La prophétie de Glendower

Commentaire sur le livre 1 de la série
LE CYCLE DU CORBEAU

de MAGGIE STIEFVATER

*Il n’y a que deux raisons pour lesquelles un esprit peut t’apparaître, Blue. Tu dois être soit l’amour de sa vie, soit la cause de sa mort. *

Extrait : LE CYCLE DU CORBEAU, tome 1, LA PROPHÉTIE DE GLENDOWER, de Maggie Stiefvater, Pour les formats papier et numérique : Teen spirit éditeur. Nombre de page respectivement, 472 et 352 pages.

Chaque année, Blue Sargent accompagne sa mère clairvoyante observer les esprits des futurs morts. Des esprits que Blue ne peut voir… Du moins, elle ne le pouvait pas, jusqu’à ce qu’un jeune homme lui apparaisse et s’adresse directement à elle. Il s’appelle Gansey et Blue découvre vite qu’il est étudiant à Aglionby, l’école privée locale. Or, elle a pour principe de ne pas s’approcher des jeunes hommes de l’académie ; plus connus sous le nom de « Corbeaux » , ils ne causent que des ennuis. Pourtant, Blue est irrésistiblement attirée par Gansey.

Du plus loin que remontent ses souvenirs, Blue a toujours su qu’elle causerait la mort de l’amour de sa vie. Elle n’avait pourtant jamais cru que ce serait un problème. Maintenant que sa vie se retrouve intrinsèquement liée au monde sinistre des Corbeaux, elle n’en est plus aussi certaine.

 Le premier esprit de Blue

Dans cette histoire à caractère fantastique, on suit Blue Sargent, une adolescente issue d’une famille de clairvoyantes, qui ne possède aucun don… sauf celui d’amplifier les pouvoirs des autres. Chaque année, elle accompagne sa mère pour observer les esprits des futurs morts. Mais cette fois, elle voit un esprit elle-même — celui de Gansey, un étudiant d’Aglionby, l’école privée locale. Cela ne peut signifier que deux choses : soit il est l’amour de sa vie, soit elle causera sa mort.

Gansey, lui, est obsédé par la légende du roi gallois Glendower, qu’il croit endormi quelque part en Virginie, et dont il espère obtenir un vœu. Il est accompagné de ses trois amis : Adam, le boursier déterminé ; Ronan, le rebelle tourmenté ; et Noah, le discret observateur. Ensemble, ils se lancent dans une quête ésotérique où les lignes entre le réel et le magique deviennent floues.

Ce roman est apprécié pour son atmosphère envoûtante, ses personnages profonds et son écriture poétique. Mais j’ai trouvé cette quête surnaturelle un peu longue sans trop d’action. Malgré tout, elle pose les bases d’une série riche sinon en rebondissements, au moins en émotions car si LE CYCLE DU CORBEAU est sur fond de surnaturel, c’est d’abord une histoire d’amour.

Il n’y a pas vraiment d’action. Le rythme est lent. Quoique bien travaillés, les personnages manquent de direction et le fil conducteur est difficile à saisir. Il est vrai que je ne suis pas un inconditionnel de la littérature sentimentale, mais je dois admettre que l’écriture de Stiefvater est d’une extraordinaire beauté.

Malgré tout, je n’ai pas accroché. Le roman privilégiant l’atmosphère, l’intrigue est trop stagnante et met une éternité à se pointer le bout du nez. C’est lent. Un peu plus d’action aurait avantagé le rythme. Je suppose que ça va bouger dans les tomes suivants. Il n’est pas dit que je n’y reviendrai pas car les adolescents de l’histoire sont sympathiques et attachants.

Suggestion de lecture : tout comme les tortues, de Marie-Christine Chartier


L’autrice Maggie Stiefvater

Pour explorer la série LE CYCLE DU CORBEAU, cliquez ici

Bonne lecture
Claude Lambert

le dimanche 27 juillet 2025

Le gène Atlantis

Commentaire sur le livre de 
A.G. Riddle

<Pour Karl, la scène qui se déroulait devant lui, pratiquement au ralenti, avait quelque chose d’irréel. Il se sentit s’élancer vers Steve, tandis qu’il détachait une corde d’un mousqueton à sa taille pour la lui lancer. Steve l’attrapa à la seconde même où un craquement sinistre emplissait l’air. Sous ses pieds, la glace se rompit, tandis que s’ouvrait un gouffre sans fond.>

Extrait : LE GÈNE ATLANTIS, tome 1 de la trilogie, A.G. Riddle, Bragelonne éditeur pour la présente traduction, format numérique, 1316 pages.

En Antarctique, des chercheurs ont mis au jour, enfouie dans la glace, une mystérieuse structure vieille de plusieurs milliers d’années. À l’intérieur, l’équipe fait une découverte qui va radicalement changer l’histoire de l’homme — mais qui pourrait également déclencher son extinction… parallèlement, Kate Warner, une scientifique est venue s’installer à Jakarta, en Indonésie, pour fuir son passé.

Son acharnement l’a menée à une avancée fondamentale : un traitement pour l’autisme. Or l’aboutissement de ses travaux va s’avérer infiniment plus dangereux que ce qu’elle pouvait imaginer… Le jour où deux enfants sont enlevés dans sa clinique, Kate est entraînée malgré elle dans un complot mondial aux conséquences imprévisibles.

Intéressant mélange de genres

C’est effectivement un mélange de genres : Science-fiction, suspense, espionnage, mythologie dont l’Atlantide et beaucoup de sciences : archéologie, évolution, anthropologie, génétique, ufologie et j’en passe, le tout sur fond de menaces apocalyptiques.

C’est très réchauffé comme histoire. Intéressant mais ordinaire. Le fil conducteur est instable et rend l’histoire pas facile à lire par moment à cause entre autres d’une impressionnante galeries de personnages plus ou moins aboutis.

Ce qui a stimulé mon intérêt tient sur deux facteurs : premièrement, au moment où je lisais ce livre, le Canada était dans la sixième vague de la pandémie dite du COVID 19 qui a fait des millions de morts dans le monde. Or l’apocalypse annoncée dans l’histoire est une pandémie, celle-ci déclenchée volontairement par ce qu’on appelle *le protocole de Toba* qui contient un fond de vérité historique  (en parlant du célèbre volcan) :

*Quel que soit ce <protocole de Toba>, je crois que son objectif final est de réduire la population humaine dans des proportions radicales. * (Extrait) Ce fameux protocole qui a des racines eugéniques suppose que : *…les enfants souffrant d’autisme pouvaient représenter une menace. Qu’ils étaient la prochaine étape de l’évolution humaine. *

Le deuxième facteur est une certaine somme de trouvailles dispersées dans l’ouvrage. Par exemple, une théorie assez singulière sur la grippe espagnole qui a fait de 50 à 100 millions de morts dans le monde entre 1918 et 1921. Autre exemple, une théorie visant à conforter l’hypothèse que l’Atlantide ait vraiment existé et que les Atlantes sont en dormance.

Un dernier exemple : une hypothèse élaborée sur la théorie du complot à l’origine des évènements du 11 septembre 2001. C’est sans compter l’évocation d’une distorsion temporelle, de la lance du destin, du grand déluge et j’en passe. Intéressant mais étourdissant. C’est un peu tiré par les cheveux.

C’est quand même intéressant à lire. L’écriture est fluide, les chapitres sont courts. L’ensemble est bien ventilé, il y a de bonnes idées et il est clair pour moi que l’auteur s’est bien documenté.

Je dirai simplement qu’il en a trop mis…trop de théories, trop de science, trop de personnages, une imagination débordante mais pas suffisamment canalisée. J’ai relativement aimé mais sans trop d’étincelles.

Suggestion de lecture : LA CITÉ ENSEVELIE, audio, collectif d’auteurs


L’auteur A.G.Riddle

 

LA SUITE

 

Bonne lecture
Claude Lambert

Le samedi 26 juillet 2025

 

PARALLÈLE-NEW YORK, bd

de Laval Ng et Philippe Pelaez

« Calmez-vous, Munoz. Ce n’est pas le moment de s’énerver.
– Je ne m’énerve pas, je panique. Mais où on est ?!
– A ton avis ?
– Je connais New York, et ça, c’est pas New York !! »

Extrait : PARALLÈLE, livre 1, NEW YORK, bande dessinée de Laval Ng et Philippe Pelaez, sandawe éditeur, 2016.


Extrait de la bande dessiné PARALLÈLE, tome 1
illustrateur : Ng Laval, scénariste : Philippe Pelaez

 

En 2082, un vaisseau minier s’écrase sur une planète au climat glaciaire, peuplée de créatures inhospitalières. Alors qu’ils sont en contact radio avec la présidence des Etats-Unis, les membres de l’équipage s’aperçoivent qu’ils sont bloqués dans un univers parallèle et que les monstres qu’ils affrontent ne sont autres que leurs doubles.

 

 

Monde parallèle en BD

PARALLÈLE est une série de bandes dessinées apocalyptiques qui serait suivie logiquement d’une autre série intitulée AFTER. C’était à l’état de projet au moment d’écrire cet article. Le sujet n’est pas original comme tel. Les histoires apocalyptiques et post apocalyptiques abondent en littérature même si elles sont plus rares en BD.

J’y ai trouvé toutefois de très bonnes idées comme les deux terres jumelles antagonistes qui sont des mondes parallèles avec action parallèle. Des idées comme celle-ci rendent la série enlevante et intrigante. D’ailleurs, l’intrigue se dévoile très graduellement et amène le lecteur de découverte en découverte en provoquant à l’occasion quelques frissons.

La présentation est très belle. J’ai été subjugué par le graphisme avec le bleu dominant et une foule de teintes réalisées par Daniel Florent. Les dessins de Laval Ng sont parfaitement ajustés avec le scénario de Philippe Pelaez et rendent crédibles les créatures antagonistes qui nous amènent aux côtés noirs de l’être humain.

L’aspect scientifique est assez facile à suivre et nous familiarise entre autres avec les effets des impulsions électro-magnétiques entre autres et aussi, le récit n’est pas sans nous faire réfléchir sur les effets irréversibles d’une guerre totale.

Cette BD est une découverte pour moi. Ça m’a plu. Un plus dans l’univers de la littérature-jeunesse. Sa technique narrative m’a accroché autant que les dessins. Une excellente BD immersive à souhait.


Ng Laval , illustrateur (à gauche) et le scénariste Philippe Pelaez

LA SUITE

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 20 juillet 2025

 

Ta deuxième vie commence…

Quand tu comprends que tu
n’en a qu’une

Commentaire sur le livre de
RAPHAËLLE GIORDANO
illustré par Sophie Ruffieux

Un routinologue et hop!

Après la lecture de LE JOUR OÙ LES LIONS MANGERONT DE LA SALADE VERTE, il n’était pas du tout dans mes plans de lire un autre livre de Raphaëlle Giordano. Mais j’ai été attiré par le format bande dessinée de son livre TA DEUXIÈME VIE COMMENCE QUAND TU COMPRENDS QUE TU N’EN AS QU’UNE.

Ce titre ne m’a pas vraiment impressionné. Il est long et ne veut pas dire grand-chose. J’ai toute fois été impressionné par sa qualité graphique, les belles illustrations de Sophie Ruffieux qui donne de la vie à un texte platonique.

Dans le premier livre que j’ai lu de Giordano, il était question de <burnerie>.
Le livre d’aujourd’hui développe comme sujet principal, unique devrais-je dire, la <routinologie>. Pour décrire ce néologisme, une autre trouvaille de l’auteure, je vous propose cet extrait :

<Notre méthode de routinologie puise ses sources dans les enseignements de divers courants de pensée philosophique, spirituels et même scientifiques à travers le monde…un condensé de ce que les hommes ont pensé de mieux pour évoluer en bien. Nous partirons du principe que ce n’est pas entre les murs d’un cabinet que la personne qui désire changer trouvera sa vérité, ni qu’elle comprendra quel sens donner à sa vie. Nous privilégions donc l’action, le concret et l’expérience.> Extrait

C’est le genre de discours ennuyant qui m’a toujours fait fuir les ouvrages dont le thème central est le développement de la personnalité car c’est de ça qu’il s’agit ici. Ça ne signifie pas que le message transmis est mauvais. Loin de là. L’idée de base est même bienveillante.

Mais dans ce genre de livre, on peut prendre des éléments pour soi et en laisser aux autres. C’est très vendeur, à la limite moralisateur mais ça ne m’a pas vraiment convaincu.

Quant à l’histoire, elle est simpliste, sans profondeur et frôle parfois le ridicule. Pas de rebondissements, pas d’action sinon la chronique d’une mère de famille en mal de routinologie au milieu de sa famille. Bref ce livre est un cours de routinologie.

Cependant, ça vaut la peine de lire le livre pour la finale que j’ai trouvée inattendue, originale, savoureuse… une finale qui n’est pas sans rappeler le très beau film de Mimi Leder sorti en 2 000 : PAYEZ AU SUIVANT

Enfin, sur le plan visuel, la bande dessinée est très attrayante et a quelque chose d’apaisant, peut-être à cause des couleurs aux tendances pastel. Les très belles illustrations rendent les personnages attachants et donnent du corps à l’ensemble. Un très beau travail de Sophie Ruffieux qui m’a procuré, malgré tout, du plaisir à lire ce livre.


L’auteure Raphaëlle Giordano                        Sophie Ruffieux, illustratrice

Bonne lecture
Claude Lambert
le samedi 19 juillet 2025

 

L’enfant des livres

Commentaire sur le livre de
FRANÇOIS FOLL

< La souffrance physique est un puissant anesthésique de la souffrance morale. En revanche, dès qu’elle s’estompe, l’autre revient au galop. Ce fut le cas pour Martin qui sentit monter en lui un mascaret d’idées sombres. La semi-hébétude dans laquelle il se trouvait fut soudain balayée par un flot d’amertume. Il prit clairement conscience de la situation.

Sans appui, sans aide à attendre de qui que ce fût, elle était désespérée. Certes, il avait tenu bon. L’implacable tourmenteur dont il ne comprenait pas l’acharnement n’avait pas réussi à lui faire avouer ce qu’il n’avait pas commis, la syncope provoquée par la douleur l’avait peut-être sauvé d’un délire incontrôlable. Avec l’aide de Dieu, il avait vaincu les méchants, prouvé sa bonne foi. >

Extrait : L’ENFANT DES LIVRES, François Foll, Nouveau Monde édition pour le format numérique, 2009, 504 pages. Point éditeur 2011 pour le format papier de 576 pages.

 

Les livres qui affranchissent

C’est un tout premier roman pour François Foll et je dois dire qu’il débute sa carrière sur des chapeaux de roues. Je ne m’attendais pas du tout à un tel déploiement de talent et d’imagination. Ce livre, magnifiquement documenté m’a touché et m’a fait vibrer…une de mes plus belles lectures. Avec ce livre entre les mains, le temps s’est arrêté.

On suit un jeune garçon attachant doté d’une nature généreuse, avide de connaissances mais malheureusement écrasé par les préceptes absurdes et débilitants de la religion. Mal aimé et maltraité, Martin a 10 ans au début de l’histoire. Son destin sera d’être pris en charge par un colporteur appelé à devenir un grand Chevaler : Raymond Puységur.

Martin évoluera avec son père adoptif, dans un monde fragilisé par d’interminables guerres de religion, cruelles et meurtrières opposant les catholiques aux calvinistes. À travers toutes ses tribulations, Martin connaîtra l’amour et aura recours à un abri moral de premier ordre : les livres.

J’ai dévoré et adoré ce livre et il y a tellement de raisons que je me permets ici d’emprunter un style télégraphique :

-Les personnages sont attachants, vivants, vigoureux et travaillés. J’ai développé une exceptionnelle empathie pour Martin et j’ai été fasciné par le caractère bien trempé de Puységur. Tous les personnages ont quelque chose d’authentique.

-Un élément important qui a retenu mon attention est l’omniprésence des livres. Bien que guerrier et habile au maniement de l’épée, Martin grandira dans les livres et vieillira dans les livres. J’ai vu dans ce récit de Foll un vibrant plaidoyer sur le pouvoir des livres.

-Non seulement l’auteur parle du contenu des livres mais en explique la fabrication du contenant. Il détaille comment, au XVIe siècle, on fabriquait un livre à travers le quotidien des maîtres imprimeurs: la fabrication des pages, la reliure, l’assemblage…comment on pouvait faire d’un livre, une véritable œuvre d’art. Foll est rentré dans les détails. Sa recherche est impressionnante et ça m’a captivé.

J’ai appris et compris plusieurs aspects des guerres de religion. Entre autres, Foll fait évoluer son personnage principal à travers les évènements qui conduiront un massacre de la Saint-Barthélemy en 1572, un innommable gâchis qui a fait plus de 3000 morts dans la seule ville de Paris et plus de 10 000 en France. Il y a dans ce livre une effrayante vision de ce carnage.

L’auteur met en perspective l’absurdité du fanatisme, de l’extrémisme, de l’intransigeance religieuse, de l’ultra orthodoxie. L’ENFANT DES LIVRE est un véritable plaidoyer en faveur de la tolérance, ce qui n’était pas pour me déplaire. Je suis curieux de voir ce que Voltaire en aurait dit.

La plume est fine, parfois très directe. L’écriture est belle, d’une grande richesse et l’auteur, fait appel pour ses dialogues au français d’un autre temps : *Cornedieu ! Je conjecturai bien l’issue de ce massacre ! Des bas de poil ! Des couards ! Des parjures incapables de faire une braverie pour transformer ce royaume acéphale ! Et puis celle-là. (Il fixa l’épouse de l’apothicaire). Voyez comme elle s’est pimplochée ! D’épouse exemplaire, la voilà transformée en caillette ! N’a-t-elle pas appris que l’excès de fard et la superfluité du vêtement sont le lot des femmes perdues ? * (Extrait) Savoureux …authentique.

François Foll m’a livré, avec L’ENFANT DES LIVRES sa vision du pouvoir des livres et des vertus de la connaissance. Je recommande chaleureusement cette perle littéraire, un des meilleurs romans historiques que j’ai lus.

Suggestion de lecture : LA SCRIBE, d’Antonio Garrido

 


Ingénieur retraité et passionné d’histoire, Français Foll est membre très actif de l’association Lire et Faire lire. Il a eu l’idée d’écrire L’Enfant des livres, son premier roman, après un an de lecture aux enfants des écoles, pour témoigner de l’importance du livre, de son rôle vital dans l’éducation, mais aussi du danger de son utilisation à des fins partisanes.

 

 

BONNE LECTURE
CLAUDE LAMBERT

AURORA, Kim Stanley Robinson

J’ai l’impression que le paradoxe de Fermi a trouvé sa réponse : quand la vie devient assez intelligente pour quitter sa planète, elle est aussi devenue trop intelligente pour s’en aller. Parce qu’elle sait que cela ne marchera pas. Donc, elle reste chez elle. Elle profite de son monde. <Extrait : AURORA de Kim Stanley Robinson, à l’origine, publié chez Orbit éditeur en 2015. Papier, 480 pages. Version numérique, Bragelone édditeur, 2019>

Un vaisseau générationnel emmène 2 000 passagers, à une vitesse de 30 000 km/s, vers Tau Ceti, une étoile située à 11,9 années-lumière de la Terre. Le voyage prend presque deux cents ans au cours desquels six générations de passagers se succèdent à bord.

Les passagers originaires de différents pays de la Terre s’installent dans les écosystèmes correspondants, mais peuvent voyager d’un biome à l’autre ; la plupart d’entre eux mènent des activités techniques ou agricoles visant à assurer les besoins alimentaires et en oxygène des passagers. L’équilibre biologique est fragile et nécessite un suivi permanent.

Un vieux rêve

AURORA est une variation d’un thème largement répandu en littérature : la recherche d’une exoplanète viable sur laquelle des humains, fuyant une terre souffrante veulent repartir à zéro. Notez qu’AURORA est le nom de la planète visée. Le vaisseau comme tel n’a pas de nom. On l’appelle vaisseau tout simplement, personnifié par une intelligence artificielle de très haut niveau.

L’histoire commence 160 années après le départ de l’énorme vaisseau : *-Une centaine de kilomètres carrés…C’est une île de bonne taille. Avec vingt-quatre biomes semi-autonomes. Une arche, un véritable vaisseau-monde* (Extrait) Au cœur du récit se trouvent toutes les problématiques qui n’on pas été envisagées par les concepteurs du vaisseau, mettant tout le monde en péril.

Ces problématiques étaient nombreuses et complexes : accumulation d’éléments indésirables, déficit alimentaire, déséquilibre biologique, défaillances mécaniques, vieillissement des matériaux, prolifération de micro-organismes, et j’en passe. Tous ces problèmes entraînent des décisions menant à l’agitation sociale. *Le nombre de ces gens qui protestaient augmenta tant que les groupes rebelles ou retournés à l’état sauvage devinrent un phénomène fréquent. * (Extrait)

*Au début de l’an 68, les troubles se convertirent en ce qui ressemblait beaucoup à une guerre civile qui atteignit un point culminant durant une semaine, pendant laquelle cent cinquante personnes trouvèrent la mort. * (Extrait) Je vous laisse découvrir ce qui attend les voyageurs sur Aurora. Sachez toutefois qu’il n’y aura rien de simple.


Dessin du vaisseau Aurora tel qu’imaginé par Kim Stanley Robinson

C’est une grande saga qui n’est pas sans rappeler LE PAPILLON DES ÉTOILES de Bernard Werber. Je la trouve toutefois supérieure car elle est loin de se limiter à la sauvagerie humaine et sur la question de savoir si les hommes peuvent être autre chose que des hommes.

C’est un roman très indigeste sur le plan scientifique. Les explications sont longues, complexes et pas très vulgarisées. Je pense entre autres à ce jeu du chat et de la souris que le vaisseau entreprend entre les planètes de notre système solaire et le soleil afin d’opérer sur le vaisseau une décélération. Ce seul sujet occupe plus d’une centaine de pages dont je me questionne encore sur l’utilité.

En revanche, le récit est fort bien conçu sur les plans humain, social et philosophique. Entre autres, l’auteur émet un postulat selon lequel *La vie est une manifestation planétaire qui ne peut survivre que sur son monde d’origine. *   (Extrait) Intéressant…très intéressant même si ça remet en question le vieux rêve très humain de recommencer à zéro sur une exoplanète.

Il y a beaucoup de trouvailles et d’idées originales dans ce récit. Je pense entre autres à l’intelligence artificielle du vaisseau, appelée à protéger les voyageurs contre eux-mêmes. Ou encore à la sécession du vaisseau, plausible puisqu’il est modulaire. Brillant. L’aspect *suspense* est bien développé. L’histoire est empreinte de gigantisme et aussi de beauté qui porte à faire rêver. Le récit est aussi dynamique.

Il y a bien sûr des irritants. Les longueurs et la lourdeur dont j’ai parlé plus haut, une finale bizarre, un peu frustrante, les voyageurs qui ont préféré rester sur Aurora sont occultés, et les personnages qui sont superficiels…disons pas très bien travaillés. Je recommande ce livre pour son originalité, ses bonnes idées et la réflexion qu’il induit sur la nature humaine.

L’auteur Kim Stanley Robinson

Bonne lecture
Claude Lambert
le dimanche 29 juin 2025

Les étoiles de Noss Head

Commentaire sur le livre de
SOPHIE JOMAIN

*Je les distinguais à peine dans la nuit et sous la pluie battante, mais je savais que ce qui allait suivre serait d’une violence inouïe. Ils se tenaient debout, face à face, prêts à s’affronter. Pour moi. Dans un dernier effort, je parvins à me redresser et à m’adosser contre le mur. Je ne les quittais pas des yeux et retenais ma respiration. Quelque chose était en train de se passer. *

(Extrait : LES ÉTOILES DE NOSS HEAD, tome 1, VERTIGE, de Sophie Jomain. Version audio : Audible studios éditeur, 2020, durée d’écoute : 9 heures 24 minutes, narratrice : Mélina Sia. Édition de papier : Jailu éditeur, 2014, 352 pages.)

Hannah, bientôt dix-huit ans, était loin d’imaginer que sa vie prendrait un tel tournant. Ses vacances tant redoutées à Wick vont finalement se transformer en véritable conte de fée… puis en cauchemar. Sa petite vie tranquille, ses idées bien arrêtées, ses projets… tout va changer, brutalement. Elle devra affronter l’inimaginable, faire face à ce qu’elle n’aurait jamais pensé croire un jour, car les légendes n’en sont pas toujours…Leith ne s’attendait pas non plus à Hannah. Il tombe de haut, l’Esprit a choisi : c’est elle, son âme sœur. Pourra-t-il lui cacher sa vraie nature encore longtemps ? Osera-t-il lui avouer qu’il n’est pas tout à fait humain ? Il n’a pas le choix, leur rencontre l’a mise en danger. Lui seul peut lui venir en aide.

Ça rappelle quelque chose

Bel effort de Sophie Jomain pour dépoussiérer un genre déjà très usé en littérature. Pourtant son livre me rappelle étrangement l’œuvre de Stephenie Meyer FASCINATION, mieux connue sous le titre de TWILIGHT qui a fait le tour du monde et qui a été adulée pour des raisons que je m’explique plutôt mal. Même atmosphère, même machisme et la jeune héroïne, banale jusqu’à l’insignifiance, pure et innocente devant l’amour et béate dans les bras protecteurs de son amoureux garou.

Il y a quand même une différence fondamentale. Dans Vertige, il n’y a pas de vampire. C’est une histoire entre loups garous seulement avec, au milieu une humaine un peu perdue dans la généalogie, la biologie et la culture lycanthrope.


Donc l’histoire est simple. Hannah est au bord de ses 18 ans. Sa vie va basculer quand elle va rencontrer un beau jeune homme appelé Leith. Mais l’adonis n’est pas tout à fait humain et il devra bien l’avouer à Hannah tôt ou tard. S’annonce ainsi une liaison problématique qui bousculera les familles et mettra Hannah devant un danger potentiel.


Le malheur de cette œuvre est qu’elle est dans l’ombre d’une autre saga qui a captivé des millions de lecteurs et de téléspectateurs et certaines similitudes sont simplement navrantes. Je pense entre autres à l’immaturité des personnages et à l’image projetée de la jeune fille faible, fragile et innocente.


Il y a quand même des éléments intéressants dans cette histoire. Le contexte mythologique par exemple qui est documenté et intéressant. L’auteure donne beaucoup de détails sur les loups-garous : leur histoire, leur culture familiale, leur tradition cruelle et la subdivision de leur race, certaines familles étant beaucoup plus agressives que d’autres.


Autre élément digne de mention je crois. J’ai écouté la version audio de ce livre et ça change beaucoup de choses si je la compare à la version papier. Ça ma gardé dans le coup comme on dit, Mélina Sia ayant livré un excellent travail de narration… très agréable.


Donc finalement, nous avons ici une variation sur un thème très connu qui véhicule des valeurs ultra-conservatrices et qui ne tranche pas particulièrement par son originalité. Évidemment, ce n’est que le premier tome. Je n’ai pas vraiment envie de lire la suite car dans ce genre de saga, c’est vraiment dans le premier opus qu’il faut trancher par l’originalité et la nouveauté.


L’auteure Sophie Jomain


LA SUITE

Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert
le samedi 28 juin 2025

Les dieux s’amusent

Commentaire sur le livre de
DENIS LINDON

*Il y a un peu plus de trois mille ans, la Terre était peuplée d’une multitude de divinités qui ne cessaient d’intervenir dans les affaires des hommes. À bien des égards, ces dieux ressemblaient fort à des hommes ordinaires : ils étaient orgueilleux, avides, paresseux, gourmands, menteurs, mesquins, rancuniers, jaloux, frivoles, capricieux et violents ; il leur arrivait aussi quelquefois d’avoir de bons sentiments. Ils se mariaient, avaient des enfants, se disputaient, se trompaient, se vengeaient et se pardonnaient tout comme le commun des mortels. *

Extrait : LES DIEUX S’AMUSENT, Denis Lindon. Support papier : Castorpoch éditeur (rééd.) 512 pages. Version audio : Gallimard éditeur, 2019, durée d’écoute : 9 heures 2 minutes, narrateur : Jean-Paul Bordes. Format numérique : Flammarion jeunesse éditeur, 2019, 469 pages.

Un précis de mythologie aussi savant que souriant. Un livre passionnant, drôle et instructif qui permet de découvrir les plus belles histoires du monde : les amours de Jupiter, les travaux d’Hercule, les colères d’Achille, les ruses d’Ulysse…

Léger et plein d’humour

C’est un livre léger, rafraîchissant et instructif. Il faut prendre son titre au pied de la lettre. L’auteur démystifie (façon de parler) la mythologie grecque. Il raconte l’histoire et l’évolution des dieux jusqu’à leur dernière invention : un genre de marionnette appelé *humain*.

Denis Lindon raconte les dieux grecs sous un angle différent et novateur. Il prend des libertés par rapport à la mythologie officielle pour autant qu’on puisse considérer une mythologie comme officielle. Il ne s’en cache pas d’ailleurs. Peut -être est-ce au nom de cette liberté que Lindon a laissé glisser des erreurs dans l’histoire.

Il dit par exemple que le Cheval de Troie était une offrande à Athéna alors que ladite offrande était faite à Poséidon. Autre exemple, les 12 travaux d’Hercule qui ne sont pas présentés dans le bon ordre. L’ouvrage comporte plusieurs coquilles de ce genre. C’est la raison pour laquelle il faut se rabattre sur le titre et croire que l’auteur s’est aussi amusé.

Il y a quelque chose de paradoxal dans le fait de dire qu’une mythologie est inexacte puisqu’il n’est question que de légende. À ce chapitre, ma base de référence a toujours été et sera toujours Homère, ainsi que L’HISTOIRE DE LA MYTHOLOGIE GRECQUE de Jeremy Haim publié chez AFNIL et réédité en 2021. Si je me base sur ces références et quelques autres, la crédibilité de LES DIEUX S’AMUSENT est quelque peu discutable.

Il reste que le livre est original et divertissant. Sa version audio est superbe. J’ai trouvé l’ensemble drôle et instructif malgré tout. Son titre donne une bonne idée de l’objectif que s’était fixé l’auteur au départ.

Le livre est divisé en trois grandes parties. La première est consacrée à l’histoire des dieux grecs qui sont présentés comme des magouilleurs indolents, capricieux, menteurs, infidèles, sournois et autres gentillesses du genre.

La deuxième partie est consacrée à l’histoire et la guerre de Troie avec Ulysse en vedette, Achille bien sûr, Ajax, Hector, Pâris, la belle Hélène et plusieurs autres. Enfin, la troisième partie est consacrée à l’odyssée d’Homère qui, sous l’emprise de dieux cruels et fourbes, mettra 20 ans pour regagner sa terre d’Itak après la guerre de Troie.

Bien que ce livre dépoussière la mythologie grecque, que sa présentation soit agréable et sa façon d’aborder les dieux soit amusante, ce n’est pas un livre pour les enfants à cause des thèmes qui y sont développés : guerre, meurtres, cruauté, traîtrise, inceste, jalousie, misogynie et j’en passe.

Les dieux n’étaient pas des enfants de chœur. Il est donc exagéré de dire que c’est un livre pour toute la famille. Pour le reste, c’est une histoire énergique, captivante, qui va au-delà des autres versions. Petit bémol, l’humour prend souvent le pas sur la rectitude.

Suggestion de lecture : LE CHANT D’ACHILLE de Madeline Miller

Du même auteur

Après avoir dirigé pendant quinze ans l’une des plus importantes sociétés françaises de conseil en management, fondé et présidé la Sofres, Denis Lindon est devenu professeur de marketing à HEC et consultant d’entreprise dans les domaines de la stratégie marketing et de la formation des cadres marketing. Denis Lindon est diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris et d’économie de l’Université de Cambridge (G.-B.). Il écrit aussi des livres pour les enfants.

Bonne lecture
Bonne écoute
Claude Lambert
le dimanche 23 juin 2025

Nous sommes là

Commentaire sur le livre de
MICHAEL MARSHALL

*Tandis que Dawn s’endormait pour de bon et que le train atteignait sa vitesse de croisière pour ce trajet d’une heure jusqu’à Rockbridge, chez eux, David ne parvenait pas à oublier un détail. Ce que l’inconnu lui avait dit avant de se fondre dans la cohue… quatre petits mots, assénés comme un ordre. Ou une menace.
―Souviens-toi de moi, avait-il dit. *

Extrait : NOUS SOMMES LÀ, Michael Marshall, publié à l’origine par Orion éditeur en 2013, traduit en 2015 chez Bragelonne éditeur. Format numérique pour la présente, 1084 pages.


Lorsque David bouscule un inconnu à New York, ce qu’il entend va changer sa vie pour toujours : Souviens-toi de moi. A présent, des phénomènes étranges ne cessent de se produire, et David ne parvient pas à se départir de l’impression que quelqu’un l’observe.

Puis John et sa compagne Kristina viennent en aide à une amie se sentant suivie en permanence. En creusant un peu, ils déterrent quelque chose d’inimaginable. Il existe des êtres cachés dans l’ombre, qui observent, attendent. Prêts à sortir…

Dans l’ombre
Nous avons passé notre vie à vos côtés.
Nous savons qui vous êtes.
Nous savons où vous vivez.
Vous ne pouvez pas nous voir,
mais soyez-en sûrs :
Nous sommes là.


Un thriller fantastique
qui appelle à la patience

L’objet du livre est intéressant : une espèce de sixième sens, perception extra-sensorielle, une impression obsédante. Maintenant, ajoutons à cela un peu de tangibilité avec des phénomènes aux limites du palpable : *…Ils disparurent de nouveau…David ne les voyait plus mais il sentait leur présence. Il y avait des gens dans le parc, des gens qu’il ne pouvait pas voir. * (extrait)

Bien sûr, certains évènements mettent la puce à l’oreille et lancent l’intrigue : David qui bouscule un inconnu qui lui dit *souviens-toi de moi* ou une jeune femme qui à la lourde impression d’être suivie et qui a besoin d’aide.

Ils découvrent alors quelque chose d’impensable…monde parallèle, autre dimension, anges ou démons, ami imaginaire, fantôme, hallucinations ou disons une imagination débordante ou simple supposition… : *Elle avait émis l’hypothèse que les gens ne partaient pas vraiment quand ils décédaient ou quelque chose comme ça…Oh Seigneur. (Extrait)

C’est une intrigue assez bien développée. Je l’ai trouvé originale. Malheureusement, le récit a une faiblesse pour le moins irritante : un important déficit dans le rythme. En effet, le développement de l’histoire est d’une lenteur éprouvante. Il n’y a pas d’action dans cette histoire. Heureusement, L’intrigue a un certain caractère addictif. L’histoire est très longue à démarrer et prendre un sens.

Si l’intrigue garde en haleine jusqu’à un certain point, il faut rester concentré à cause d’une imposante galerie de personnages qui a tendance à noyer l’intérêt. Toutefois, certains personnages forcent l’attention, mon préféré étant Reinhart, le genre vilain. Qui dans cette histoire semble n’avoir sa place nulle part et pourtant son rôle est capital… un rebelle qui met du piquant dans le récit. J’aime bien. Malgré ses lacunes, le récit vaut la peine d’être lu car il évoque et met en perspective les éléments non-palpables de notre vie : l’imaginaire, l’intuition, le ressenti, la perception, les apparences, les impressions tenaces et jusqu’à un certain point, la prémonition.

Ça pousse au questionnement. Par exemple, savons-nous toujours exactement où nous mettons les pieds? *… y avait une bonne femme. Je l’ai vue. Il n’y avait d’abord personne, et puis elle est apparue de nulle part. Je viens de luis passer à travers, mec. *

Un livre à l’atmosphère très particulière.

Suggestion de lecture : LA FANTASTIQUE ODYSSÉE, de Chérif Arbouz


L’auteur Michael Marshall

Du même auteur

Bonne lecture
Claude Lambert
le samedi 22 juin 2025

Le monstre de Kiev

Commentaire sur le livre de
SYLVAIN JOHNSON

<Il n’eut droit à aucun procès et fut rapidement surnommé ―le monstre de Kiev― par les journaux et les citoyens, qui parleraient de son crime pendant des mois. D’autres agressions inexpliquées sur des enfants lui furent rapidement attribuées, sans la moindre preuve. Le lendemain, il était déjà en route pour le goulag, le fameux système carcéral de camps de travail. >

Extrait : LE MONSTRE DE KIEV, Sylvain Johnson, ADA éditeur, 2018, collection Corbeau, édition de papier, 445 pages.

Grigori Tarasovski, un condamné au goulag pour un horrible crime qu’il n’a pas commis, découvre la violence et la folie de son espèce au sein des camps de prisonniers. Toutefois, il s’aperçoit que l’enfer de Sibérie cache autre chose: des entités innommables, monstrueuses, nées d’une légende antique. La source de leur création – et de leurs pouvoirs – est tout près. Une source capable de changer le destin des hommes. Et de les détruire.

Note :
GOULAG : organisme central gérant les camps de travail forcé en Union soviétique. La police politique placée à la tête du système pénal développa le Goulag comme instrument de terreur et d’expansion industrielle. Cette administration pénitentiaire connut une croissance constante jusqu’à la mort de Staline, à mesure que de nouveaux groupes étaient incarcérés et déportés, et que ses prérogatives économiques se développaient. <Wikipédia>

 

L’horreur né du goulag

Quoiqu’original, LE MONSTRE DE KIEV est un roman dur, violent et d’une grande noirceur car on y plonge dans l’atmosphère de la Russie Stalinienne des années 1930 alors que le peuple était écrasé par la paranoïa et la délation. On plonge aussi dans le quotidien d’un goulag, celui de Kolyma, une prison-mouroir sibérienne, basse œuvre d’un régime politique cancéreux.

Je pourrais dire que l’histoire est en deux parties mais son caractère surnaturel est tellement manifeste qu’il est plus juste de dire que l’histoire se déroule en deux temps parallèles mais elle deviendra plus claire pour les lecteurs quand les deux existences s’imbriqueront.

On suit Grigori Tarasovsky, injustement condamné au Goulag, milieu carcéral sibérien d’une inimaginable cruauté qui transformera Grigori en monstre cruel et sans pitié. Une chaîne d’évènements mettra Grigori en présence d’enfants à l’apparence de spectres, venus de nulle part et qui doivent leur subsistance à une entité nommée *la Source* et qui doit être protégée à tout prix.

Par la suite, après avoir hérité de l’énigmatique médaille de Saint-Christophe, Tarasosvky changera de temps et d’espace grâce au concours de deux petites filles : Svetla et Tania, jusqu’à une rencontre ultime, à Montréal. Rongé par un cancer, menacé par la redoutable mafia russe, Grigori ne se doute absolument pas de ce qui est prévu pour lui, par la source…

Sachant que l’auteur, Sylvain Johnson est membre du collectif des CONTES INTERDITS, je craignais un récit gore, aux limites du supportable. Ce ne fut pas le cas. Bien sûr, la plume est crue, directe et froide, mais le récit dans l’ensemble est original. L’histoire est captivante et le style de l’auteur m’a plu.

Toutefois, l’épilogue m’a semblé un peu anarchique et la finale un peu prévisible concernant le destin de Grigori Tarasovsky. Si l’évolution du personnage principal est relativement facile, je ne peux en dire autant des créatures en général et de la Source en particulier. Des détails manquent à ma compréhension. L’aspect surnaturel est indéniable, mais, me semble-t-il, sensiblement sous développé.

Dans l’ensemble j’ai aimé ce livre. Il est bien documenté et m’a appris des choses et bien sûr, il m’a fait frissonner. Bref, c’est une histoire d’horreur qui m’a fait de l’effet.

Suggestion de lecture du même auteur : UN DIEU PARMI LES HOMMES


L’auteur Sylvain Johnson

 

Bonne lecture
Claude Lambert
le vendredi 21 juin 2025