guerre en Afrique du Sud, ainsi que son titanesque travail littéraire (plus de cinquante livres et un nombre impressionnant de nouvelles), lui valent d’être proclamé chevalier en 1902: il devient alors « Sir » Arthur Conan Doyle. Sir Arthur Conan Doyle meurt d’une crise cardiaque le 7 juillet 1930, riche et célèbre.

Comédien, Nicolas Planchais tourne régulièrement au cinéma et à la télévision. Il aime particulièrement travailler avec sa voix qu’il prête à de nombreux documentaires et, plus récemment, à des livres audios.



Peter Cushing et André Morel comptent parmi les plus célèbres interprètes de Sherlock Holmes et du docteur Watson.

Bonne écoute
Claude Lambert
Le dimanche 3 octobre 2021